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Macron adresse ses voeux aux Français pour espérer tourner la page de la dissolution

Emmanuel Macron présente mardi soir ses voeux aux Français pour 2025 dans la traditionnelle allocution télévisée de la Saint-Sylvestre, dans l’espoir de tourner la page d’une année marquée par sa dissolution ratée de l’Assemblée nationale et la perte d’une grande part de son influence.”Ce sont ses huitièmes voeux” depuis son arrivée à l’Elysée en 2017, mais “les premiers dans un rôle un peu différent”, relève-t-on dans son entourage.Rentré de quelques jours de repos au fort de Brégançon sur la Méditerranée, le président de la République va bien revenir sur les “difficultés géopolitiques ou de politique intérieure”, à commencer par la dissolution de l’Assemblée nationale. Mais il devrait s’en tenir aux “grands enjeux”, sans dicter de solutions comme il a pu le faire par le passé, ajoute-t-on.”Auparavant, il était un président qui gouvernait”, donnant l’impulsion aux politiques publiques qui occupaient une part importante de ce discours du Nouvel An, relève un conseiller. Cette année, il sera “davantage dans un rôle de garant” et de “président qui préside”.C’est aussi la première fois que le chef de l’Etat s’exprime depuis qu’il a nommé le 13 décembre François Bayrou comme Premier ministre, dernier soubresaut d’une année politique scandée par les crises.Malgré l’arrivée à Matignon du centriste, son allié historique, Emmanuel Macron entend donc conserver une posture en retrait. Comme c’est le cas depuis que son camp a perdu les élections législatives anticipées de l’été à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale, ouvrant la plus grave crise politique de la Ve République.”L’ombre de la dissolution va peser sur ces vÅ“ux”, car le président “est vraiment cornerisé” et doit tenter de “redonner un élan” à son second quinquennat, dit à l’AFP Philippe Moreau Chevrolet, professeur en communication à Sciences Po.S’il a déjà esquissé un timide mea culpa début décembre, il va peut-être tenter d’ouvrir de nouvelles perspectives, pour éloigner la petite musique de certains de ses opposants qui jugent inéluctable sa démission avant la fin de son mandat, en 2027.- “Décision démocratique” -La présidente des députés du Rassemblement national, Marine Le Pen, avait dit mi-décembre se préparer à une présidentielle anticipée. Dans ses propres voeux, elle affirme mardi que 2025 sera “une année décisive”, espérant un “dénouement heureux” à l’instabilité gouvernementale, qui passerait par une “décision démocratique”.De son côté, le nouveau Premier ministre a souhaité, à l’issue d’une visite à Mayotte dévastée par le cyclone Chido, une année de “réconciliation”, d'”action” et de “stabilité” face aux “fractures” récentes.Une gageure: faute de majorité dans une Assemblée nationale morcelée en trois blocs, son équipe s’appuie sur le même attelage fragile entre la macronie et le parti Les Républicains qui avait soutenu le précédent Premier ministre de droite Michel Barnier, finalement censuré trois mois après sa nomination. Le gouvernement Bayrou s’expose donc au même risque d’être renversé par les députés de gauche et d’extrême droite.Et ce, alors que le pays entame 2025 sans budget voté malgré des déficits alarmants.Il y a un an, lors de ses voeux, le président de la République annonçait une année de “fiertés françaises”, avec le 80e anniversaire du Débarquement allié en Normandie, les Jeux olympiques de Paris et la réouverture de Notre-Dame cinq ans après l’incendie. Autant de paris réussis.Mais il évoquait aussi une année de “réarmement de la Nation” pour faire face aux défis à venir.Et là, 2024 n’a pas tenu ses promesses.Les crises et les déconvenues se sont enchaînées: fronde paysanne inédite qui lui a valu un passage houleux au Salon de l’agriculture, émeutes en Nouvelle Calédonie sur fond d’impasse institutionnelle que sa visite express dans l’archipel n’est pas parvenue à résoudre, coup d’arrêt à la réindustrialisation du pays et procès en mauvaise gestion des finances publiques. Et l’année se termine sur la désolation et la colère à Mayotte.A l’international, la guerre se poursuit en Ukraine et à Gaza, même si M. Macron a remporté quelques succès diplomatiques, en contribuant à un cessez-le-feu au Liban entre Israël et le mouvement chiite Hezbollah, ou en réunissant à Paris son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky avec le président élu des Etats-Unis Donald Trump.

France: le budget initial de 2024 reconduit à l’identique en 2025 par décret au Journal officiel

En attendant l’adoption d’un budget pour 2025, le gouvernement a reconduit les autorisations d’engagement ouvertes par la loi de finances initiale de 2024 par un décret publié au Journal officiel mardi.”A la suite de la promulgation” d’une loi spéciale le 20 décembre, ce décret alloue aux ministères des crédits pour 2025 “en reconduisant ceux ouverts en loi de finances initiale pour l’année 2024 par le Parlement”, est-il expliqué dans le document.Dans la présentation de son projet de budget pour 2025, le précédent gouvernement de Michel Barnier avait indiqué que cela correspondait à des dépenses de l’Etat de 492,9 milliards d’euros.Ces crédits sont plus élevés que ce que prévoyait ce précédent gouvernement qui planchait sur des économies de plus de 7 milliards d’euros par rapport au budget initial de 2024, dans l’espoir de réduire le déficit public.Mais la censure le 4 décembre du gouvernement Barnier par l’Assemblée nationale a empêché la promulgation de ce projet de budget.Le nouveau Premier ministre, François Bayrou, avait dit, le 19 décembre, espérer l’adoption d’un budget “à la mi-février”, sans toutefois être “sûr d’y arriver”. Il avait indiqué qu’il repartirait de “la copie qui a été votée” au Parlement avant la censure du gouvernement de son prédécesseur, M. Barnier.Dans l’attente de ce budget en bonne et due forme, le Parlement a adopté mi-décembre une loi spéciale qui permet à l’exécutif de prélever l’impôt, de dépenser les crédits sur la base du budget 2024 et d’emprunter pour financer l’Etat et la Sécurité sociale.Cette “loi spéciale”, promulguée le 20 décembre par le président Emmanuel Macron, ne permet pas de pratiquer la traditionnelle indexation du barème de cet impôt sur l’inflation. En conséquence, sans nouveau budget, 380.000 nouveaux ménages risquent d’être assujettis à l’impôt sur le revenu, et des millions de contribuables d’en payer davantage. Au 1er janvier, cette absence de budget pour 2025 n’aura toutefois pas d’impact immédiat sur les Français, qui ne seront pas prélevés davantage, a indiqué le ministère des Comptes publics à l’AFP. La hausse de l’impôt sur le revenu pourra toutefois se manifester ultérieurement, au moment de la déclaration de revenus au printemps, si aucun budget n’est adopté d’ici là. Dans une interview à La Tribune Dimanche, le nouveau ministre de l’Economie, Eric Lombard, s’est voulu rassurant. “Nous aurons un budget qui comportera une indexation du barème”, a-t-il affirmé. “Les Français qui ne paient pas d’impôts sur le revenu aujourd’hui n’en paieront pas demain”, a-t-il également assuré.

