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Bruno Le Maire, de grand argentier aux Armées

Après sept années passées à Bercy, Bruno Le Maire fait son retour dimanche au gouvernement, aux Armées, portefeuille régalien où il devra piloter le réarmement français face au regain de tensions géopolitiques.À 56 ans, ce normalien et énarque hérite d’un portefeuille stratégique dans un contexte marqué par la montée des tensions géopolitiques depuis l’invasion russe de l’Ukraine.Sous réserve de l’adoption du projet de budget 2026, Bruno Le Maire devra s’atteler à l’actualisation de la Loi de programmation militaire (LPM) pour accélérer le réarmement du pays face à la détérioration de la sécurité en Europe sous la menace russe.Le président Emmanuel Macron avait annoncé en juillet vouloir renforcer l’effort budgétaire pour la défense déjà engagé, en ajoutant des dépenses de 3,5 milliards d’euros en 2026 puis à nouveau 3 milliards de plus en 2027.Avec son homologue allemand Boris Pistorius, ce germanophone est également chargé d’ici la fin de l’année de trouver un chemin pour tenter d’engager la prochaine étape du projet Scaf de futur avion de combat européen, actuellement bloqué par les intérêts divergents des industriels des deux pays.- Record de longévité à Bercy -Son arrivée aux Armées est une surprise: l’ex-ministre qui enseignait depuis un an dans une université suisse, était devenu depuis quelques mois conseiller stratégique du géant technologique néerlandais ASML, et se disait en retrait de la vie politique.Mais Bruno Le Maire reste dans la continuité de son parcours de poids lourd du gouvernement.Pendant sept ans – un record de longévité à la tête de ce ministère – il avait piloté le “paquebot” Bercy et l’économie française, déployant la politique de l’offre d’Emmanuel Macron et son cortège de baisses d’impôts. Défendant les réformes contestées des retraites et de l’assurance-chômage, il fait du plein-emploi et de la réindustrialisation de la France des priorités, conditions nécessaires selon lui d’une croissance durable et d’un pays attractif.   Partisan d’un Etat moins dispendieux, il ouvre toutefois grand les cordons de la bourse face au Covid, à l’inflation et à la flambée de l’énergie, avant d’amorcer un virage vers l’orthodoxie budgétaire, essayant tant bien que mal de sortir progressivement du “quoi qu’il en coûte”.- Déficit excessif -Après la reprise post-Covid de l’économie, il cherche à convaincre du nécessaire redressement des comptes publics si fragilisés que la France a été épinglée par la Commission européenne pour déficit excessif et a vu sa note abaissée par l’agence S&P.La croissance ralentit, le déficit public dérape (5,5% en 2023) et la dette explose. Des dizaines de milliards d’euros d’économies sont jugés nécessaires.  Il y a eu “des erreurs bien entendu, des choses qui n’ont pas été parfaites, mais j’ai toujours fait le mieux possible”, avait reconnu Bruno Le Maire, tirant le bilan de son septennat, auquel mettra fin la défaite du camp présidentiel aux législatives anticipées à l’été 2024.- Soutien de la première heure -Bercy lui avait permis de renaître politiquement après son échec cuisant à la primaire de la droite fin 2016. Un choc dans le parcours jusque-là sans accroc de ce brillant élève des beaux quartiers, normalien et énarque, qui a “grandi dans les couloirs des cabinets” ministériels, comme il le dit lui-même.C’est en 2007, sur les conseils d’un de ses mentors, Dominique de Villepin, dont il a été directeur de cabinet à Matignon, que ce catholique pratiquant s’était fait élire député pour la première fois, en Normandie.Le style du nouveau locataire de l’Hôtel de Brienne, amateur d’envolées lyriques et de citations littéraires, tranche avec la réserve de son prédécesseur, Sébastien Lecornu. Les deux hommes se connaissent bien: ce dernier a notamment été son conseiller en 2008 au ministère des Affaires européennes, puis lors de la primaire perdue de 2016.Bruno Le Maire, mélomane germanophile, qui se dit autant écrivain que politique, est père de quatre garçons et marié à une artiste peintre.Dans son entourage, on loue “un homme de conviction et d’intuition”, “grand bosseur”. Agrégé de lettres modernes, Bruno Le Maire, qui se considère autant écrivain qu’homme politique, a publié au moins six livres depuis 2017.mpa-max-mra-emb/abb/vk/hj

