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Après la caricature d’Hanouna, LFI condamnée pour atteinte au “droit à l’image”

L’affaire de la caricature de Cyril Hanouna sur une affiche de la France insoumise (LFI) se poursuit devant les tribunaux: le mouvement, qui fait l’objet d’accusations d’antisémitisme, a été condamné vendredi à verser 3.500 euros à l’animateur pour atteinte au “droit à l’image”.”Je suis très content”, a sobrement commenté l’intéressé dans son émission “Touche pas à mon poste”  (TPMP) dans la soirée, en précisant que cette somme serait reversée à une association luttant contre l’antisémitisme.Il a également annoncé que la dernière de TPMP en format webtélé aura lieu mercredi. “Maintenant, on va se concentrer sur notre projet”, a précisé l’animateur qui doit rejoindre le groupe M6 en septembre sur la chaîné W9 et Fun Radio.LFI, qui a indiqué faire appel, répond depuis plusieurs jours aux interpellations après la publication de ce visuel battant le rappel pour participer aux manifestations contre le racisme samedi en France. Le tribunal judiciaire de Nanterre a condamné le parti de gauche radicale à verser une provision de 3.500 euros à Cyril Hanouna au titre du préjudice moral pour atteinte au “droit à l’image”.Se prononçant en référé au civil, il a aussi interdit la reproduction sur tout support de l’affiche, initialement postée sur les réseaux sociaux de LFI, puis retirée.Cyril Hanouna, dont la plainte a été examinée mercredi, a également prévu une action au pénal, selon son avocat Stéphane Hasbanian. Il a pointé auprès de l’AFP un “photomontage choquant”, dont le caractère “antisémite” devra faire l’objet de cette nouvelle procédure. Faute de ce grief, le juge des référés s’est borné vendredi à constater “que l’image reproduite ne le présente pas à son avantage”.On y voyait Cyril Hanouna, d’origine juive tunisienne et proche du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, en noir et blanc, sourcils froncés et grimace agressive. Une image vue par de nombreux responsables politiques comme reprenant l’iconographie des caricatures antisémites des années 1930 et de l’Allemagne nazie.LFI récuse toute “signification antisémite”.Mais M. Hanouna l’a martelé: “c’est une caricature qui nous ramène aux heures les plus sombres” et “c’est fait sciemment”.Ses relations avec LFI se sont tendues ces dernières années, alors que plusieurs figures du mouvement apparaissaient auparavant régulièrement dans ses émissions.Les tensions ont culminé en novembre 2022, quand l’animateur a injurié en direct le député LFI Louis Boyard, qui avait critiqué Vincent Bolloré, dans “TPMP” sur C8 (groupe Canal+, dans le giron de M. Bolloré). – “positif” selon LFI -Il y a une dizaine de jours, le parti avait remplacé momentanément la caricature de l’animateur par une simple photographie issue de “TPMP”. C’est un juge au fond qui devra se prononcer sur une éventuelle atteinte au droit à l’image sur cette affiche-là.”Manifestations contre l’extrême droite, ses idées… et ses relais !”, est-il écrit sur ces affiches. Or M. Hanouna affirme n’avoir jamais manifesté un quelconque soutien à un mouvement politique. L’animateur demandait également l’interdiction de l’utilisation de son image pour toute affiche de LFI, point sur lequel le juge des référés l’a débouté.Dans un communiqué, le parti et ses avocats ont considéré que la décision en référé est “positive” car, notamment, elle “estime comme légitime le débat sur les liens entre M. Hanouna et l’extrême droite, et souligne la liberté d’expression dont bénéficie La France Insoumise dans le cadre de ses campagnes visuelles”.Au sujet de la caricature, divers responsables LFI ont admis une “erreur” ou une “maladresse”, reconnaissant qu’elle avait été générée par l’intelligence artificielle. Mais pas Jean-Luc Mélenchon qui a balayé l’accusation d’antisémitisme d’un tonitruant “taisez-vous” à un journaliste qui l’interrogeait dimanche.Mercredi, le leader LFI a de nouveau repoussé ces critiques. “Ça fait sept jours qu’on nous tire dessus: ça passe à travers, ou presque”, a-t-il lancé.Représenté sur une autre affiche portant les mots “dégageons les racistes !”, Éric Ciotti, patron des députés UDR, a lui annoncé vendredi “avoir déposé une plainte pour injure publique”.Dans les manifestations prévues samedi, les associations de lutte contre l’antisémitisme seront en tête de cortège avec les syndicats, a assuré la leader de la CGT Sophie Binet vendredi.”On ne peut pas lutter contre le racisme sans lutter contre l’antisémitisme et vice versa”, a-t-elle souligné sur RTL, en rappelant que la CGT avait jugé “inacceptables” les affiches représentant Cyril Hanouna. ac-gbh-reb-mdv/pel/mpm/ab/swi

