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Nucléaire: l’Elysée vise désormais 2038 pour la mise en service du premier réacteur EPR2

L’Elysée a annoncé qu’il visait désormais l’horizon 2038 au lieu de 2035 pour la mise en service du premier des six futurs réacteurs EPR2 voulus par Emmanuel Macron, une relance nucléaire qui devrait s’appuyer sur un prêt de l’Etat à taux préférentiel et un renforcement de la souveraineté en uranium.  Le président de la République avait annoncé en février 2022 un programme de construction de 6 nouveaux réacteurs nucléaires et une option pour 8 autres avec une mise en service vers 2035 pour le premier d’entre eux, à Penly. Mais un audit gouvernemental de février 2022 mentionnait déjà l’horizon 2037 pour les premières mises en service. L’Elysée évoque désormais d'”ici 2038″ pour la “première mise en service”, selon le communiqué de la présidence diffusé à l’issue d’un conseil de politique nucléaire (CPN) autour d’Emmanuel Macron, le 4e depuis 2022.Aux conditions de 2020, le coût estimé à 51,7 milliards d’euros en 2022 est à présent évalué à 67,4 milliards, ce qui revient à 79,9 milliards aux conditions plus récentes de 2023, selon un rapport de la Cour des comptes de janvier sur la base d’un chiffrage d’EDF de fin 2023. Le mois dernier, le ministre chargé de l’Energie Marc Ferracci avait fixé les ordres de grandeur, en évoquant un coût “en-dessous de 100 milliards d’euros”, tenant compte notamment de l’inflation.Pour connaître le chiffre définitif, il faudra patienter: EDF a indiqué le 20 février que la présentation du devis complet du programme prendrait encore “plusieurs mois”.- “Moins d’urgence” -Alors comment financer ces réacteurs qui doivent permettre à la France, avec les énergies renouvelables, de réduire sa dépendance aux énergies fossiles importées?Lundi, les participants ont “examiné les grands principes du schéma de financement” de ce programme, précisant qu’il serait notamment “basé sur un prêt de l’État bonifié couvrant au moins la moitié des coûts de construction”, selon la présidence. Un tel modèle a déjà été validé par l’Union européenne pour le financement de la centrale tchèque de Dukovany essentiellement par un prêt de l’Etat à taux zéro.En France, il serait assorti d’un contrat sur la production nucléaire à un prix garanti par l’Etat de 100 euros maximum du mégawattheure, selon le communiqué. Concrètement, si l’électricité nucléaire d’EDF est vendue sur les marchés au-delà de ce seuil, EDF doit verser des recettes à l’Etat ; en-dessous, c’est l’Etat qui compense EDF. L’Elysée espère “finaliser dans les prochaines semaines les discussions entre l’État et EDF” et “initier rapidement les échanges avec la Commission européenne, dans la perspective d’une décision finale d’investissement d’EDF en 2026”, au lieu de fin 2025, pour cette étape clé préalable au lancement du chantier. Pourquoi ce décalage? “Il y a moins d’urgence alors autant prendre du temps pour réussir le programme”, souligne une source proche d’EDF. Car le contexte est bien différent du spectre des pénuries d’électricité en 2022 dans le sillage de la guerre en Ukraine: “depuis, la production d’EDF est revenue au niveau d’avant crise énergétique, les efforts de sobriété ont porté leurs fruits, et comme la demande d’électricité n’augmente pas au niveau envisagé, il n’y a pas d’urgence”, ajoute la même source. – “Relancer la recherche” -L’objectif d’EDF et de son unique actionnaire, l’Etat, est bien d’éviter la répétition du scénario de Flamanville, le chantier de l’EPR normand émaillé d’une série de dérapages de coûts et de calendrier. D’où le rappel du conseil de politique nucléaire sur “la nécessité pour EDF de consolider la maîtrise industrielle du programme”.Au moment où l’atome connaît un regain d’intérêt dans le monde, le CPN s’est également penché sur le risque de “tensions importantes” sur la demande d’uranium qui sert à fabriquer le combustible nucléaire, et a validé “le soutien que l’État apportera à Orano (ex-Areva, NDLR) sur l’approvisionnement en uranium de la France à moyen et long terme”.Le Conseil de politique nucléaire a aussi “lancé des travaux préparatoires” en vue de “relancer la recherche sur la fermeture du cycle, qui permettra à terme de se passer des importations d’uranium naturel”, dans la deuxième moitié du siècle. Sur la question des mini-réacteurs (SMR ou small modular reactors), le CPN a appelé le CEA “à engager des discussions” avec les start-up qui développent les projets les plus avancés en vue d’implantation sur ses sites nucléaires dans le sud à Marcoule et Cadarache 

Dans les abysses, l’appétit minier a lancé une course pour nommer une faune et une flore méconnues

