Deux employés de l’ambassade d’Israël abattus devant le Musée juif de Washington
Un homme a abattu deux employés de l’ambassade d’Israël aux Etats-Unis près du Musée juif de Washington mercredi soir, scandant des slogans pro-palestiniens lors de son arrestation, une attaque antisémite pour de nombreuses capitales et résultat, selon Israël, de “l’incitation à la haine” contre l’Etat juif dans de nombreux pays.”Deux membres du personnel de l’ambassade israélienne ont été tués de manière insensée ce soir près du Musée juif de Washington”, a annoncé la ministre de la Sécurité intérieure Kristi Noem sur le réseau social X.-“Furieuse incitation” à l’antisémitisme -Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a ordonné jeudi de renforcer la sécurité de toutes les représentations diplomatiques de son pays dans le monde, voyant dans cette attaque le résultat d’une “furieuse incitation” à la violence contre Israël, dont les actions militaires à Gaza alimentent de nombreux mouvements de protestation pro-palestiniens dans plusieurs pays, dont les Etats-Unis.”Ces horribles meurtres (…), évidemment motivés par l’antisémitisme, doivent cesser, MAINTENANT!”, a réagi pour sa part le président Donald Trump sur son réseau Truth Social. “La haine et le radicalisme n’ont pas leur place aux Etats-Unis”, a-t-il ajouté.De nombreuses capitales européennes ont exprimé leur indignation et qualifié d’antisémite cette attaque, dont le bilan aurait pu être beaucoup plus lourd puisque le tireur a réussi à entrer dans le musée après avoir été pris pour une victime, selon des témoins.Peu après 21H00 (01H00 GMT jeudi) “nous avons entendu environ 10 à 15 coups de feu”, a raconté aux médias américains Yoni Kalin. Puis “le garde de sécurité laisse rentrer ce type. Je suppose qu’ils pensaient qu’il était une victime. Il était trempé de pluie, clairement en état de choc. (…) Certaines personnes présentes lui ont apporté de l’eau. Ils l’ont fait asseoir. +Ça va ? Vous avez été blessé ? Que s’est-il passé ?+ Et il a répondu +appelez les flics+”.Puis il a sorti un keffieh, foulard de longue date emblème pro-palestinien, et dit “c’est moi qui l’ai fait, je l’ai fait pour Gaza”, a raconté un autre témoin, Katie Kalisher.Sur une vidéo circulant sur les réseaux sociaux que l’AFP n’a pas authentifiée dans l’immédiat, un homme, barbu, à lunettes, en veste et chemise blanche, est arrêté et emmené par plusieurs personnes, sans opposer de résistance. Avant de franchir la porte, il se tourne vers l’assistance et la caméra en criant à deux reprises “Libérez, libérez la Palestine” (Free! Free Palestine!).La police l’a identifié comme étant Elias Rodriguez, âgé de 30 ans et originaire de Chicago, dans le nord des Etats-Unis. Le Musée juif, qui se situe en plein centre de Washington, non loin du Capitole, accueillait lors de l’attaque une réception organisée par l’organisation juive American Jewish Committe (AJC).- Jeune couple -Yechiel Leiter, ambassadeur d’Israël aux États-Unis, a révélé devant la presse que “le couple qui a été abattu (…) au nom de la +Palestine libre+ était un jeune couple sur le point de se fiancer. Le jeune homme avait acheté une bague cette semaine avec l’intention de demander sa petite amie en mariage la semaine prochaine à Jérusalem”.L’ambassade a publié sur X une photo du couple souriant et le ministère israélien des Affaires étrangères les a identifiés comme étant Yaron Lisinsky, Israélien — détenteur également d’un passeport allemand, selon Berlin — et Sarah Lynn Milgrim, citoyenne