Aurore Bergé porte-parole, une macroniste influente jugée clivante

Personnalité aussi médiatique que clivante, Aurore Bergé prend du galon au sein du gouvernement en étant nommée dimanche porte-parole: une reconnaissance pour cette macroniste influente issue de la droite et reconnue pour ses talents de communicante.Depuis son élection à l’Assemblée nationale en 2017, cette ancienne communicante professionnelle âgée de 38 ans, à l’aise sur les plateaux de télévision pour porter l’estocade contre les Insoumis ou le Rassemblement national, s’était imposée en première ligne de la macronie. Il lui faudra désormais jouer de tous ses talents rhétoriques pour porter la parole unique d’un gouvernement que sa prédecesseure, Sophie Primas, qualifiait parfois de “polyphonique”… pour ne pas dire cacophonique.Pour construire son ascension, Mme Bergé a su forcer quelques portes, jusqu’à devenir présidente de son groupe politique au Palais Bourbon, de juin 2022 à juillet 2023, puis enfin ministre, chargée de l’Egalité entre les hommes et les femmes dans le gouvernement Attal (janvier-septembre 2024). Elle connut ensuite une courte éclipse lorsque Michel Barnier devint Premier ministre (septembre-décembre 2024), en redevenant simple députée des Yvelines dans le groupe dirigé par Gabriel Attal, avec qui les relations se sont considérablement rafraîchies. Elle a été renommée ministre en charge de l’Egalité entre les femmes et les hommes dans le gouvernement de François Bayrou en décembre dernier, et garde ce portefeuille dans celui de Sébastien Lecornu en plus du porte-parolat. Lors de la précédente législature, cette fille de comédiens – son père, récemment décédé, était la voix française de Sylvester Stallone -, a régulièrement assumé des positions tranchantes, voire des coups médiatiques, au risque de crisper ses alliés de la majorité d’alors, des élus Horizons et Modem parfois pris de court.- “Poigne” -Décrite par ses pairs comme “très, très clivante”, “autoritaire”, “dans l’auto-promotion”, ou ne “servant que ses potes”, cette “professionnelle de la politique” était également louée par d’autres élus qui lui reconnaissaient “du talent” et une “poigne”, une capacité “un peu bulldozer” à “tenir le groupe”. Elle “sait décider vite et bien, et est très courageuse”, soulignait une élue.En octobre 2019, elle avait créé la polémique dans son camp, se disant prête à voter une proposition de loi d’Eric Ciotti (alors LR, désormais rallié au RN) sur l’interdiction du voile pour les accompagnantes scolaires.Avant de se rallier à Emmanuel Macron en 2017, ses affinités successives – pour Nicolas Sarkozy, François Fillon et Alain Juppé – lui avaient déjà valu une réputation d’ambitieuse, voire d’opportuniste. La macroniste, formée à Sciences Po Paris et engagée très jeune à droite, défend par ailleurs une vision stricte de la laïcité.En tant que ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, elle a crispé en évoquant l’idée de couper les subventions aux associations féministes ayant tenu des “propos ambigus” sur l’attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023. Avant de reconnaître qu’aucune association financée par l’Etat ne pouvait prêter le flanc à un tel reproche. L’épisode a laissé des traces parmi les militantes féministes. Mais Aurore Bergé a toujours affirmé suivre la même ligne directrice, “libérale” et “européenne”, mais aussi “féministe” et “progressiste”. En 2013, elle avait ainsi pris position pour le mariage pour tous, à rebours de la majorité de son camp. Et son engagement pour inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution a été apprécié parmi les défenseurs des droits des femmes.  Soupçonnée d’avoir menti sous serment sur ses liens avec une lobbyiste des crèches privées, ce que Mme Bergé dément, elle a été entendue en juin dans l’enquête qui la vise pour “faux témoignage”, selon des sources proches du dossier.

Mathieu Lefèvre, un spécialiste du budget “aile droite” pour parlementer avec la gauche