Dans les profondeurs froides et obscures du Pacifique, l’immense plancher océanique est constellé de galets riches en métaux convoités par l’industrie, au milieu d’une multitude d’espèces étranges, quasi totalement inconnues de la science.D’un côté, l’industrie minière se bat pour obtenir le droit d’excaver les fonds marins de la zone de Clarion Clipperton (CCZ), immense plaine à plus de 3.000 mètres de profondeur, entre Hawaï et le Mexique. De l’autre, des chercheurs, en grande partie financés par les entreprises, s’y précipitent pour identifier et cartographier des milliers d’espèces mystérieuses.La zone, longtemps perçue comme un désert sous-marin, est désormais connue pour abriter une faune et une flore abondantes: un concombre de mer géant surnommé “l’écureuil gélatineux”, une crevette aux longues pattes velues, des vers ou des éponges flottantes attachées aux rochers.C’est l’intérêt pour les “nodules”, ces “galets de métaux” comme le cobalt et le manganèse, recherchés pour les batteries, les panneaux solaires ou les écrans tactiles, qui a ouvert la voie à l’exploration scientifique. “Nous avons une bien meilleure compréhension de cette partie du monde que si nous n’avions pas essayé de l’exploiter”, admet Tammy Horton, du Centre océanographique national du Royaume-Uni (NOC).Mais pour les défenseurs de l’environnement, cette biodiversité est le véritable trésor de ces abysses. Et elle risque de disparaître avant même d’être découverte, sous l’énorme panache de sédiments millénaires que l’exploitation minière soulèverait.Les nodules eux-mêmes lui offre un habitat unique, sorte de jardins de corail en miniature.Les scientifiques ont prélevé des échantillons avec des appareils de collecte lancés depuis des navires et ont déployé des véhicules télécommandés pour prendre des photos. Un cliché peut dévoiler une seule ophiure, animal ressemblant à une étoile de mer, mais il est rare que les chercheurs voient deux fois la même créature. Il existe “un nombre considérable d’espèces rares “, rendant cette région comparable à l’Amazonie, a déclaré Tammy Horton.- Long et méticuleux -Environ 90% des 5.000 espèces animales recensées dans la CCZ étaient nouvelles pour la science, selon le premier bilan publié en 2023 dans la revue Nature Ecology and Evolution.L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), fondée sous l’égide de l’ONU, s’est fixé pour objectif de décrire plus d’un millier d’espèces d’ici à 2030 dans les régions convoitées par l’industrie. Chaque animal doit être esquissé, disséqué et doté d’un “code-barres” moléculaire, sorte d’empreinte ADN pour permettre à d’autres chercheurs de l’identifier. Il a fallu un an à Tammy Horton et une équipe pour décrire 27 amphipodes, sorte de petit crustacé, sur plus d’une centaine encore sans nom.Mais l’AIFM, censée finaliser cette année son code minier, est pressée d’aller plus vite, alors que l’entreprise canadienne The Metals Company prévoit de soumettre la toute première demande d’exploitation en juin.Pour l’association Fauna & Flora, l’exploitation risque de perturber la chaîne alimentaire, voire accentuer le changement climatique en libérant le carbone contenue dans les sédiments, source de réchauffement supplémentaire. – Souvenirs de la guerre froide -Le plus ancien site minier expérimental est une bande de fond excavée dans le plus grand secret en 1979.Selon Daniel Jones, autre professeur du NOC qui a fouillé les archives pour le localiser, l’expérimentation est née d’une complexe manigance de la CIA pour récupérer un sous-marin nucléaire russe.Après avoir fait semblant de mener une exploration minière en guise de couverture, la CIA avait décidé de louer le navire pour une véritable tentative, raconte Daniel Jones, qui a retrouvé une vieille photo de la machine d’environ huit mètres de large qui a raclé les fonds.Son équipe s’est rendue sur place en 2023 et a constaté que les traces, plus de 40 ans après, étaient encore visibles sur le plancher océanique.Il y avait “les premiers indices d’un rétablissement biologique” le long des sillons, a déclaré M. Jones, mais la densité de population animale n’avait pas retrouvé sa densité normale.Les nodules eux-mêmes se sont probablement formés il y a des millions d’années: des fragments solides – dent de requin, os d’oreille de poisson – se sont déposés sur les fonds, puis agrandis à un rythme infiniment lent par l’accumulation de minéraux dans l’eau.Mais selon le Conseil consultatif des académies européennes des sciences (EASAC), le besoin en nodules pour la transition énergétique a été exagéré.Une fois lancée, l’exploitation des grands fonds marins sera difficile à arrêter, met en garde Michael Norton, directeur de l’environnement à l’EASAC: “C’est une voie à sens unique. Une fois engagé, on ne fait plus demi-tour de son plein gré”.