Lille: le premier adjoint de Martine Aubry, Arnaud Deslandes, élu maire

Le premier adjoint de Martine Aubry, Arnaud Deslandes, a été élu sans surprise maire de Lille vendredi lors d’un conseil municipal extraordinaire, succédant à l’emblématique édile socialiste, qui a démissionné après 24 ans à la tête de la ville.Élu par 43 voix sur 54 suffrages exprimés, le quadragénaire, qui avait été désigné comme dauphin par Mme Aubry il y a deux semaines, l’a emporté face à Stéphane Baly, candidat écologiste aux prochaines municipales en 2026.M. Baly a qualifié cette élection de “succession (…) sans aucun suspense”, soulignant que “la seule élection qui compte se déroulera dans un an”.Après un long hommage à Martine Aubry, M. Deslandes, 42 ans, lui a dit son “infinie reconnaissance”, estimant que “Lille et Martine Aubry ne font qu’un”.”J’inscris mon action dans la ligne de ce qui a été accompli”, a-t-il souligné, revendiquant “l’héritage de Martine Aubry en politique”.Il a évoqué “la rénovation des quartiers populaires”, la “défense des services publics”, ou encore une ville “résiliente” face aux changements climatiques.”J’ai un an pour faire mes preuves, j’en ai conscience”, a-t-il reconnu. “Je prouverai que je ne serai pas qu’un maire de transition”.A un an des municipales, Martine Aubry, 74 ans, élue à Lille depuis 30 ans et maire depuis 2001, a annoncé le 6 mars sa démission, estimant que le temps était venu “de passer la main à une nouvelle génération”.”C’est bien sûr les Lilloises et les Lillois qui choisiront dans un an”, a souligné Mme Aubry vendredi soir, martelant qu’il n’y avait “rien d’anti-démocratique” à l’élection de M. Deslandes.Cette passation anticipée vise à donner à ce dernier de la visibilité et l’opportunité d’incarner le pouvoir avant les municipales de l’an prochain, une stratégie classique en politique.Le PS n’a pas encore officiellement désigné de candidat à la mairie de Lille pour 2026. Une primaire prévue le 6 novembre devra départager les prétendants, dont M. Deslandes et le député socialiste et conseiller municipal lillois Roger Vicot, en campagne depuis déjà plusieurs mois.Arnaud Deslandes, encore peu connu du grand public, a fait toute sa carrière dans l’ombre de Martine Aubry, dont il est un fidèle.Né à Charleville-Mézières (Ardennes) le 22 octobre 1982, ce fils d’une professeure et d’un avocat, socialistes convaincus, a suivi leur voie en prenant dès 2002 sa carte au Mouvement des jeunes socialistes (MJS), puis au PS.Étudiant à Sciences Po Lille de 2001 à 2007, il est entré en 2005 au cabinet de Martine Aubry en tant que stagiaire. Il a ensuite gravi tous les échelons du beffroi: collaborateur de cabinet de 2006 à 2013, directeur de cabinet de 2013 à 2020, adjoint chargé de la solidarité et de la cohésion des territoires de 2020 à 2023, puis premier adjoint.

Narcotrafic: les députés rétablissent la création d’un “procès-verbal distinct” inaccessible aux avocats de la défense

Les députés ont approuvé vendredi dans le cadre de l’examen d’un texte sur la lutte contre le narcotrafic la création d’un “procès-verbal distinct”, une mesure destinée à protéger les enquêteurs et informateurs mais jugée par les avocats pénalistes et la gauche attentatoire aux droits de la défense.Cette disposition, approuvée par 57 députés contre 31, prévoit la création lors des enquêtes d’un “procès-verbal distinct”, ou “dossier-coffre”, pour ne pas divulguer à la défense certaines informations sur la mise en Å“uvre de techniques spéciales d’enquête (sonorisation, captation des données informatiques…), telles que la date, l’horaire, le lieu de leur mise en Å“uvre, ou l’identité de la personne ayant concouru à l’installation. Défendue par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, elle avait été supprimée en commission.Le rapporteur Vincent Caure (Renaissance) et le gouvernement ont proposé des amendements de réécriture visant à mieux l’encadrer, tenant compte d’un avis du Conseil d’Etat, qui avait recommandé de restreindre “le dossier-coffre” aux cas de nature à mettre en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne. L’amendement de M. Caure prévoit qu’aucune condamnation ne puisse être prononcée sur le fondement des éléments recueillis via les techniques spéciales d’enquête, sauf si la requête et le procès-verbal ont été versés au dossier. Le juge de la liberté et de la détention pourra cependant autoriser une dérogation à ce principe lorsque la connaissance des éléments recueillis apparaîtra absolument nécessaire à la manifestation de la vérité.Plusieurs députés du Nouveau Front populaire se sont interrogés sur l’utilité de la mesure, alors qu’il est déjà possible d’anonymiser les témoignages et l’identité des enquêteurs.Devant les députés, M. Retailleau a de nouveau défendu un dispositif “vital” qui va permettre de “protéger des vies humaines”.Plus tard dans la journée, les députés ont approuvé un article vivement contesté par la gauche qui permettrait au préfet de prononcer une “interdiction de paraître” d’un mois maximum dans les lieux liés à des activités de trafic de stupéfiants pour les personnes y participant.Le préfet pourra aussi saisir un juge pour faire expulser de son logement toute personne dont les agissements en lien avec des activités de trafic de stupéfiants troublent l’ordre public.Les députés du Nouveau Front populaire se sont notamment alarmés d’une mesure qui impacterait, au-delà du trafiquant, les membres de sa famille.”Le droit au logement est un droit constitutionnel. L’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas indifférent aux décisions que nous avons à prendre. Et nous sommes (…) définitivement opposés aux punitions collectives”, a déclaré le président du groupe PS Boris Vallaud.Jeudi soir, les députés avaient en revanche refusé de rétablir une autre mesure phare du texte, portée par M. Retailleau, celle prévoyant d’obliger les plateformes de messageries cryptées à rendre les messages des narcotrafiquants accessibles aux enquêteurs.