Cadre macroniste sur les sujets budgétaires, proche de Gérald Darmanin, Mathieu Lefèvre, a été nommé dimanche ministre en charge des Relations avec le Parlement, avec la délicate tâche de trouver des terrains d’entente à gauche.A 38 ans, le natif de Créteil, député du Val-de-Marne depuis 2022, entre au gouvernement après avoir été plusieurs fois pressenti. Il remplace à ce poste de ministre délégué placé auprès du Premier ministre Patrick Mignola (MoDem), et devra aider à nouer des compromis budgétaires avec la gauche.Tout sauf une sinécure, d’autant que ce chantre de la politique de l’offre et de la fin des 35 heures, incarne davantage l’aile droite de la macronie.Pragmatique, il a toutefois pointé récemment un besoin de “justice fiscale” : “on ne peut pas commencer un débat budgétaire où l’on demande beaucoup d’efforts aux Français si ceux qui doivent payer l’impôt ne le font pas”.”Nos partenaires de jeu, de travail, ce sont le Parti socialiste et Les Républicains”, estimait également M. Lefèvre sur franceinfo.”Pour trouver un accord avec le PS ? C’est quand même la quintessence de l’aile droite macroniste…”, commentait peu avant sa nomination un député Les Républicains, circonspect. “C’est le pire +MRP+ possible, très clivant”, a réagi un député PS dimanche dans la foulée de sa nomination. Philippe Brun, député socialiste est nettement plus mesuré : “il est compétent sur le fond des questions budgétaires”. “Je trouve qu’il y a eu un changement chez lui après la dissolution en 2024. Il était toujours très dur contre la gauche, depuis il a plus un discours de facilitateur et d’homme de dialogue, c’est intéressant””On n’a pas tout bien fait, on doit faire amende honorable, et on doit entrer en discussion en disant que les autres aussi peuvent avoir raison”, a récemment esquissé le futur ministre.- “Dépenses publiques” -Membre de la commission des Finances depuis son élection, Mathieu Lefèvre y avait déjà fait ses classes de 2011 à 2017, en tant qu’assistant parlementaire de Gilles Carrez (LR), rapporteur général du budget, puis président de la commission des Finances.C’est Gérald Darmanin, alors chargé des Comptes publics, qui le fait venir à Bercy puis au ministère de l’Intérieur. Il fait toujours partie de ceux qui œuvrent en coulisses, sur le fond et la forme, à tracer un chemin pour le ministre de la Justice qui se verrait bien un jour à l’Elysée. Réélu après la dissolution, ce diplômé de la Sorbonne en sciences politiques et de l’Ecole supérieure de commerce de Paris, a également officié en tant que co-rapporteur de la commission d’enquête sur les raisons du dérapage du déficit public, lancée par l’Insoumis Eric Coquerel.Avec un tropisme régalien, intervenant régulièrement sur les sujet de sécurité ou d’immigration, il se frotte très souvent dans l’hémicycle aux Insoumis et au Rassemblement national.Président du groupe d’amitié France-Israël à l’Assemblée, il a aussi connu plusieurs passes d’armes avec les Insoumis sur le 7-octobre et la guerre à Gaza, ces derniers lui reprochant un positionnement trop pro-israélien. Lui rétorque qu’il critique le gouvernement Netanyahu et plaide pour la solution à deux Etats.Sa nomination intervient dans un contexte particulier: pour la première fois depuis 2021, le budget ne devrait faire l’objet d’aucun recours au 49.3 en bout de course pour trier les amendements des parlementaires. Ce qui promet une avalanche de tractations avec les oppositions en-dehors et à l’intérieur du Parlement pour le néo-ministre.