américaine de confession juive.”Ne vous y trompez pas: nous retrouverons les responsables et les traduirons en justice”, a écrit sur X le Secrétaire d’Etat Marco Rubio, laissant entendre qu’il pourrait y avoir d’autres responsables que le tireur.”Il existe un lien direct entre l’incitation à la haine antisémite et anti-israélienne, et ce meurtre. Cette incitation est également le fait de dirigeants et de responsables de nombreux pays et organisations internationales, particulièrement en Europe”, a dénoncé le chef de la diplomatie israélienne Gidéon Saar, en référence aux nombreuses protestations dans le monde contre l’offensive israélienne contre Gaza.- Extrême gauche -Depuis les attaques du 7 octobre 2023 du Hamas contre Israël et les ripostes israéliennes contre Gaza qui ont fait plus de 50.000 morts selon le mouvement islamiste, les Etats-Unis ont connu une vague de mobilisation pro-palestinienne, notamment sur les campus universitaires, et une forte hausse des actes antisémites, dénoncée par la précédente administration démocrate de Joe Biden.L’extrême gauche en particulier s’est mobilisée en faveur des Palestiniens et contre l’offensive israélienne.Jeudi, le parti d’extrême gauche américain “Party for Socialism and Liberation” (PSL), tout en admettant que M. Rodriguez avait milité “brièvement” dans ses rangs en 2017, s’est défendu sur X de tout lien avec l’attaque et dit que le suspect n’était pas membre du parti.
Russie: Lioudmila, 84 ans, face à ses juges pour avoir demandé “la paix”
“J’ai extrêmement mal pour mon pays”, dit Lioudmila, 84 ans, depuis son appartement de Saint-Pétersbourg. Survivante du siège de Léningrad, elle doit être jugée à cause d’une pancarte réclamant “la paix”, en pleine offensive russe en Ukraine.Vêtue d’un cardigan bordeaux et soigneusement maquillée, Lioudmila Vassilieva, cheveux courts et gris, montre l’objet du délit: une pancarte avec un texte écrit à la main, qui lui vaut d’être jugée pour avoir “discrédité” l’armée, comme des milliers d’autres depuis le début de l’offensive de Moscou en Ukraine en 2022.Il y est écrit en russe: “A tous. Arrêtons la guerre ! Nous sommes responsables de la paix sur Terre !” Le tout est signé: “Avec amour, Lioudmila, enfant de Léningrad assiégée”, dans une référence compréhensible par tous les Russes au terrible siège nazi de Léningrad (nom de Saint-Pétersbourg à l’époque soviétique) pendant la Seconde Guerre mondiale.Lioudmila Vassilieva a brandi sa pancarte en mars dernier dans le centre de la deuxième ville de Russie.La grand-mère de quatre petits-enfants s’est rendue coupable d’avoir porté le “discrédit sur l’armée” russe. D’après l’article 20.3.3 du Code administratif, elle risque une amende allant de 30.000 à 50.000 roubles (de 330 à 550 euros, environ).Amnesty International, ONG que la Russie a interdite lundi, estimait en 2023 que ce délit est “utilisé pour criminaliser l’expression de toute opinion critique de l’invasion” de l’Ukraine.- “Trahison”, “extrémisme”-Le procès de Lioudmila Vassielieva doit avoir lieu vendredi à Saint-Pétersbourg. Il s’inscrit dans un contexte de répression des voix dissidentes, alors que l’offensive russe a fait des dizaines de milliers de morts et blessés, civils comme militaires, des deux côtés. Les arrestations pour “espionnage”, “trahison”, “sabotage”, “extrémisme” ou pour des critiques visant l’armée se sont multipliées au cours des trois dernières années.La justice russe a notamment condamné en novembre dernier à cinq ans et demi de prison ferme