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A Belgrade, deux expositions rivales sur l’impact de Banksy

A Belgrade, deux expositions rivales présentant l’impact de l’artiste de rue britannique Banksy ont donné lieu à un débat coloré sur la commercialisation de l’art de la rue.Banksy, dont l’identité est inconnue du public, sillonne le monde depuis des décennies pour réaliser des peintures murales clandestines dans des espaces publics, dont en Cisjordanie occupée, à Londres et à Los Angeles.L’artiste ne donne presque jamais son aval officiel aux expositions présentant ses oeuvres.Dans la capitale de la Serbie, dans l’une des expositions intitulée simplement “Banksy”, la collection comprend notamment des gravures et des affiches, des pochettes d’album pour divers musiciens, des collaborations avec Greenpeace et une séquence d’ouverture alternative de la série populaire “Les Simpsons”, que l’artiste a adaptée.L’exposition a été organisée par la galerie slovène Deva Puri et le conservateur David Rjazancev, qui a passé une dizaine d’années à travailler sur le projet qui propose une visite multimédia axée sur de nombreuses oeuvres de Banksy.Le prix d’entrée est d’environ 1.300 dinars (11 euros).M. Rjazancev a affirmé que l’exposition comprend des oeuvres empruntées à des galeries, des musées et des collections privées, dont l’authenticité a été vérifiée.L’exposition a eu son lot de détracteurs et a donné lieu à la création d’une exposition concurrente.Nemanja Janjic, commissaire de l’exposition concurrente gratuite intitulée “Fake Banksy, Real Message”, a déclaré qu’il avait été frappé par l’accès payé à l’exposition rivale, sans le consentement de l’artiste, ce qui va à l’encontre du message anti-establishment de Banksy.”Son art est avant tout une critique du consumérisme, de l’élitisme et du profit, avec un message clair selon lequel l’art devrait être accessible à tous”, souligne M. Janjic.Dans son exposition, proposant des oeuvres inspirés de Banksy, les visiteurs peuvent détruire des oeuvres d’art à l’aide d’une déchiqueteuse de papier, en hommage à l’oeuvre “Love Is in the Bin”, l’intervention artistique de Banksy en 2018 chez Sotheby’s Londres, où sa peinture s’est autodétruite immédiatement après avoir été vendue.”Ses oeuvres ne sont pas destinées à la consommation de masse (…) il n’est pas capitaliste, ni commercial”, dit à l’AFP une habitante de Belgrade qui s’est présentée sous le nom de Vanja, après avoir quitté l’exposition “Fake Banksy”.Belgrade est célèbre pour son art de la rue. Les murs de la ville abritent des portraits de seigneurs de la guerre, de stars du rock et de poètes, ainsi que des odes nationalistes à la Russie et des revendications sur le Kosovo voisin.

Les produits des distributeurs, moins chers mais moins sains, selon 60 millions de consommateurs

Les produits alimentaires de marques de distributeurs (MDD) sont plébiscités par la clientèle des grandes surfaces en raison de leurs prix moindres, mais peuvent contenir des additifs potentiellement nocifs, d’après une enquête de 60 millions de consommateurs parue jeudi, qui relève d’importantes disparités entre les enseignes.L’étude du magazine édité par l’établissement public Institut national de la consommation (INC) s’appuie sur les données de 3.000 à 6.000 produits référencés par la base de donnée Open Food Facts, chez six enseignes de distribution: Auchan, Carrefour, Intermarché, E. Leclerc, Lidl et Coopérative U, en France métropolitaine.  Premier constat, la popularité de ces produits, par rapport à ceux de grandes marques, est importante et a progressé à la faveur de la forte inflation des prix en 2022 et 2023.Les produits sous MDD sont en moyenne 20 à 30% moins chers que leurs équivalents de marque, même si ces gammes de produits alimentaires ont aussi vu leurs prix augmenter: entre 2021 et 2024, l’augmentation est même plus importante pour les produits premiers prix (+26%) et MDD (+20% ) que pour leur équivalent chez les marques nationales (+15% en moyenne).Autre enjeu: les produits affichant un Nutri-score (le principal indice de qualité nutritionnelle) “E” ou “D”, les valeurs les plus faibles, sont majoritaires en rayon. La faute notamment aux additifs, aux risques pour la santé encore mal connus: émulsifiants, nitrates et antioxydants sont monnaie courante dans la composition de ces aliments “low cost”, pointe 60 millions de consommateurs.”Leur présence n’est pas interdite, rappelle Sylvie Metzelard, rédactrice en chef du magazine, mais des études récentes montrent que ces additifs peuvent poser des problèmes de type diabète ou maladies cardiovasculaires, notamment les émulsifiants”.Bien qu’Auchan et Carrefour fassent mieux en la matière, Lidl et Intermarché apparaissant comme des mauvais élèves, “le tableau général est plutôt mauvais”, pointe l’étude. Sur 30 produits parmi les plus couramment vendus, seuls quatre récoltent une appréciation “bien” contre huit scores “très mauvais”, toutes enseignes confondues. “On constate que certaines marques peuvent se passer complètement d’additifs, là où d’autres enseignes vont en mettre deux, trois dans le même produit”, note Sylvie Metzelard, qui rappelle une “règle d’or”: “toujours vérifier la composition des aliments” sur l’emballage.Côté prix, les produits vendus dans les enseignes E.Leclerc sont 5,5% moins chers que la moyenne de tous les produits commercialisés toutes gammes confondues, talonnés par Carrefour (-2,7%) et Intermarché (-2%) alors que les produits vendus dans les Monoprix sont en moyenne 16,7% plus chers.”Il y a quand même une baisse des prix depuis le début d’année”, relève Lionel Maugain, chef de rubrique à l’INC, qui souligne “l’effet déflationniste indéniable” du rachat de la chaîne de magasins Casino: “dans 40% des magasins repris, les prix ont baissé de 30% en moyenne”.A noter que Lidl et Aldi sont absents de ce classement, 60 millions de consommateurs arguant que leur forte proportion de produits distributeurs rend la comparaison avec les autres enseignes difficile.