Annie Genevard, “habile” arbitre à l’Agriculture comme chez les Républicains

Annie Genevard, reconduite dimanche au ministère de l’Agriculture, a fait taire ceux qui la pensaient novice sur le sujet en déployant la même “habileté politique” sur les dossiers agricoles que pour gérer les conflits au sein des Républicains.Si sa capacité d’écoute est saluée par ses interlocuteurs privilégiés – FNSEA, Coopération agricole, agroindustriels et même les contestataires de la Coordination rurale -, les défenseurs de l’environnement et la Confédération paysanne déplorent eux de ne pas être entendus.Cette ancienne professeure de français de 69 ans briguait plutôt l’Education nationale avant d’être nommée rue de Varenne en septembre 2024 par Michel Barnier, suscitant alors des doutes après un été de récoltes et d’épizooties dramatiques.Mais lors de ses déplacements, l’ancienne députée du Doubs et maire de Morteau répète son attachement à “ses” agriculteurs et aux montbéliardes de sa Franche-Comté natale.Son suppléant à l’Assemblée Éric Liégeon, un éleveur, a été secrétaire départemental de la FNSEA, syndicat dominant et partenaire privilégié du gouvernement.En décembre, elle est reconduite par François Bayrou, face à des agriculteurs qui demandent l’aboutissement des promesses non tenues après les manifestations agricoles de l’hiver précédent.Le contexte est tendu, avec des élections syndicales en janvier qui font perdre la majorité absolue à l’alliance historique FNSEA-JA mais pas sa domination sur les institutions agricoles.- “Allégeance” à la FNSEA -Véronique Le Floc’h, présidente de la radicale Coordination rurale, qui perce lors du scrutin (30% des votes), affirme que le syndicat n’a depuis “jamais aussi bien travaillé avec un ministre”. “Mais elle écoute encore trop la FNSEA.”Le porte-parole de la Confédération paysanne (20% des voix) Stéphane Galais dénonce lui une une “allégeance à la FNSEA qui n’a jamais été aussi flagrante”, avec des “reculs scandaleux” sur le soutien à l’agriculture biologique et sur les pesticides. S’il lui reconnaît une certaine “habileté” lors de grandes réunions, c’est surtout car les “forces d’opposition” y sont en “minorité permanente”.En février, Annie Genevard fait adopter au pas de charge la loi d’orientation agricole. Quelques jours plus tard au Salon de l’agriculture, elle expose sa vision – “Produire plus” pour garantir la “souveraineté alimentaire”.Sa défense du stockage de l’eau, de l’agrandissement des élevages et de la réintroduction de pesticides pour “les filières sans solution” est calquée sur la FNSEA.Avec son expérience d’ancienne vice-présidente de l’Assemblée, elle réécrit avec le sénateur (LR et ex-FNSEA) Laurent Duplomb sa proposition de loi visant à “lever les contraintes” imposées aux agriculteurs pour la rendre “acceptable”.Mais le processus accéléré, sans débat en séance, pour cette loi qui doit réintroduire sous conditions un pesticide néonicotinoïde interdit, creuse les fractures avec les ONG, la gauche, et révèle des divisions avec le ministère de la Transition écologique.- “Sacrée habileté politique” -Une pétition citoyenne rassemble plus de 2 millions de signatures contre le texte, un record. Annie Genevard se heurte en août à la censure partielle du Conseil constitutionnel, qui retoque la mesure controversée.Deuxième écueil: le début du processus de ratification de l’accord de libre-échange de l’Union européenne avec des pays du Mercosur, pourfendu par l’ensemble du monde agricole français, qu’elle avait essayé de bloquer.Pas de quoi réclamer son départ. FNSEA et JA voulaient “de la stabilité”.”Elle a une sacrée habileté politique, on l’a vu dans l’agriculture comme on l’avait vu chez les Républicains quand elle règle les conflits de mâles alpha”, confie un responsable agricole.Après avoir repris le siège des Républicains à Eric Ciotti, rallié à l’extrême droite et enfermé dans son bureau en 2024, elle a notamment joué les arbitres en tant que secrétaire générale entre Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau. En dix ans, elle a gravi presque tous les échelons chez les Républicains, où elle défend une ligne conservatrice sur la sécurité, l’immigration, la laïcité ou encore l’avortement et la PMA pour toutes.

Eric Woerth, un partisan de la décentralisation à la tête de l’Aménagement du terrioire

Désigné dimanche ministre de l’Aménagement du territoire, l’ex-LR Eric Woerth, 69 ans, est un partisan de la décentralisation qu’il a tenté de relancer dans un rapport présenté l’an dernier au président Emmanuel Macron. Dix jours après été relaxé dans l’affaire financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, dont il a été le trésorier, Eric Woerth, 69 ans, entre au sein du gouvernement de Sébastien Lecornu, un ex-LR comme lui.En 2022, Eric Woerth avait abandonné son parti de toujours pour rejoindre la macronie et a présenté un an plus tard un rapport avec 51 propositions pour “rétablir la confiance” entre Etat et collectivités. Outre l’Aménagement du territoire, il aura dans son porte-feuille la Décentralisation et le Logement, succédant à l’ancien socialiste François Rebsamen qui avait annoncé dès samedi son départ du gouvernement. Parlementaire respecté, réputé pour son calme en toutes circonstances, il est devenu l’archétype du dirigeant inquiété par la justice et finalement mis hors de cause au terme d’un long calvaire médiatique. Réélu député de l’Oise en 2017 et 2022, Eric Woerth a d’abord été inquiété dans l’affaire de la vente contestée de l’hippodrome de Compiègne révélée par le Canard enchaîné en 2010 et soldée par un non-lieu de la Commission d’instruction de la Cour de justice de la République. Un “torrent de boue” de quatre ans, avait-il commenté à l’époque.Il fut ensuite doublement relaxé dans l’affaire Bettencourt en 2015 après “cinq ans d’accusations malveillantes et mensongères, parfois instrumentalisées par des femmes et des hommes politiques sans scrupules”, selon ses termes.Plus récemment, l’ancien maire de Chantilly (1995-2017) a également été relaxé dans l’affaire des financement libyens, contrairement à l’ex-président Nicolas Sarkozy qui a été condamné à cinq ans d’emprisonnement avec incarcération prochaine pour avoir “laissé ses plus proches” démarcher la Libye de Mouammar Kadhafi pour financer sa campagne victorieuse de 2007. – Un pilier de la chiraquie -En 2017, il a été élu président de la prestigieuse commission des Finances de l’Assemblée nationale, un poste dévolu à un responsable de l’opposition, dont il faisait partie en temps que député LR. Expert en finances, diplômé de HEC et de Sciences-Po, ancien de chez Arthur Andersen France, Pechiney et Bossard, M. Woerth fut en politique d’abord un pilier de la Chiraquie: trésorier de la campagne de 1995 puis conseiller parlementaire d’Alain Juppé à Matignon.Mandataire financier de l’UMP naissante en 2002, puis trésorier du parti sous le magistère de Nicolas Sarkozy, il devient secrétaire d’Etat à la Réforme de l’Etat dans le gouvernement Raffarin de 2004 à 2005.Il prend une part active à la conquête du pouvoir de M. Sarkozy en gérant notamment le “premier cercle” des importants donateurs et devient ministre du Budget (2007-2010), puis du Travail et de la Fonction publique (2010) avant d’être contraint de quitter le gouvernement après les révélations autour de l’affaire Bettencourt.