une pédiatre âgée de 65 ans de Moscou. Elle était accusée par la mère d’un de ses patients d’avoir critiqué l’assaut russe en Ukraine au cours d’une consultation.Lioudmila Vassilieva plaide, elle, la “non-indifférence” pour expliquer son geste. “J’ai toujours été quelqu’un qui n’est pas indifférente. J’ai toujours été du côté des faibles, tout comme ma maman”, explique-t-elle.Dans son clair et grand appartement de Saint-Pétersbourg, deux élégants chats batifolent au milieu des livres. Il y a aussi le portrait de sa mère, qui a survécu au siège de Léningrad avec cinq enfants sur les bras, dont la petite Lioudmila.”Maman disait toujours: +nous pouvons tout supporter, pourvu qu’il n’y ait pas la guerre+”, dit-elle à l’AFP, en se remémorant cet épisode tragique de la Seconde Guerre mondiale au cours duquel entre 600.000 et 1,5 million de personnes sont mortes, de faim pour la plupart. “Il arrivait à maman de donner son sang pour obtenir une ration supplémentaire”, raconte Lioudmila.- “Je n’ai pas peur” -Après la Seconde Guerre mondiale, “on parlait tout le temps de la paix. Rappelez-vous du passé pour que cela (la guerre, ndlr) ne se reproduise jamais”, lance Lioudmila. “Mais aujourd’hui, de quoi parle-t-on ?”, demande-t-elle, émue, en faisant allusion à la rhétorique du pouvoir russe qui manie un discours aux accents belliqueux.Pour Lioudmila, qui était ingénieure à l’époque de l’URSS, la perestroïka (restructuration) et les réformes lancées par Mikhaïl Gorbatchev dans les années 1980 ont constitué une “fenêtre vers la liberté”. Membre du parti ultra-libéral “Choix démocratique” d’Egor Gaïdar dans les années 90, elle dit baigner dans les idéaux démocratiques depuis toujours et avoir “participé à tous les rassemblements d’opposition” depuis l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir en 2000.Son credo est: “Laissez les gens vivre et choisir par eux-mêmes ce qu’ils veulent. Ne leur imposez rien, je vous en prie”.Et l’appel à la “paix” lancé en plein centre de Saint-Pétersbourg était non pas adressé aux autorités russes mais à “tous les gens”, car ce sont eux “qui peuvent avoir de l’influence et arrêter” le conflit, affirme Lioudmila, qui se dit persuadée que des “gens ont été intimidés” récemment, sans détailler. “Quant à moi, j’ai déjà 84 ans. Je n’ai pas peur”, conclut-elle.
Produits de santé: les Français préfèrent les pharmacies à la vente en ligne
Le géant américain Amazon poursuit sa percée dans la vente en ligne de produits de santé sans ordonnance (hygiène, beauté, vitamines..) en Europe sans pour autant complètement bousculer les habitudes des Français qui conservent le “réflexe” de se rendre en pharmacie.La vitalité du géant américain de la livraison sur ce segment s’est confirmée au premier trimestre 2025 en France, marquée par une croissance de 43% sur un an, après +44% sur l’ensemble de 2024, selon des chiffres du cabinet d’analyse de données de santé, Iqvia, communiqués à l’AFP.”Les trois-quarts des produits commercialisés par Amazon sont de nouvelles références sur le marché européen, principalement dans la dermo-cosmétique, dont les marges sont plus élevées”, souligne Iqvia.Cette progression reflète plus largement l’essor du e-commerce de produits de santé en vente libre en Europe, qui “affiche une croissance dynamique dans tous les pays, mais la part de marché reste limitée par rapport aux canaux traditionnels”, c’est-à -dire les pharmacies, “notamment en France”, tempère ce spécialiste.Les disparités restent notables d’un pays à l’autre. En Espagne, la progression de la vente sur internet de ces produits en vente libre comme les sirops contre la toux, les vitamines et compléments alimentaires, les produits d’hygiène ou de beauté atteint 25%. Suivent la Pologne (18%), l’Italie (16%) ou encore l’Allemagne (11%).