“Comment je fais, moi, pour manger?”: des fonctionnaires américains asphyxiés par la paralysie budgétaire

“Faut bien que je vive”, lance d’un ton amer Diane Miller, 74 ans, au milieu d’un parking en banlieue de Washington. A ses côtés, des centaines d’employés fédéraux, étranglés économiquement par la paralysie budgétaire aux Etats-Unis, font la queue devant une distribution d’aide alimentaire.Son tour arrive, elle montre sa carte de fonctionnaire de l’Etat fédéral et reçoit deux cartons: un de fruits et légumes frais, un de denrées non périssables. Une aide “nécessaire” depuis que sa fiche de paie affiche le chiffre “0”.La grande majorité des employés fédéraux ont été placés au chômage technique depuis le 1er octobre et ne touchent plus leur salaire à cause du fameux “shutdown”, faute d’accord entre les républicains de Donald Trump et l’opposition démocrate sur le budget américain.”C’est horrible, on en souffre tous. J’ai travaillé plus de 50 ans pour l’Etat et je me retrouve ici, dans cette file, à venir chercher de la nourriture. Sans ça, comment je fais, moi, pour manger?”, lance, les yeux brillants de colère, Diane Miller.Pour accompagner les fonctionnaires, des distributions de nourriture sont organisées à travers le pays. Mercredi près de Washington, les plus de 310 cartons, contenant chacun l’équivalent de 75 dollars de course, ont été distribués en moins d’une heure.”Ces gens, il y a encore deux semaines, recevaient un salaire régulier et menaient une vie normale. Soudain, ils se sont retrouvés sans rien et font la queue pour recevoir de la nourriture”, soupire Dave Silbert, à la tête de la banque alimentaire qui co-organise la distribution.”Personne ne mérite d’être traité comme nous le sommes actuellement”, fustige Diane Miller, qui travaille pour la Fema, l’agence gouvernementale mobilisée en cas de catastrophe naturelle, qui a vu ses effectifs fondre sous les assauts de Donald Trump.Pour elle, il n’est plus question de faire des dépenses “inutiles”, et encore moins d’aller au restaurant.- “Triste d’être Américaine” -Dans la file d’attente, Adrian, qui préfère taire son nom de famille par crainte de représailles, lâche dans un flot de parole: “On peut à peine payer nos emprunts bancaires et avec les factures du quotidien, comme le téléphone et tout, ça fait effet domino. J’ai besoin d’aide. Ça ne devrait pas être le cas après 33 ans au service de mon pays.””Tout le monde est payé: les députés, les sénateurs. Alors que nous, non. Si on n’est pas payés, ils ne devraient pas l’être non plus.”Cette experte en droit fiscal pointe du doigt la politique de Donald Trump, et notamment les drastiques coupes dans les emplois fédéraux effectuées en début d’année via sa commission à l’efficacité gouvernementale, Doge, chapeautée par Elon Musk: “Tout le monde nous voit maintenant comme un ennemi, alors qu’on fait juste notre travail.””Combien de temps ça va durer?” La paralysie budgétaire, qui s’étire depuis 22 jours, est d’ores et déjà la deuxième plus longue de l’histoire du pays.La question angoisse Amber, employée des ressources humaines de l’armée américaine qui n’a pas souhaité être identifiée: “J’ai très peur que ça dure encore longtemps. Je suis dans une situation très précaire, en plein divorce, et maintenant, sans salaire, j’ai du mal à joindre les deux bouts.”Elle dit qu’elle vient d’emprunter 20.000 dollars pour payer des loyers. “Je suis ici aujourd’hui parce que je dois bien nourrir mes deux enfants…”, glisse-t-elle.”Si ça dure jusqu’aux vacances de Thanksgiving (fin novembre, ndlr), puis jusqu’à l’hiver, ce sera la +cata+!”, renchérit Diane Miller.D’un sourire crispé, la septuagénaire soupire: “Aujourd’hui, je suis triste d’être Américaine.”

Un soldat britannique acquitté de deux meurtres lors du “Bloody Sunday”