Roland Lescure, macroniste historique à la tête de Bercy

Compagnon de route d’Emmanuel Macron, social-libéral passé à la vie d’élu sur le tard, l’ancien ministre de l’Industrie Roland Lescure retourne à Bercy avec cette fois le portefeuille beaucoup plus large de ministre de l’Economie et des Finances, dans un contexte hautement incertain à l’international comme en France.A 58 ans, ce fils d’un journaliste à L’Humanité et d’une syndicaliste CGT de la RATP, assume volontiers l’étiquette de “libéral” sur le plan économique, opposé comme tout bon macroniste à “augmenter le coût du travail”. Mais paradoxe: il est classé à l’aile gauche de Renaissance.”C’est que le mouvement a bougé à droite”, rétorque pourtant à l’envi ce fan du PSG, ex-ministre de l’Industrie (juillet 2022-septembre 2024), qui remplace Eric Lombard.Illustration fin 2023: il s’oppose à la loi immigration dans sa version très à droite adoptée au Parlement. Au point d’être catalogué comme “frondeur” d’un gouvernement qu’il ne quitte toutefois pas.D’autres opposants à la loi le lui reprochent. “Le mec s’est toujours arrangé pour avoir un poste”, pique un député. “Il ne se considérait pas du tout comme frondeur”, tempère un membre du groupe macroniste.Ses positions augurent toutefois de discussions musclées avec Les Républicains: “c’est un gros problème. Il porte la ligne inverse de Bruno Retailleau sur l’immigration”, soufflait-on en 2024 dans l’entourage du ministre de l’Intérieur, quand le nom de Roland Lescure circulait pour Matignon.Roland Lescure reprochait à Bruno Retailleau de “fai(re) des poutous à Marine Le Pen”.- Opposition au RN -Vice-président de l’Assemblée, repérable à sa grande taille, le Franco-Canadien n’avait pas été rappelé au gouvernement Barnier, qu’il jugeait lui-même trop à droite et dépendant du RN.L’ouverture d’usines “c’est une arme anti-colère, anti-Rassemblement National”, estime-t-il, volontiers offensif contre le parti lépéniste, lui qui qualifiait Marine Le Pen de “Machiavel aux petits pieds” lorsqu’elle faisait pression sur le gouvernement Barnier.”C’est la quintessence de la Macronie que l’on déteste. Il se croit le plus beau, le plus fort, le plus intelligent”, grince un haut gradé lepéniste.Une source syndicale lui reconnaît une “grande écoute avec les organisations syndicales”. L’ancien député PCF Sébastien Jumel décrivait en 2022 un homme “pas tordu”, “peut-être” grâce à des “parents communistes”, estimant que “pour le reste, il a mal tourné”.Père de trois enfants, le petit-fils de Pierre Lescure, fondateur des Editions de Minuit, a été élevé dans un HLM de Montreuil (Seine-Saint-Denis).Demi-frère de l’ex-patron de Canal+ Pierre Lescure, il est diplômé de Polytechnique, l’École nationale de statistique et de la London School of Economics. Il a travaillé à Bercy, la Commission européenne et l’Insee, avant une carrière dans la finance (Natixis, Groupama).Il vit une expérience éphémère au PS en 2006, rebuté par le fonctionnement interne. En 2009, il est numéro 2 de la Caisse de dépôt et placement du Québec, avec un salaire de l’ordre du million d’euros.- “Guerre commerciale” -En 2012, lors d’une réunion d’investisseurs étrangers, il rencontre un certain Emmanuel Macron. Quatre ans après il plonge en politique, inquiet par le Brexit et l’élection de Donald Trump.Séduit par le positionnement pro-européen d’Emmanuel Macron, il se fait élire en 2017 député des Français d’Amérique du Nord, et préside la commission des Affaires économiques. Il connaît aussi des échecs, manquant de prendre la tête du groupe LREM, ou la présidence de l’Assemblée en 2022, pourtant soutenu par Emmanuel Macron.De 10 ans au Canada il retient quelques anglicismes et des idées qu’il aimerait soulever en France (légalisation du cannabis pour mieux le contrôler, rouvrir le débat sur les statistiques ethniques pour lutter contre les discriminations).Plus récemment, il considère l’accord UE-USA sur les tarifs douaniers comme “un aveu de faiblesse historique (…) Nous avons perdu la guerre commerciale avant même d’oser la mener”.Il appelle alors à “protéger notre marché européen via une politique industrielle commune”, et à un “accord anti-coercition qui permet de mettre des tarifs sur les GAFAM”, lui qui a quitté en janvier le réseau social X, “outil de propagande”.Il est également opposé à la taxe Zucman mais appelle à des concessions au PS à l’orée de débats budgétaires à haut risque.”Pour que les socialistes, et cela sera indispensable, aient des victoires, il va falloir qu’on ait des défaites”, philosophait-il en septembre sur franceinfo.