- Place marginale en France – En France, l’expansion des commandes sur internet est plus mesurée (+6%) mais elle dépasse celle des pharmacies traditionnelles (+3,5%).En termes de parts de marché, “la pharmacie en ligne représente à peu près 2% du total en France et 3% si on ajoute Amazon, donc cela reste relativement confidentiel”, nuance Paul Reynolds, expert chez Iqvia France.Grâce à une forte présence territoriale, les quelque 22.000 pharmacies de France restent ainsi le premier point de vente.”Année après année, le réflexe d’aller chercher conseil en pharmacie se confirme. D’autant plus depuis le Covid, où il y a eu un renforcement du lien de proximité entre les Français et leur pharmacien”, constate le spécialiste.Cet attachement aux officines renforce le monopole pharmaceutique – en France, seule une officine dirigée par un pharmacien peut vendre des médicaments – que l’Ordre national de la profession veut préserver face à l’essor du e-commerce. “On comprend bien qu’aujourd’hui il y a une recherche de simplicité d’accès”, déclarait récemment à l’AFP la présidente de cet organisme, Carine Wolf-Thal. Mais “parce qu’il n’y a aucun médicament anodin”, “les pharmaciens sont justement là pour éviter les mésusages et les surconsommations”.- L’Allemagne, leader européen -La vente en ligne est perçue par la profession comme “complémentaire”, “notamment dans des régions, où il n’y a pas de pharmacie toute proche”, mais “surtout, il faut que le pharmacien ait un site de vente en ligne déclaré à l’Agence régionale de santé (ARS). Et en aucun cas, cela peut être de la prescription de médicaments sur ordonnance”, souligne Mme Wolf-Thal.Tout comme en Italie et en Espagne, l’activité de vente à distance reste limitée aux seuls médicaments qui ne sont pas soumis à prescription obligatoire, soit ceux qui sont en accès libre à la pharmacie (on les appelle aussi OTC, abréviation de “over the counter”).Seules 838 officines françaises sont référencées comme ayant une activité de vente en ligne de médicaments à prescription médicale facultative. Ne sont pas comptabilisées celles qui font le choix de ne vendre en ligne que de la parapharmacie et n’ont donc pas besoin d’autorisation particulière.Les pays anglo-saxons adoptent une approche plus libérale: en Allemagne et au Royaume-Uni par exemple, une pharmacie en ligne peut proposer à la vente des médicaments soumis à prescription. C’est aussi le cas d’autres pays européens tels que les Pays-Bas, les pays nordiques, ou encore la Suisse.L’Allemagne est le pays d’Europe avec la plus grande part de marché de vente en ligne (20%), devant notamment l’Italie et la Pologne (8%), la Belgique (6%) et l’Espagne (5%), selon Iqvia.
Obus, grenade, mortier: les traces de la Grande guerre omniprésentes dans la campagne belge