Chido: après Mayotte, Bayrou achève son déplacement à La Réunion

François Bayrou achève mardi à La Réunion son déplacement consacré au cyclone Chido qui a frappé Mayotte, où il a annoncé lundi une batterie de mesures destinées au redressement de l’archipel.Le Premier ministre, qui a dormi à Saint-Denis de la Réunion, a débuté sa journée par une rencontre matinale avec les élus locaux à la préfecture. Il y saluera ensuite des agents impliqués dans le centre opérationnel de La Réunion, importante base logistique de l’aide à Mayotte.Il visitera ensuite la plateforme d’intervention régionale de l’Océan indien de la Croix rouge à Sainte-Marie. Puis inspectera, dans la même commune, le “hub logistique” pour Mayotte situé sur une base aérienne à proximité de l’aéroport Roland-Garros d’où la délégation s’envolera à la mi-journée pour regagner Paris.Lundi, après une visite d’une journée à Mayotte à la tête d’une importante délégation ministérielle, M. Bayrou a présenté devant le Conseil départemental de l’archipel son plan “Mayotte debout” qui “a une seule ligne directrice: pas de phrases, des décisions concrètes et précises, des engagements concrets et précis”.Parmi la dizaine de mesures annoncées, le rétablissement de l’électricité “dans chaque foyer”, la volonté d’empêcher la reconstruction de bidonvilles, ou encore une série de mesures financières, fiscales, sanitaires ou sur l’éducation.Avec l’objectif, a expliqué le chef du gouvernement à l’AFP, de tenir “un discours clair et compréhensible de l’ensemble des citoyens” et de “s’inscrire dans la démarche du président de la République”, qui avait annoncé de premières mesures d’urgence lors d’un déplacement à Mayotte après le cyclone, qui a causé, selon le dernier bilan officiel, la mort de 39 personnes.Des mesures qui vont “incontestablement dans le bon sens”, a réagi sur X la cheffe des députés RN Marine Le Pen, souhaitant néanmoins que “les espoirs des Mahorais ne soient pas à nouveau trahis”.Une “loi d’urgence” sera présentée vendredi en Conseil des ministres, avec “une présentation au Parlement sous quinze jours”, a annoncé M. Bayrou. Un projet de “loi programme de refondation” de l’archipel “préparé et conçu avec les élus de Mayotte, sera mis au point dans les trois mois, a-t-il précisé.A Mayotte, M. Bayrou était notamment accompagné de ses deux ministres d’État Élisabeth Borne (Éducation) et Manuel Valls (Outremer). M. Valls est resté à Mayotte pour poursuivre le dialogue avec les élus et le travail de coordination.La délégation s’est aussi heurtée au désespoir des habitants, à l’image de cette séquence au cours de laquelle Mme Borne est interpellée par deux enseignants qui témoignent des difficultés du quotidien. “Ok”, leur répond avant de quitter les lieux Mme Borne, dont l’attitude a été largement fustigée sur les réseaux sociaux.”Image terrible. Une ministre ne peut pas tourner les talons en méprisant le témoignage d’enseignants qui alertent sur la situation sanitaire”, a ainsi grincé le premier secrétaire du PS Olivier Faure.”La séquence tronquée, diffusée ne reflète pas mes échanges avec les deux enseignants”, a expliqué Mme Borne mardi sur le réseau social X.”Par ailleurs, attachée au dialogue, consciente et préoccupée par la gravité de la situation, j’ai longuement échangé (lundi) avec les personnels de direction et les syndicats enseignants sur la situation à Mayotte et les défis de la rentrée”, ajoute l’ancienne Première ministre.