Difficile renégociation pour la réforme des retraites

Les partenaires sociaux entament jeudi trois mois de négociations sur la réforme des retraites de 2023, rendues encore plus difficiles par l’exigence du gouvernement d’un retour à l’équilibre financier du système pour 2030, alors que les syndicats demandent l’abrogation du relèvement à 64 ans de l’âge de départ.Après avoir initialement demandé aux négociateurs de ne pas “dégrader” cet équilibre, François Bayrou a envoyé mercredi soir aux dirigeants des organisations patronales et syndicales une lettre leur réclamant de “rétablir l’équilibre financier” du système de retraites “à un horizon proche” avec un “objectif à l’année 2030”.La Cour des comptes a évalué la semaine dernière, dans un rapport qui doit servir de base aux discussions, que le déficit du système de retraites devrait atteindre 6,6 milliards d’euros en 2025 et se “stabiliser” jusqu’en 2030, avant de se creuser davantage. “Je suis pessimiste sur l’issue des discussions”, a déclaré dans un entretien au Monde jeudi le président du Medef, Patrick Martin.”Nous voyons mal comment la cible d’un retour à l’équilibre en 2030 pourrait être atteinte si l’on remet en cause la règle des 64 ans”, selon lui.Le syndicat FO a également affiché son scepticisme.”Sur les retraites, franchement, s’il n’y a pas d’abrogation, je ne vois pas comment on peut commencer à discuter”, a déclaré à l’AFP son négociateur Michel Beaugas.La première séance de discussions hebdomadaire s’ouvre à 14 heures dans des locaux des services du Premier ministre, en l’absence des numéros uns des organisations syndicales comme patronales.Elle démarrera par un “retour” sur le rapport de la Cour des comptes, à laquelle la CGT a notamment demandé de chiffrer le coût d’un retour de l’âge de départ à 62 ans.Selon un courrier adressé aux participants par l’animateur des débats Jean-Jacques Marette, les négociateurs devront ensuite établir leur “programme de travail” pour les trois mois à venir.Lors de la rencontre, siègeront les cinq syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC et CFTC) et les trois organisations patronales (Medef, CPME, U2P) représentatifs au niveau interprofessionnel, mais aussi la FNSEA (agriculture) et le syndicat Unsa.Une configuration critiquée notamment par FO qui ne voit pas pourquoi l’Unsa, syndicat non représentatif au niveau national, et la FNSEA ont été conviés, mais pas Solidaires, la FSU (fonction publique) ou l’Udes (employeurs de l’économie sociale et solidaire).- Contrat de génération -Premier syndicat, la CFDT est “motivée pour agir dans le cadre d’un rendez-vous qui est une vraie opportunité”, a expliqué à l’AFP le numéro deux de la centrale réformiste Yvan Ricordeau.La CFDT espère pouvoir “répondre aux principales attentes” des salariés, notamment “la prise en compte de la pénibilité et le renforcement du droit des femmes”, a-t-il précisé.Yvan Ricordeau souligne aussi la nécessité de “trouver une voie de passage avec un équilibre financier”, car il faut garantir une retraite aux “générations futures”, c’est-à-dire les actifs qui cotisent aujourd’hui.La Confédération des PME insiste aussi sur “l’équité intergénérationnelle” et veut “mettre dans l’équation la question de l’espérance de vie et de son évolution”, a expliqué à l’AFP son vice-président en charge des affaires sociales, Eric Chevée.Pour trouver de nouvelles recettes, la CPME propose d’aligner le taux de CSG (contribution sociale généralisée) des retraités sur celui des actifs, un peu plus élevé, (hors petites pensions). Elle souhaite aussi l’introduction d’une dose de “capitalisation” (un système d’épargne dans lequel chaque retraité cotise pour sa retraite future) en plus du système par répartition qui prévaut aujourd’hui (les cotisations des actifs payent des pensions des retraités actuels), une idée également défendue par le Medef.”Le patronat mène une campagne de pub extrêmement puissante sur la retraite par capitalisation”, constate pour sa part Denis Gravouil, négociateur de la CGT qui farouchement opposé à cette idée.Ce syndicat propose d’équilibrer le système de retraites en augmentant les salaires des femmes afin qu’elles gagnent réellement autant que les hommes, en supprimant les exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires et en soumettant aux cotisations l’intéressement et la participation. François Bayrou a indiqué dans son courrier que les parlementaires seraient informés de l’avancée des travaux “à échéances régulières”. Il avait assuré mi-janvier que si les partenaires sociaux parviennent à un accord, le texte sera soumis au Parlement pour amender la très impopulaire réforme de 2023.

