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Face aux violences à l’école, la commission parlementaire appelle à “une révolution”

Dénonçant des “monstruosités” et un “Etat défaillant” face à un déferlement de violences en milieu scolaire pendant des décennies, la commission parlementaire lancée après le scandale Bétharram a proposé mercredi 50 mesures pour mieux protéger les enfants.La commission d’enquête a permis de dresser le “constat accablant” d’une “défaillance majeure de l’Etat” a déclaré son corapporteur Paul Vannier (LFI) lors d’une conférence de presse, appelant à une “révolution” face aux violences scolaires.Les travaux de cette commission d’enquête ont permis 80 signalements à la justice au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. Elle est née du scandale autour des révélations sur l’affaire des violences sexuelles et physiques qui se sont poursuivies pendant des décennies à Notre-Dame-de-Bétharram, dans le Béarn. L’affaire, qui a entraîné des révélations en chaîne de mauvais traitements et agressions sexuelles dans d’autres établissements à travers la France, a aussi ébranlé François Bayrou, ministre de l’Education nationale au moment des premières plaintes.Dans leur rapport rendu mercredi, les députés pointent chez lui un “défaut d’action” à l’époque qui a pu laisser les violences “perdurer”, alors qu’il était “informé” et “avait les moyens” d’agir.La présidente de la commission parlementaire, Fatiha Keloua Hachi, a fustigé aussi les attaques lancées par François Bayrou, lors de son audition fleuve devant la commission, contre l’ex-professeure de Bétharram Françoise Gullung, lanceuse d’alerte qu’il a accusée d’avoir “affabulé”. Il vit “dans un monde qui est différent du nôtre” où l’on peut donner des “claques éducatives”, a-t-elle dit lors de la conférence de presse.- “Déchaînement de violences” -Pour Paul Vannier, François Bayrou a menti sur ce qu’il savait des sévices à Bétharram et commis un parjure. Mais Fatiha Keloua-Hachi a écarté l’idée d’un signalement à la justice, une décision confirmée par la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet qui a jugé la demande de M. Vannier “sans objet”Dans leur rapport, les députés évoquent “un véritable déchaînement de violences” à Notre-Dame-de-Bétharram, avec “une communauté de notables au soutien indéfectible”. Ils décrivent les mêmes “logiques à l’oeuvre” dans d’autres établissements, dont des “violences institutionnalisées sous prétexte d’excellence pédagogique”. Mis en cause dans le rapport, Village d’enfants géré par l’institut catholique traditionaliste de Riaumont (Pas-de-Calais), concerné par plusieurs affaires, et fermé depuis 2019, a annoncé à l’AFP via son avocat sa volonté de saisir la justice pour obtenir un “droit de réponse”, dénonçant un “travail à charge”.Plus largement, pour les rapporteurs, les mécanismes d’omerta et de mauvais traitements étaient “accentués dans l’enseignement catholique”, du fait d’un “modèle éducatif explicitement plus strict, s’appuyant sur de nombreux internats”. Ces violences, d’après eux, persistent, “encore invisibilisées” dans l’enseignement public et de façon “préoccupante” dans l’enseignement privé, “notamment catholique”.Paul Vannier dénonce aussi la place d'”intermédiaire” que s’est arrogé Secrétariat général à l’enseignement catholique (Sgec), sans statut légal pour le faire, dans les relations avec le ministère de l’Education. Il a appelé à dépasser ce “ministère bis”.Le secrétaire général de l’enseignement catholique Philippe Delorme a dénoncé auprès de l’AFP “une orientation” du rapport “qui voudrait que l’enseignement public et privé fonctionnent exactement de la même manière, ce qui est complètement absurde”. “On ne peut pas dire que nos 7.200 établissements dysfonctionnent”, insiste-t-il.Les députés déplorent en outre des contrôles de l’Etat “quasi-inexistants” et une prévention et des signalements “lacunaires”.- “Traduire en actes” -Parmi ses cinquante recommandations, le rapport appelle à reconnaître “la responsabilité de l’Etat pour les carences” ayant permis ces violences et créer un “fonds d’indemnisation et d’accompagnement des victimes”. “François Bayrou, le 15 février, nous a assuré qu’il créerait ce fonds” mais “nous n’avons toujours rien”, a déploré sur RTL Alain Esquerre, porte-parole d’un collectif de victimes de Bétharram.Les députés veulent aussi lancer une mission parlementaire transpartisane chargée de propositions pour “rendre imprescriptibles certaines infractions commises sur les mineurs”.Une recommandation “particulièrement” soutenue par la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), dans un communiqué. Elle a salué aussi, entre autres, une proposition visant à “procéder à un contrôle de l’honorabilité” du personnel et des bénévoles, et appelé le gouvernement à “se saisir rapidement de ces préconisations”.Les députés demandent aussi plus de contrôles dans tous les établissements, surtout dans le privé, et notamment dans les internats. La ministre de l’Education nationale Elisabeth Borne a indiqué qu’elle “prenait acte” du rapport et allait examiner “s’il y a lieu d’adapter le plan +Brisons le silence+”, lancé en mars pour lutter contre les violences en milieu scolaire.