En Allemagne, un paysan péruvien devant la justice face à un géant de l’énergie

Dix ans après le début de son combat judiciaire, un paysan péruvien a fait face lundi devant la justice allemande au géant de l’énergie RWE, à qui il demande de réparer les effets du changement climatique dans les Andes.Pour cette affaire emblématique, très suivie par les défenseurs de l’environnement, Saul Luciano Lliuya a fait le déplacement au tribunal de Hamm, dans le nord-ouest de l’Allemagne, loin de sa ferme de Huaraz, dans l’ouest du Pérou.Selon l’ONG Germanwatch, qui soutient l’agriculteur, sa maison est menacée par la fonte des glaciers des Andes, qui ont déjà fait “remonter dangereusement à plusieurs reprises” le niveau du lac Palcacocha situé au-dessus de sa ville.”Les glaciers sont en train de fondre, de disparaître petit à petit”, a dit l’agriculteur de 44 ans, père de deux enfants, lundi avant l’audience.”Certains lacs comme celui de Palcacocha sont devenus un risque pour moi et pour plus de 50.000 personnes qui vivent dans cette zone”, a-t-il déclaré devant un décor en carton représentant des glaciers.M. Lliuya et Germanwatch demandent à RWE, l’un des principaux groupes énergétiques d’Allemagne, de participer symboliquement aux travaux pour réduire le niveau d’eau du lac.- Quote-part des émissions -Motif: bien qu’il n’ait aucune centrale au Pérou, le conglomérat fait partie des trois plus grands émetteurs de gaz à effet de serre en Europe, et est responsable de 0,47% des émissions mondiales, selon un rapport.Les plaignants exigent donc de RWE une quote-part correspondante de 17.000 euros aux 3,5 millions d’euros de travaux.La première journée d’audience a été consacrée à l’analyse des risques climatiques dans la région de Huaraz, et notamment celui d’un débordement du lac glaciaire, a expliqué un avocat du camp des plaignants.Les réponses des deux experts mandatés par le tribunal à des questions essentiellement géologiques sont cruciales pour la suite de l’affaire.Le tribunal doit en effet d’abord évaluer le risque de crue pour la maison de M. Lliuya. Si celui-ci est considéré comme sérieux, il examinera ensuite dans quelle mesure le changement climatique et les émissions de RWE contribuent à une potentielle inondation.Selon Noah Walker-Crawford, chercheur de la Londons School of Economics engagé auprès des plaignants, les experts “reconnaissent qu’il existe un risque” que la maison du paysan subisse une inondation en raison de “la fonte des glaciers”.Une deuxième et dernière journée d’audience est prévue mercredi. Une décision est possible dès ce jour mais “il est plus probable” que les juges se prononcent “d’ici trois ou quatre semaines”, a estimé Noah Walker-Crawford.Fin 2017, l’agriculteur avait obtenu un premier succès lorsque sa requête avait été jugée recevable en appel, après avoir été retoquée en première instance.Cette décision avait suscité l’espoir des militants de l’environnement d’en faire un cas précurseur de “justice climatique mondiale”, concept politique selon lequel le Nord pollueur doit dédommager les pays du Sud victimes de la pollution.Depuis, la procédure a avancé lentement, ralentie notamment par la pandémie de Covid-19.”Je n’aurais jamais pensé que cela prendrait autant de temps”, a dit avant le procès Saul Luciano Lliuya, qui a déposé plainte il y a près de dix ans.- “Juridiquement inadmissible” -De son côté, l’énergéticien allemand juge la requête “juridiquement inadmissible”.Pour le groupe qui exploite en Allemagne plusieurs mines de lignite, un minerai très polluant, il n’est “pas possible d’attribuer juridiquement les effets spécifiques d’un changement climatique à un seul émetteur”.Le groupe soutient notamment qu’il a toujours respecté les réglementations nationales sur les émissions de gaz à effet de serre et s’est fixé l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2040. RWE s’est notamment engagé à cesser la production d’électricité au charbon d’ici à 2030 dans le bassin rhénan, tout en investissant massivement dans l’éolien et le solaire.Avec cette procédure, Germanwatch dit vouloir faire “pression” pour forcer les responsables politiques “à agir et à dire que, oui, les grands émetteurs sur cette planète doivent finalement contribuer sur le principe de pollueur-payeur”, a déclaré lundi Christoph Bals, directeur politique de l’ONG.Les litiges contre gouvernements et sociétés polluantes se multiplient ces dernières années.

Terres rares: face au monopole chinois, une usine de recyclage franco-japonaise en construction en France

Pour échapper au monopole chinois sur les métaux stratégiques, la startup lyonnaise Carester a posé lundi la première pierre d’une usine de recyclage de terres rares à Lacq (sud-ouest), pour alimenter les filières de l’automobile ou des éoliennes, avec des financements japonais et français.Objectif affiché, la souveraineté. L’usine Caremag, permettra “de se doter d’une technologie sur laquelle la Chine est en position monopolistique puisqu’elle fournit 98% du marché européen”, a indiqué la ministre de la transition écologique Agnès Pannier-Runacher, qui a soutenu le projet dès sa conception lorsqu’elle était ministre de l’Industrie.Les terres rares et les aimants permanents, qui résistent à la démagnétisation, jouent un rôle-clé dans la transition énergétique, mais aussi dans l’industrie électronique, pour les moteurs de véhicules électriques, les générateurs d’éoliennes, la robotique ou les pompes.L’usine commencera de produire fin 2026, début 2027. A terme, elle devrait employer 92 personnes pour recycler 2.000 tonnes par an d’aimants permanents afin de produire quelque 800 tonnes de terres rares légères (néodyme et praséodyme). Elle devrait aussi raffiner 5.000 tonnes de concentrés miniers pour produire 600 tonnes de terres rares lourdes séparées (oxydes de dysprosium et terbium), soit environ 15% de la production mondiale actuelle. Au total, le projet a reçu 216 millions d’euros de financements japonais et français.Quelque 110 millions sont apportés par les sociétés japonaises partenaires Jogmec (organisation publique pour la sécurité des métaux et de l’énergie) et le trader en métaux Iwatani. Et 106 millions d’euros viennent de l’Etat français sous forme de subventions et avances remboursables dans le cadre des appels à projets France Relance et France 2030, ainsi qu’un crédit d’impôt industrie verte.Selon l’entreprise, ce sera le premier recycleur européen de terres rares et le plus gros producteur occidental de terres rares lourdes séparées.La construction, autorisée depuis 2023, “représente une avancée majeure vers l’indépendance de l’Europe en terres rares pour les aimants permanents”, a déclaré le président de Carester, Frédéric Carencotte au cours d’un bref entretien téléphonique avec l’AFP.- “partenaires long terme” -“Pour contrecarrer le risque de dumping” sur les prix, venant notamment d’industriels chinois désireux de maintenir leur monopole mondial, l’entreprise a “trouvé des partenaires long terme”, avec une “vision commune”, associant notamment l’Etat japonais et l’Etat français, a ajouté M. Carencotte.Côté européen, le groupe automobile Stellantis a ainsi signé un contrat s’engageant à acheter une partie de la production, a indiqué M. Carencotte.Côté japonais, “50% de la production” sera vendu à la société de trading japonaise partenaire, charge à elle de vendre les oxydes de terres rares lourdes produits par Caremag à “un ou des partenaires industriels japonais”, a-t-il ajouté, sans donner de nom.De son côté, Mme Pannier-Runacher a fait référence à “un partenariat stratégique de long terme comme on a su en construire avec Toyota à Valenciennes”.Sur le plan environnemental, la future usine promet des standards élevés: “Mon usine ne rejettera pas d’effluents liquides”, a assuré M. Carencotte à l’AFP. Ainsi du nitrate d’ammonium, coproduit des opérations, sera reconcentré et vendu comme fertilisant, et 80% des rejets directs de CO2 seront recyclés, a-t-il indiqué.”L’objectif n’est pas que d’extraire des métaux rares, mais également de les transformer et de les recycler”, avait indiqué dimanche le ministre de l’Industrie Marc Ferracci dans un entretien à la Tribune, consacré au développement de l’exploitation du sous-sol minier français.Ainsi en France, trois autres projets industriels visent le recyclage d’aimants permanents.La start-up MagREEsource a inauguré en juin, en Isère, la première usine-test d’Europe produisant des aimants permanents à partir d’aimants recyclés, à hauteur de 50 tonnes par an.Le groupe belge Solvay exploite par ailleurs, à La Rochelle, une usine de fabrication de produits de performance à base de terres rares. Il doit prochainement lancer la production des premières tonnes d’oxydes de terres rares pour des aimants permanents.Le groupe minier Orano a aussi lancé en 2022 le projet Magnolia, ayant pour ambition de structurer un outil industriel de fabrication d’aimants permanents haute- performance.