Le gouvernement acte la réouverture des clubs de jeux parisiens

Les clubs de jeux parisiens vont pouvoir rouvrir, après deux mois de fermeture forcée faute de cadre législatif, profitant d’une prolongation de leur expérimentation, selon un décret paru jeudi au Journal officiel.Le décret du ministère de l’Intérieur, qui entre en application ce jeudi, autorise les clubs de jeux à exercer jusqu’en 2027, comme le prévoit la loi de finances 2025 adoptée début février.”La commission consultative des établissements de jeux va se réunir à 14H30 pour signer les autorisations, nous visons donc une réouverture demain (vendredi) à la mi-journée”, a indiqué à l’AFP la communication du groupe Barrière, à la tête d’un club de jeux sur les Champs-Elysées.Les clubs de jeux sont expérimentés depuis 2018 dans la capitale, où les casinos sont interdits depuis plus d’un siècle dans un rayon de 100 km, avec une seule exception pour l’établissement d’Enghien-les-Bains.L’expérimentation initiale, censée se terminer en 2020, avait été prolongée une première fois jusqu’à fin 2022, puis une deuxième fois jusqu’au 31 décembre 2024. Les clubs de jeux avaient depuis dû fermer leurs portes en raison de la censure du gouvernement Barnier qui n’avait pas permis au budget 2025 d’être adopté à temps.La fermeture avait eu comme conséquence la mise au chômage partiel de 1.500 personnes.”Une catastrophe sociale et économique a pu être évitée de justesse grâce à l’appui efficace des pouvoirs publics. Cependant, le soulagement n’est que partiel, car cette nouvelle prolongation ne saurait être une solution de long terme”, selon Grégory Rabuel, président de l’organisation patronale du secteur, Casinos de France, dans un communiqué mercredi soir.”C’est pourquoi nous sollicitons la pérennisation des clubs de jeux au plus vite, mais également l’autorisation de la roulette dans nos établissements”, poursuit celui qui est aussi directeur général du groupe Barrière.Les clubs de jeux proposent des jeux dits de table (poker, blackjack, bingo…). Roulettes et machines à sous y sont interdits, alors que ces jeux sont très populaires et surtout extrêmement lucratifs pour les casinotiers, principalement les machines à sous qui peuvent représenter quelque 90% des recettes.Casinos de France fait valoir que l’autorisation des jeux de roulette permettrait d'”assurer la viabilité économique des clubs de jeux” et de “lutter contre une activité clandestine qui a ressurgi durant ces deux derniers mois dans la capitale”.

