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Rudoyée par Trump, l’UE se tourne vers d’autres partenaires

Des sommets aux quatre coins du globe, des négociations commerciales lancées tous azimuts: rudoyée par les Etats-Unis de Donald Trump, l’Union européenne est embarquée dans une opération séduction pour diversifier ses alliances.Menacée à trois reprises par des droits de douane du président américain au cours des derniers mois, le bloc européen tente par tous les moyens de nouer de nouveaux partenariats, ou donner un second souffle à ceux existants.L’Europe n’a évidemment pas décidé de tourner le dos à son principal partenaire commercial, avec qui elle échange annuellement 1.600 milliards d’euros de biens et services.Tout au long de la semaine, Bruxelles a plaidé pour des négociations “constructives” avec Washington. Quand les Etats-Unis ont annoncé repousser de 90 jours l’application de certains droits de douane, l’Europe a dans la foulée suspendu ses mesures de riposte.Mais face à un allié américain imprévisible, très tenté par le protectionnisme, le Vieux continent sait qu’il n’a d’autre choix que de proposer son immense marché intérieur de 450 millions de consommateurs à d’autres. Et trouver de nouveaux débouchés pour ses produits.- Rendez-vous à Samarcande -Le calendrier sur lequel Bruxelles avance suit une logique précise.La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a commencé par signer un accord de libre-échange avec le bloc sud-américain du Mercosur, un mois tout juste après l’élection de Donald Trump, en dépit des vives protestations de la France.Elle a annoncé renforcer le partenariat commercial de l’UE avec le Mexique quelques jours seulement avant que Donald Trump ne prête serment, en janvier. Et relancé des négociations longtemps enterrées avec la Malaisie le jour même de l’investiture du milliardaire républicain.Accompagnée de son équipe de commissaires et du président du Conseil Antonio Costa, la cheffe de l’exécutif européen s’est depuis rendue à des sommets en Inde, en Afrique du sud et en Asie centrale. Quitte à reléguer au second plan certaines préoccupations sur le traitement des droits humains par certains de ces pays, exprimées par le passé.La première réaction d’Ursula von der Leyen aux droits de douane de Donald Trump du 2 avril est d’ailleurs venue de… Samarcande, en Ouzbékistan, où elle était venue plaider pour l’accélération des flux commerciaux entre l’Union européenne et l’Asie.”L’Europe poursuit la diversification de ses partenariats commerciaux”, a encore assuré la présidente de la Commission européenne jeudi, tendant la main à tous ceux qui croient aux principes “de liberté et d’ouverture” des marchés.- La tentation chinoise -L’UE a elle aussi reçu des mains tendues. Et notamment celle de Pékin, ciblé par des taxes de 145% sur ses exportations vers les Etats-Unis. Le président chinois Xi Jinping a invité vendredi Bruxelles à mutualiser leurs forces pour “résister” ensemble à la “coercition” de Washington. Dans la foulée, l’Union européenne a confirmé la tenue d’un sommet entre les dirigeants chinois et ceux des institutions européennes courant juillet, en Chine.Un rapprochement avec Pékin n’est toutefois pas sans risques. Certains dirigeants européens craignent que la Chine n’inonde le continent des produits qu’elle ne pourrait plus envoyer vers les Etats-Unis, quitte à brader ses prix. Avec le risque que l’industrie européenne, dont de nombreux secteurs sont déjà mis à mal par la concurrence chinoise, soit encore plus menacée.”L’UE peut diversifier et étendre ses relations commerciales ailleurs dans le monde, mais elle ne trouvera pas de marché où la demande et le pouvoir d’achat sont aussi importants qu’aux Etats-Unis”, résume Varg Folkman du European Policy Centre. D’autant que la conclusion d’accords convenables aux 27 pays membres de l’UE comme le tracé de nouvelles routes commerciales “prendront du temps”, prédit l’analyste auprès de l’AFP. “Cela ne se fera pas en un claquement de doigts”.