Panne et messageries cryptées, une nuit agitée pour l’Assemblée sur le narcotrafic

Les députés ont décidé de maintenir jeudi la confidentialité des messageries cryptées, Bruno Retailleau échouant à les convaincre du bien-fondé d’une mesure pour lutter contre les trafiquants de drogue, au terme d’un vote perturbé par une rarissime panne technique.Le ministre de l’Intérieur souhaitait initialement pouvoir imposer aux plateformes de messagerie chiffrée (Signal, WhatsApp…) de communiquer les correspondances des trafiquants aux services de renseignement.Mais les députés avaient supprimé cette mesure – qui agrège contre elle de nombreux acteurs et experts de la cybersécurité – en commission des Lois la semaine dernière. Il existe à leurs yeux un risque trop important de créer une faille qui mette en danger les conversations de l’ensemble des utilisateurs.Dans l’hémicycle, trois députés du bloc central ont proposé une réécriture de l’article, prenant en compte – selon eux – les “inquiétudes” soulevées. Mais sans réussir à convaincre, y compris plusieurs députés de leur camp.Après des débats houleux, où le ministre de l’Intérieur a été accusé de vouloir faire revenir sa mesure “par la fenêtre”, et les députés auteurs des amendements d’être ses “porte-flingues”, l’Assemblée a procédé au vote par scrutin public.Mais une panne du système a empêché la comptabilisation des votes. Durant une heure, les services ont tenté de le réparer, en vain.Certains députés se sont même interrogés sur la possibilité d’un piratage.”Nous ne sommes pas victimes d’un dysfonctionnement lié à la sécurité informatique”, a rassuré la vice-présidente Naïma Moutchou à la reprise de la séance. “C’est une petite pièce du système qui a chauffé… sous la tension”, a-t-elle précisé, rieuse.L’Assemblée a procédé à une autre forme de scrutin public, plus laborieuse: durant une demi-heure, Mme Moutchou a appelé le nom de chacun des 577 députés. Charge aux élus de répondre pour ou contre au micro.Peu avant minuit, la présidente a annoncé le résultat qui ne faisait plus grand doute: 119 voix contre, 24 pour.- “Surveillance généralisée” -Un revers pour le ministre de l’Intérieur, qui avait pourtant bien commencé la soirée, avec le vote d’une mesure peu consensuelle: le recours, dans le cadre d’une expérimentation, au renseignement algorithmique pour détecter des menaces liées à la criminalité organisée.Les députés insoumis, écologistes et communistes se sont succédés au micro pour dénoncer un nouveau pas “vers une surveillance généralisée”.”Ce sont des filets extrêmement larges qui seront jetés sur nos vies privées et sur notre liberté d’opinion, d’expression, d’aller et venir”, a fustigé la députée Elisa Martin.Dans le même temps, ces élus dénonçaient n’avoir reçu aucun des rapports, prévus dans la loi, pour évaluer l’efficacité de cette surveillance algorithmique, déjà autorisée pour la prévention du terrorisme et des ingérences étrangères.Au contraire, “il s’agit de pêche à la ligne”, a défendu M. Retailleau vantant un important dispositif de contrôle. “C’est encadré, c’est ciblé”.Plus tôt dans la journée, c’est un autre ministre qui était au banc pour défendre cette loi sénatoriale contre le narcotrafic.Gérald Darmanin a vécu des échanges plus apaisés, et l’hémicycle a même assisté à une rare entente entre le garde des Sceaux et des députés de LFI autour de la refonte du régime des “repentis”.”S’il y a au moins un dispositif avec lequel on est d’accord, c’est celui-ci”, a dit le député insoumis Antoine Léaument, auteur d’un récent rapport recommandant une légalisation du cannabis.A l’unanimité, les députés ont voté pour un régime plus attractif qui prend modèle sur la loi antimafia italienne.On compte en France 42 “repentis” contre près d’un millier en Italie, selon les chiffres donnés par le ministre.Or “si on ne fait pas parler les gens qui sont dans les organisations criminelles, nous n’aurons pas d’informations” pour les démanteler.Avec le nouveau dispositif, les “repentis” pourraient voir leur peine réduite jusqu’à deux-tiers. Il est également élargi aux personnes ayant commis un crime de sang.Un décret d’application doit dessiner plus précisément ses contours (nouvelle identité, famille, aménagements de peines, etc.). Le ministre s’est engagé à travailler en concertation avec les parlementaires sur son écriture.Les débats sur le texte se poursuivront vendredi à l’Assemblée. 