Le ministre des Transports exclut de céder face aux contrôleurs aériens en grève

Le ministre des Transports Philippe Tabarot a exclu mercredi de céder aux revendications de syndicats de contrôleurs aériens, qualifiées d'”inacceptables”, à la veille du début d’une grève qui devrait entraîner d’importantes perturbations juste avant les vacances scolaires.”Je sais combien ces mouvements de grève sont coûteux pour vos compagnies aériennes”, a affirmé le ministre en clôturant à Paris le congrès annuel de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam), porte-voix du secteur.”Les revendications portées par des syndicats minoritaires sont inacceptables, tout comme le choix de faire cette grève au moment des grands départs en congés”, a ajouté le ministre.Le trafic devrait être très perturbé jeudi dans les aéroports parisiens et du sud de la France, après un appel à la grève de deux syndicats d’aiguilleurs du ciel pour défendre leurs conditions de travail.La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a demandé aux compagnies de réduire fortement leurs programmes de vols face à ce mouvement social: un quart des liaisons annulées jeudi à Paris-Charles-de-Gaulle, Orly et Beauvais, la moitié à Nice, Bastia et Calvi et 30% à Lyon, Marseille, Montpellier, Ajaccio et Figari.La situation sera encore plus tendue vendredi, dernier jour de l’année scolaire, dans les aéroports parisiens et à Beauvais (40% d’annulations). Nice restera à 50%, tandis que Lyon, Marseille, Montpellier et les aéroports corses seront à 30%, selon une mise à jour de la DGAC mercredi soir.- “Tenir bon” -De source proche du dossier, l’aviation d’affaires sera aussi très affectée par ce conflit.”Je suis résolu à tenir bon face à ce mouvement et notamment face à la demande d’abandon d’un certain nombre de dispositions qui avaient pourtant été actées et qui ne sont pas respectées”, a martelé le ministre.Une réforme est en cours pour établir un pointage des contrôleurs à la prise de poste, à la suite d’un “incident grave” à l’aéroport de Bordeaux fin 2022, quand deux avions avaient failli entrer en collision. Le Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile (BEA) en a fait peser la responsabilité sur une organisation défaillante du travail de contrôleurs.”Il en va de la sécurité des vols et du sérieux de la profession, et je ne céderai pas sur cette réforme indispensable”, a souligné M. Tabarot.L’influente association Airlines for Europe, qui fédère entre autres Air France-KLM, Lufthansa, British Airways, EasyJet et Ryanair, a jugé ces appels à la grève “intolérables” et a prévenu qu’ils allaient “perturber les projets de vacances de milliers de personnes”. Air France a confirmé avoir été “contrainte d’adapter son programme de vols”, sans préciser le nombre d’annulations, mais elle a souligné que son réseau long-courrier ne serait pas affecté.Comme elle, sa filiale low-cost Transavia a indiqué que ses clients concernés étaient informés individuellement et que “des mesures commerciales” permettraient “un report du voyage sans frais ou un remboursement intégral”. – “Management toxique” -Le deuxième syndicat d’aiguilleurs du ciel (17% des voix aux dernières élections professionnelles), l’Unsa-Icna, a appelé à la grève jeudi et vendredi. Le troisième, l’Usac-CGT (16% des suffrages), a rejoint le mouvement. En réponse aux propos de M. Tabarot, l’Unsa-Icna a dit mercredi “regrette(r) que la communication politique ait désormais pris le pas sur le traitement des problématiques majeures” à la DGAC.Le syndicat a cité à cet effet “un sous-effectif entretenu et responsable des retards une bonne partie de l’été”, des outils obsolètes et “un management toxique, incompatible avec les impératifs de sérénité et de sécurité exigés”.Le premier syndicat, le SNCTA (60% des voix), a indiqué à l’AFP ne pas appeler à la grève. Selon une source proche du dossier, 270 contrôleurs aériens sur quelque 1.400 se sont déclarés grévistes jeudi.Les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (Icna) figurent parmi les fonctionnaires les mieux payés, avec un salaire brut moyen “de l’ordre de 96.000 euros par an, soit environ 8.000 euros mensuels”, selon un rapport du Sénat d’octobre 2024.