Au Sénégal, les machines géantes d’un groupe minier français avalent terres et désert

Dans un vacarme assourdissant, la “plus grosse drague minière au monde” et la gigantesque usine flottante d’un groupe minier français fendent les dunes du singulier désert de Lompoul, au Sénégal, une vision digne du film “Dune”.Vingt-quatre heures sur 24, les deux machines géantes aspirent le précieux sable minéralisé des dunes de ce désert. Auparavant, elles ont avalé celui contenu dans des terres agricoles fertiles avoisinantes, qui produisent la majorité des légumes frais consommés au Sénégal. La drague mobile se déplace avec l’usine flottante sur un bassin d’eau artificiel long d’un demi kilomètre, aspirant 7.000 tonnes par heure de sable brut et d’eau mélangés, une eau pompée à plus de 450 mètres de profondeur.Cette mine colossale et itinérante du groupe minier français Eramet a causé depuis 2014 le déplacement de milliers d’habitants et paysans dans cette région agricole aux écosystèmes fragiles. Elle a aussi engouffré des kilomètres de terres le long de la côte atlantique de ce pays – l’impressionnant tracé de l’avancée de la mine étant visible depuis l’espace.  C’est l’histoire d'”un désespoir et d’une désillusion qu’on a eu avec ce projet”, lance à l’AFP Gora Gaye, 47 ans, maire de la communauté rurale de Diokoul Diawrigne, qui englobe le magnifique désert de Lompoul, l’un des plus petits au monde, un écosystème unique de dunes balayées par la brise de l’océan.Cet atout d’écotourisme dans ce pays en partie sahélien est actuellement défiguré par la mine. Depuis 2014, le groupe minier exploite ces dunes – utilisant la “plus grosse drague minière au monde” selon Eramet – pour en extraire les minéraux (zircon, ilménite, rutile et leucoxène), exportés à travers le monde pour le marché du bâtiment et ses dérivés, la métallurgie, la céramique.Une équipe de l’AFP a eu un accès rare aux installations de la mine, composée de la drague, de l’usine flottante de séparation des sables minéralisés et non minéralisés, d’une autre usine séparant les différents minerais par tri magnétique et électrostatique, d’un tronçon de chemin de fer privé jusqu’au port de Dakar, de logements, bureaux, routes sillonnées de véhicules 4X4, dénotant avec le calme de cette région arpentée par les dromadaires, les vipères et les oiseaux marins.Pendant des années, le sort des villageois déplacés et leur mobilisation dénonçant un accaparement des terres et un système de compensation “dérisoire” ont été peu écoutés, voire étouffés, à la faveur d’autorités locales et nationales complaisantes, dénoncent les détracteurs de la mine.- Écosystème unique -Mais la controverse a récemment pris une ampleur nationale quand la mine est entrée dans la zone du désert de Lompoul (nord). Se joignant aux paysans, des élus locaux et entrepreneurs notamment dans le tourisme ont dénoncé vivement l’impact de ces activités. Fin janvier, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye lui-même a fait des déclarations fortes en Conseil des ministres au sujet de l’industrie extractive. “L’exploitation des ressources minières dans plusieurs localités du pays ne participe pas activement au développement territorial et ne profite pas aux populations locales”, a-t-il lancé.Lors du Conseil du 12 mars, il a donné des directives à ses ministres sur la “transparence dans la gouvernance des ressources naturelles”, leur demandant de “veiller à la gestion optimale des impacts environnementaux et sociaux de l’exploitation minière et pétrolière sur le bien-être des populations”.Se réclamant du souverainisme et élu en 2024 sur un agenda de rupture avec les pratiques du passé, le nouveau pouvoir au Sénégal est scruté sur d’éventuelles décisions concernant les activités d’EGC. C’est en 2004 que les autorités sénégalaises en place à l’époque ont accordé au groupe minier – détenu à 27% par l’Etat français et 4ème producteur mondial de zircon – cette concession pour y exploiter ce convoité sable minéralisé. L’Etat du Sénégal détient 10% du capital de la filiale sénégalaise d’Eramet, Grande Côte Opérations (GCO), renommée depuis Eramet Grande Côte (EGC).”La mine, elle avance; le sort des personnes quand la mine est passée ce n’est plus le problème” d’Eramet, estime Cheikh Yves Jacquemain, hôtelier franco-sénégalais et propriétaire d’un écolodge de tentes traditionnelles dans le désert.A 150 mètres seulement de son campement, les deux machines tournent à plein régime. Parmi les sept sites d’hébergement touristique de Lompoul, six ont accepté le dédommagement de EGC ou une relocalisation. M. Jacquemain est toujours en négociation avec EGC pour obtenir des compensations financières “justes”, pour lui et ses 40 employés.Le groupe minier est accusé de “dégrader les dunes et les sols”, de “menacer les ressources hydriques”, ainsi que la sécurité alimentaire et les activités économiques.Des communautés pointent une détérioration de leurs conditions de vie. L’une des récriminations est un système d’indemnisation jugé “dérisoire”, basé sur un barème national datant des années 70 et qui ne valorise pas la terre agricole par rapport à la perte irrémédiable de revenus provenant de ces zones fertiles. – “Entreprise responsable” -EGC répond à l’AFP qu’en “entreprise responsable”, le groupe indemnise les habitants “cinq fois plus” l’hectare nu que ce barème national, et qu’au total l’indemnisation moyenne est de 8 à 10 millions de FCFA l’hectare (entre 12.190 et 15.240 euros).Le maire de Diokoul Diawrigne indique à l’AFP que lui et sa communauté ont rejeté en 2022 l’étude d’impact environnementale présentée par GCO lors d’une audience publique. Mais l’étude a malgré tout été validée au niveau ministériel à l’époque. Reconnaissant qu'”au début” le projet minier avait suscité “un espoir” parmi la population, il n’a apporté, selon lui, que des “promesses non tenues, une destruction de notre écosystème, des intimidations, des déplacements de villages de manière catastrophique et un recul sur le plan du développement économique dans la zone des Niayes”. Les détracteurs de la mine s’inquiètent du bouleversement de cet écosystème d’une biodiversité rare, composé de cuvettes interdunaires, des oasis où les sols permettent une agriculture “qui a produit jusqu’à un passé récent 80% des légumes frais consommés au Sénégal”.Au fil des années, les habitants déplacés ont été relogés dans “quatre grands nouveaux villages” équipés de commodités, “un total de 586 maisons et des infrastructures communautaires (centre de santé, école, etc…) ont été construites à ce jour” par le groupe minier et 3.142 personnes sont concernées, indique EGC.  