“Mayotte debout”: Bayrou dévoile son plan pour l’archipel dévasté par Chido

Empêcher la reconstruction des bidonvilles, rétablir l’électricité “dans chaque foyer” d’ici fin janvier: François Bayrou a annoncé lundi une batterie de mesures lors de sa visite à Mayotte, deux semaines après le passage du dévastateur cyclone Chido.Après une visite d’une journée à la tête d’une importante délégation ministérielle, le Premier ministre a présenté devant le Conseil départemental de l’archipel son plan “Mayotte debout” qui “a une seule ligne directrice: pas de phrases, des décisions concrètes et précises, des engagements concrets et précis”.Pris dans une polémique sur sa présence au Conseil municipal de Pau deux jours après le cyclone et trois jours après sa nomination à Matignon, confronté à l’impatience et à la colère d’habitants et de représentants de l’île sur la lenteur des secours, M. Bayrou a égrené plusieurs dizaines de mesures sur de nombreux thèmes, dont l’éducation, la santé, l’approvisionnement en eau et en électricité, ou encore le soutien à l’économie locale.Des mesures qui vont “incontestablement dans le bon sens”, a réagi sur X la cheffe des députés RN Marine Le Pen, souhaitant que “les espoirs des Mahorais ne soient pas à nouveau trahis”.En parallèle aux mesures, une “loi d’urgence” sera présentée vendredi en Conseil des ministres, avec “une présentation au Parlement sous quinze jours”, a annoncé M. Bayrou. Un projet de “loi programme de refondation” de l’archipel “préparé et conçu avec les élus de Mayotte, sera mis au point dans les trois mois, a-t-il précisé.Parmi les dispositions-phares détaillées lundi, l’engagement de l’Etat et des pouvoirs publics locaux à “interdire et empêcher la reconstruction des bidonvilles”, reprenant un mantra d’Emmanuel Macron, venu les 19 et 20 décembre sur place.Une volonté qui pourrait être “inscrite dans la loi”, alors qu’environ un tiers de la population de ce département le plus pauvre de France réside dans des habitats précaires, entièrement détruits.Face à l’urgence d’un archipel encore en partie privé de services essentiels, M. Bayrou a demandé que l’électricité soit “rétablie dans chaque foyer fin janvier”, grâce à “un renfort de 200 agents” et l’arrivée de “200 groupes électrogènes, une dizaine par commune” pour faire fonctionner “les équipements indispensables”.Selon EDF, au total, 51,6% des clients ont été réalimentés en électricité au 29 décembre.”Avant la fin de la semaine, le volume de production d’eau potable obtenu avant Chido sera atteint”, a promis le chef du gouvernement.Il a aussi annoncé le lancement d’un “plan vigilance” à Mayotte associant armée et gendarmerie pour “surveiller” les établissements scolaires face aux menaces d’incendie et de pillage. Le maire de Mamoudzou venait, en séance, de dénoncer que l’on ait lundi “brûlé une école de la République” transformée depuis quinze jours en centre d’hébergement.Face à l’immigration irrégulière – le département compte 320.000 habitants selon l’Insee, mais peut-être 100.000 à 200.000 de plus avec les sans-papiers -, M. Bayrou a plaidé pour un “recensement général et précis de la population”.Une “opération vérité qui permettra de sortir des ambiguïtés et des incohérences que beaucoup d’élus ont signalé sur l’appréciation numérique de la population”, a-t-il fait valoir, alors qu’il avait plus tôt dans la journée jugé “irresponsable” de prétendre “qu’il n’y a pas un problème d’immigration brûlant à Mayotte”.Sur le volet économique, M. Bayrou a indiqué que les cotisations sociales seraient suspendues “pour toutes les entreprises jusqu’au 31 mars”. Des compensations de pertes de chiffres d’affaires, ou encore des facilités de prêts sont également prévues.- Objectif: deux ans -“Il ne s’agit pas seulement de reconstruire Mayotte comme elle était. Il s’agit de dessiner l’avenir de Mayotte, différent”, avait expliqué dans la journée M. Bayrou, qui a répété son “objectif” de rebâtir Mayotte en deux ans.Accompagné de cinq ministres, dont les ministres d’Etat Elisabeth Borne (Education) et Manuel Valls (Outremer), François Bayrou a visité l’usine de dessalement d’eau de Petite Terre, un hôpital de campagne, une école dont plusieurs salles de classes ont été dévastées, avant de multiplier les rencontres avec les forces vives et les élus de l’île.La délégation s’est aussi heurtée au désespoir des habitants, à l’image de cette séquence au cours de laquelle Mme Borne est interpellée par deux enseignants qui témoignent des difficultés du quotidien. “Ok”, leur répond avant de quitter les lieux Mme Borne, dont l’attitude a été largement fustigée sur les réseaux sociaux.”Image terrible. Une ministre ne peut pas tourner les talons en méprisant le témoignage d’enseignants qui alertent sur la situation sanitaire”, a ainsi grincé le premier secrétaire du PS Olivier Faure.Chido, cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé le 14 décembre la mort de 39 personnes et fait plus de 5.600 blessés, selon un bilan publié dimanche par la préfecture.Concernant le bilan des victimes, M. Bayrou a appelé lundi à une “très grande prudence”, affirmant que les “rumeurs de milliers de morts” n’étaient “pas fondées”.Après Mayotte, M. Bayrou se rendra sur l’île de La Réunion, importante base logistique pour l’aide à l’archipel mahorais, où il poursuivra sa visite mardi matin avant de regagner la métropole.”Dans le sud, dans le nord, on est les oubliés de ce territoire. Ils (les plus hauts responsables politiques) restent toujours à Mamoudzou”, déplore une habitante, Marachi Maoulida, “déçue” de cette visite primo-ministérielle d’une journée mais qui veut rester “optimiste”. 

Gestion du Covid-19: fin de l’enquête à la CJR, pas de ministre mis en examen

Des investigations aux enjeux historiques qui pourraient déboucher sur un non-lieu: l’enquête portant sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 par le gouvernement a été clôturée par la Cour de justice de la République (CJR), sans ministre mis en examen.L’ex-Premier ministre Edouard Philippe, l’ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn, ainsi que son successeur Olivier Véran sont placés sous le statut plus favorable de témoin assisté, à l’issue de cette information judiciaire ouverte en juillet 2020.L’absence de mise en examen ouvre la voie à un probable non-lieu.”Un avis de fin d’information a été délivré le 28 novembre”, a indiqué lundi à l’AFP Rémy Heitz, procureur général près la Cour de cassation, qui exerce les fonctions du ministère public près la CJR et qui confirmait une information de Franceinfo. “Par ailleurs, aucune personne n’est à ce jour mise en examen”, a ajouté M. Heitz.Contactés lundi matin, les avocats des anciens ministres n’ont pas répondu dans l’immédiat à l’AFP.Les investigations ont été menées pour mise en danger de la vie d’autrui et abstention volontaire de combattre un sinistre.Elles découlaient de plusieurs plaintes de médecins ou d’associations dénonçant, dès le début du confinement en mars 2020 en France, le manque d’équipements de protection pour les soignants et la population ou encore les errements sur la nécessité ou non de porter des masques.- Une mise en examen annulée -Dans cette enquête, seule Agnès Buzyn, ministre de la Santé entre mai 2017 et février 2020, avait été, un temps, mise en examen pour mise en danger de la vie d’autrui. Mais elle en a obtenu l’annulation, en janvier 2023, par la Cour de cassation.Mme Buzyn, critiquée quand elle a quitté ses fonctions au début de la crise sanitaire pour devenir candidate à la mairie de Paris, s’est toujours défendue de ne pas avoir agi lorsque l’épidémie est apparue en Chine et s’est propagée en Europe.Après l’annulation de sa mise en examen, elle avait estimé que l’existence d’une enquête pénale sur la gestion gouvernementale du Covid-19 “rend(ait) l’émergence de la vérité plus difficile”. “Plus personne n’a envie de parler vraiment”, malgré “un besoin de retour d’expérience”, avait-elle déploré.Maintenant que l’enquête est terminée, il revient au parquet général puis à la commission d’instruction de se prononcer sur la suite à y donner.Quatre ans d’instruction ont permis de nombreuses auditions et perquisitions, jusqu’aux domiciles et bureaux d’Edouard Philippe, Agnès Buzyn et Olivier Véran, mais aussi chez le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, et la directrice générale de Santé Publique France, Geneviève Chêne.Quatre ans qui ont étoffé un dossier de dizaines de milliers de pages. “Le rendu de ces investigations permettra-t-il bien de mettre au jour l’organisation de l’Etat face aux crises sanitaires d’ampleur” et “peut-être”, en prévenir d’autres? Ou les magistrats vont-ils se contenter de livrer une “version synthétique” de leur travail de fond? s’interroge une source proche du dossier.Quelle que soit l’option retenue, le Pôle santé publique du tribunal judiciaire de Paris, qui enquête aussi sur la gestion du Covid en France, pourra se nourrir des éléments récoltés par la CJR, offrant ainsi une “vision globale et croisée” de l’épidémie, note une autre source proche du dossier.La CJR est la seule juridiction habilitée à poursuivre et juger les membres du gouvernement – Premiers ministres, ministres et secrétaires d’Etat – pour les crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. Elle a connu une forte inflation des plaintes lors de l’épidémie de Covid-19.Mais elle est souvent contestée, en particulier pour sa formation de jugement, composée de trois magistrats de la Cour de cassation, six députés et six sénateurs, dotés chacun d’une voix.Par ailleurs, ces derniers mois, des sources ont regretté auprès de l’AFP plusieurs classements de plaintes qui auraient, à leurs yeux, nécessité des investigations. 