Les industriels européens de la chimie, “en grande difficulté”, demandent à Bruxelles des mesures “immédiates et concrètes”

Les industriels européens de la chimie, “en grande difficulté”, demandent à Bruxelles des mesures “immédiates et concrètes” pour rétablir leur compétitivité, au lendemain de la présentation par la Commission de ses propositions pour aider à la transition verte de l’industrie.A l’approche du Conseil européen de mars, “400 dirigeants d’entreprises” de la chimie “demandent aux chefs d’Etat et de gouvernement des mesures immédiates et concrètes” face à une “crise sans précédent”, indique un communiqué de France Chimie qui relaye cet appel européen.Les industriels ont salué la présentation mercredi par la Commission européenne du “Pacte pour une industrie propre”, soulignant que neuf des dix actions formulées un an auparavant par 15 fédérations industrielles européennes, y sont reprises.”L’ambition de l’UE doit maintenant se traduire en actions”, a déclaré Ilham Kadri, présidente du Conseil international de la chimie (ICCA) et PDG du groupe Syensqo, citée dans le communiqué.Elle a également souligné que “chaque jour, l’Europe perd du terrain et des emplois qualifiés”.Cet appel des chimistes fait écho à celui des industriels européens de l’acier, au chevet desquels plusieurs ministres européens de l’Industrie sont réunis jeudi à Paris pour une réunion de crise et pour demander à Bruxelles d'”accélérer” son soutien à la sidérurgie.L’Union européenne a proposé mercredi de mettre un coup de frein à certains de ses projets sur le climat pour donner un peu d’air aux entreprises, soumises à une concurrence féroce venant des Etats-Unis et de la Chine.”Ce pacte est une première étape qui doit se traduire en actions concrètes sans plus tarder”, a déclaré Frédéric Gauchet, Président de France Chimie.Les industriels ont mis en avant cinq priorités, afin de “restaurer” la compétitivité du secteur: l’accès à une “énergie décarbonée compétitive”, restaurer “la compétitivité des investissements et accélérer l’innovation”, mener un “choc de simplification réglementaire”, rétablir un cadre de “concurrence commerciale équitable avec le reste du monde”, et enfin assurer l’apport d’une “main d’Å“uvre hautement qualifiée”.L’industrie européenne a vu, entre 2023 et 2024, la production manufacturière reculer de 2,6%, ont souligné les industriels.”Nous avons besoin d’actions concrètes, pas de stratégies ni d’engagements vagues. Il faut agir maintenant”, a renchéri Marco Mensink, directeur général du Conseil européen de l’industrie chimique (Cefic).En France, “près de 10% des emplois et une quarantaine de sites sont menacés”, estime France Chimie.

La Bourse de Paris recule, entre résultats et menaces douanières de Trump

La Bourse de Paris cède du terrain jeudi, digérant les résultats du mastodonte Nvidia et d’une série d’entreprises françaises, ainsi que les dernières menaces douanières de Donald Trump visant l’Union européenne.Le CAC 40 cédait vers 9H50 (heure de Paris) 0,76% à 8.082,02 points, en recul de 61,96 points. La veille, l’indice vedette français avait pris 1,15% à 8.143,92 points.Les investisseurs décortiquent les résultats de Nvidia, champion américain des microprocesseurs, deuxième capitalisation mondiale et baromètre de l’intelligence artificielle, publiés mercredi soir.Le groupe a fait mieux qu’attendu au quatrième trimestre de son exercice décalé, avec un bénéfice net de 22,1 milliards de dollars, et s’est montré encourageant quant à la demande de semi-conducteurs.Mais les marchés “espéraient un résultat encore plus important”, estime Jacob Falkencrone, de Saxo Banque.La publication était attendue au tournant, dans un contexte de doutes ces dernières semaines sur les perspectives de croissance réelle des secteurs liés au développement de l’intelligence artificielle. Ce sentiment s’est accru depuis que le chinois DeepSeek a revendiqué le développement d’un modèle aussi performant que ses concurrents américains, avec beaucoup moins de ressources.Dans ce contexte, “les marchés sont de plus en plus difficiles à impressionner”, explique Ipek Ozkardeskaya, analyste pour Swissquote Bank.Autre point d’attention: les nouvelles menaces douanières de Donald Trump.Le président américain a annoncé mercredi, à l’occasion de la première réunion de son cabinet à la Maison Blanche, que les produits européens feraient l’objet “prochainement” de 25% de droits de douane.Mais “on ne sait pas encore exactement contre quels secteurs et produits les États-Unis vont prendre des mesures”, relève Andreas Lipkow, analyste indépendant.Les marchés scruteront aussi la publication dans la matinée des “minutes”, compte rendu de la dernière réunion de la Banque centrale européenne (BCE).Dans ce contexte, le taux d’intérêt de l’emprunt à dix ans français atteignait vers 9H50 3,16%, contre 3,14% la veille en clôture. Son équivalent allemand, référence en Europe, restait stable à 2,43%.Les investisseurs digèrent enfin une série de résultats.Eiffage dynamiqueLe groupe de BTP, d’infrastructures et concessions de transport Eiffage (+5,67% à 96,52 euros vers 9h50) a réalisé une année 2024 dynamique, avec une hausse de 2,8% de son bénéfice net (1,04 milliard d’euros) porté par l’activité travaux.Arkema déçoitLe chimiste Arkema cédait 5,45% à 78,85 euros, après un bénéfice net ayant reculé de 15,3% à 354 millions d’euros.EngieL’énergéticien français Engie (+5,60% euros à 17,45 euros) a revu à la hausse ses perspectives pour 2025 après une année marquée par une activité “record” dans les renouvelables et une forte performance opérationnelle et financière, dans un contexte de baisse des prix de l’énergie.SEB dévisseLe groupe d’électroménager SEB perdait, lui, 10,80% à 83,70 euros. L’entreprise a dégagé un bénéfice net en forte baisse pour 2024.