Réunis sur la place du village des “recasés” de Foth, à 120 km au nord de Dakar, un alignement de concessions en dur sur une zone dépourvue de végétation, Omar Keïta et une vingtaine d’autres chefs de familles déplacées ont visiblement besoin d’exprimer leur colère.”On veut retourner sur nos terres et que notre village soit reconstruit pour retrouver notre vie d’avant… Je lance un appel au président du Sénégal et même à la France!”, s’exclame Omar, 32 ans, visage soucieux.Il ose à peine montrer la chambre – “prêtée par son grand frère” – et la promiscuité où il vit “depuis six ans” avec sa femme et ses trois enfants: un lit, une commode, et un matelas pour lui par terre. Il déclare qu’on ne lui a pas attribué de maison. Des affirmations que nie le directeur général de EGC, Frédéric Zanklan: “chaque famille est relogée selon l’état de la famille au moment du recensement”, dit-il à l’AFP, ajoutant que si les familles s’agrandissent “ce n’est pas de leur fait”. – Appel au président –  Omar réplique qu’avant son déplacement, il “avait (ses) champs et (sa) maison”. “On gagnait nos vies dignement mais GCO a remis ma vie à zéro, je dois tout reconstruire…”.  “Le sol était fertile dans notre village, mais ici je suis même obligé d’aller travailler dans les champs d’autres personnes”, indique-t-il.   Dans la cour de sa concession, Ibrahima Ba, 60 ans, ne décolère pas non plus: “nous avons régressé dans tous les sens”. “Je suis toujours agriculteur. La différence est que dans mon village, le sol était très fertile, l’eau était douce, on n’avait aucun problème”. “Nous demandons au président Diomaye Faye et à son Premier ministre de venir en aide à la population de Foth et des Niayes; nous croyons qu’ils peuvent faire quelque chose parce que c’est un pays étranger qui veut détruire la vie des citoyens sénégalais”, lâche-t-il.Dans un entretien à l’AFP, M. Zanklan déclare que la société est “dans un cadre tout à fait légal” dans ses activités, qui “respectent la convention minière” signée avec le gouvernement.  “C’est un projet qui bénéficie au Sénégal”, plaide-t-il. EGC affirme avoir “généré 149 millions d’euros de retombées économiques pour le Sénégal en 2023”, et avoir versé “25 millions d’euros sous forme d’impôts, de taxes et de dividendes” sur un chiffre d’affaires de la société de 215 millions d’euros en 2023.       Il met en avant les “près de 2.000 personnes qui travaillent au niveau de la mine et des usines de séparation, dont 97% sont des Sénégalais, et 48% de ces travailleurs proviennent du bassin d’emploi local”, affirme-t-il. En 2023, l’Initiative pour la transparence dans l’industrie extractive (ITIE) a classé EGC comme 4ème contributeur minier au budget de l’Etat du Sénégal, souligne-t-il.La société indique aussi être “la première entreprise minière à restituer les terres valorisées au Sénégal”, après un processus de réhabilitation constaté par l’AFP sur une partie de la zone avec des essences d’arbres permettant une diversification des cultures. Mais les communautés déplorent que les terres ne leur sont pas “rendues”, mais remises à l’Etat sénégalais – la terre étant propriété de la Nation dans ce pays et les paysans qui l’exploitent en ayant l’usufruit.  – “Un moratoire” -Dans la même région, arpentant un champ sans culture et montrant des mares brunâtres, Serigne Mar Sow déplore les “dégâts incommensurables” de la mine, selon lui.L’eau pompée pour la drague est redéversée dans le bassin artificiel et s’infiltre vers la nappe phréatique superficielle. EGC assure ainsi que les activités maraîchères “en bénéficient”.  “On cultivait ici des légumes et des bananes et vous voyez que toutes les plantes sont mortes, c’est à cause de cette eau qui inonde nos champs car la drague de GCO se trouve à 2,5 km d’ici”, se désole pour sa part M. Sow. “Le sol n’est plus fertile”.Montrant des plants de manioc et des bananiers morts, il accuse cette eau redéversée de contenir des “produits chimiques”.”Il y a 15 à 20 parcelles qui ont été abandonnées à cause de cette eau qui remonte. Il y a une diminution drastique de nos espaces de récolte” et des emplois afférents. De son côté, EGC affirme que le processus d’extraction “est purement mécanique” et qu'”aucun produit chimique n’est utilisé”.Aujourd’hui, le maire de Diokoul Diawrigne “demande à l’Etat de faire un moratoire, d’arrêter la mine pour un moment, et qu’on évalue via des études sérieuses l’ensemble des dégâts qui ont été causés et qui vont l’être, en comparaison à ce que cela a rapporté à l’Etat et aux communautés”.   “Il ne faut pas qu’on ferme les yeux sur ce drame; quel que soit ce que le Sénégal gagne dans cette affaire, il faudra se tourner vers les communautés, voir ce qu’elles sont en train de vivre et les accompagner”. Frédéric Zanklan estime de son côté qu’il n’y a “pas besoin de moratoire”. “S’il y a des inquiétudes, toute autorité peut venir voir par elle-même”.Il précise que le groupe espère augmenter la capacité d’absorption de la drague à 8.500 tonnes par heure à partir de 2026.Un moratoire, “cela voudrait dire 2.000 personnes au chômage et l’arrêt des retombées économiques pour l’Etat du Sénégal: ce serait irresponsable alors que le pays a vraiment besoin de se développer”, estime-t-il. En attendant, de jour comme de nuit, la drague continue à engouffrer les dunes de Lompoul avec fracas, loin de la quiétude passée du plus petit désert d’Afrique. 