Un tribunal a acquitté jeudi à Belfast un soldat britannique qui était jugé pour deux meurtres et cinq tentatives de meurtres lors du “Bloody Sunday” en 1972, l’un des épisodes les plus sombres du conflit en Irlande du Nord.”Je déclare l’accusé non coupable des sept chefs d’accusation”, a déclaré le juge Patrick Lynch en mettant en avant l’insuffisance des preuves.L’ancien parachutiste, connu uniquement comme le “soldat F” pour des raisons légales, était le premier militaire jugé pour ce “dimanche sanglant”, il y a plus d’un demi-siècle. Le 30 janvier 1972 à Londonderry (également appelé Derry), des parachutistes britanniques avaient ouvert le feu sur une manifestation pacifique de militants catholiques, faisant treize morts et au moins quinze blessés.Le soldat F était accusé de deux meurtres, ceux de James Wray et William McKinney, et de cinq tentatives de meurtres.Le verdict a été rendu dans une salle comble, en présence de dizaines de proches de victimes, qui ont accueilli la décision dans le calme.”Les responsables devraient avoir honte”, a déclaré le juge, en rendant sa décision.Mais “quels que soient les soupçons que le tribunal peut avoir sur le rôle de F, ce tribunal est contraint et limité par les preuves présentées devant lui”, a-t-il ajouté. Il faut qu’elles soient “convaincantes et manifestement fiables”, a souligné le magistrat, en indiquant que c’était “loin” d’être le cas. – “Déni de justice” -“Le déni de justice persistant pour les familles du +Bloody Sunday+ est profondément décevant”, a dénoncé sur X Michelle O’Neill, la Première ministre d’Irlande du Nord, une responsable du parti nationaliste Sinn Fein.L’armée britannique a longtemps affirmé que les parachutistes avaient répondu aux tirs de “terroristes” de l’IRA (Armée républicaine irlandaise, paramilitaires opposés à toute présence britannique sur l’île d’Irlande), une version alors confortée par un rapport réalisé à la hâte.Malgré de nombreux témoignages contredisant ces affirmations, il a fallu attendre 2010 pour que soit officiellement reconnue l’innocence des victimes, atteintes pour certaines dans le dos ou même à terre, agitant un mouchoir blanc.Le Premier ministre de l’époque, David Cameron, avait présenté des excuses officielles, qualifiant d'”injustifiables” les faits lors du “Bloody Sunday”.Le verdict, dans ce procès qui a démarré le 15 septembre, était très attendu en Irlande du Nord, où des décennies de violences intercommunautaires ont laissé des blessures profondes.”Soldat F”, qui a plaidé non coupable, est resté pendant tout le procès dissimulé derrière un rideau bleu, pour préserver son anonymat. Ses avocats ont affirmé que sa sécurité était en danger. Il n’a pas témoigné.- “L’intention de tuer” -Le représentant de l’accusation, Louis Mably, avait décrit au procès les tirs de l’armée britannique alors que des civils non armés fuyaient. Ces actes ont été commis “sans justification” et “avec l’intention de tuer”, avait-il affirmé, avant de trancher : “Ce sont les ingrédients d’un meurtre”.”La seule question dans cette affaire est de savoir si F faisait partie des soldats ayant participé à cette fusillade, soit en tant qu’auteur principal, soit en tant que participant secondaire”, avait-il cependant déclaré.Les principaux éléments de preuve étaient d’anciennes déclarations de deux parachutistes, soldats G et H, qui se trouvaient avec F lors des tirs.  Mais, selon la défense, ces déclarations se contredisaient entre elles et contredisaient les récits d’autres témoins cités au procès. Le parquet nord-irlandais avait engagé des poursuites pénales contre le soldat F en 2019. Elles ont ensuite été abandonnées, puis relancées en 2022.Le massacre du “Bloody Sunday” — immortalisé par le tube du groupe de rock irlandais U2 “Sunday Bloody Sunday” (1983) — a eu pour effet de précipiter de nombreux jeunes catholiques républicains dans les bras de l’IRA.C’est l’un des moments les plus sombres des trois décennies de “Troubles” qui ont opposé républicains, surtout catholiques, partisans d’une réunification avec l’Irlande, et unionistes protestants, défenseurs de l’appartenance de l’Irlande du Nord à la Couronne britannique. Il faudra attendre 1998 pour que l’accord de paix du Vendredi Saint mette un terme à ce conflit qui a fait environ 3.500 morts.Depuis la fin du conflit nord-irlandais, seul un ex-soldat britannique a été condamné: début 2023, David Holden a écopé d’une peine de trois ans avec sursis, pour avoir tué un homme d’une balle dans le dos à un check-point en 1988. Il avait expliqué avoir tiré par accident car il avait les mains mouillées.