Retraites: les partenaires sociaux veulent “s’autonomiser”

Les trois syndicats de salariés et les deux organisations patronales encore engagés dans les concertations sur les retraites vont continuer leur travaux, mais avec une volonté de “s’autonomiser” par rapport au pouvoir politique.”Cela continue mais c’est très fragile”, a déclaré la négociatrice de la CFTC, Pascale Coton, après une réunion jeudi consacrée en partie au nouveau contexte créé par les propos du Premier ministre François Bayrou dimanche, affirmant que les concertations ne permettraient pas de revenir à 62 ans.Ces déclarations ont provoqué notamment le départ de la CGT.Côté patronal, le président du Medef Patrick Martin a affirmé jeudi vouloir “relancer les discussions sur de nouvelles bases” en les élargissant “au financement de toute la protection sociale” et à la question des cotisations qui doivent “baisser”, dans un entretien aux Echos.”Il faut sortir du format imposé par le gouvernement et réunir les organisations patronales et syndicales dans un cadre autonome,” a ajouté le dirigeant du Medef.Un peu plus tôt le négociateur de la Confédération des PME (CPME) Eric Chevée avait expliqué: “On va écrire nous-mêmes nos objectifs et notre feuille de route”.Sur la même ligne, le syndicat de salariés CFDT veut “définir entre partenaires sociaux les objectifs” des travaux, “et leur calendrier”, a renchéri son négociateur Yvan Ricordeau.Mais maintenir le navire des concertations à flot risque de s’avérer compliqué.Pour la patronne de la CGT Sophie Binet, “le Premier ministre et le patronat ont malheureusement définitivement enterré ce conclave. “C’est très grave parce que le Premier ministre s’était engagé à ce que ces discussions soient +sans totem, ni tabou+”, a-t-elle dit mercredi soir, réaffirmant : “les 62 ans, c’est la question centrale”.Selon un sondage Elabe pour BFMTV publié mercredi, 56% des personnes sondées souhaitent revenir aux 62 ans (contre 62% en janvier) et une sur deux voudrait voir adoptée une motion de censure contre le gouvernement de François Bayrou sur le sujet des retraites dans les prochaines semaines.Au moment où se tenait le “conclave”, plusieurs centaines de personnes – en majorité des retraités, et des sympathisants de la CGT mais aussi de la FSU , CFTC, ou Solidaires – ont manifesté à Paris et Toulouse pour réclamer une “retraite à 60 ans” ou une “vraie revalorisation des pensions”. – “Idées claires” -Reste à savoir si les cinq organisations restantes vont réussir à se fixer rapidement une nouvelle feuille de route. A l’issue de la réunion de jeudi, la CFTC et la CFE-CGC (cadres) ont regretté notamment que le Medef n’ait encore dévoilé aucune proposition de contribution patronale à un rétablissement de l’équilibre du système des retraites, comme une hausse des cotisations patronales ou un bougé sur l’âge de départ à la retraite.Mais pour la négociatrice du Medef, Diane Milleron-Deperrois, s’il n’est “pas possible d’activer les cotisations pesant sur les salariés et les employeurs”, il est encore “trop tôt” pour dévoiler “d’autres leviers”.Parmi les nouvelles thématiques qui pourraient figurer dans la nouvelle feuille de route que vont tenter de se fixer les partenaires sociaux, il y la reprise en main du pilotage du régime général des salariés du privé, devenu une prérogative du pouvoir politique en 1995, lors de la réforme Juppé.La CFDT “a les idées claires sur comment on peut aboutir sur les règles de pilotage”, a déclaré Yvan Ricordeau, dont le syndicat n’exclut pas de lier les discussions sur les retraites à des négociations plus larges sur la protection sociale en général, a-t-il indiqué.”Nos instances se réunissent mi-avril, je ferai le bilan. Et si on me dit arrête, j’arrêterai, tristement, mais bien obligée”, car “on ne peut pas continuer de servir la soupe au Medef”, a déclaré Pascale Coton de la CFTC.Outre la CGT et FO, parti dès la première réunion en qualifiant le processus de “mascarade”, le syndicat patronal des artisans U2P a lui aussi quitté les concertations, estimant que l’équilibre du régime des retraites “imposera de repousser l’âge légal de départ au-delà de 64 ans”, sauf pour les métiers difficiles.bur-bat-eva-lby-ref/nth

Loi d’orientation agricole: le Conseil constitutionnel censure plusieurs articles clés