La question de la climatisation échauffe le débat politique

Demain tous climatisés? Si le RN réclame un “grand plan pour la climatisation”, la gauche et les macronistes n’en font qu’une solution d’appoint et plaident pour le développement d’autres mesures comme la végétalisation ou l’isolation thermique.En plein épisode de canicule dans l’Hexagone, Marine Le Pen a réclamé lundi “un grand plan d’équipement pour la climatisation”, relayé par son allié Eric Ciotti qui souhaite équiper en priorité “écoles, hôpitaux et maisons de retraite”.La leader d’extrême droite a déploré que “les services publics ne (soient) pas capables de fonctionner faute de climatisation, contrairement à des dizaines de pays dans le monde”.”Je pense aussi à tous les travailleurs qui suffoquent dans des bâtiments sans clim’ parce que des dirigeants ont décidé que les Français devaient souffrir de la chaleur pendant qu’eux-mêmes jouissent évidemment de véhicules et de bureaux climatisés”, a encore fustigé Mme Le Pen sur X.Le groupe UDR (Union des droites pour la République) a déposé mercredi une proposition de loi portant sur une “obligation de climatisation des espaces publics prioritaires”.”Il est urgent de lancer un grand plan d’équipement national pour les plus fragiles à travers le développement massif des réseaux de froid et de la climatisation. Nous avons le devoir (…) de généraliser ces solutions”, affirme le groupe d’Eric Ciotti dans son texte.”Ceux qui vous parlent de grand plan de climatisation viennent de découvrir la Lune”, a réagi lundi sur BFMTV la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher. “Il y a les incompétents, le Rassemblement national (…), qui vient de découvrir que dans les Ehpad, on a besoin de pièces climatisées. Merci, ça fait depuis 2004 que c’est obligatoire”, a-t-elle cinglé.”Le sujet que nous avons avec la climatisation, c’est un sujet de réchauffement”, a-t-elle encore commenté aux côtés du Premier ministre, François Bayrou, mardi. “Il faut climatiser pour les personnes vulnérables et leur permettre d’avoir un répit. En revanche, il ne faut pas en faire partout, sinon on risque de réchauffer et donc c’est une mauvaise solution.”- “Plan volets” -“L’objectif, ça doit rester d’avoir des bâtiments mieux isolés”, a lancé de son côté le patron de Renaissance, Gabriel Attal, mardi sur franceinfo. “Dans l’intervalle (…), il faut prendre toutes les mesures qui permettent d’adapter les choses en attendant.”Malgré les effets pervers pointés de la climatisation (consommation d’énergie, surplus de chaleur dans la rue), la gauche reconnait elle aussi aujourd’hui son caractère indispensable pour les personnes fragiles.Ainsi, Boris Vallaud, le chef de file des députés socialistes s’est dit “pour la climatisation pour les établissements qui accueillent des jeunes publics”, dans une déclaration à l’AFP.LFI a de son côté dévoilé mardi un plan “de réponse aux canicules” fixant pour objectif “l’installation de la climatisation dans l’ensemble des hôpitaux publics, Ehpad, et établissements scolaires”.La patronne des Ecologistes, Marine Tondelier, a elle ironisé sur X sur “le programme écologique de Marine Le Pen” qui se borne selon elle à “acheter des climatiseurs”.Mais elle a reconnu elle aussi que “les hôpitaux, les écoles et les Ehpad” doivent être “climatisés, pour le personnel comme pour le public”, après avoir été taclée par le député RN Jean-Philippe Tanguy, qui l’a invitée  à “bosser dans un hôpital à 35 degrés”.L’Ecologiste fait valoir que “contrairement (au RN), nous avons un peu bossé le sujet du réchauffement climatique”, et pointe “que la climatisation ne suffira pas”.”Il faut impérativement avancer sur la végétalisation des villes et l’isolation thermique des logements”, insiste-t-elle.Pour la député EELV Sandrine Rousseau, la climatisation dans certains bâtiments “semble inévitable. Mais avant cela, il y a quand même la rénovation thermique”, a-t-elle ajouté, évoquant la nécessité d’un “plan volet” et d'”un plan ventilateur”: “il y a énormément d’immeubles, de bâtiments publics qui n’ont pas de volets”, qui peuvent pourtant selon elle “isoler de la chaleur”.

Pour Yaël Braun-Pivet, “on ne peut exclure d’emblée toute hausse d’impôts”

La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), estime mercredi dans un entretien aux Echos qu'”on ne peut faire l’impasse sur les recettes et exclure d’emblée toute hausse d’impôts” pour le budget 2026.”Faire cet effort (pour trouver 40 milliards d’euros) uniquement par des économies sur les dépenses publiques n’est pas réaliste. Cela ne correspond pas à l’objectif d’équité qui doit être le nôtre. On ne peut pas faire l’impasse sur les recettes et exclure d’emblée toute hausse d’impôts”, fait valoir l’élue des Yvelines, selon qui “il faut privilégier les mesures qui ont le moins d’impact possible sur la croissance”.Mme Braun-Pivet se dit par ailleurs “favorable au principe d’une année blanche”, qui pourrait même, “en fonction de l’évolution de l’inflation (…) être envisagée au-delà de 2026″.”Le périmètre devra, selon moi, être assez large pour avoir un véritable impact en termes d’économies: désindexation de l’impôt sur le revenu, du barème de la CSG (contribution sociale généralisée, ndlr) sur les retraites, des pensions”, ajoute-t-elle, en plaidant pour “épargner les plus fragiles”.Elle estime en revanche que “les retraités les plus aisés pourraient davantage être mis à contribution”, en rappelant son souhait de supprimer “l’abattement fiscal de 10% sur les pensions, qui ne pénalise pas les petites retraites”, une mesure qui pourrait rapporter 4 milliards d’euros par an.”Une alternative pourrait être d’aligner le taux le plus élevé de CSG sur celui des salariés”, ajoute-t-elle.La présidente de la chambre basse considère en outre “nécessaire” de “se pencher sur la taxation des +super héritages+”, notant que “0,1% des héritiers reçoivent des montants supérieurs à 13 millions d’euros et ne paient en moyenne que 10% des droits de succession”.A propos de la TVA sociale, Mme Braun-Pivet se dit “partagée”, n’y voyant un intérêt que “si cette hausse de TVA se répercute à 100% sur une baisse du coût du travail”.Concernant les collectivités locales, elle estime “possible d’agir sur la masse salariale, qui a fortement augmenté ces dernières années”. Et elle en appelle, “au-delà de 2026” à des “réformes structurelles” pour réduire le “coût du mille-feuille territorial” en clarifiant les compétences.Elle souhaite à cette fin que “députés et sénateurs se réunissent sur le sujet pour aboutir à une initiative parlementaire consensuelle avant la fin de l’année à partir des propositions existantes”.