La Poste dévoile ses résultats, ses missions de service public sous pression

La Poste publie jeudi des résultats annuels très attendus, au moment où la Cour des comptes préconise de raboter ses missions de service public, à quelques mois du départ de son patron Philippe Wahl.Durant ses douze années de mandat, qui s’achèveront fin juin, M. Wahl aura eu à relever un défi de taille: compenser les faramineuses pertes liées à la baisse des volumes de courrier, pour maintenir le navire La Poste à flot.En dix ans, les revenus de La Poste se sont effrités de 6,5 milliards d’euros, “soit l’équivalent du chiffre d’affaires mondial d’un autre groupe public, la RATP”, aime rappeler le patron de La Poste.Sa stratégie a consisté à diversifier les activités du groupe: livraison express de colis, portage de repas aux personnes âgées, téléphonie…Le but est d’absorber le repli du courrier et la chute de fréquentation des points de contact de La Poste (17.000 aujourd’hui), divisée par plus deux deux entre 2008 et 2023.La Poste a conquis le marché stratégique du colis, en France et à l’international, avec ses marques Colissimo, DPD France et Geopost.En 2023, 44% de son chiffre d’affaires était réalisé à l’international et 53% porté par l’activité de colis.Mais la rentabilité du groupe, détenu à 66% par la Caisse des dépôts et consignations et à 34% par l’Etat, doit beaucoup à l’assureur CNP Assurances, filiale à 100% de la Banque Postale.En 2023, le groupe affichait un bénéfice net en baisse, à 514 millions d’euros, pour un chiffre d’affaires de 34 milliards d’euros, en hausse.- Distribution six jours sur sept -Outre le repli des volumes de missives, La Poste doit également faire face à la sous-compensation par l’Etat des quatre missions de service public qui lui sont confiées : la distribution du courrier et de la presse, l’aménagement du territoire et l’accessibilité bancaire.Cette sous-compensation a coûté à La Poste 1,2 milliard d’euros en 2023, souligne fréquemment M. Wahl.Le 17 février dernier, la Cour des comptes a publié sur son site une note révélant qu’elle avait “analysé la trajectoire financière du groupe La Poste pour les exercices 2019 à 2023” et qu’elle avait formulé des préconisations auprès du Premier ministre.La juridiction financière juge la rentabilité des activités de diversification “insuffisante” tandis que Philippe Wahl défend sa stratégie ayant permis au groupe de “rester profitable” malgré les difficultés.La Cour des comptes recommande d'”adapter les missions de service public au recul de leur usage” et d’ajuster la compensation “à hauteur du déficit comptable qui en résulte”.Pierre Moscovici, dans ce référé adressé à Matignon, conseille de “s’interroger désormais sur la fréquence de distribution du courrier”, soulignant que la France était “l’un des derniers pays” en “6 jours sur 7”.Dans sa réponse, François Bayrou a évoqué des discussions en 2025 lors desquelles seront étudiés “les scénarios d’économies réalisables sur le service universel postal”.Sur l’aménagement du territoire, la Cour des comptes propose “des synergies plus fortes avec le programme France Services” – vraisemblablement l’intégration de bureaux de poste dans les locaux de France Services – pour réaliser des “économies rapides”.Les syndicats, eux, n’ont pas tardé à faire entendre leur mécontentement. Les préconisations de la Cour des comptes “auraient aussi un lourd impact sur les conditions de travail avec un alourdissement de la charge de travail et une recrudescence de l’absentéisme déjà très élevé”, dénonce FO.Sud PTT tance, lui, “une vision particulièrement étroite et focalisée sur les profits […], (une) attitude qui conforte les pouvoirs publics dans la voie de la dégradation des missions”.