Gestion du Covid-19: les investigations menées par la CJR sont closes, sans mise en examen

L’enquête portant sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 par le gouvernement a été clôturée par la Cour de justice de la République (CJR), sans mise en examen, a indiqué lundi à l’AFP le procureur général Rémy Heitz, confirmant une information de Franceinfo.A l’issue de cette information judiciaire ouverte en juillet 2020 pour mise en danger de la vie d’autrui notamment, l’ex-Premier ministre Edouard Philippe, l’ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn, ainsi que son successeur Olivier Véran sont placés sous le statut plus favorable de témoin assisté.L’absence de mise en examen ouvre la voie à un probable non-lieu.”Un avis de fin d’information a été délivré le 28 novembre”, a précisé Rémy Heitz, procureur général près la Cour de cassation, qui exerce les fonctions du ministère public près la CJR. “Par ailleurs, aucune personne n’est à ce jour mise en examen”, a-t-il ajouté.Les investigations avaient été ouvertes pour mise en danger de la vie d’autrui et abstention volontaire de combattre un sinistre.Elles découlaient de plusieurs plaintes dénonçant, dès le début du confinement en mars 2020 en France, le manque d’équipements de protection pour les soignants et la population ou encore les errements sur la nécessité ou non de porter des masques.Contactés lundi matin, les avocats des anciens ministres n’ont pas répondu dans l’immédiat à l’AFP.Dans cette enquête aux enjeux historiques, seule Agnès Buzyn a, un temps, été mise en examen pour mise en danger de la vie d’autrui. Elle s’était pourvue en cassation et avait obtenu l’annulation de cette mise en examen.La CJR est la seule juridiction habilitée à poursuivre et juger les membres du gouvernement – Premiers ministres, ministres et secrétaires d’Etat – pour les crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. Cette Cour a connu une forte inflation des plaintes lors de l’épidémie du Covid-19.

Bayrou veut remettre Mayotte “debout” après le passage du cyclone Chido

François Bayrou, déterminé à reconstruire Mayotte en deux ans, est arrivé lundi sur l’archipel dévasté par le cyclone Chido à la tête d’une imposante délégation ministérielle, avec la promesse d’un plan d’aide baptisé “Mayotte debout”, qui précédera d’autres mesures de long terme.”Les Mahorais ont souvent le sentiment que ce qu’on leur apporte, ce sont des assurances, de belles paroles de solidarité dans les déclarations, mais ce qu’ils veulent, c’est du réel. (…) Après une journée de dialogue, nous annoncerons ce soir un plan qui s’appellera +Mayotte debout+”, qui permettra “d’apporter des réponses rapides”, a affirmé le Premier ministre, alors que les habitants attendent de pied ferme des réponses concrètes du gouvernement.”Et puis après, il y aura une deuxième phase d’ici quelques mois. C’est un plan à long terme. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de reconstruire Mayotte comme elle était. Il s’agit de dessiner l’avenir de Mayotte, différent”, a ajouté M. Bayrou.Désireux de “faire mentir la fatalité”, le Premier ministre a répété son “objectif” de rebâtir Mayotte en deux ans.Accompagné de cinq ministres, dont les ministres d’Etat Elisabeth Borne (Education) et Manuel Valls (Outremer), François Bayrou doit s’exprimer depuis le conseil départemental mahorais en fin de journée. Le sort de Mayotte pourrait faire l’objet d’un projet de loi spéciale, qui serait présentée lors du Conseil des ministres vendredi.- “Prudence” sur le bilan -Mais pour la députée Liot de Mayotte Estelle Youssouffa, les efforts ne sont “pas à la hauteur des besoins”. “Il faut calibrer l’aide à hauteur de la population réelle”, y compris les sans-papiers, nombreux dans l’archipel, a-t-elle souligné sur RTL.M. Bayrou a jugé à cet égard “irresponsable” de prétendre “qu’il n’y a pas un problème d’immigration brûlant à Mayotte”. “Notre devoir à nous, c’est de poser la question et de tenter d’apporter des réponses”, par “des propositions de loi qui isoleront les sujets qui seront des sujets de blocage”, a-t-il dit. Revenir sur le droit du sol à Mayotte, déjà restreint dans l’archipel, “est une question qu’il faut se poser”, a-t-il précisé.Environ un tiers de la population de Mayotte – officiellement 320.000 habitants selon l’Insee, mais peut-être 100.000 à 200.000 de plus compte tenu de l’immigration irrégulière – réside dans des habitats précaires, entièrement détruits.Chido, cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé le 14 décembre la mort de 39 personnes et fait plus de 5.600 blessés, selon un bilan publié dimanche par la préfecture.Concernant le bilan des victimes, M. Bayrou a appelé lundi à une “très grande prudence”, affirmant que les “rumeurs de milliers de morts” n’étaient “pas fondées” et que les décès se comptaient plutôt en “quelques dizaines ou quelques centaines”. Le préfet de Mayotte avait évoqué au lendemain de la catastrophe la possibilité qu’il y ait “plusieurs centaines” de morts. “Peut-être approcherons-nous le millier, voire quelques milliers”, avait-il ajouté.Les dommages sont en tous cas colossaux dans ce département le plus pauvre de France. Les secours y sont depuis à pied d’Å“uvre pour rétablir les services essentiels comme l’eau, l’électricité et les réseaux de communications.- “Moteur diesel” -Après l’acheminement dans son avion de 2,5 tonnes de matériel humanitaire, le Premier ministre a débuté la journée par plusieurs visites: usine de dessalement de Petite-Terre, collège de Kaweni 2 à Mamoudzou, hôpital de campagne installé après le cyclone.”Tout a été vandalisé”, a déploré un professeur de sport, qui réclame que le collège soit “gardé”.En montrant les collines dévastées où se trouvaient des bidonvilles, le maire de Mamoudzou Ambdilwahedou Soumaila a plaidé pour que l’on “arrête ça”. “On ne peut pas laisser les gens refaire les mêmes erreurs en espérant que demain il y aura des résultats différents”, a-t-il fait valoir auprès de M. Bayrou.Plusieurs rencontres sont prévues avec les acteurs économiques, les forces de sécurité et les élus locaux, ainsi qu’une cérémonie d’hommage au capitaine de gendarmerie Florian Monnier décédé en intervention après le passage du cyclone.Lors d’un déplacement les 19 et 20 décembre, où il avait été confronté à l’impatience, la colère et au désespoir de Mahorais qui ont souvent tout perdu, le président Emmanuel Macron avait annoncé de premières mesures d’urgence pour Mayotte qui, “pendant des mois”, “ne vivra pas en situation normale”.  M. Bayrou a, lui, connu une première et intense polémique en se rendant, deux jours après le passage du cyclone, à Pau pour présider le conseil municipal de la ville dont il est le maire depuis 2014.Le chef du gouvernement a été “un peu un moteur diesel” sur Mayotte, a raillé lundi le député Rassemblement national Laurent Jacobelli.Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a lui demandé “des actes” au Premier ministre, car “les habitants se sentent abandonnés et attendent des aides”.A l’issue de sa visite à Mayotte, M. Bayrou se rendra sur l’île de La Réunion, importante base logistique pour l’aide à l’archipel mahorais, où il poursuivra sa visite mardi matin avant de regagner la métropole.