Le gouvernement se fait attendre, LR maintient la pression

Le Premier ministre Sébastien Lecornu est entré dans la dernière ligne droite pour former son gouvernement, mais il se heurte encore aux réticences des Républicains de Bruno Retailleau, qui ont reporté à dimanche une réunion cruciale sur leur participation au futur exécutif.Le chef du gouvernement parviendra-t-il à constituer son équipe gouvernementale avant dimanche soir ? Le temps presse pour M. Lecornu, qui est attendu mardi après-midi à l’Assemblée nationale pour sa déclaration de politique générale. Il devra déjà soumettre sa liste à Emmanuel Macron avant toute annonce. Et le chef de l’Etat pourrait bien s’impatienter: selon un interlocuteur régulier du président, celui-ci a demandé à son Premier ministre de former son gouvernement avant la fin du week-end, avec une équipe resserrée autour de 25 ministres. La présentation du futur exécutif pourrait toutefois n’intervenir que lundi matin.Or à ce stade, rien n’assure que la “short-list” pourra contenir le nom de Bruno Retailleau et celui d’autres figures LR.Le parti gaulliste maintient en effet le suspense et accroît la pression sur le Premier ministre. “Les échanges avec Matignon se sont poursuivis (samedi) mais ont encore besoin d’être prolongés” avant d’acter toute participation au gouvernement, a écrit samedi soir le patron de LR et ministre de l’Intérieur sortant, dans un message à ses troupes consulté par l’AFP. Conséquence: une réunion cruciale des parlementaires de droite avec leur chef, initialement prévue samedi soir, a été reportée à “dimanche dans la journée”.Coup de bluff ou réelle menace de claquer la porte du gouvernement ? Les Républicains s’agacent ces dernières heures car ils n’ont pas obtenu du locataire de Matignon la “feuille de route” tant exigée… Une “lettre de cadrage” écrite, érigée comme préalable à tout engagement de la droite, selon les dirigeants du parti.Depuis jeudi, Bruno Retailleau fustige le manque d’engagements de Sébastien Lecornu sur l’immigration: “il n’y a rien de rien”, avait-il lancé lors d’une visio interne, manifestement irrité de ne pas voir satisfaite sa demande de confier à Beauvau “toute la politique de visas”, de revoir l’aide médicale d’État (AME) ou de rétablir le délit de séjour irrégulier.- Le MoDem veut aussi des gages -Le Premier ministre a adressé samedi un premier geste en direction de LR sur le volet budgétaire, en confirmant, via son entourage, la baisse dès 2026 d’un impôt de production critique par les entreprises, la CVAE, pour 1,1 milliard d’euros.Cela suffira-t-il à la droite ? Réduction de la dépense publique, absence d’augmentation d’impôt, revalorisation du travail, contrôle de l’immigration… Les exigences de LR sont nombreuses.Le renoncement de Sébastien Lecornu à l’utilisation du 49.3 “a complètement changé la donne”, pointe également une source parlementaire LR. “On se retrouve totalement dépossédés, au profit des deux pôles de radicalité, le RN et LFI”, ajoute cette source, qui craint une “foire à la démagogie” au Parlement.De l’autre côté, la pression du Parti socialiste ne faiblit pas. “Nous nous dirigeons tout droit vers la censure” si “la donne ne change pas”, a martelé le premier secrétaire Olivier Faure, se disant prêt à “assumer” une éventuelle dissolution si le gouvernement tombait.Pour Sébastien Lecornu, l’étau se resserre d’autant plus que ses alliés du MoDem ont eux aussi haussé le ton samedi soir, les députés du mouvement de François Bayrou demandant “une clarification” au Premier ministre avant de décliner les “modalités” de leur soutien, dans un courrier.LR a également des exigences concernant le casting. Selon plusieurs sources au parti, Bruno Retailleau a demandé qu’un tiers des futurs ministres soient issus de sa famille politique.La future équipe penchera-t-elle plus à droite que la précédente ? Premier signal: le ministre sortant de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, François Rebsamen, a annoncé qu’il ne rempilerait pas, arguant notamment de ses “convictions d’homme de gauche”.Quant à Eric Lombard, ministre démissionnaire de l’Economie perçu comme l’un des hommes du dialogue avec la gauche, il s’est fendu d’un message sur X pour plaider en ce sens. Selon lui, il existe bien “des pistes de compromis possibles avec plusieurs forces de gauche” sur le budget, a-t-il insisté.