L’Assemblée rejette la censure de François Bayrou, l’esprit tourné vers l’automne budgétaire

Un trimestre de gagné pour François Bayrou? Le Premier ministre a survécu mardi à une huitième motion de censure, déposée par le PS et soutenue par la gauche, mais pas par le RN, qui donne rendez-vous aux débats budgétaires à l’automne.Sans surprise, en l’absence annoncée du soutien des députés lepénistes et de leurs alliés de l’UDR, la motion de censure n’a recueillie que 189 voix sur les 289 nécessaires pour faire tomber le gouvernement.Presque cinq mois après leur accord de non-censure pour laisser passer les budgets de l’Etat et de la Sécurité sociale, les socialistes ont accusé le Premier ministre de “trahison”, avec en toile de fond le conclave sur les retraites entre partenaires sociaux, qui s’est conclu sans accord.Les socialistes reprochent à François Bayrou d’avoir promis dans son courrier initial une discussion entre partenaires sociaux “sans totem ni tabou”, et d’avoir promis le “dernier mot au Parlement”, avant de fermer la porte à un rabaissement de l’âge légal de départ et à l’idée de déposer un texte comportant la mesure d’âge au Parlement.Le Premier ministre posait toutefois dans son courrier comme condition “un accord politique et (un) équilibre financier global maintenu”.”En rompant votre promesse, vous avez choisi le déshonneur”, a lancé depuis la tribune la socialiste Estelle Mercier, en défense de la motion de censure, associant ce fin connaisseur d’Henri IV à la figure d’un “Ravaillac”, qui a “poignardé la liste de (ses) engagements”.En réponse, François Bayrou a ironisé sur la motion de censure, prétexte selon lui pour que le Parti socialiste rappelle qu’il est “dans l’opposition”, et a invoqué “le devoir” de “l’intérêt général”, “plus fort que toutes les menaces” de censure.Sur le fond, il a défendu des avancées actées pendant le conclave qu’il compte présenter au Parlement à l’automne dans le budget de la Sécurité sociale, notamment pour un départ sans décote à 66 ans et demi, ou pour les retraites des femmes.Et le chef du gouvernement d’insister sur l’équilibre financier du système de retraites, sous peine de provoquer “une guerre des générations”: “Si personne n’alerte, si personne n’entend, nous allons nous perdre dans le surendettement”.”La réalité, c’est que notre système de retraite hypothèque notre avenir et celui de nos enfants”, a abondé Stéphane Vojetta, apparenté au groupe macroniste.- Censure inéluctable ? -La gauche s’en est aussi pris au RN. “Dans cet ensemble de manœuvres détestables, vous avez un appui certain, le Rassemblement national” qui “n’abrogera pas la réforme des retraites”, a tancé à la tribune Hadrien Clouet (LFI).”Pour tous les électeurs du RN, ce vote servira de révélateur. Le Pen-Bardella sont sur le terrain social, économique, fiscal, la prolongation de Macron-Bayrou”, a réagi le patron du PS, Olivier Faure.”Nous avons à cœur de revenir sur une réforme (…) inutile (…) inefficace” et “profondément injuste”, avait affirmé auparavant l’orateur RN Gaëtan Dussausaye.Mais il a surtout donné “rendez-vous au budget”, égrainant une série de “lignes rouges”: “nouveaux coups portés contre le pouvoir d’achat des Français” et “impôts ou taxes supplémentaires sur les entreprises tant que vous n’aurez pas réduit le train de vie de l’État”.Il a également cité la “TVA sociale”. En réponse à la piste “d’une année blanche”, qui consisterait à geler retraites, prestations sociales et barème de l’impôt sur le revenu, pour faire des économies, il a répondu que le RN ne soutiendrait qu'”une année blanche pour la contribution nette française au budget de l’Union européenne”.Enfin sur le volet énergétique, il a affirmé que son groupe ne voulait “pas de décret sur la programmation pluriannuelle de l’énergie pour évacuer en quelques secondes un élément essentiel de la souveraineté française”, alors que les débats sur ce sujet doivent reprendre à l’Assemblée en septembre.Et l’automne s’annonce houleux pour le Premier ministre, qui devra naviguer entre les menaces de censure pour trouver 40 milliards d’euros d’économies.Avec un soutien des plus minimalistes du bloc central, prompt à se déchirer.”De toute façon il tombera. La seule question c’est quand. Si c’est à l’automne c’est dans la nature des choses”, pense un cadre macroniste. “François Bayrou est menacé de censure depuis le lendemain de sa nomination”, philosophe Patrick Mignola, ministre des Relations avec le Parlement et proche du Premier ministre, promettant “un budget courageux”.