2024, “annus horribilis” d’Emmanuel Macron, piégé par sa dissolution

Emmanuel Macron voulait que ce soit l’année du “réarmement” de la France, il termine 2024 comme désarmé par sa propre dissolution.”Annus horribilis”. Rarement l’expression aura si bien décrit un moment que les douze derniers mois du chef de l’Etat, englué dans la plus grave impasse politique des dernières décennies.Une année de tous les records institutionnels, mais des records peu enviables: un gouvernement démissionnaire pendant 51 jours, puis le bail à Matignon le plus éphémère de la Ve République pour Michel Barnier, renversé par l’Assemblée nationale lors d’une censure inédite depuis 1962.Et l’avènement juste avant Noël du gouvernement de son premier allié, le centriste François Bayrou – qui devient le quatrième Premier ministre en fonctions depuis le 1er janvier -, est loin de résoudre la crise.Face à ce marasme, Emmanuel Macron, tout puissant et protagoniste de tout depuis son arrivée à l’Elysée en 2017, en est réduit par instants à un rôle de figurant.”C’est une pièce dont le président n’est ni metteur en scène ni acteur”, soupirait un conseiller au moment où gauche et droite se rejoignaient pour renverser le gouvernement Barnier.Pourtant, cette pièce, il en est bien l’auteur.- Psyché présidentielle -Pour ses opposants comme pour l’essentiel de ses soutiens, la crise a été déclenchée par sa dissolution de l’Assemblée, cette annonce qui a fait l’effet d’une bombe le 9 juin, au soir d’élections européennes largement remportées par l’extrême droite.La regrette-t-il aujourd’hui? “Inéluctable” et “nécessaire”, “cette décision n’a pas été comprise”, “et c’est ma responsabilité”, a-t-il fini par lâcher devant les Français.On a connu mea culpa plus explicite.Edouard Philippe, qui a lui “toujours pensé que c’était une mauvaise décision”, suggère dans un sourire que venant d’Emmanuel Macron, peu porté sur le repentir, cela s’y apparente tout de même. “Je connais le président, dans la façon qu’il a eu de le dire (…) moi j’ai compris que le président faisait le premier pas pour l’admettre”, dit son ex-Premier ministre.Car depuis que le chef de l’Etat a chamboulé la vie institutionnelle du pays, ce sont les profondeurs de la psyché présidentielle que son propre camp cherche à sonder pour percer les ressorts de son choix. Dès le 10 juin, il doit répondre à ceux, nombreux, qui le jugent “fou” pour avoir provoqué un tel séisme.”Pour moi c’est un mystère, cet oxymore entre cette grande intelligence et cette erreur politique majeure qu’est la dissolution”, résume, presque désabusé, un ami de la première heure du président.- “Fiertés françaises” -2024, ce “millésime” vanté avec une pointe de grandiloquence par Emmanuel Macron, avait pourtant commencé sous d’autres auspices.Dans ses voeux de la Saint-Sylvestre, il promettait une “année de détermination, de choix, de régénération” et “d’espérance”.Et une année de “fiertés françaises”.Fierté pour les Jeux olympiques de Paris, ouverts par une cérémonie osée et spectaculaire sur la Seine qui a marqué les téléspectateurs du monde entier. Et fierté pour la réouverture de Notre-Dame, brûlée et reconstruite en cinq ans envers et contre tout.Des paris fous… et réussis, alors que beaucoup les pensaient intenables.Des parenthèses enchantées, aussi, mais qui se sont aussitôt refermées sans redonner des couleurs dans l’opinion à un chef de l’Etat dont la cote de popularité est au plus bas.Autre maître-mot de ce mois de janvier 2024: le “réarmement de la Nation”, que promet Emmanuel Macron dans ses voeux puis lors d’une grande conférence de presse, en prime time dans la salle des fêtes de l’Elysée.La formule est de Jonathan Guémas, la plume des discours présidentiels du premier quinquennat, de retour au palais comme conseiller stratégie et communication pour redonner de l’oxygène à un second mandat déjà essoufflé. Elle est déclinée ad nauseam: réarmement économique, industriel, européen, étatique, civique, académique, scientifique, technologique, agricole et même démographique!- Le plus jeune Premier ministre-Pour l’incarner, surprise du chef: Gabriel Attal, 34 ans, entre à Matignon.”Le plus jeune président de la République de l’Histoire nomme le plus jeune Premier ministre de l’Histoire”, clame l’impétrant.A grand renfort de communication, les stratèges macronistes esquissent le sens d’une nomination qui doit rimer avec “audace”, “mouvement”, “vitesse”.”Vous incarnez le retour aux sources de ce que nous sommes, le dépassement au service du pays, l’esprit de 2017″, lance Emmanuel Macron à ses nouveaux ministres. Comme en écho à “Révolution”, son livre-programme avant sa première élection, il leur demande d’être des “révolutionnaires”, pas “des gestionnaires”.Un discours offensif qui, en creux, dit crûment ce que le chef de l’Etat et sa garde rapprochée ont nié vingt mois durant: oui, le second quinquennat manquait jusqu’ici d’élan; oui, le président se sentait comme corseté avec une Première ministre, Elisabeth Borne, qui n’avait pas été son premier choix.- L’élan retombe -Mais la dynamique retombe. Polémique autour de la nouvelle ministre de l’Education, Amélie Oudéa-Castéra, qui s’enferre dans des explications controversées sur la scolarisation de ses enfants dans le privé. Puis une crise agricole inédite, qui oblige le jeune chef du gouvernement à essuyer les plâtres plus vite que prévu.La belle entente ne dure pas longtemps entre celui dont les tempes ont blanchi en sept ans de pouvoir et son “petit frère”, comme il appellera Gabriel Attal devant des enfants.Emmanuel Macron juge sévèrement sa gestion de la fronde paysanne, d’autant que lui-même vit une journée plus qu’agitée lors de l’inauguration du traditionnel salon de l’agriculture, accueilli par des syndicalistes remontés à bloc.Un “marcheur” historique assure qu’il “espérait vraiment qu’Attal prenne toute la lumière… et tous les coups”. Mais en fait, dès “le jour où il l’a nommé, Macron a vu la petite lumière qui brille dans les yeux d’Attal et il n’a pas dû le supporter”, ironise un vieux routier de la politique.Du coup, il fustige auprès de ses proches un Premier ministre obnubilé par la “com” et son image, et lui reproche de ne pas s’investir assez vite et assez fort dans la campagne des européennes qui démarre.