Le Conseil constitutionnel a censuré jeudi, totalement ou partiellement, près d’un tiers des articles de la loi d’orientation agricole, dont plusieurs mesures censées consacrer le principe de “souveraineté alimentaire” mais aussi répondre à la colère des agriculteurs sur le poids des contrôles et des normes.”La LOA va enfin entrer en vigueur! L’essentiel des mesures concrètes pour les agriculteurs a été validé (…) Les censures prononcées sont essentiellement liées à de purs motifs de forme et ne marquent pas l’enterrement des mesures proposées: le travail continue”, s’est félicitée la ministre de l’Agriculture Annie Genevard dans une déclaration transmise à l’AFP.Cette loi, très attendue pour répondre au mouvement de colère agricole et adoptée au pas de charge en février avant le Salon de l’agriculture, consacrait la “bonne foi” présumée des agriculteurs lors des contrôles, une question qui a concentré les crispations d’agriculteurs, notamment de la Coordination rurale, qui veut la disparition de la police de l’environnement (OFB). Le Conseil a censuré cette disposition ainsi que la présomption de “non intentionnalité” pour certaines atteintes à l’environnement.Les Sages ont toutefois maintenu la dépénalisation de certaines atteintes à l’environnement, lorsqu’elles ne sont pas commises “de manière intentionnelle”, au profit d’une amende administrative de 450 euros maximum, ou du suivi d’un stage de sensibilisation.- Souveraineté alimentaire -Ils ont surtout rejeté le principe contesté de “non-régression de la souveraineté alimentaire”, miroir de la non-régression environnementale déjà consacrée.Mais l’ambition centrale de la loi pour ériger “la protection, la valorisation et le développement de l’agriculture” au rang d'”intérêt général majeur” et d'”intérêt fondamental de la Nation”, demande de la FNSEA syndicat agricole historique, n’a elle, pas été censurée.La “non-régression de la souveraineté alimentaire” avait été ajoutée par les sénateurs mais élus et juristes doutaient de la portée du dispositif, la protection de l’environnement ayant une valeur constitutionnelle, alors que cet “intérêt général majeur” est inscrit dans une loi simple.Selon le ministère de l’Agriculture, la “non régression de la souveraineté alimentaire” est toutefois “validée de manière opérationnelle à travers les conférences de la souveraineté alimentaire” annoncées par la ministre. Dans le détail, le Conseil constitutionnel, dont c’est la première décision sur un texte de loi depuis l’arrivée de Richard Ferrand à la présidence, censure totalement 14 articles et partiellement trois articles de ce texte, après une saisine par les députés des groupes LFI et Ecologiste.”C’est une petite victoire, face à tant de reculs environnementaux que proposait cette loi d’orientation agricole”, a réagi Benoît Biteau député écologiste de Charente-Maritime.- “Nouvelle marque” -Est aussi censurée une disposition qui prévoyait, sous certaines conditions et si elles n’engendrent pas de “concurrence déloyale”, que les “normes réglementaires en matière d’agriculture ne peuvent aller au-delà des exigences minimales des normes européennes”.Cela répondait à la demande des syndicats agricoles FNSEA, JA et Coordination rurale d’arrêter la “surtransposition” des normes européennes, notamment en matière de produits phytosanitaires.”Mes seuls regrets sont la suppression des principes de non-régression de la souveraineté alimentaire et de non-surtransposition, car c’est aujourd’hui l’origine du mal”, a déclaré à l’AFP Laurent Duplomb (LR), rapporteur de la loi au Sénat où il a très largement contribué au remaniement du texte.”Le texte final redonne tout de même un nouveau cap à notre agriculture (…) en infléchissant une certaine façon de penser”, qui a laissé de côté “l’agroécologie”, selon lui.Le Conseil constitutionnel a jugé conformes deux mesures particulièrement décriées par la gauche et les écologistes. L’une qui invite le gouvernement à “s’abstenir d’interdire les usages de produits phytopharmaceutiques autorisés par l’Union européenne” en l’absence d’alternatives viables, une traduction du principe “pas d’interdiction sans solution”, mantra de la FNSEA.L’autre accordant aussi une présomption d’urgence en cas de contentieux sur la construction d’une réserve d’eau.L’exclusion des bâtiments agricoles du décompte de l’artificialisation des sols dans le cadre du dispositif “zéro artificialisation nette” a elle été censurée. L’article a été jugé “cavalier”, c’est-à-dire sans lien suffisant avec le texte.Le texte prévoit aussi une simplification de la législation sur les haies et la création d’un guichet unique départemental – “France services agriculture” – pour faciliter les installations d’agriculteurs ou les cessions d’exploitation. Les articles concernés n’avaient pas été contestés.parl-mdz-ama/jbo/nth

IVG: le Sénat vote pour “rendre justice” aux femmes condamnées pour avoir avorté

“Une démarche mémorielle après des décennies de honte et de silence”: le Sénat a adopté jeudi un texte pour réhabiliter les femmes condamnées pour avoir avorté illégalement avant la dépénalisation de l’IVG.Cinquante ans après le vote de la loi Veil de 1975 dépénalisant l’interruption volontaire de grossesse, un an après l’inscription de la “liberté garantie” d’avorter dans la Constitution, les sénateurs ont passé un nouveau message pour reconnaître les “souffrances” des femmes victimes de lois attentatoires à leur liberté.La proposition de loi du groupe socialiste, portée par l’ancienne ministre des Droits des femmes Laurence Rossignol, a été adoptée à l’unanimité en première lecture dans l’après-midi, avec le soutien du gouvernement. Elle est transmise à l’Assemblée nationale.Le texte entend faire reconnaître à l’Etat que les lois en vigueur avant 1975 ont constitué “une atteinte à la protection de la santé des femmes, à l’autonomie sexuelle et reproductive” ou encore “aux droits des femmes”, et qu’elles ont conduit à “de nombreux décès” et été sources de “souffrances physiques et morales”.- “Des pays ne plient pas” -Ce texte, “c’est une façon de dire que la honte doit changer de camp, que ces législations étaient criminelles”, a expliqué Laurence Rossignol, qui défend “une démarche mémorielle après des décennies de honte et de silence”.”Alors que la défense du droit à l’avortement est remise en cause dans le monde, il faut dire au monde entier qu’il y a des pays qui ne plient pas”, insiste la sénatrice du Val-de-Marne.Sa proposition de loi propose par ailleurs la création d’une commission de reconnaissance du préjudice subi par les femmes ayant avorté, chargée de contribuer au “recueil” et à la “transmission de la mémoire” des femmes contraintes aux avortements clandestins et de ceux qui les ont aidées.La ministre déléguée à l’Egalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, a salué un “acte d’hommage” pour “rendre justice à celles qui ont combattu dans l’ombre, à celles qui ont payé le prix de leur liberté, parfois de leur vie, le simple droit de disposer d’elles-mêmes”. Elle a notamment évoqué devant les sénateurs l’histoire de sa propre mère, qui avait elle-même avorté clandestinement.Cette initiative concrétise un appel publié au mois de janvier dans Libération au moment des 50 ans de la loi Veil, qui demandait déjà cette réhabilitation.Il était signé par un collectif de personnalités politiques, artistiques et féministes parmi lesquelles l’écrivaine et prix Nobel de littérature Annie Ernaux, les comédiennes Anna Mouglalis et Laure Calamy ou encore la présidente de la Fondation des femmes Anne-Cécile Mailfert.Pour cette dernière, ce texte “répare une injustice”. “On parle de plus de 11.000 personnes condamnées, c’est essentiel de pouvoir les réhabiliter, de leur dire +On n’aurait jamais dû vous condamner pour avoir exercé votre liberté+”, dit-elle à l’AFP.L’initiative donne également corps à une pétition de la Fondation des femmes sur ce sujet, appelant à “réparer une injustice historique” et qui recueillait mercredi soir 9.000 signatures.- “Dignité” -Les associations de défense des droits des femmes ont salué cette proposition. “C’est un très bon signal: à l’heure où une sage-femme vient d’être arrêtée au Texas pour avoir pratiqué des avortements, la France va exactement dans le sens inverse”, a souligné auprès de l’AFP Suzy Rojtman, porte-parole du Collectif national pour les droits des femmes.Pour Sarah Durocher, présidente du Planning familial, cela permettra de “rendre un peu de dignité” aux femmes “qui ont vécu dans le silence”.Le texte ne prévoit pas de volet indemnitaire pour porter réparation aux personnes concernées par cette loi. A dessein, “parce qu’il n’y avait pas que des amies des femmes qui ont pratiqué des avortements”, note Laurence Rossignol, qui évoque les “mères maquerelles” ou encore les “proxénètes” ayant pratiqué des avortements clandestins.Une initiative parallèle des sénateurs socialistes, pour réhabiliter les personnes condamnées pour homosexualité du fait des lois discriminatoires en vigueur entre 1942 et 1982 en France, a déjà prospéré dans les deux chambres du Parlement ces derniers mois. Le Sénat l’examinera en deuxième lecture le 6 mai.