“Celui-ci est un +18-pounder+, il reste peut-être un peu d’explosif dedans”, lâche Franjo, en récupérant au sol un vieil obus d’artillerie dont il identifie tout de suite l’origine britannique. Le démineur l’installe avec précaution dans un bac de sable à l’arrière de sa camionnette.Dans le nord-ouest de la Belgique, au coeur du plat pays flamand, où plusieurs centaines de milliers de soldats sont tombés pendant la guerre 1914-18, les vestiges du conflit sont partout dans le paysage.Outre les cimetières militaires et leurs sépultures soigneusement alignées, parfois à perte de vue, munitions et obus de toutes origines — anglaise, allemande, française — continuent de remonter à la surface, au point de donner du travail chaque jour au service de déminage de l’armée belge (SEDEE).Ce service aujourd’hui centenaire a installé une base à Langemark-Poelkapelle, au nord d’Ypres, où se concentre la majeure partie de son activité.Ses hommes répondent chaque année à plus de 2.000 demandes d’agriculteurs ou de responsables de chantier pour retirer des munitions, déjà tirées ou pas. La découverte survient souvent en retournant la terre, en plein champ, ou lors du terrassement d’une future habitation.En bout de chaîne, après identification du degré de dangerosité de l’objet — dont va dépendre le mode d’élimination (explosion en extérieur ou combustion dans un four)–, “on en détruit 200 à 250 tonnes par an”, souligne à l’AFP Jacques Callebaut, chargé de communication du service.Ce matin-là , il a fallu moins d’une heure à la camionnette aux quatre roues motrices siglée SEDEE/DOVO (la déclinaison en néerlandais) pour ramasser une bonne douzaine d’obus et grenades en sillonnant les petites routes de campagne.Franjo et ses deux collègues disposent, en guise de carnet de bord, d’une petite pile de courriels de la police, qui répertorient avec précision tous les lieux, chemins, croisements, où des engins ont été signalés.- Passage aux rayons X -Parfois le propriétaire du terrain dépose l’obus à hauteur d’homme, sur un vieux poteau en béton, pour faciliter le travail.A chaque arrêt, l’un des démineurs de l’équipe fait le guet pour éviter un surgissement impromptu. Tous portent des gants pour manipuler les vieux engins rouillés.”Environ 60% environ des munitions qu’on trouve contiennent une charge explosive, et entre 10 et 30% peuvent aussi être toxiques, c’est un danger supplémentaire”, relève Jacques Callebaut.Phosphore blanc, arsenic ou ypérite, le liquide chimique vésicant qui doit son nom à la ville d’Ypres (connu aussi sous l’appellation “gaz moutarde”): la présence éventuelle de ces substances dangereuses est scrutée de près par les démineurs.Lorsqu’un doute subsiste malgré leur oeil expert, ils font appel à la technologie. Un passage aux rayons X permet de voir les entrailles de l’obus, repérer par exemple une cartouche renfermant un fumigène. Si le résultat n’est pas satisfaisant, un spectromètre à neutrons peut être utilisé pour mesurer chaque composant.Cette expertise de l’armée belge est réputée à l’étranger: “Les munitions toxiques trouvées aux Pays-Bas sont traitées par nous, et il y a quelques semaines, on a été appelés pour neutraliser une bombe en Norvège car ils n’avaient pas le matériel pour le faire”, vante M. Callebaut.Champ de bataille de l’Europe dès le Moyen-Age, en raison de sa situation géographique au carrefour des empires germanique, français et britannique, la Belgique a vu Napoléon être défait à Waterloo en 1815, avec des pertes humaines énormes, et elle a aussi été durement touchée par les deux guerres mondiales du 20e siècle.Un siècle après c’est surtout le métal de la Première guerre qui affleure, car autour d’Ypres “une ligne de front statique a perduré pendant quatre ans, avec des millions d’obus d’un côté comme de l’autre”, explique l’historien belge Corentin Rousman. “En comparaison, les obus de la Seconde guerre ne réapparaissent que de temps en temps dans les villes bombardées”.