Des champs connectés: au Nigeria, les promesses d’une agriculture 2.0

Température ambiante, pH du sol, irrigation de la terre… Dandam Nangor n’a plus besoin de se rendre dans ses serres de poivrons: il lui suffit de dégainer son téléphone pour déterminer quand arroser, appliquer engrais ou pesticides, refroidir ou réchauffer l’air.Depuis un an, ce Nigérian de 34 ans qui conjugue son métier d’analyste informatique à son activité agricole utilise un nouvel outil d’intelligence artificielle développé par une start-up locale dont objectif est de faire basculer la région de Jos, dans le centre du Nigeria, vers une agriculture 2.0.Jos, capitale de l’Etat de Plateau, située à plus de 1.000 mètres d’altitude, est réputée pour son climat clément et son agriculture maraîchère dont les fruits et légumes se retrouvent sur les étals des grandes villes du pays.Mais là, comme ailleurs, le dérèglement climatique fait payer un lourd tribut aux agriculteurs, confrontés à une alternance de périodes de sécheresse, d’épisodes d’intenses pluies et d’intempéries imprévisibles, compromettant la sécurité alimentaire du pays le plus peuplé d’Afrique dont l’agriculture représente plus de 20% du produit intérieur brut.- Application mobile -Depuis qu’il a installé l’outil développé par la société Green Eden, Dandam Nangor “arrive à réguler” la quantité d’eau pour ses poivrons et sa récolte a augmenté de “400 kilos”.Dans la serre, des sondes plantées dans le sol communiquent des données à une unité centrale qui traite et envoie les informations sur l’application mobile.”Le problème est le changement climatique et ses perturbations”, explique Stephanie Meltus, fondatrice de Green Eden dont la solution a été déployée dans plus de 70 exploitations agricoles grâce à des financements de proches puis de fondations et d’entreprises.Cette étudiante en pharmacie de 21 ans est convaincue que l’avenir de l’agriculture passe par les nouvelles technologies et veut “combler le fossé” d’une Afrique “toujours connue pour son retard”.Depuis quelques années, dans le monde entier, le secteur de l’agritech, ou agriculture de précision, attire les investisseurs et mobilise des gouvernements, en portant la promesse de résoudre les nombreux défis du secteur.Les nouvelles technologies permettent “de rassembler beaucoup de données en peu de temps” et de “prendre des décisions informées qui permettent de maximiser les ressources”, estime Nuhu Adamu Gworgwor, professeur d’agronomie à l’Université de Jos.La plupart des agriculteurs gèrent de petites exploitations, en dessous de deux hectares, rappelle-t-il, et de nombreux Nigérians pratiquent une agriculture vivrière de subsistance, ce qui les rend d’autant plus vulnérables au changement climatique.”A cause de la sécheresse, des cultures que nous avions avant ici disparaissent, les récoltes s’effondrent et les fermiers quittent les champs”, souligne le professeur.- “Meilleure décision” -A Jos, Miriam Agbo, 24 ans, a fondé Anatsor pour les élevages avicoles, en y investissant ses fonds propres ainsi que ceux de sa famille et d’amis. Des capteurs “collectent des données comme la température, l’humidité, la qualité de l’air et de l’eau” dans les élevages et les transmettent à une application mobile.”Cela réduit la charge de travail des agriculteurs”, assure la jeune femme, qui a lancé la phase pilote de son projet dans une dizaine d’exploitations.”A cause du changement climatique, les variations de température affectent les poules” qui “ne mangent pas s’il fait trop chaud” et “peuvent s’asphyxier en se serrant les unes aux autres” lorsqu’il fait trop froid.Adopter ce système a été “la meilleure décision de ma vie”, affirme Mercy Atsuku Msenhemba, depuis le hangar qui abrite ses poules pondeuses.Elle “reçoit des notifications” lui disant quand changer l’eau, réchauffer ou refroidir l’air, et n’a “plus besoin de se lever au milieu de la nuit pour venir surveiller” ses volailles. Leur mortalité a drastiquement baissé, tout comme son “niveau de stress”.A 150 dollars, le système d’Anatsor est “abordable” et “vaut le coup”.- Eduquer, investir -Gambo Wadams Zakka, étudiant en littérature anglaise à Jos, a conçu un système mêlant imagerie satellitaire, capteurs et intelligence artificielle baptisé AgriTech Innovator et cherche des fonds pour le finaliser. Son système enverra “des SMS pour prévenir l’agriculteur d’une invasion de nuisibles” afin qu’il “applique rapidement des pesticides”. Les alertes SMS donneront aussi les prix des denrées au marché local, permettant à l’agriculteur de décider “quand vendre au meilleur prix”.Un outil “parfait”, selon Michael Inyam Itsegok, qui cultive patates, bananes, et concombres depuis 25 ans et compte sur cette nouvelle technologie pour surmonter les “pertes” liées aux aléas météorologiques.Les voix critiques de l’agritech, qui estiment que les nouvelles technologies ne promeuvent pas de bonnes pratiques environnementales comme l’agroécologie, rencontrent peu d’écho au Nigeria où 33 millions d’habitants auront besoin d’aide alimentaire en 2025, selon le Programme alimentaire mondial.Malgré un enthousiasme palpable, la révolution technologique agricole semble encore loin dans un pays où l’innovation repose sur des initiatives individuelles plutôt que sur des politiques publiques d’investissement et où le taux de connectivité à internet n’atteint que 40%, beaucoup moins en zones rurales.Stephanie Meltus reconnaît d’ailleurs le besoin de “former” et “éduquer” les agriculteurs à ces nouveaux outils, y compris comment “simplement naviguer sur une application mobile”.