Les prêts aux partis politiques sous surveillance, le RN dans le collimateur

La commission chargée de vérifier les comptes des partis politiques a indiqué mardi faire “extrêmement attention” au sujet des prêts accordés par des particuliers, principalement au bénéfice du Rassemblement national, dont il est “essentiel qu’ils soient effectivement remboursés”.À côté des dons et du financement publics, les partis politiques peuvent aussi se financer par des “emprunts auprès de personnes physiques”. Une manne chiffrée à huit millions d’euros en 2021, plus de 10 millions en 2022 et encore quetre millions en 2023, selon le rapport annuel de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).Or le RN est “le parti qui a le plus utilisé” ce procédé, a relevé le président de la CNCCFP, Christian Charpy, lors d’une conférence de presse. Chiffres à l’appui: pour la seule campagne des élections européennes de 2024, le parti de Jordan Bardella s’est appuyé à plus de 87% sur quelque 225 particuliers, qui lui ont avancé près de 4,5 millions d’euros -dont une trentaine de prêts d’au moins 50.000 euros.Les années précédentes également, le parti à la flamme a “concentré une forte majorité” de ce type d’emprunts: 613 en 2021 sur un total de 764 tous partis confondus, puis 425 en 2022 (sur un total de 492) et encore 96 en 2023 (sur un total de 123).Au total, le RN affichait fin 2023 plus de 20 millions d’encours à rembourser “auprès de personnes physiques”, le plus ancien remontant à 2007. “Il est essentiel que ces prêts soient remboursés, sinon ce sont des dons déguisés”, ce qui serait “contraire au code électoral”, a souligné M. Charpy.Le président de la CNCCFP a également promis de “veiller à ce que les prêteurs ne soient pas toujours les mêmes”, autre sujet de friction avec le parti d’extrême droite, sous le coup d’une enquête judiciaire après un signalement de la commission.Une “opération de harcèlement” dénoncée en mai par M. Bardella, qui avait assuré que ces emprunts litigieux étaient “parfaitement légaux”.Le parti à la flamme met en outre régulièrement en avant le refus des banques françaises de leur prêter de l’argent, l’obligeant à recourir aux prêts de particuliers.Selon son trésorier, Kévin Pfeffer, la dette du RN s’élève actuellement à 13 millions d’euros, qu’il entend apurer d’ici fin 2027.

Les députés adoptent le projet de loi pour “refonder” Mayotte

Plus de six mois après le passage dévastateur de Chido, les députés ont largement adopté mardi le projet de loi du gouvernement pour “refonder” Mayotte, département le plus pauvre de France, confronté avant même le cyclone à d’immenses défis.”Avec cette loi, Mayotte pourra mieux affronter le fléau qui empêche son développement, comme l’habitat illégal, l’insécurité ou l’immigration irrégulière”, s’est félicité le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, après le vote.Cette loi “concrétise surtout des promesses, parfois anciennes et jusqu’ici non tenues”, a déclaré M. Valls, citant notamment la convergence sociale inscrite dans le marbre. Durant les débats, parfois houleux, de nombreux députés ont rappelé à l’ancien Premier ministre socialiste la promesse de son gouvernement, il y a dix ans, d’un alignement des droits sociaux avec l’Hexagone pour 2025.”Ce texte est solide (…) Il prévoit quatre milliards d’euros d’investissement sur six ans. C’est inédit et c’est puissant”, a également souligné le ministre après le vote.La chambre basse a voté le texte à 367 voix pour et 109 voix contre. Déjà adopté en mai par le Sénat, il doit désormais faire l’objet d’un compromis entre sénateurs et députés la semaine prochaine en commission mixte paritaire (CMP), avec une probable adoption définitive dans la foulée.En dépit d’avancées sociales, comme l’alignement du montant du SMIC avec celui de l’Hexagone en 2027, la gauche a préféré voter contre ou s’abstenir en raison du volet migratoire, en partie durci par le Rassemblement national lors d’un examen marqué par un fort absentéisme.Dans la foulée du vote, Marine Le Pen a réagi sur X: “Largement amendé par les députés du Rassemblement national”, le projet de loi est “une victoire pour les Mahorais qui attendaient des mesures fortes pour lutter contre l’immigration, rétablir la sécurité sur l’île et assurer l’égalité sociale”.Il prévoit une série de mesures de lutte contre l’immigration, et permet par exemple le placement en rétention de mineurs accompagnant un majeur faisant l’objet d’une mesure d’éloignement.Au sujet de l’habitat informel, une mesure permet la destruction des bidonvilles, avec la possibilité de déroger à l’obligation d’une offre de relogement ou d’hébergement d’urgence.”Pendant qu’on parle d’expulsion et de centres de rétention, l’eau ne coule toujours pas à Mayotte, les écoles ferment, les robinets sont à sec”, a fustigé le député Davy Rimane (groupe communiste et ultra-marin), dénonçant un “texte qui sert de laboratoire politique” aux idées d’extrême droite pour “en faire un modèle exportable” à d’autres territoires en France. Vendredi, au dernier jour de l’examen, le groupe de Marine Le Pen s’est parfois retrouvé majoritaire dans l’hémicycle, à tel point que Manuel Valls avait lui-même fustigé l’absence du “socle commun”, permettant à des mesures “scandaleuses” d’être adoptées.Comme cette ligne ajoutée à la feuille de route du gouvernement pour Mayotte (un rapport annexé au projet de loi, sans valeur contraignante toutefois) qui prévoit désormais un moratoire sur la scolarisation d’enfant de parent étranger en situation irrégulière.- “Changement de cap” -Après le vote, le ministre a formulé le vœu que la CMP permette de revenir sur ces “ajouts regrettables et inconstitutionnels”.A l’inverse, M. Valls espère que les députés et sénateurs réintroduiront une mesure (supprimée à l’Assemblée) qui facilite les expropriations afin de permettre la construction de certaines infrastructures essentielles. La mesure est particulièrement irritante pour les Mahorais et sa suppression a été saluée par la députée de Mayotte Estelle Youssouffa (groupe Liot) lors de son discours à la tribune.L’élue, mobilisée tout au long de l’examen, avec parfois des échanges très durs avec le ministre ou d’autres députés, a applaudi “un changement de cap capital” avec ce texte. Elle a souligné l’abrogation du visa territorialisé en 2030, qui empêche un détenteur d’un titre de séjour mahorais de venir dans l’Hexagone.”La solidarité nationale jouera enfin pleinement en 2030 et l’Hexagone, La Réunion, assumeront aussi les conséquences du fardeau migratoire”, selon elle.Le RN y était opposé, y voyant une “fausse bonne idée”, avec une mesure qui “fera appel d’air”.Mme Youssouffa a aussi applaudi les 4 milliards d’euros d’investissements mis sur la table par l’Etat, avant de lancer, lasse des fausses promesses des gouvernement successifs, un avertissement à M. Valls: “Si vous êtes encore là cet automne, vous me trouverez sur votre chemin lors du projet de loi de finances pour vérifier que pas un euro ne manque pour Mayotte”.