- L’Europe “peut mourir” -Car ce scrutin, il est “existentiel”, martèle la macronie, qui a mis l’Europe au coeur de son ADN politique.Gabriel Attal avait été choisi en partie comme “arme” censée tenir tête à Jordan Bardella, président et candidat du Rassemblement national pour les européennes, mais les sondages sont en berne face à l’extrême droite.Le président tarde à choisir sa propre tête de liste, essuie refus sur refus, et finit par adouber, un peu par défaut, l’eurodéputée sortante Valérie Hayer, sans que la campagne décolle. Emmanuel Macron dégaine donc son “discours de la Sorbonne 2”, et dramatise les enjeux.L’Europe “peut mourir”, lance-t-il dans le vénérable amphithéâtre parisien.Au sein du Vieux Continent, sa voix porte: souvent moqués au début, ses concepts d’autonomie stratégique et de souveraineté européenne ont fait leur chemin dans l’esprit des Vingt-Sept.Mais le président français a aussi semé le trouble auprès de ses alliés de l’Otan, en n’excluant pas, en février, l’envoi de troupes sur le sol ukrainien à l’avenir. Un tabou absolu pour les Etats-Unis et l’Allemagne, qui désavouent ses propos, mais aussi pour l’opinion française et ses opposants hexagonaux, qui en font un argument électoral.Dans les urnes, le résultat est catastrophique. Le 9 juin, le RN de Jordan Bardella engrange plus que le double des voix de la coalition macroniste, talonnée par Raphaël Glucksmann et les socialistes. L’extrême droite frôle en tout les 40%.- “Cloportes” -La réponse d’Emmanuel Macron, dans une allocution-surprise, est donc immédiate: il dissout l’Assemblée et organise des élections législatives anticipées.Son “conseiller mémoire”, Bruno Roger-Petit, convoque le général de Gaulle, Raymond Aron et Pierre Mendès-France pour justifier une décision qui assomme tout le monde, à commencer par Gabriel Attal, qui n’est mis dans la confidence qu’à la dernière minute. La rupture est consommée entre le Premier ministre et celui qui l’a nommé.”On ne se trompe jamais quand on redonne la parole au peuple”, assure l’entourage présidentiel, qui mise sur les divisions de la gauche et l’impréparation des adversaires pour “saisir le système”, “prendre tout le monde de court” et “gagner”.A ce moment-là, Emmanuel Macron “croit franchement qu’il peut gagner”, rapporte un proche qui s’est un peu éloigné, sans jamais rompre. “Et il se dit que s’il rate son coup et qu’au fond c’est Bardella” qui devient Premier ministre, “ce n’est pas un drame”.Las, la gauche s’unit en 24 heures, le RN reçoit le renfort inattendu du président du parti Les Républicains Eric Ciotti, tandis que c’est le camp présidentiel qui semble le plus sonné.Les soutiens d’Emmanuel Macron lui en veulent. Et beaucoup de Français aussi, pour ce début d’été chamboulé alors que se profilaient tranquillement les vacances et les JO.Dans une vidéo devenue virale, un sympathisant s’emporte auprès de Gabriel Attal, devenu chef de campagne: “Vous, vous êtes bien, mais il faudra dire au président qu’il ferme sa gueule!”.Edouard Philippe, qui vise l’Elysée en 2027, finit de s’émanciper en enfonçant Emmanuel Macron, accusé d’avoir “tué la majorité présidentielle”.Et d’autres ténors de feu cette majorité s’en prennent sans ménagement aux conseillers du chef de l’Etat, soupçonnés d’avoir ourdi la dissolution sans concertation.”Les parquets des palais de la République sont pleins de cloportes”, tance le ministre de l’Economie Bruno Le Maire. “Une clique sans expérience politique”, renchérit un ex-conseiller, qui regrette l’isolement présidentiel.- “Trêve olympique” -A des députés, Emmanuel Macron racontera que ses stratèges lui avaient dit: “t’inquiète pas, on est prêt”. “Moi j’appuie sur le bouton et je me retourne: en fait personne n’était prêt.”Les législatives se muent en chemin de croix pour le président, qui intervient à tout bout de champ alors que son camp lui demande de rester en retrait. Jusqu’à ce long podcast intimiste de 1h49 dans lequel il affirme que le vote pour le RN ou pour La France insoumise, les “deux extrêmes” renvoyés dos à dos, mènerait à “la guerre civile”. “Un chef d’Etat ne doit pas dire ça”, s’étrangle un vieil ami du président.La dissolution devait favoriser une “clarification”. C’est l’inverse qui se produit: si le parti de Marine Le Pen arrive largement en tête au premier tour, le “front républicain” anti-RN débouche au second sur une Assemblée sans majorité, coupée en trois blocs.La gauche, ressoudée au sein du Nouveau Front populaire arrivé en tête contre toute attente, réclame d’accéder à Matignon.Mais Emmanuel Macron temporise. La dissolution était urgente, la formation d’un gouvernement attendra!L’équipe Attal, démissionnaire, gère les affaires courantes pendant tout l’été, bien au-delà de la “trêve olympique” décrétée par le président.Bernard Cazeneuve, Xavier Bertrand, Thierry Beaudet, David Lisnard… les noms valsent pour le poste de Premier ministre et comme souvent, l’homme de l’Elysée peine à trancher.- “Parfum de cohabitation” -Il se résout finalement à nommer Michel Barnier, un opposant de droite, ex-commissaire et négociateur européen, pour que le gouvernement exhale ce “parfum de cohabitation” promis au vu de la défaite macroniste.Mais dès sa naissance, et à rebours du “front républicain”, la survie du nouvel exécutif dépend du bon vouloir du RN… qui le censurera trois mois plus tard, avec la gauche, laissant le pays sans budget pour 2025.Encore un raté pour Emmanuel Macron qui avait justifié la dissolution par la menace de censure à l’automne, en plein débat budgétaire, qui aurait été “dix fois pire”, “la crise totale”, comme il l’expliquait-il en petit comité.Finalement, il aura les deux crises pour le prix d’une.D’autant qu’entre les périodes électorales, la gestion d’affaires courantes et l’absence d’exécutif stable, c’est une année quasiment blanche en termes de réformes qui se termine, et un bilan qui voit ses principales réussites remises en cause: la réindustrialisation marque le pas, et les investissements étrangers sont mis sur pause.Emmanuel Macron rumine. Aux dires de ses proches, il accuse Michel Barnier, dont il n’a guère goûté l’indépendance, d’avoir écorné le sacro-saint dogme macroniste contre toute hausse d’impôts.Alors qu’il a fait mine de rester en retrait pendant l’automne, le président veut donc profiter de la censure pour reprendre la main à l’hiver, en nommant un fidèle en la personne de l’inamovible et discret ministre des Armées Sébastien Lecornu.Mais François Bayrou, persuadé d’être l’homme de la situation, menace de déclencher une crise dans la crise s’il n’est pas envoyé à Matignon. Emmanuel Macron cède, sur fond de montée, lente mais continue, des appels à sa démission.Cruelle, Marine Le Pen constate, dans Le Parisien: “Emmanuel Macron a même perdu son pouvoir de nomination du Premier ministre, qui s’est nommé lui-même. Il ne lui reste pas grand-chose”.