Des automobilistes délaissent Tesla depuis l’entrée en politique de Musk

Tom Blackburn était si fier de sa Tesla rouge vif. Mais depuis l’arrivée d’Elon Musk sur la scène politique américaine, il s’est juré de ne plus jamais rien acheter auprès du constructeur automobile.Elon Musk suscite la controverse aux États-Unis en aidant le président Donald Trump à réduire les dépenses publiques du gouvernement fédéral par des mesures jugées illégales ou immorales par ses détracteurs.La polémique pourrait rejaillir sur son entreprise américaine, Tesla, jadis louée par ceux soucieux de protéger l’environnement en achetant des véhicules électriques.”Je suis simplement un peu gêné de la conduire maintenant”, admet à l’AFP M. Blackburn, un avocat à la retraite, à propos de sa voiture achetée il y a plus de dix ans. “Je me suis plutôt désintéressé de Tesla en tant que marque.”En réaction, le Virginien de 76 ans a apposé l’an dernier un autocollant sur sa voiture: “Je l’ai achetée avant de savoir qu’il était fou”. Mais “maintenant, je pense qu’il me faut quelque chose de plus fort”, lance-t-il.Elon Musk est devenu directeur général de Tesla en 2008, supervisant la montée en puissance de la société devenue depuis l’une des plus valorisées en matière de capitalisation boursière.Des experts estiment que les aventures politiques du milliardaire, soutien de partis politiques européens d’extrême droite et relais de théories du complot, pourraient isoler Tesla de sa clientèle habituellement progressiste.”Je pense qu’il (Elon Musk) va avoir un effet préjudiciable de long terme sur la marque”, anticipe Daniel Binns, directeur général Elmwood Brand Consultancy.Tesla doit se “dissocier” d’Elon Musk dans son marketing, affirme-t-il, mettant en garde contre une “tempête” qui pourrait conduire les automobilistes à s’en détourner au bénéfice de constructeurs rivaux.”La marque, sur tant d’aspects, n’est pas alignée avec (sa clientèle) et le marché est rempli de fantastiques concurrents”, analyse M. Binns auprès de l’AFP.Le cours de Tesla s’est effondré de 9% cette semaine avec le recul des ventes en Europe, que des experts analysent en partie par l’image de son patron auprès des acheteurs d’automobiles.”Nous pensons (…) que les problèmes liés à l’image de Musk accentuent les vents contraires”, estime auprès de l’AFP Dan Ives, de Wedbush Securities.”Une activité politique accrue crée en effet un risque pour Tesla, qui pourrait se mettre à dos des consommateurs (…) mais il est trop tôt pour dire qu’il y a un impact sur l’entreprise”, note, moins affirmatif, Seth Goldstein, stratège chez Morningstar.- “Videz votre stock” -Elon Musk a déjà suscité la polémique depuis son rapprochement avec Donald Trump, par exemple par son geste interprété comme un salut nazi lors d’un rassemblement de soutiens du président américain.Kumait Jaroje, un médecin de l’agglomération de Boston, raconte à l’AFP essayer de vendre sa Cybertruck, un pick-up aux lignes futuristes. Cet homme de 40 ans craint d’être agressé, depuis qu’un message antinazi a été laissé sur son véhicule.Le professionnel de santé a soutenu Donald Trump à l’élection présidentielle de novembre. Il a acheté son véhicule l’an dernier et dit avoir été la cible d’insultes ou de queues de poisson par d’autres automobilistes.”J’évite de le conduire”, raconte M. Jaroje. “Tesla est devenu une étiquette désignant les personnes qui aiment Musk, ce qui n’est pas vrai”, clame-t-il.Quelque 54% des Américains ont un point de vue défavorable à propos du milliardaire originaire d’Afrique du Sud, selon une étude du Pew Research Center, une opinion d’autant plus partagée chez les sondés démocrates.Des détracteurs de Musk ont manifesté dans des boutiques du constructeur et encouragé leurs propriétaires à se débarrasser des véhicules pour faire baisser leurs prix, derrière le slogan “Videz votre stock”.La chanteuse américaine Sheryl Crow a vendu sa Tesla en février, en signe de protestation, affirmant en reverser l’argent à NPR, le réseau de radiodiffusion publique des Etats-Unis menacé d’une réduction de son financement gouvernemental.Pour sa part, Luis Garay, un électeur de 68 ans du Maryland s’identifiant comme un indépendant mais ayant voté pour le camp démocrate lors de l’élection, dit à l’AFP pouvoir distinguer Tesla des opinions politiques d’Elon Musk.Margaret Moerchen, une habitante de Washington se décrivant comme progressiste, estime quant à elle que “le fait qu’on conduise une Tesla ne vaut pas soutien à Elon Musk”.Sa Tesla, achetée en 2015 pour aider à réduire les émissions de CO2, explique-t-elle, est aujourd’hui recouverte d’autocollants, entre drapeau arc-en-ciel et messages comme “Vive les véhicules électriques, à bas Musk”.L’astronome de 45 ans affirme qu’elle n’achètera plus chez cette entreprise, au profit de sa rivale Rivian.