IA: l’américain Oracle investit 5 milliards de dollars pour “aider” le Royaume-Uni

Le groupe américain Oracle, dont le président Larry Ellison est un soutien historique de Donald Trump, a annoncé lundi investir 5 milliards de dollars sur cinq ans dans les infrastructures “cloud” au Royaume-Uni, disant soutenir “la vision du gouvernement britannique pour un avenir axé sur l’intelligence artificielle”.Le Premier ministre britannique Keir Starmer avait annoncé mi-janvier vouloir attirer les entreprises de l’IA en leur laissant tester sur son sol leurs innovations avant toute régulation, faisant fi des préoccupations éthiques et sécuritaires autour de cette technologie.Cet investissement doit permettre de “répondre à la demande en croissance rapide” du “cloud” (informatique à distance) au Royaume-Uni et “d’aider le gouvernement britannique à concrétiser sa vision en matière d’innovation et d’adoption de l’IA”, explique l’entreprise dans son communiqué.Il témoigne du maintien de bonnes relations entre les Etats-Unis de Donald Trump et le Royaume-Uni du travailliste Keir Starmer, au moment où l’Union européenne est ciblée par Washington, notamment en raison de sa régulation des géants du numérique.Le dirigeant britannique s’efforce de ménager son tonitruant homologue américain depuis son retour au pouvoir fin janvier. Il espère négocier avec lui un accord économique qui permettrait à Londres d’échapper aux droits de douane des Etats-Unis.Le ministre britannique au Commerce Jonathan Reynolds est d’ailleurs attendu mardi à Washington pour des discussions sur le sujet.Fondé en 1977 dans la Silicon Valley, Oracle était à l’origine spécialisé dans la gestion de bases de données, avant de devenir depuis le milieu des années 2010 un acteur majeur du “cloud”, essentiel à l’IA.Son fondateur, le multimilliardaire Larry Ellison, grand ami de Donald Trump, est impliqué dans le projet géant d’infrastructures pour l’IA, Stargate, avec la société japonaise SoftBank et OpenAI.Quelque 500 milliards de dollars sont annoncés dans ce projet pour la construction et la gestion de centres de données, une annonce présentée en grande pompe par Donald Trump fin janvier.Le projet Stargate offre un accélérateur majeur à Oracle qui, s’il est un acteur reconnu du cloud, pèse moins de 5% du marché mondial, bien loin du trio composé de Google, Microsoft et Amazon, qui en contrôlent près des deux tiers.

La Bourse de Paris en petite hausse, profitant des plans d’investissements en Europe

La Bourse de Paris évolue en petite hausse lundi, soutenue par les plans d’investissements prévus en Europe, sur fond de tensions commerciales avec l’administration Trump toujours présentes dans l’esprit des investisseurs.L’indice vedette CAC 40 prenait 0,30%, soit 23,75 points à 8.052,03 points vers 09H45. Vendredi, il avait terminé en nette hausse de 1,13%, à 8.028,28 points.Pour John Plassard, spécialiste de l’investissement pour Mirabaud, “les investisseurs semblent (…) rassurés de la formation d’un gouvernement de coalition en Allemagne et que l’agence Fitch Ratings ait laissé la note de la France intacte”.Le plan d’investissements géant du futur chancelier Friedrich Merz destiné à réarmer et moderniser l’Allemagne, très attendu par les partenaires du pays, est désormais sur de bons rails grâce à un accord politique conclu in extremis vendredi.Le chef des conservateurs a obtenu vendredi des députés écologistes qu’ils acceptent de lever leur veto à son “bazooka” de centaines de milliards d’euros, un programme de dépense sans précédent pour la première économie européenne.Par ailleurs, l’agence de notation Fitch a maintenu vendredi soir la note souveraine “AA-” de la France, qu’elle avait assortie en octobre d’une “perspective négative”, le gouvernement se disant aussitôt “déterminé” à poursuivre le redressement des finances publiques.La perspective négative attribuée le 11 octobre était une menace d’abaissement de la note qui ne s’est pas concrétisée cette fois.Mais la guerre commerciale avec l’administration Trump reste un point d’attention pour les investisseurs, et devrait “continuer au moins à court terme, provoquant notamment une flambée des anticipations d’inflation”, estime Christopher Dembik, conseiller en investissement chez Pictet AM.Le président américain a affirmé dans la nuit de dimanche à lundi n’avoir “aucune intention” d’assouplir les droits de douane de 25% imposés aux partenaires commerciaux des Etats-Unis sur l’acier et l’aluminiumLa semaine sera par ailleurs riche en décisions de politique monétaire, avec notamment la réunion de la Réserve fédérale américaine (Fed) mardi et mercredi, mais aussi celle de la Banque du Japon mercredi, de la Banque d’Angleterre, la Banque Nationale Suisse et de la Riksbank (la Banque de Suède) jeudi.Le luxe mécontentLes poids lourds du luxe, très exposés au marché chinois, fléchissent lundi à la Bourse de Paris face aux indicateurs en demi-teinte venant de Pékin.La Chine avait présenté dimanche un plan d’action visant à relancer la consommation des ménages en berne et à l’aider à atteindre ses ambitieux objectifs de croissance. Mais les marchés ont calmé leur optimisme après la publication d’une série d’indicateurs économiques en demi-teinte en Chine. Si les ventes au détail, un indicateur clé du moral des consommateurs, ont progressé de 4% sur un an en janvier et février, le taux de chômage urbain, principal indicateur de l’emploi en Chine, a quant à lui grimpé à 5,4% en février, son plus haut niveau depuis deux ans.Vers 09H45, LVMH reculait de 0,50% à 602,10 euros, Hermès perdait 1,24% à 2.478 euros et Christian Dior SE cédait 0,63% à 556 euros. Le groupe de cosmétiques L’Oréal perdait 1,08% à 362,95 euros.Kering perdait quant à lui 1,39% à 220,45 euros. Vendredi, l’action du groupe avait déjà terminé en chute de plus de 10%, les investisseurs doutant de la capacité du styliste Demna Gvasalia, choisi comme nouveau directeur artistique de Gucci, à redresser la marque phare du groupe de luxe.