Bayrou arrivé à Mayotte, le gouvernement attendu au tournant

François Bayrou est arrivé lundi à Mayotte à la tête d’une imposante délégation ministérielle pour une intense journée de déplacement sur l’île dévastée par le cyclone Chido, où les réponses concrètes du gouvernement sont attendues de pied ferme par les habitants.L’avion du Premier ministre s’est posé lundi à 05H40 locales (03H40 à Paris) à l’aéroport de Mamoudzou. M. Bayrou est accompagné de cinq ministres dont deux des poids lourds de son gouvernement annoncé lundi: les ministres d’Etat Elisabeth Borne (Education) et Manuel Valls (Outremer).Valérie Létard (Logement), Yannick Neuder (Santé) et Thani Mohamed Soilihi (Francophonie et Partenariats internationaux), ex-sénateur de l’île, sont également du voyage dans l’avion primo-ministériel qui transporte 2.5 tonnes de matériel humanitaire, notamment des pastilles de purification d’eau, du matériel pour effectuer des soins et du matériel pour les patients sous dialyse, a indiqué Matignon.Poursuite de l’acheminement de l’aide, reconstruction, éducation et rentrée scolaire immanquablement perturbée: les nouvelles mesures du gouvernement sont attendues sur l’île, deux semaines après le passage de Chido, qui a causé la mort de 39 personnes et plus de 5.600 blessés, selon un bilan de la préfecture de Mayotte publié dimanche.Le cyclone le plus dévastateur qu’ait connu l’île depuis 90 ans a causé le 14 décembre des dommages colossaux dans le département le plus pauvre de France, où les secours sont depuis à pied d’Å“uvre pour rétablir les services essentiels comme l’eau, l’électricité et les réseaux de communications.”Le souci qui doit être le nôtre, et qui est un impératif, c’est de présenter des solutions concrètes le plus vite possible. La solidarité ne peut pas être seulement dans les mots, il faut qu’elle soit dans la réalité”, a expliqué mercredi à l’AFP le Premier ministre.La journée débute à 07H15 locales (05H15 heure de Paris) par la visite de l’usine de dessalement de Petite Terre, suivie de celle du collège de Kaweni 2 à Mamoudzou et de l’hôpital de campagne installé après le cyclone.Plusieurs rencontres sont prévues avec les acteurs économiques, du monde de l’éducation, les forces de sécurité et les élus locaux, ainsi qu’une cérémonie d’hommage au capitaine de gendarmerie Florian Monnier décédé en intervention après le passage du cyclone.A l’issue de cette journée, François Bayrou s’exprimera au conseil départemental avant de se rendre en soirée sur l’île de La Réunion, importante base logistique pour l’aide à Mayotte, située à 1.435 kilomètres, où il poursuivra sa visite mardi matin avant de regagner la métropole.- “Plan de reconstruction” -Le déplacement de M. Bayrou et de ses ministres suit celui d’Emmanuel Macron les 19 et 20 décembre lors duquel le président a annoncé de premières mesures d’urgence pour une île qui, “pendant des mois”, “ne vivra pas en situation normale”. M. Bayrou est donc chargé “d’assurer le suivi rigoureux de ces engagements”, a fait savoir l’Elysée dimanche.M. Macron a également été confronté pendant de longues heures à l’impatience, la colère et au désespoir de Mahorais qui ont souvent tout perdu. Il s’est attiré des critiques pour avoir notamment répondu: “N’opposez pas les gens! Si vous opposez les gens on est foutu, parce que vous êtes contents d’être en France. Parce que si c’était pas la France vous seriez 10.000 fois plus dans la merde!”.Son nouveau Premier ministre François Bayrou a, lui, connu une première et intense polémique en se rendant, deux jours après le cyclone, à Pau pour présider le conseil municipal de la ville dont il est le maire depuis 2014. L’annonce de la composition de son gouvernement lundi, journée décrétée de deuil national, a également été critiquée.Autant de points rappelés par le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure qui, dans une lettre ouverte, demande “des actes” au Premier ministre. “Les habitants se sentent abandonnés et attendent des aides”, écrit M. Faure, qui interroge également M. Bayrou sur “le travail de recensement des personnes décédées”.Sur place, des collectifs de citoyens mahorais exigent également “des réponses concrètes” et immédiates du Premier ministre. Dans une lettre ouverte, ils dénoncent “l’insuffisance criante des mesures” de soutien après le passage du cyclone.Et ils demandent “un plan de reconstruction rapide et structuré”, la création d’un “fonds solidaire exceptionnel” pour indemniser les sinistrés, y compris les non-assurés, et la “suppression des impôts fonciers pour l’année en cours”.Le sort de Mayotte doit faire l’objet d’un projet de loi spéciale, qui pourrait être présentée lors du Conseil des ministres prévu vendredi.