Arrêt du chantier ou pas: décision-clé jeudi sur le sort de l’A69

Le bitume n’a pas encore été coulé, mais le tracé est en partie réalisé. La justice administrative doit annoncer jeudi si elle met à l’arrêt le colossal chantier de l’A69 qui déjà s’étend sur des dizaines de kilomètres entre Toulouse et Castres, retoquant alors la première infrastructure routière de cette envergure en France.Sur le terrain, les récurrentes actions et manifestations d’opposition se sont taries dans l’attente de la décision du tribunal administratif de Toulouse. Si deux “écureuils” occupent encore un arbre marqué pour être abattu, les militants contre l’A69 patientent sereinement et se disent “très confiants”.  Il faut dire que par deux fois, la rapporteure publique, dont les avis sont régulièrement suivis, a demandé au tribunal administratif de Toulouse “l’annulation totale” de l’arrêté préfectoral qui a permis d’entamer le chantier en 2023. À l’audience du 18 février, cette magistrate, Mona Rousseau, a réaffirmé que les gains espérés de la future autoroute n’étaient pas suffisants pour établir une “raison impérative d’intérêt public majeur” (RIIPM) justifiant les atteintes à l’environnement commises par le projet.Pour ses promoteurs, cet axe de 53 km vise avant tout à désenclaver “le bassin de vie” du sud du Tarn, qui “a besoin de se connecter aux équipements de la capitale régionale” Toulouse, comme l’aéroport ou les hôpitaux, a souligné Yasser Abdoulhoussen, directeur de projet, chargé du pilotage de l’A69 à la préfecture du Tarn.Aussi, à moins que le tribunal ne décide de reporter sa décision, de ne se prononcer que partiellement ou de s’en remettre au Conseil d’État, deux possibilités s’offrent à lui: annuler ou non l’arrêté préfectoral, ce qui engendrerait soit l’arrêt immédiat du chantier, soit, à l’inverse, la poursuite normale des travaux de l’autoroute dont l’ouverture était initialement prévue fin 2025.Quelle que soit la décision, il y aura un appel puis sans doute un recours devant le Conseil d’État. “Donc on va en parler encore pendant des années”, explique à l’AFP Julien Bétaille, maître de conférences en droit de l’environnement à l’université Toulouse Capitole.- “Sursaut prometteur” -Si les anti-A69 obtiennent gain de cause, ce sera un “message fort pour la justice environnementale”, estime l’une de leurs avocates, Alice Terrasse, qui espère “un sursaut prometteur” du tribunal.”Juridiquement, ce ne serait pas une surprise”, commente M. Bétaille, qui juge que cette décision serait “logique” au regard de “l’évolution de la jurisprudence” et du “contexte de changement climatique, d’érosion de la biodiversité”.Mais “statistiquement”, ce serait une “anomalie”, reprend-il, car “dans tout l’historique de la jurisprudence sur les autoroutes en France, aucun projet autoroutier n’a été annulé pour des raisons environnementales”.Pour l’expert, cela signifierait qu'”un verrou a sauté dans la mentalité du juge administratif”, qui accepterait ainsi “de s’attaquer aux autoroutes”. De fait, ce serait la première fois en France qu’une infrastructure routière d’une telle importance est interrompue par un jugement, et non par une décision politique, comme l’abandon du projet d’A45 Lyon/Saint-Étienne en 2018.Le cas du contournement du village touristique de Beynac, en Dordogne, retoqué par la justice administrative, concerne un ouvrage de moindre envergure, avec un budget initial plus de dix fois inférieur aux 450 millions d’euros que doit coûter l’A69.- “Plusieurs millions d’euros” -Plaidant pour la poursuite du chantier, Atosca, constructeur et futur concessionnaire de l’autoroute, affirme avoir “désormais concrétisé plus de 300 millions d’euros, soit 65% du budget total du chantier”.En outre, l’arrêt du chantier serait coûteux, font valoir l’État et Atosca. Il faudrait stabiliser des ouvrages en cours de réalisation, protéger ceux déjà édifiés, surveiller des matériels entreposés ou encore installer des clôtures autour des bassins et fossés ouverts.Cette sécurisation du chantier, ajoutée à l’application des clauses de suspension du contrat, coûterait plusieurs millions d’euros, ajoutent-ils.Dans l’hypothèse d’une décision favorable à l’État et Atosca, le chantier de l’A69 se poursuivrait au moins jusqu’à une décision en appel, qui prendrait plusieurs mois.Dans ce cas-là, “on prendra acte que la justice n’applique pas le droit et qu’il va falloir se débrouiller autrement”, a déclaré Geoffrey Tarroux, du collectif La Voie est libre. “Mais la lutte continuera.”