La gauche non-mélenchoniste prépare son chemin vers la présidentielle

La gauche non-mélenchoniste tente dans la douleur de se mettre en ordre de bataille autour d’une candidature commune pour la présidentielle de 2027 et de rattraper son retard sur le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon.Le patron du Parti socialiste Olivier Faure, le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, la cheffe des Ecologistes Marine Tondelier, les députés François Ruffin et Clémentine Autain, se retrouvent mercredi à Bagneux (Hauts-de-Seine) autour de l’ex-candidate du Nouveau Front populaire à Matignon, Lucie Castets, pour “discuter des conditions d’une candidature commune” à la prochaine présidentielle.Mme Castets avait lancé l’invitation à toute la gauche en avril pour élaborer collectivement “une procédure démocratique et transparente de désignation d’un candidat commun”, suggérant parmi d’autres options l’organisation d’une “primaire des gauches la plus large qu’on ait jamais proposée”.C’est “un grand moment de rassemblement, où l’on passe de la parole aux actes”, a expliqué mercredi l’ancienne candidate du NFP dans un entretien au quotidien Libération, en espérant en sortir “avec le calendrier le plus précis possible sur la méthode de désignation commune” et “une méthode de travail pour les aspects programmatiques”.Les discussions, dont une partie se fera avec des représentants de la société civile, doivent se dérouler à huis clos.Cette réunion intervient juste après le congrès du PS, qui a acté la victoire d’Olivier Faure et de sa ligne unitaire allant “de Raphaël Glucksmann à François Ruffin”, face à son opposant Nicolas Mayer-Rossignol qui plaidait pour “une affirmation socialiste” pour 2027.  Avec cette rencontre, “on va formaliser aux yeux du grand public qu’on veut avancer ensemble”, explique l’eurodéputé PS Pierre Jouvet, proche d’Olivier Faure.  Mais sans surprise, l’invitation a été déclinée par le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, déjà lancé dans sa quatrième campagne pour la présidentielle, après avoir effleuré le second tour en 2022.L’Insoumis, qui peut compter sur un programme bien rodé et des intentions de vote autour de 12-13%, malgré les polémiques récurrentes, est opposé aux primaires, qui selon lui “donnent la primeur à ceux qui clivent le moins et font exploser ceux qui y participent”.- “Double jeu” -Il pense surtout qu’il peut, comme en 2022, rafler le vote utile de gauche: “On a frôlé la qualification à deux reprises. Les sondages nous mettent dans une position de force”, remarque le député LFI Paul Vannier.Ce refus arrange bien les socialistes et les Ecologistes, qui ont à plusieurs reprises indiqué qu’ils ne s’aligneraient pas derrière Jean-Luc Mélenchon, jugé trop clivant pour gagner au second tour même face à l’extrême droite.Il n’est pas le seul à sécher la réunion: le patron des communistes, Fabien Roussel, a prévenu qu’il ne participerait à une telle réunion que lorsque “la gauche s’engagera d’abord à s’unir aux élections municipales”. Et le même de déplorer le “double jeu” de certains partenaires qui “font le choix de s’allier avec LFI pour se présenter contre des maires sortants de gauche”, ciblant les Ecologistes sans les nommer.”Fabien (Roussel) a très envie de se lancer dans la présidentielle, c’est une histoire de fierté communiste, mais les communistes finiront pas nous rejoindre”, veut croire Marine Tondelier.Autre absent remarqué, le leader de Place publique, Raphaël Glucksmann, qui a déjà lancé son “projet pour la France” et argue que ses principes l’empêchent de se rendre à une invitation également faite à LFI.”Lui et Jean-Luc Mélenchon ont des discours antifascistes très rhétoriques. Mais l’antifascisme, ce n’est pas que de la rhétorique, c’est aussi des actes”, tance Marine Tondelier.Raphaël Glucksmann, autour de 14-15% dans les intentions de vote, considère que la dynamique sondagière créera le vote utile autour de lui, sans passer par la “synthèse molle” d’une primaire.Les socialistes, partenaires privilégiés de Place publique, pensent pourtant pouvoir faire revenir l’eurodéputé à de meilleurs sentiments. Regrettant ces absences, Lucie Castets assure que la porte est “toujours ouverte”, persuadée que “les partis ont vraiment conscience que séparés, c’est l’échec assuré”.   “Je préfère qu’il n’y ait que des acteurs de bonne volonté autour de la table, plutôt que des gens qui viennent pour bousiller la réunion” et “jouer sur deux tableaux”, rétorque pour sa part le député François Ruffin, déjà candidat à la primaire, comme Clémentine Autain, et persuadé de la gagner.