Isoler les narcotrafiquants en prison ? La proposition de Darmanin diversement accueillie

La proposition du nouveau ministre de la Justice Gérald Darmanin d’un isolement renforcé en détention des narcotrafiquants les plus dangereux, réitérée dimanche devant les professionnels du tribunal judiciaire de Paris, est diversement accueillie chez les magistrats et avocats.”La France est capable malgré les difficultés budgétaires d’isoler les quelques dizaines, la centaine de chefs de réseaux pour donner un signal extrêmement fort et montrer le volontarisme de l’Etat”, a assuré le garde des Sceaux à l’issue d’un déplacement au tribunal de Paris.Pour ce faire, a-t-il développé, il faudra “un renforcement de moyens, un isolement peut-être dans certains centres pénitentiaires particuliers, des brouillages” de téléphones portables dans certaines cellules. M. Darmanin avait annoncé samedi soir dans une interview au Parisien vouloir instaurer un isolement renforcé des “100 plus grands narcotrafiquants” qui poursuivent leurs activités criminelles depuis leur cellule, “inspiré du modèle appliqué aux plus grands terroristes” incarcérés.”Je n’ai pas forcément besoin d’un texte législatif pour cela”, l’isolement pénitentiaire étant une mesure administrative, a-t-il précisé dimanche lors d’un point presse, sans toutefois détailler l’organisation de ce régime de détention particulier alors que la surpopulation carcérale bat des records avec 80.130 détenus au 1er novembre. – “Vrai sujet” -“Avec quelques millions (d’euros) de plus, une bonne organisation, du volontarisme, des fonctionnaires très engagés (…) dans les prochains mois, nous aurons mis hors d’état de nuire des gens qui continuent de semer la mort dans les rues françaises”, a promis le ministre.”On a des détenus dangereux un peu partout. Il faut des établissements spécifiques pour ce type de détenus”, a réagi auprès de l’AFP Emmanuel Baudin, secrétaire général de FO Justice. Les narcotrafiquants gèrent “tellement d’argent”, disposent d'”un tel réseau qu’il faut absolument les isoler, c’est un vrai sujet”, ajoute M. Baudin. Les magistrats spécialisés dans la criminalité organisée réclament eux aussi “un régime pénitentiaire particulier pour les criminels qui, depuis leur cellule, continuent leurs activités criminelles”, rappelle l’un d’entre eux, prenant l’exemple du régime spécial instauré par l’Italie pour les mafieux. “Même si vous placez un brouilleur au pied de la cellule d’un criminel, il trouve le moyen de faire passer ses messages par un autre détenu et en quelques minutes il poursuit ses activités”, souligne-t-il.- “Torture blanche” -Vouloir un isolement renforcé, “c’est ignorer totalement ce qu’est l’isolement: une torture blanche, une mesure inefficace aux conséquences dramatiques sur la santé physique et psychique des individus”, estime au contraire Romain Boulet, président de l’association des avocats pénalistes.”Cette mesure administrative sera décidée sur la base du renseignement pénitentiaire, une étiquette qui va tomber sur quelqu’un soupçonné d’être un des plus gros narcotrafiquants sans respect de la présomption d’innocence, sans qu’on sache ce qui a présidé à une telle étiquette, et qui sera quasiment impossible à contester”, redoute-t-il.Pour l’avocat Bruno Rebstock, “alors que la situation carcérale n’a jamais été aussi dégradée (…) le nouveau ministre de la Justice n’ambitionne que de recréer sous une autre appellation les quartiers de haute sécurité”, abandonnés en 1982.”A force de s’accoutumer à ces régimes d’exception, on assimile le délinquant de droit commun à des terroristes, auquel on réserve à présent le même sort”, soupire le pénaliste Raphaël Chiche.Le nouveau locataire de la place Vendôme entend également “faire écrouer les personnes condamnées à des peines courtes, voire très courtes dans des lieux carcéraux de quelques dizaines de places maximum”. Ces nouveaux lieux de détention seraient construits rapidement, grâce notamment à un cahier des charges moins strict, a-t-il estimé dimanche.”Il nous faut des établissements spécifiques, des prisons légères” qui permettraient aux petits délinquants d’exécuter leurs peines “sans être mélangés aux voyous chevronnés”, abonde une magistrate.Mais ces nouvelles prisons devraient être adaptées au profil des détenus, insiste-t-elle. “Il faut penser les murs autour des détenus et non l’inverse. On nous demande de faire des miracles sur les questions d’exécution des peines, de réinsertion et de lutte contre la récidive dans un immobilier carcéral datant du 19e siècle”, regrette-t-elle.Un autre magistrat s’interroge: le garde des Sceaux va-t-il intégrer cette proposition à la loi sur l’aménagement des peines de prison ferme inférieures à six mois ou modifier cette loi ? “Il n’a pas été clair”.