A La Réole, Glucksmann défend “le travail” et “l’amour de la France”

Raphaël Glucksmann a renforcé samedi une nouvelle fois sa stature présidentielle, en promettant de “remettre le travail au coeur du contrat social” et d'”assumer de parler de son amour pour la France”. Dans un discours devant plusieurs centaines de personnes, au premier jour des Rencontres de Place Publique à La Réole (Gironde), l’eurodéputé, qui défend une ligne pro-européenne et anti-LFI, a promis de “remettre le travail au coeur du contrat social”. Si l’obsession de la gauche n’est pas de comprendre pourquoi “les travailleurs de toutes les terres socialistes et communistes basculent en masse pour le Rassemblement national, et bien la gauche n’a aucune chance de revenir au pouvoir”, a asséné Raphaël Glucksmann, que certains sondages placent aux portes du second tour de la présidentielle.”Pouvoir vivre de son travail, c’est la première attente des Français”, a-t-il estimé, jugeant que le premier geste d’un gouvernement de gauche “sera d’organiser une grande conférence sociale pour obtenir des hausses générales des salaires”.Il a prévu de rencontrer syndicats, entrepreneurs et travailleurs pour aboutir à un projet présidentiel en juin prochain, et également évoqué l’interrogation des Français qui se sont tournés vers l’extrême droite “sur l’amour réel que porte la gauche à la France”. “Il faut assumer de porter notre vision de ce que c’est qu’être Français, de partager notre amour de ce qu’est la France, son histoire”, a-t-il insisté. “Si nous ne faisons pas cela, nous ne pourrons pas gagner les élections et nous ne mériterons pas de les gagner”, a-t-il encore affirmé.Il n’entend pas faire alliance aux prochaines élections avec LFI: “nous ne partirons pas dans ce combat pour la défense de la démocratie avec ceux qui ne font pas la différence entre la démocratie et la dictature”.”Notre ligne n’est pas encore comprise par tout le monde, mais nous n’en changerons pas, c’est la seule ligne qui correspond à nos principes et la seule ligne qui peut l’emporter”, a-t-il affirmé.Alors que le Premier ministre Sébastien Lecornu doit annoncer son gouvernement dans les prochains jours et prononcer sa déclaration de politique générale mardi, Raphaël Glucksmann s’est montré réservé. Renoncer à l’usage de l’article 49.3 de la Constitution est “un pas important” de la part du Premier ministre mais “pas suffisant”.”La censure n’est pas un objectif en soi”, mais le Premier ministre doit proposer une politique en rupture par rapport aux huit années de macronisme “et qui va dans un sens de plus de justice fiscale”, pour éviter d’être sanctionné, a-t-il expliqué.  Pour Raphaël Glucksmann, dont la formation politique compte deux députés qui siègent avec le PS, “on ne doit pas faire la fine bouche” sur le 49.3, mais “le parlementarisme ce n’est pas un chef de gouvernement qui dit je suis Ponce Pilate” et s’en lave les mains.Il réclame des “éléments tangibles pour qu’on s’oriente vers un compromis”. caz/jmt/bow