Porté par les victimes, le délit “d’homicide routier” entériné au Parlement

“La loi ne détournera plus les yeux”: le délit “d’homicide routier” va pouvoir être mis en place après un ultime vote favorable du Sénat mardi, au grand soulagement des victimes qui en ont fait leur combat depuis plusieurs années.Le processus parlementaire est achevé. Après un vote des sénateurs à main levée mardi, la réforme portée par le député Les Républicains Eric Pauget attend désormais sa promulgation par le président de la République, préalable à son entrée en vigueur.Le débat sur le délit d’homicide et blessures routiers a été relancé après l’accident provoqué par Pierre Palmade en février 2023. Le comédien avait blessé grièvement trois personnes lors d’une violente collision en conduisant sous l’emprise de stupéfiants et a été condamné à cinq ans d’emprisonnement dont deux ferme en novembre 2024 pour blessures involontaires.Depuis trois ans, c’est aussi le combat du chef étoilé Yannick Alléno et son association Antoine Alléno, du nom de son fils mort en mai 2022 après avoir été percuté par un conducteur multipliant les infractions graves, qui a été condamné à 7 ans d’emprisonnement pour homicide involontaire.Or, l’utilisation de l’adjectif involontaire, terme juridique qui qualifie actuellement ces infractions, désempare les victimes et leurs familles, qui peinent souvent à l’accepter lorsqu’elles font face à des comportements délibérés comme la conduite sous l’emprise de stupéfiants ou sans permis.- “Changement sémantique” -“C’est l’aboutissement d’un travail acharné contre l’injustice”, s’est réjoui Yannick Alléno dans un communiqué où il salue l’adoption de ce texte qui va “mettre un terme à l’archaïsme de notre droit pénal”.”Rien ne réparera l’irréparable. Mais la loi, désormais, ne détournera plus les yeux”, s’est satisfait le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, appréciant une loi qui “affirme avec clarté que tuer sur la route, sous l’emprise de l’alcool, sous l’emprise de la drogue, en excès de vitesse ou dans le mépris délibéré des règles, ce n’est pas un simple accident, c’est un acte criminel”.Cette revendication était partagée jusqu’à la Ligue contre la violence routière, celle-ci arguant que ce “changement sémantique, souhaité par les victimes, intègre aussi des circonstances aggravantes plus nombreuses”.Avec ce délit, les responsables d’accidents mortels de la circulation accompagnés d’au moins une circonstance aggravante seront poursuivis pour homicide routier.Les circonstances aggravantes sont la violation d’une mesure de sécurité, l’état d’ivresse, la consommation de stupéfiants et/ou des substances psychoactives, ne pas être titulaire du permis, un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 km/h, le délit de fuite, se servir de son téléphone portable à la main ou avec des écouteurs, le refus d’obtempérer, le rodéo urbain.- Peines encourues inchangées -Lorsqu’un conducteur se rendra coupable d’une de ces circonstances, il sera passible de 7 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende, une peine élevée à 10 ans d’emprisonnement et 150.000 euros au-delà de deux circonstances aggravantes.Ce sont les mêmes peines que celles encourues actuellement avec l’homicide involontaire. Un point qui inquiète, alors que certains observateurs estiment que la moyenne des peines prononcées actuellement est de 2 ans d’emprisonnement.”Je redoute l’idée que les magistrats ne dépassent pas leur analyse de l’accident de la circulation comme demeurant un accident. Ils auraient pu le faire si on avait changé le quantum des peines”, souligne à l’AFP Me Vincent Julé-Parade, spécialisé dans la défense des victimes de la route.Plusieurs sénateurs ont émis les mêmes doutes mardi lors de l’examen final du texte, craignant un texte uniquement “symbolique” mais consentant néanmoins à adopter la proposition de loi sans modification pour éviter de prolonger le processus législatif.Le rapporteur Les Républicains Francis Szpiner a ainsi jugé le texte “imparfait”, estimant qu’il faudrait prolonger le travail pour, à terme, “que les chauffards comprennent que leur comportement est criminel”.En 2024, 3.190 personnes sont décédées sur les routes de France métropolitaine et 233.000 ont été blessées, dont près de 16.000 gravement. Selon l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), les deux tiers des accidents corporels présentent au moins un facteur aggravant et les trois quarts des responsables récidivent, presque aussi fréquemment et plus gravement qu’avant.