“Enquêtrice à l’ONU”: avec Agnès Callamard dans les coulisses du système international

Comment enquêter sur des exécutions extra-judiciaires lorsqu’on est mandatée par l’ONU ? Entre pressions diplomatiques et moyens dérisoires, Agnès Callamard, rapporteuse spéciale de 2016 à 2021, raconte les coulisses du système onusien dans sa quête de vérité.Assassinats politiques, crimes d’Etat ou exécutions commises par les groupes armés: “Enquêtrice à l’ONU”, son livre paru le 9 avril chez Flammarion co-écrit avec le journaliste Alexandre Duyck, revient sur des dossiers emblématiques.”Au départ, ce sont souvent des coups de cÅ“ur, des coups de colère qui m’amènent à faire ces enquêtes”, explique-t-elle à l’AFP, regard perçant derrière ses lunettes rondes aux branches rose fluo.Quand elle s’intéresse aux meurtres des journalistes de RFI Ghislaine Dupont et Claude Verlon en 2013 au Mali, elle se heurte à “des murs”: le mutisme de la force onusienne sur les lieux lors de l’enlèvement, puis l'”utilisation démesurée du secret-défense par la France”.”Pourquoi tous ces mensonges, les silences et les secrets de toutes les parties prenantes ?”: dans ce dossier qui la laisse amère de n’avoir pu aller au bout, elle ne “croit plus” à l’émergence de la vérité.Dans le cas de l’assassinat en 2018 du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, c’était un “coup de colère”: personne ne s’intéressait au sort d’un homme tué et découpé en morceaux dans le consulat du Royaume en Turquie.Agnès Callamard, aujourd’hui secrétaire générale d’Amnesty International, comprend alors que les Nations unies n’entendent pas s’en mêler. “+Vous pensez vraiment que c’est une bonne idée? N’allez-vous pas sortir du cadre du mandat?+”, entend-elle.- Avancer les frais -Et puis il y a les conditions de travail parfois “ubuesques”, surtout financièrement. Non seulement la fonction est bénévole (elle est alors professeure à l’université américaine de Columbia), mais elle avance les frais pour se rendre à Washington, où vivait Jamal Khashoggi – plus de 15.000 dollars.Si l’accès à la scène de crime lui est interdit, les autorités turques lui fournissent des enregistrements audio de l’intérieur du consulat pour retracer les derniers instants du journaliste.Après des mois d’enquête et une centaine d’entretiens dans six pays, son rapport publié en 2019 réclame des sanctions et met directement en cause le prince héritier, Mohammed Ben Salman.La démarche suivie après l’empoisonnement en 2020 de l’opposant russe Alexeï Navalny avec un agent neurotoxique – il est finalement mort dans une prison russe en 2024 – suit le même raisonnement: “Comment je prouve la responsabilité de l’Etat russe?”.”Dans le cas de Jamal, comme dans celui d’Alexeï, nous ne pouvions en aucun cas conclure que ces meurtres ou tentatives de meurtre étaient le fait d’individus agissant de leur propre chef” sans intervention du pouvoir, affirme-t-elle.A chaque fois, il faut faire fi des menaces et désaveux de ceux qu’elle et son équipe dérangent, souvent des autocrates mais pas seulement.- “Image salie” -En 2020 le secrétaire d’Etat américain d’alors, Mike Pompeo, dénonce un rapport “fallacieux” sur la frappe américaine contre le général iranien Qassem Soleimani à Bagdad et appelle à “se méfier du discours des Nations unies”.Il ne s’agissait pas de “légitime défense”, relève Mme Callamard, inquiète de voir se multiplier les assassinats ciblés par drone en violation du droit international. Si on se permet d’éliminer ainsi de hauts responsables officiels, qui seront les prochaines cibles ?Ses investigations montrent la difficulté d’obtenir l’ouverture d’enquêtes judiciaires, et pour l’ONU d’imposer des sanctions.”Il y a eu un manque de courage de la part des autorités onusiennes, à certains moments” face à “l’Arabie saoudite, la Chine, les Etats-Unis ou la Russie, des États puissants sur lesquels repose notamment le budget des Nations unies”.Pour elle, le rôle des rapporteurs spéciaux reste pourtant “fondamental” pour “soutenir tous ceux qui se battent seuls” et “risquent vraiment leur vie”, journalistes ou militants. Car même quand la justice est inopérante, “aucun pays n’aime voir son image salie”.Elle cite la rapporteuse de l’ONU pour les Territoires palestiniens Francesca Albanese, qui dénonce “les crimes les plus odieux” à Gaza, en accusant Israël de “génocide”.Face au “piétinement” généralisé du droit international et aux dérives autoritaires croissantes, elle appelle à réformer les institutions internationales. A commencer par le Conseil de sécurité de l’ONU: “Partout où il y a des crises humanitaires, des morts, le droit de veto (réservé à ses cinq membres permanents) devrait être prohibé ou restreint”.