Gouvernement: le MoDem demande à son tour “une clarification” à Lecornu

Les députés MoDem ont demandé samedi “une clarification” au Premier ministre Sébastien Lecornu avant de s’engager sur leur soutien au futur gouvernement, craignant de devenir “la variable d’ajustements” des négociations avec la gauche et la droite, dans un courrier dont l’AFP a obtenu copie.”Au-delà de la méthode, une clarification est nécessaire sur le fond”, affirme le président du groupe Les Démocrates à l’Assemblée nationale, Marc Fesneau, dans ce courrier daté de samedi, alors que Sébastien Lecornu peaufine les contours de son équipe gouvernementale.Les députés du mouvement de l’ex-Premier ministre François Bayrou estiment en effet qu’il “ne serait pas acceptable que le pacte que nous formons avec les forces du bloc central depuis 2017 ne soit désormais plus que la variable d’ajustement de négociations avec la Droite républicaine ou le Parti socialiste”.”Il nous faut nous dire clairement ce que nous avons envie de préserver, de continuer à construire ensemble et quelles sont nos spécificités. Il s’agit d’une condition sine qua non pour assurer notre cohésion tout d’abord, mais aussi pour pouvoir librement assumer nos accords et nos désaccords avec la droite et la gauche de gouvernement, seul gage d’un compromis solide”, ajoutent-ils.Alors que Les Républicains maintiennent le suspense sur leur participation au gouvernement et accentuent la pression sur le locataire de Matignon, les députés MoDem semblent faire de même en lui demandant plus de détails sur la “méthode”, “l’approche sur le fond” et “l’architecture gouvernementale envisagée”.Ils souhaitent notamment obtenir des clarifications sur les “priorités” du Premier ministre et sur ses “orientations en vue du budget”, et rappellent en ce sens leurs propositions: “réduction de la dépense publique”, lutte contre “la rente et l’optimisation fiscale”, “valorisation du travail”.”C’est sur cette base que nous vous indiquerons les modalités du soutien que notre groupe pourra apporter”, ajoute Marc Fesneau, demandant des “réponses” tout en rappelant “l’état d’esprit et la loyauté” du MoDem, allié d’Emmanuel Macron depuis son premier mandat.

Le ministre sortant François Rebsamen absent du prochain gouvernement, arguant de ses “convictions d’homme de gauche”

Le ministre sortant de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, François Rebsamen, a annoncé samedi qu’il ne ferait pas partie du prochain gouvernement qu’essaye de composer Sébastien Lecornu, arguant notamment de ses “convictions d’homme de gauche”.”Mes convictions d’homme de gauche, progressiste, mon attachement à la justice fiscale et sociale, à la réduction des inégalités, et ma conception de la décentralisation m’ont conduit à faire ce choix”, a détaillé dans un communiqué cet ancien socialiste et ministre du Travail de François Hollande.Alors que le nouveau Premier ministre met la dernière main à son gouvernement, M. Rebsamen, qui dirige son propre mouvement “La Fédération progressiste”, lui apportera “un soutien exigeant et lucide en fonction de l’adéquation de ses décisions avec mes convictions sociales-démocrates, écologistes, européennes et progressistes”.M. Rebsamen avait rejoint le gouvernement en décembre dernier, lors de la nomination de François Bayrou, abandonnant à cette occasion son mandat de maire de Dijon.En rupture de ban avec le PS et devenu proche de la macronie, M. Rebsamen, âgé de 74 ans, faisait partie des ministres d’expérience dont M. Bayrou voulait s’entourer pour espérer durer, en vain.A la tête de son ministère, M. Rebsamen se prévaut d’avoir engagé deux réformes “très attendues”, sur le statut de l’élu et sur la simplification de la gestion des collectivités, dont il espère “qu’elles seront poursuivies”. “Concernant la Corse, le projet de loi constitutionnelle” sur l’autonomie de l’île “a été approuvé en Conseil des ministres le 31 juillet et devait être inscrit à l’ordre du jour des assemblées, pour une présentation au Parlement après les élections municipales. Cet engagement du Président de la République doit être respecté”, plaide-t-il encore. M. Rebsamen reste président de la métropole de Dijon et dit vouloir contribuer “au débat d’idées qui marquera la prochaine élection présidentielle”.