Le “syndrome Mattei”, un “traumatisme” pour les ministres de la Santé pendant les canicules

Août 2003, en plein pic de la canicule la plus meurtrière de France, le ministre de la Santé Jean-François Mattei apparaît au journal de 20H00 en polo dans sa maison de vacances du Var. Une image qui avait fait polémique, “traumatisante” pour les politiques qui lui ont succédé.Une légère brise fait bruisser les arbres dans le fond. Manches courtes et col ouvert, Jean-François Mattei l’affirme: “Je ne pense pas du tout qu’il y ait eu de sous-estimation (…) Cette canicule n’était pas prévisible”. “Nous avons développé un plan approprié (…) Le travail est fait, et croyez moi, il est bien fait”, conclut le ministre à la fin de son duplex sur TF1. Cette vague de chaleur, historique, causera au final 15.000 morts, se muant en tempête politique. “Pour les ministres de la Santé successifs, ça a été certainement une espèce de traumatisme”, affirme François Braun, en poste de 2022 à 2023. “J’ai cette image de Mattei en tête” depuis 2003, confie l’ancien ministre et médecin urgentiste.”Il y avait un tel décalage entre la situation qu’on vivait sur le terrain et les propos qui étaient particulièrement rassurants”, avance celui qui exerçait alors à l’hôpital de Verdun (Grand Est). “On avait des malades partout, et entendre le ministre dire ça, on ne comprenait pas.”Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentistes de France qui avait dénoncé à l’époque la gestion de l’épisode, se rappelle lui aussi de la situation “catastrophique” dans les hôpitaux, de “l’insouciance” et de l’attitude “désinvolte” du ministre. “Vous vous dites, le mec ne comprend pas que là, tout le monde est en train de crever.”- “Un cas d’école” -“C’est devenu un cas d’école de non-communication de crise”, lance l’urgentiste.Début août 2003, les records de chaleur tombent. A Toulouse, Bordeaux, Limoges ou Montauban, le mercure dépasse les 40°C. C’est l’été le plus chaud depuis la mise en place d’un réseau d’observation en France. Cette chaleur sans précédent met en évidence des dysfonctionnements dans les services de santé. Critiqué pour n’avoir pas pris la mesure de la crise, Jean-François Mattei est remplacé en mars 2004 par Philippe Douste-Blazy.”A minima, il aurait dû aller à l’hôpital ou dans une clinique à côté de son lieu de vacances”, critique une ancienne conseillère gouvernementale. “Il arrive dans les deux derniers jours du pic de canicule. Donc, on a l’impression d’un retard à l’allumage.””Depuis le syndrome Mattei, tous les ministres prennent le sujet en amont, quitte à en faire des caisses. La veille, ils sont déjà sur le terrain”, explique cette même ex locataire de l’avenue Duquesne. Les déplacements sont désormais prévus à l’avance, à proximité des lieux de vacances des ministres, afin de pouvoir les déclencher en 24 heures en cas de canicule.”Il y a toujours cette idée de faire attention, de ne pas être pris au dépourvu”, abonde auprès de l’AFP la communicante Emilie Zapalski. Le Premier ministre François Bayrou a d’ailleurs reporté un déplacement à Chartres prévu mardi pour pouvoir se focaliser sur ce sujet de la canicule. Quant à l’actuelle ministre de la Santé Catherine Vautrin, en visite à Nantes, elle n’a pas hésité lundi à marteler les conseils essentiels, égrenant un numéro vert et poussant le sens du détail jusqu’à s’afficher avec un verre d’eau à la main avalé devant les caméras.”On sent qu’il y a cette idée de bien être présent sur ce sujet, pour qu’on ne puisse pas le leur reprocher”, ajoute Mme Zapalski.”C’est assez contradictoire, c’est-à-dire que c’est bien de faire un grand raout en termes de communication, ce serait mieux qu’on ait les moyens de prendre en charge des gens au niveau des urgences”, dénonce la communicante, tout en déplorant les baisses de budget demandées aux hôpitaux.75.000 lits d’hospitalisation ont fermé entre 2003 et 2021, selon un rapport annuel de la Drees.”On apprend bien à traiter en termes de communication, mais hors crise, on n’apprend pas à traiter le problème de fond”, regrette Emilie Zapalski.