Obus, grenade, mortier: les traces de la Grande guerre omniprésentes dans la campagne belge
“Celui-ci est un +18-pounder+, il reste peut-être un peu d’explosif dedans”, lâche Franjo, en récupérant au sol un vieil obus d’artillerie dont il identifie tout de suite l’origine britannique. Le démineur l’installe avec précaution dans un bac de sable à l’arrière de sa camionnette.Dans le nord-ouest de la Belgique, au coeur du plat pays flamand, où plusieurs centaines de milliers de soldats sont tombés pendant la guerre 1914-18, les vestiges du conflit sont partout dans le paysage.Outre les cimetières militaires et leurs sépultures soigneusement alignées, parfois à perte de vue, munitions et obus de toutes origines — anglaise, allemande, française — continuent de remonter à la surface, au point de donner du travail chaque jour au service de déminage de l’armée belge (SEDEE).Ce service aujourd’hui centenaire a installé une base à Langemark-Poelkapelle, au nord d’Ypres, où se concentre la majeure partie de son activité.Ses hommes répondent chaque année à plus de 2.000 demandes d’agriculteurs ou de responsables de chantier pour retirer des munitions, déjà tirées ou pas. La découverte survient souvent en retournant la terre, en plein champ, ou lors du terrassement d’une future habitation.En bout de chaîne, après identification du degré de dangerosité de l’objet — dont va dépendre le mode d’élimination (explosion en extérieur ou combustion dans un four)–, “on en détruit 200 à 250 tonnes par an”, souligne à l’AFP Jacques Callebaut, chargé de communication du service.Ce matin-là , il a fallu moins d’une heure à la camionnette aux quatre roues motrices siglée SEDEE/DOVO (la déclinaison en néerlandais) pour ramasser une bonne douzaine d’obus et grenades en sillonnant les petites routes de campagne.Franjo et ses deux collègues disposent, en guise de carnet de bord, d’une petite pile de courriels de la police, qui répertorient avec précision tous les lieux, chemins, croisements, où des engins ont été signalés.- Passage aux rayons X -Parfois le propriétaire du terrain dépose l’obus à hauteur d’homme, sur un vieux poteau en béton, pour faciliter le travail.A chaque arrêt, l’un des démineurs de l’équipe fait le guet pour éviter un surgissement impromptu. Tous portent des gants pour manipuler les vieux engins rouillés.”Environ 60% environ des munitions qu’on trouve contiennent une charge explosive, et entre 10 et 30% peuvent aussi être toxiques, c’est un danger supplémentaire”, relève Jacques Callebaut.Phosphore blanc, arsenic ou ypérite, le liquide chimique vésicant qui doit son nom à la ville d’Ypres (connu aussi sous l’appellation “gaz moutarde”): la présence éventuelle de ces substances dangereuses est scrutée de près par les démineurs.Lorsqu’un doute subsiste malgré leur oeil expert, ils font appel à la technologie. Un passage aux rayons X permet de voir les entrailles de l’obus, repérer par exemple une cartouche renfermant un fumigène. Si le résultat n’est pas satisfaisant, un spectromètre à neutrons peut être utilisé pour mesurer chaque composant.Cette expertise de l’armée belge est réputée à l’étranger: “Les munitions toxiques trouvées aux Pays-Bas sont traitées par nous, et il y a quelques semaines, on a été appelés pour neutraliser une bombe en Norvège car ils n’avaient pas le matériel pour le faire”, vante M. Callebaut.Champ de bataille de l’Europe dès le Moyen-Age, en raison de sa situation géographique au carrefour des empires germanique, français et britannique, la Belgique a vu Napoléon être défait à Waterloo en 1815, avec des pertes humaines énormes, et elle a aussi été durement touchée par les deux guerres mondiales du 20e siècle.Un siècle après c’est surtout le métal de la Première guerre qui affleure, car autour d’Ypres “une ligne de front statique a perduré pendant quatre ans, avec des millions d’obus d’un côté comme de l’autre”, explique l’historien belge Corentin Rousman. “En comparaison, les obus de la Seconde guerre ne réapparaissent que de temps en temps dans les villes bombardées”.
“Sanctions massives”: que peuvent vraiment faire les alliés de l’Ukraine face à Moscou ?