Masters 1000 de Monte-Carlo: face à Alcaraz, Fils bute encore aux portes des demies

Cruel: le N.1 français Arthur Fils (15e mondial) a calé vendredi une troisième fois de suite en quarts de finale d’un Masters 1000, vaincu à Monte-Carlo par le N.3 mondial Carlos Alcaraz, non sans l’avoir bousculé.”Je suis comme un fou, ça m’énerve”, a glissé un Fils abattu en conférence de presse après sa défaite 4-6, 7-5, 6-3 en un peu moins de 2h30. “C’est dur de perdre des matchs comme ça, c’est agaçant, surtout quand on a des occasions”, a-t-il admis à chaud.”(Une défaite) 6-2, 6-2, c’est énervant mais tu te dis que tu n’étais pas au niveau et qu’il faut retourner bosser. Là, je suis au niveau, mais ça ne passe pas parce que je perds la concentration. Et il y a des moments où il ne faut pas la perdre…”, a soupiré le droitier, seul joueur du circuit à avoir atteint au moins les quarts de finale des trois premiers Masters 1000 de la saison.En mars, le joueur né en région parisienne s’était incliné au tie-break du troisième set contre l’ex-N.1 mondial Daniil Medvedev (11e) au Masters 1000 d’Indian Wells en mars. Deux semaines plus tard à Miami, il avait éliminé le N.2 mondial Alexander Zverev en huitièmes de finale avant de céder contre le futur vainqueur du tournoi, le Tchèque Jakub Mensik (23e). Alcaraz, qui affrontait Fils pour la première fois, atteint lui sa troisième demi-finale de la saison, après son titre à l’ATP 500 de Rotterdam en février et sa demi-finale à Indian Wells. – Double 6-0 -Il défiera pour une place en finale son compatriote et ami Alejandro Davidovich Fokina (42e), qui s’est débarrassé sans difficulté majeure de l’Australien Alexei Popyrin (27e), dominé 6-3, 6-2 dans le premier match de la journée sur le Central.Alcaraz (21 ans) n’avait avant cette édition jamais remporté de match à Monte-Carlo: il s’était fait éliminer dès son entrée en lice en 2022 et avait déclaré forfait les deux années suivantes. Très friable au service dans la première manche, perdue 6-4 après avoir été breaké trois fois, l’Espagnol a également été en grand danger dans la deuxième: Fils a gaspillé trois précieuses balles de break à 5-5, 0-40, et sept sur l’ensemble de la manche. Dans le set décisif, Fils a une nouvelle fois breaké et mené 3-1. Combatif, Alcaraz a débreaké et égalisé à 3-3, avant de porter l’estocade en prenant le service du Français deux jeux plus tard (5-3 puis 6-3). “J’étais quasiment mort dans le deuxième set, mais je suis content d’avoir trouvé la force de continuer à me battre. Je savais que ce n’est jamais facile de conclure un match”, a commenté l’Espagnol sur le court juste après sa victoire.Sa conférence de presse était à peine terminée que l’Australien Alex De Minaur validait à son tour son billet pour les demi-finales, grâce à une victoire 6-0, 6-0 contre le Bulgare Grigor Dimitrov (18e).”C’est assez dingue”, s’est émerveillé le 10e mondial après cette double bulle. “C’est un sentiment d’autant plus génial que la terre battue m’a donné du fil à retordre dans ma carrière”, a poursuivi l’Australien de 26 ans.”Je suis très heureux de jouer de mieux en mieux chaque année”, s’est satisfait De Minaur, qui affrontera soit le triple lauréat du tournoi et tenant du titre, le Grec Stefanos Tsitsipas (8e), soit l’Italien Lorenzo Musetti (16e) pour une place en finale.