A Jérusalem, Bardella veut faire sauter le verrou de l’antisémitisme

Jordan Bardella doit se rendre la semaine prochaine en Israël à l’occasion d’une conférence pour la lutte contre l’antisémitisme, une forme de parachèvement de la dédiabolisation du Rassemblement national qui se heurte toujours à des résistances, tant le passif lepéniste demeure chargé.”C’est l’antisémitisme qui empêche les gens de voter pour nous. À partir du moment où vous faites sauter ce verrou idéologique, vous libérez le reste”: dès 2013, Louis Aliot, aujourd’hui vice-président du RN, théorisait la nécessité de se débarrasser de l’accusation de haine envers les juifs charriée par le Front national de Jean-Marie Le Pen, lui qui avait renvoyé la Shoah à un “détail” de l’Histoire ou osé un jeu de mot avec le patronyme du ministre Michel Durafour… “crématoire!”.Sa fille, Marine Le Pen, a eu beau se présenter comme celle qui “protège” les Français de confession juive quand elle a repris la tête du parti – et exclu des membres pour antisémitisme, y compris son père qui avait promis à Patrick Bruel une prochaine “fournée” -, elle n’a jamais pu se rendre en Israël, pas plus qu’au dîner du Crif à Paris.Ses adversaires rappellent en outre les liens – qu’elle jure révolus – avec Frédéric Chatillon, proche de la sphère négationniste et longtemps lié au RN. Et rappellent que, lors des législatives de juin, une candidate investie par le RN s’est illustrée en s’affichant coiffée d’une casquette nazie, une autre se défendant de tout antisémitisme pour avoir “comme ophtalmo un juif”. Les deux ont été désavouées par les instances du parti.- Succès électoraux -L’invitation à cette conférence prévue mercredi et jeudi prochains, lancée par le ministre des affaires de la diaspora du gouvernement Netanyahu, apparaît ainsi comme un tournant. L’eurodéputée Marion Maréchal a également été conviée, elle qui s’était posée comme l’héritière politique de son grand-père – “on n’arrête pas une idée vraie (ni) un exemple juste”, avait-elle lancé lors d’une cérémonie d’hommage à Jean-Marie Le Pen en janvier à Paris.Déplorant “ce renversement de valeur”, Mathieu Lefevre, député macroniste et président du groupe d’amitié France-Israël à l’Assemblée nationale, a toutefois pointé jeudi sur Radio J la responsabilité d'”une partie du gouvernement israélien”, la plus extrémiste, d’autres ministres étant “gênés” par ces invitations à l’extrême droite.Depuis le 7-Octobre, le Rassemblement national n’a pas ménagé ses efforts pour effacer son passé, jusqu’à trouver sa place dans des manifestations contre l’antisémitisme. Avec électoralement un certain succès auprès des quelque 500.000 juifs français. Dans le XIXe arrondissement de Paris, les bureaux de vote correspondant aux fortes densités communautaires autour des Buttes-Chaumont ont compté lors des dernières européennes et législatives une proportion de suffrages RN équivalente à celle de la moyenne de l’arrondissement, alors que Mme Le Pen y avait accusé une sous-performance lors de la présidentielle de 2022.Idem à Sarcelles, dans les bureaux de la “petite Jérusalem”: si les scores du RN y sont toujours largement inférieurs à ceux observés au niveau national, ils se confondent avec, voire dépassent, l’étiage lepéniste à l’échelle de l’ensemble de cette commune du Val-d’Oise. Le thème de l’antisémitisme est très présent dans le débat politique, mais c’est aujourd’hui La France insoumise qui concentre toutes les accusations.- Prise de distance d’Herzog -L’opprobre moral envers le RN n’a néanmoins pas totalement disparu. Après l’annonce de la venue de Jordan Bardella et Marion Maréchal à Jérusalem, Bernard-Henri Lévy a annulé sa participation à la conférence.De même qu’un professeur de l’université de Londres et expert de l’antisémitisme, David Hirsch, qui a appelé dans une lettre ouverte Israël à ne “pas offrir à la droite populiste, qui a l’antisémitisme fasciste dans son héritage et parmi ses soutiens, un sceau officiel d’approbation juive”.Outre Jordan Bardella et Marion Maréchal, des représentants des partis d’extrême droite européens, notamment des Hongrois du Fidesz (le mouvement de Viktor Orban), des Espagnols de Vox ou des Démocrates de Suède ont également été invités, ces formations s’étant déjà fait épingler pour compter dans leurs rangs des membres néo-nazis ou révisionnistes.Mercredi, le président israélien Isaac Herzog a d’ailleurs pris ses distances avec l’événement, même si le RN a assuré à l’AFP que la participation de M. Bardella à une réception à la présidence était maintenue.Reste le contexte régional, avec la reprise des bombardements israéliens sur Gaza, qui interroge au RN. “Je ne suis pas là pour condamner ou ne pas condamner”, a balayé Jordan Bardella mercredi sur RMC.”Mais quand bien même Israël est un allié, il ne faut pas apparaître trop proche de Netanyahu”, met toutefois en garde un député lepéniste: “on doit faire attention à ne pas être démesurément pro-israélien pour racheter les propos antisémites de Jean-Marie Le Pen”.