Fin de la production chez Audi Bruxelles, symbole du malaise de l’industrie en Europe

L’usine Audi de Bruxelles cessera définitivement sa production vendredi, laissant sans emploi des milliers de salariés, victimes de capacités de production automobile en Europe devenues disproportionnées avec le déclin de la demande.La fermeture de ce site de quelque 3.000 employés, sans repreneur à ce stade, intervient alors que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen doit présenter mercredi son plan d’action pour “soutenir cette industrie dans la transition profonde et disruptive qui s’annonce”.Après une croissance de près de 10% en 2023, le marché mondial a nettement ralenti l’an dernier, avec une progression de 1,7% des nouvelles immatriculations de voitures. Il a même décliné dans de grands pays européens comme l’Allemagne ou la France.En outre, les constructeurs européens se sont laissé distancer en matière d’innovation dans les modèles électriques par les grands constructeurs chinois (BYD et Geely) ou l’américain Tesla, ont relevé ce mois-ci les experts d’Allianz Trade, avec comme conséquence des prix plus élevés.Concernant Audi, filiale du géant allemand Volkswagen, plusieurs arguments ont été évoqués pour expliquer cette fermeture spectaculaire d’une unité de production qui était le plus gros employeur privé dans la capitale de l’UE. En annonçant en juillet dernier qu’il envisageait cette fin d’activité, Audi avait mis en avant une “baisse mondiale” de la demande pour les SUV électriques haut de gamme, du type de son Q8 e-tron, le modèle auquel le site bruxellois était entièrement dédié.La firme allemande avait aussi invoqué des “défis structurels de longue date” sur cet ancien site Volkswagen, progressivement agrandi avec les années mais présentant des coûts logistiques élevés.D’autres voix parmi les responsables syndicaux ou les salariés ont reproché à Audi d’avoir pris tardivement le virage de l’électrification, et d’avoir privilégié un modèle haut de gamme trop cher.”On pousse les gens à acheter des voitures électriques, alors que côté infrastructures on n’est pas prêts”, a aussi déploré Jan Baetens, du syndicat chrétien belge CSC, rappelant l’échéance de 2035 qui doit marquer en principe la fin dans l’UE des ventes de voitures neuves à moteurs thermiques au profit du tout électrique.- “Enrichissant” -Avant cette échéance, la part de marché de l’électrique est censée atteindre 25% dans l’UE cette année, contre une proportion de 15% calculée pour janvier.”On a un problème de demande en ce moment. C’est remarquable d’avoir atteint ces 15% en moins de cinq ans, désormais les véhicules sont disponibles, mais la demande stagne”, soulignait la semaine dernière Sigrid de Vries, directrice générale de l’Association des constructeurs européens (ACEA).En 2024, Audi a livré plus de 164.000 modèles “tout électrique”, soit un recul de 8% sur un an. Le marché chinois, représentant près de 40% de ses livraisons globales (650.000 sur 1,67 million), a décliné de 11%.Comme un symbole de ce déclin, l’usine bruxelloise arrêtera vendredi pour de bon ses chaînes d’assemblage, même si quelque 300 personnes poursuivront pendant plusieurs mois des tâches de comptabilité, ressources humaines, nettoyage ou démontage, d’après la direction.Dans les jours précédant cet arrêt, des dizaines d’employés, ouvriers ou cadres, sont venus vider leur casier en guise d’adieux. “C’était enrichissant, dommage que ça s’arrête”, lâche à l’AFP Florin Tautu, un ingénieur arrivé de Roumanie en 2011, qui était chargé d’adapter l’infrastructure de l’usine aux nouvelles productions. Il est venu récupérer dans un sac plastique des biscuits, une gourde et deux paquets de mouchoirs.Un autre cadre, lui aussi en fin de carrière et très qualifié, se veut optimiste pour la suite. “Les gens qui ont encore un emprunt à rembourser ou des enfants étudiants, eux je les plains”, dit-il en préférant taire son nom.Côté reclassement, la direction assure que les salariés d’Audi seront aidés dans leurs recherches par du personnel dédié dans les agences régionales pour l’emploi.En avril ces agences organiseront un salon où quelque 70 entreprises viendront proposer “plus de 4.000” offres, a indiqué à l’AFP Peter d’Hoore, porte-parole de la direction.