L’heure de vérité est arrivée pour les négociations à l’OMS de l’accord sur les pandémies

C’est l’heure de vérité à l’OMS où les négociations d’un accord international pour mieux protéger le monde face aux pandémies sont entrées vendredi dans leur dernière ligne droite, avec toujours  l’espoir de parvenir à un consensus, cinq ans après le Covid et face à la menace du H5N1, de la rougeole et du mpox.”Il y a de fortes chances qu’un consensus soit atteint dans les prochaines heures”, a déclaré à l’AFP Michelle Childs, directrice à l’Initiative Médicaments contre les maladies négligées (DNDi).”L’accord sur les pandémies ne sera pas parfait. Il est le fruit d’un compromis et toutes les ambitions ne seront pas satisfaites. Mais il créera une nouvelle base cruciale sur laquelle s’appuyer pour sauver des vies lors de la prochaine urgence sanitaire mondiale”, a-t-elle indiqué.La conclusion de plus trois ans de négociations à l’Organisation mondiale de la santé sur un accord de prévention et de lutte contre les pandémies survient dans un contexte de coupes drastiques dans l’aide internationale américaine.Et le retrait des Etats-Unis de Donald Trump de l’OMS fait peser des risques sur le système de surveillance internationale des risques sanitaires, selon les experts.En décembre 2021, les pays membres de l’OMS ont décidé de doter le monde d’un texte qui doit permettre de prévenir et de mieux gérer les pandémies, après les graves erreurs du Covid-19.Des questions de taille ont ralenti les négociations, dont celle de la surveillance des pandémies, du transfert de technologies et du partage des données sur les agents pathogènes émergents et sur les avantages qui en découlent, à savoir les vaccins, les tests et les traitements.En juin dernier, les pays avaient décidé de prolonger les négociations en vue d’une validation finale en mai 2025, lors de l’assemblée annuelle de l’OMS. Au siège de l’organisation — où se déroulent les négociations –, le sentiment d’urgence s’est fait sentir ces dernières semaines.”La pandémie de Covid-19 peut sembler aujourd’hui un lointain souvenir, dépassé par les conflits et les bouleversements géopolitiques et économiques. Mais la prochaine pandémie n’attendra pas que les choses se calment”, a prévenu lundi le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, à l’ouverture de ce dernier cycle de négociations.”Disposer d’un plan pour faire face à la prochaine pandémie permettrait de sauver des milliers, voire des millions de vies”, a aussi déclaré le directeur de l’OMS chargé des situations d’urgence sanitaire, Michael Ryan, en conférence de presse jeudi.- “Dernière opportunité d’agir” -Ces derniers jours, les discussions se sont resserrées sur les sujets les plus politiques.”Les experts peuvent faire des progrès, mais au dernier moment, il faut aussi une certaine volonté politique”, a indiqué à l’AFP une source diplomatique.Jeudi, la mission chinoise auprès de l’ONU a fait état auprès de l’AFP de “progrès substantiels” avec toutefois “des divergences (qui) subsistent sur certains articles clés”, appelant toutes les parties “à faire preuve de compréhension mutuelle”.ONG et experts ont aussi appelé à faire des compromis.Ellen’t Hoen, avocate pour l’ONG Medicines Law & Policy, considère qu'”il est très important de parvenir à cet accord, même si le texte n’est pas parfait”.”C’est bien plus préférable que de devoir négocier un tel accord à partir de zéro, car cela n’arrivera probablement qu’après la prochaine pandémie, et ce serait une situation inacceptable”, a-t-elle dit à l’AFP.”Cette réunion représente la dernière opportunité d’agir”, a rappelé aux négociateurs l’initiative internationale Prezode, lancée par la France en 2021 et qui vise à prévenir les risques d’émergences zoonotiques et de pandémies en renforçant les coopérations avec les régions du monde les plus concernées.  “La prévention n’est pas une option ni un luxe. Elle est une condition d’équité et de sécurité sanitaire universelle”, a averti l’ONG, lors des débats à l’OMS.Le projet d’accord prévoit notamment la création d’un “Système d’accès aux agents pathogènes et de partage des avantages” (PABS en anglais). Il propose désormais que les entreprises qui acceptent de participer à ce mécanisme donnent à l’OMS un “accès rapide” à une partie – avec un objectif fixé à 20% – de leur production de produits de santé liés à une pandémie – dont “au moins 10% en temps réel” sous forme de donations.