L’UE cherche à mobiliser pour la transition et la reconstruction de la Syrie

L’Union européenne réunit lundi à Bruxelles une conférence des donateurs sur la Syrie, occasion pour les Européens de favoriser une mobilisation internationale en faveur de ce pays, dévasté par plus d’une décennie de guerre.La prise du pouvoir par une coalition dominée par les islamistes et dirigée par Ahmad al-Chareh, le 8 décembre, a mis fin à la dictature du clan Assad après un règne sans partage sur la Syrie pendant plus d’un demi-siècle. Cette neuvième édition de la conférence des donateurs accueille pour la première fois des représentants du pouvoir à Damas. C’est le ministre syrien des Affaires étrangères, Asaad al-Chaibani, qui représentera son pays à Bruxelles.”Cette année, bien sûr, la conférence sera différente”, a indiqué un responsable de l’UE. “Il y a une fenêtre d’opportunité. Elle n’est pas très grand ouverte, nous devons donc en profiter, autrement il sera trop tard”, a-t-il ajouté.La transition est difficile dans ce pays divisé entre plusieurs communautés religieuses. Des massacres ont été commis ces dernières semaines dans l’ouest, les pires violences depuis l’arrivée de cette coalition menée par le groupe islamiste sunnite Hayat Tahrir al-Cham (HTS).Les forces de sécurité, des groupes armés alliés ou des djihadistes étrangers ont été rendus responsables de ces violences qui ont fait, selon une ONG, près de 1.400 morts civils, principalement au sein de la communauté alaouite, une branche du chiisme, dont est issu l’ancien président Bachar al-Assad.Les Vingt-Sept, qui ont très vite après le 8 décembre décidé de soutenir la transition en Syrie, veulent y voir un incident isolé, selon des diplomates. Ils ont salué la nomination d’une commission d’enquête et indiqué que “tout (devait) être fait pour éviter que de tels crimes se reproduisent”, selon un communiqué.”Il est nécessaire de continuer à lever les sanctions. Parce que vous savez s’il y a de l’espoir pour les gens, il y a aussi moins de chaos et pour avoir cet espoir vous avez besoin que tous les services leur soient fournis comme les services bancaires par exemple”, a souligné la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas, à son arrivée à Bruxelles.Mais les 27 sont toutefois prêts à reconsidérer la levée progressive des sanctions imposées à la Syrie, décidée fin février, si d’autres violences de ce type devaient se reproduire, selon des diplomates.La France a ainsi affirmé mercredi qu’elle s’opposerait à la toute nouvelle levée de sanctions “si ces exactions devaient rester impunies”.L’Allemagne a de son côté annoncé qu’elle accorderait 300 millions d’aide supplémentaire à ce pays à peine sorti d’une guerre civile longue de près de 15 ans.- Une conférence “différente” -Les besoins sont énormes. Les Nations unies ont estimé qu’il faudrait, au rythme actuel, au moins un demi-siècle à la Syrie pour retrouver la situation économique qu’elle connaissait avant la guerre civile qui a éclaté en 2011.L’an dernier, la conférence des donateurs avait permis de mobiliser quelque 7,5 milliards d’euros pour la Syrie.Mais les efforts pour atteindre ce résultat sont compromis cette année par la décision américaine de suspendre son aide internationale. Les Etats-Unis étaient jusqu’à présent le principal fournisseur d’aide internationale à la Syrie, selon l’ONU. Ils seront représentés à la conférence lundi.”Le système global de l’aide humanitaire en général était basé sur deux piliers, l’un, très important, constitué par les Etats-Unis, et l’autre par l’UE et ses Etats membres”, a expliqué un autre responsable européen.Aujourd’hui, “l’un de ces piliers s’est considérablement réduit, voire a complètement disparu, et cela implique une réduction des fonds disponibles pour l’aide humanitaire dans le monde”, a-t-il assuré.Même avant le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, les donateurs ne fournissaient pour la Syrie qu’environ 35% de l’aide réclamée par les Nations unies.Les organisateurs de cette conférence des donateurs espèrent que les pays arabes du Moyen-Orient seront en mesure de compenser un retrait américain.