Narcotrafic: l’Assemblée approuve la création d’un nouveau régime carcéral

Les députés ont approuvé mercredi dans l’hémicycle l’une des mesures les plus décriées du texte visant à lutter contre le narcotrafic, qui prévoit la création d’un nouveau régime carcéral d’isolement pour les plus gros trafiquants.Portée par le ministre de la Justice Gérald Darmanin, et adoptée avec les voix du camp gouvernemental, de l’alliance RN-ciottistes et des indépendants de Liot, la mesure est inspirée du modèle italien de lutte contre la mafia.La députée PS Colette Capdevielle a au contraire relayé les craintes de l’Association française des magistrats instructeurs, inquiète d’une concentration au même endroit de délinquants disposant de “moyens financiers quasi illimités pour organiser des évasions”.Le texte prévoit de créer des quartiers de haute sécurité, dans lesquels seraient affectées les personnes issues de la criminalité organisée les plus dangereuses, sur décision du garde des Sceaux, et après avis du juge de l’application des peines pour une personne condamnée. Un magistrat instructeur pourra aussi s’y opposer pour une personne prévenue.Initialement fixée à quatre ans renouvelable, la durée d’affectation à ces quartiers a été ramenée à deux ans renouvelable, par amendements, après avis du Conseil d’Etat.M. Darmanin s’était engagé à saisir la juridiction, qui a recommandé plusieurs aménagements pour remédier aux “risques d’inconstitutionnalité et d’inconventionnalité”.Sur ses suggestions, les députés ont aussi adopté un amendement pour mieux cibler les personnes susceptibles d’être affectées dans ces quartiers, visant celles pour qui il est jugé nécessaire de “rompre le lien avec les réseaux de la criminalité et de la délinquance organisées”.”Cela concerne entre 600 et 900 personnes”, a affirmé M. Darmanin.Le régime est particulièrement “difficile”, de l’aveu même de M. Darmanin, et prévoit des fouilles intégrales systématiques en cas de contact physique sans surveillance constante d’un agent. Les administrations auront toutefois une latitude pour adapter le principe, par exemple en fonction de l’âge ou de la santé du détenu.- “Dignité humaine” -Le texte prévoit aussi le recours à des parloirs hygiaphones ou encore une interdiction d’accès aux unités de vie familiale et parloirs familiaux.Les visites doivent se dérouler dans un parloir avec “dispositif de séparation”, sauf exceptions comme les visites d’enfants mineurs de 16 ans (entre 16 et 18 ans l’administration pourra choisir de l’imposer). Une restriction de l’accès au téléphone est également prévue.Des amendements ont exclu les entretiens avec les avocats du champ de ces deux restrictions. Mais une proposition du président macroniste de la commission des Lois Florent Boudié a été critiquée à gauche. Elle prévoit que le détenu ou l’avocat puissent demander un parloir avec séparation. Ceci dans l’idée d’éviter au détenu une fouille intégrale après l’entretien, selon M. Boudié. Mais cela fait peser une “suspicion” sur les “avocats”, a critiqué Eléonore Caroit, membre du même groupe.L’Assemblée a aussi exclu du nouveau régime carcéral les détenus bénéficiant ou obtenant le statut de repenti en collaborant avec la justice. “Si vous parlez, vous ne serez pas dans ce régime de détention très stricte”, a assumé Gérald Darmanin, soutenant la mesure.”Est-ce qu’on va placer des personnes suspectes dans ces régimes afin d’obtenir des aveux?”, a pointé Arthur Delaporte (PS).Plus généralement la gauche, et l’ex-président macroniste de la commission des Lois Sacha Houlié (désormais député non-inscrit), se sont élevés contre un régime rappelant par trop les “quartiers de haute sécurité” abandonnés en 1982 par le ministre de la Justice de l’époque, Robert Badinter.Pouria Amirshahi (écologiste) a fustigé un régime qui “contrevient à tous les principes essentiels de la dignité humaine”.Les débats sur ce texte issu du Sénat se poursuivront jeudi à l’Assemblée.