Les alliés européens de l’Ukraine brandissent la menace de “sanctions massives” contre la Russie si celle-ci persiste dans son refus d’un cessez-le-feu. Mais que peuvent-ils vraiment faire ?- Les sanctions déjà en place -Les Européens ont déjà adopté 17 “paquets” de sanctions contre la Russie depuis son invasion de l’Ukraine le 24 février 2022. Quelque 2.400 entités et individus ont été sanctionnés, y compris le président russe Vladimir Poutine, sans toutefois enrayer la machine de guerre du Kremlin.Le dernier “paquet” de sanctions en date, adopté mardi, cible essentiellement la flotte de pétroliers “fantômes” utilisé par la Russie pour contourner les sanctions précédentes sur la production et l’exportation de brut russe.Quelque 342 navires “fantômes” sont désormais dans le collimateur de l’UE. Mais il en manque encore plus de 150 à l’appel, selon le ministre estonien de la Défense Hanno Pevkur, qui estime à environ 500 le nombre total de ces navires. Or, explique-t-il, plus de 60% des exportations de brut russe se font via cette flotte “fantôme”.Au même même moment, le Royaume-Uni a lui aussi annoncé une salve de sanctions visant 18 navires de la “flotte fantôme”.- Ce qui est en préparation -“Il y a encore de la marge, et nous pouvons faire plus”, assure un diplomate européen.Un 18e paquet est en préparation avec l’objectif de resserrer les mailles du filet à l’encontre de cette flotte “fantôme”. L’Union européenne cherche également à mieux combattre le contournement des sanctions et chaque nouveau train de sanctions identifie de nouvelles entités ou individus qui aident la Russie à renforcer sa machine de guerre. Des sanctions supplémentaires à l’encontre du secteur financier russe sont également envisagées.La détermination des Européens se heurte néanmoins à la bonne volonté de la Hongrie, pays le plus proche du Kremlin en Europe. Elle a jusqu’à présent donné son feu vert à chaque nouveau train de sanctions, mais les diplomates à Bruxelles s’inquiètent d’un possible revirement du Premier ministre hongrois Viktor Orban. Chaque nouvelle sanction requiert l’unanimité des 27.- Ce qui serait le plus efficace – La Russie finance son effort de guerre essentiellement par la vente de ses hydrocarbures. Celle-ci lui rapporte plus de 600 millions d’euros par jour, selon la dernière estimation en avril du Crea, un institut finlandais spécialisé dans les questions énergétiques.”Entre 60 et 90% de la croissance économique russe dépend de ce qui se passe sur le marché international du pétrole”, a rappelé la semaine dernière à Bruxelles Torbjörn Becker, directeur du Stockholm Institute of Transition Economics (SITE, Institut des économies en transition), spécialisé dans le suivi de l’économie russe. L’UE, en dépit des sanctions, reste le principal acheteur de gaz russe, France en tête. Les Européens, qui ont déjà bloqué toute exportation de pétrole russe dans l’UE, se sont donnés jusqu’en 2027 pour se sevrer du gaz russe.En attendant, les Européens ont cherché à agir sur les revenus pétroliers en imposant un prix maximum fixé à 60 dollars le baril.Depuis que l’UE a introduit ce plafonnement et les sanctions contre la flotte fantôme, les revenus pétroliers russes ont diminué de 38 milliards d’euros, selon des chiffres officiels. Mais ce seuil de 60 dollars est aujourd’hui le prix moyen sur le marché international, ce qui rend cette mesure inopérante. Un prix “raisonnable” serait de 30 dollars le baril, a assuré mardi à Bruxelles le ministre ukrainien des Affaires étrangères Andriï Sybiga.Réduire ce seuil “serait clairement quelque chose qui aurait un effet tangible sur l’économie russe”, a confirmé mardi la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas.Mais une telle décision appartient au Groupe des sept pays les plus industrialisés, le G7, où il n’est pas certain que les Etats-Unis y soient favorables.- Que fait Washington ? -Les dirigeants européens ont récemment assuré travailler en collaboration avec les Etats-Unis pour renforcer la pression sur la Russie.”Il est essentiel que toutes les décisions soient coordonnées, ce n’est qu’ainsi que les sanctions seront efficaces”, a affirmé mercredi le président ukrainien Volodymyr Zelensky.Le sénateur américain Lindsay Graham est à l’origine d’un projet de sanctions extrêmement dur comportant des droits de douane de 500% sur les importations de pétrole russe et de 500% sur les pays qui aujourd’hui continuent d’importer du pétrole russe.Mais rien ne dit que le président Donald Trump soit prêt à le mettre en Å“uvre.