Bayrou ravive l’opposition des socialistes pourtant gages de sa survie politique

François Bayrou fragilisé ? Le Premier ministre, déjà bousculé par les désaccords à répétition de ses ministres, voit s’effilocher le conclave sur les retraites, ravivant l’opposition des socialistes sur lesquels il compte pour durer à Matignon.Grand défenseur de la “démocratie sociale”, François Bayrou avait proposé aux partenaires sociaux de rediscuter “sans aucun totem” ni “tabou” de la réforme contestée des retraites, obtenant en contrepartie, avec plusieurs autres concessions à la clé, que les socialistes ne le censurent pas sur le budget.Or il s’est depuis mêlé des discussions, réclamant un retour à l’équilibre, fermant la porte à la retraite à 62 ans, et provoquant le départ de plusieurs participants, dont la CGT mercredi soir. Si la CFDT entend rester à la table des négociations, elle considère que le Premier ministre a “rompu le contrat”, et va “s’affranchir” de la lettre de mission.En parallèle, le ton est monté au sein de la gauche, qui accuse François Bayrou de “trahison”.Le Premier ministre “commet une erreur” s’il pense que les socialistes ne peuvent plus le censurer, mais ceux-ci attendront de voir l’issue du conclave, a prévenu mardi le premier secrétaire du PS Olivier Faure. “Nous avons sanctuarisé le budget, nous n’avons pas sanctuarisé la place de François Bayrou”, a-t-il dit.- “Sirènes” -Le Premier ministre “a baladé les Français”, “la représentation nationale” et les partenaires sociaux, tonne Benjamin Lucas, porte-parole du groupe écologiste demandant que “l’abrogation” de la réforme soit examinée par les députés, alors que François Bayrou a promis de porter au Parlement tout accord, même partiel, des partenaires sociaux.Signe que M. Bayrou évolue en terrain glissant, un sondage Elabe pour BFMTV indique mercredi que la moitié des personnes interrogées souhaitent voir le gouvernement renversé sur le sujet des retraites, en hausse de neuf points par rapport à janvier.Les socialistes “se sont laissé rouler dans la farine”, a raillé Jean-Luc Mélenchon en marge d’une réunion publique à Brest. “Est-ce qu’il y a une seule personne qui croyait dans ce pays qu’un gouvernement de droite allait décider de ramener la retraite à 62 ans ?”, a ajouté le leader de La France insoumise (LFI), certain que les socialistes “vont finir par changer d’avis” et “renverser le gouvernement”.Selon une source au groupe, les députés LFI ont contacté les groupes écologiste et communiste pour proposer une motion de censure spontanée contre François Bayrou. Une prise de contact que n’avaient confirmé ni les parlementaires écologistes ni les communistes mercredi soir, sollicités par l’AFP.Les socialistes avaient de leur côté peu goûté la charge lancée contre eux par le Premier ministre lors de l’examen de leur propre motion de censure spontanée, contre sa sortie sur la “submersion migratoire”.Patrick Kanner, chef de file des sénateurs PS, l’a accusé mercredi de dériver “vers l’extrême droite du centre” et de “céder aux sirènes” de ses ministres très droitiers Bruno Retailleau (Intérieur) et Gérald Darmanin (Justice).Ces deux poids-lourds ont mis chacun leur démission dans la balance pour peser dans les arbitrages sur l’Algérie ou le voile islamique, sur fond de désaccords avec leurs collègues. Ce qui leur a valu mardi un rappel à l’ordre, M. Bayrou les appelant à la “solidarité”.- “Lui tout seul” -“On est dans un jeu de postures lié à la présidentielle”, et “aux jeux internes aux partis politiques”, analyse un conseiller ministériel, avec Bruno Retailleau en campagne pour la présidence des Républicains et Olivier Faure en préparation de son congrès.Le Premier ministre veut aussi “rassurer sur sa droite”, selon la même source, après que le président d’Horizons Edouard Philippe a jugé “hors sol” le conclave sur les retraites dans le contexte international.Mais sans le soutien des socialistes, et en l’absence de majorité, François Bayrou risque de se retrouver à la merci du Rassemblement national, comme son prédécesseur Michel Barnier.”Nous verrons si nous votons une motion de censure si cela va dans l’intérêt des Français. Si nous héritons ensuite d’un Bayrou bis ou Bayrou fils, la censure n’aura pas d’intérêt”, a estimé mercredi Sébastien Chenu, vice-président du RN.Un ancien député MoDem observe lui que si les socialistes “ne sont pas contents” de la manière dont évolue le conclave, “ils ne sont pas vindicatifs”. Il ne les voit donc pas censurer une nouvelle fois le gouvernement “au vu du contexte” géopolitique.François Bayrou dit “ce que tout le monde pense tout bas”, décrypte un cacique du camp présidentiel pour qui “jamais personne n’a pensé qu’on puisse revenir aux 62 ans” compte tenu des déficits. “Quel est donc l’intérêt de censurer le gouvernement aujourd’hui ?” se demande-t-il.