Municipales à Marseille: Il faut sauver le centre-ville

À 83 ans, Geneviève Colonna d’Istria arpente une dernière fois les allées des Galeries Lafayette de Marseille. “Les beaux magasins ferment”, déplore-t-elle. A quelques mois des municipales, le départ de cette enseigne emblématique a imposé l’avenir du centre-ville dans la campagne électorale.Signe de morosité, les Galeries, vitrine commerciale au coeur de ville, tirent leur révérence avec la fermeture le 30 novembre des deux magasins situés au “Centre Bourse”, près du Vieux-Port, et au “Prado Shopping”, près du stade Vélodrome.”Pertes récurrentes depuis plusieurs années”, s’est justifié le groupe, qui déserte la deuxième ville de France comme d’autres enseignes avant lui, après près d’un demi-siècle de présence et en supprimant 145 emplois. La municipalité de gauche se veut néanmoins rassurante. “Le grand centre-ville” n’a rien perdu de son attractivité avec “20% de taux de vacance” des baux commerciaux, chiffre qui tombe à “11,7%” dans l’hyper centre autour du Vieux-Port, selon l’adjointe au maire en charge du commerce Rebecca Bernardi. Elle reconnaît toutefois qu’il est “fragilisé par différents facteurs”.La construction de deux centres commerciaux dans le quartier métamorphosé de la Joliette sur le périmètre du centre “est entrée en concurrence directe avec les commerçants du centre-ville”. La vente en ligne et la piétonnisation de certaines artères, réduisant le stationnement, ont complété la baisse de fréquentation.”On a le même problème dans toutes les villes qui ont un taux de vacance qui est en train de se développer”, souligne le président de la chambre de commerce Aix-Marseille-Provence Jean-Luc Chauvin.”Les centres-villes doivent fonctionner autrement, diversifier leur offre au lieu de proposer les mêmes marques qu’ailleurs où c’est plus facile d’accès”, analyse l’entrepreneur qui rappelle aussi que “la vraie question tourne autour du pouvoir d’achat”.Sur la célèbre Canebière, de nombreux artisans ont mis la clé sous la porte, remplacés par des magasins bon marché s’adaptant au pouvoir d’achat local.Contrairement à Paris ou Lyon, la pauvreté se concentre en effet dans le centre de Marseille avec un taux supérieur à 38%, contre 25% sur l’ensemble de la ville, d’après les chiffres de l’Insee.- Projets “hors sol” -Depuis 2020, la nouvelle majorité municipale gauche-société civile a préempté une vingtaine de baux commerciaux pour “empêcher certaines activités et relancer le commerce de proximité”, explique Mme Bernardi. Mais “la compétence directe au commerce” et à “l’urbanisme commercial” reviennent respectivement à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et à la métropole d’Aix-Marseille, dirigées par la droite, pointe l’élue.Avec le départ des Galeries Lafayette du Centre Bourse, l’avenir de l’imposante galerie marchande construite en 1977 entre le Vieux-Port et la gare Saint-Charles est devenu un enjeu des prochaines municipales.La candidate de la droite et du centre Martine Vassal impute l'”abandon” du centre-ville à l’insécurité.”Les tergiversations sur la vidéo-protection ont fini par aboutir à prolifération des points de deal, des agressions et la transformation de certaines rues en salles de shoot sauvages”, dénonce son porte-parole Romain Simmarano. Ses équipes ont lancé une consultation en ligne pour décider de l’avenir du Centre Bourse avec notamment comme proposition l’ouverture d’une école de cuisine, une maison de l’enfant ou encore un parc urbain.Pour Franck Allisio, député RN des Bouches-du-Rhône et candidat à la mairie de Marseille, “le préalable absolu dans le centre-ville est la sécurité et la propreté”. “Vous ferez revenir des familles, des gens qui y habiteront et ouvriront des magasins et donc ramèneront de la richesse”.Le maire sortant Benoît Payan (ex-PS) a annoncé sur BFM TV avoir “travaillé” avec le président Emmanuel Macron sur un “très grand équipement (…) probablement culturel”. Si le projet échoue, il promet d”acheter les Galeries Lafayette” et “d’en faire un lieu où on remet de la vie”.Toutes ces propositions à la veille d’une échéance électorale sont “hors sol”, tance Emmanuel Patris, urbaniste et co-président de l’association Un Centre-ville Pour Tous, fustigeant l’absence de concertation avec les habitants. “Il y une façon de travailler très institutionnelle entre élus et techniciens et on va aboutir à quelque chose qui ne correspond ni aux besoins, ni aux attentes”.

Le gouvernement acte la suspension de la réforme des retraites, son financement critiqué

Le gouvernement a acté jeudi la suspension de la réforme des retraites dans le projet de budget de la Sécurité sociale, mais la mise à contribution des complémentaires santé et des retraités, prévue pour la financer, suscite de vives critiques.  Après plusieurs jours de tergiversations sur le véhicule législatif – amendement, projet de loi à part… – l’option de la lettre rectificative au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) a finalement été entérinée lors d’un Conseil des ministres spécial présidé, en visioconférence, par le président Emmanuel Macron depuis Bruxelles.”Gage de clarté et de transparence, cette inscription dans le texte initial”, réclamée par le RN et la gauche, “vise à garantir la tenue d’un débat parlementaire loyal et sincère”, a souligné Matignon dans un communiqué alors que l’examen du PLFSS débute lundi au Parlement.Le projet décale dans le temps l’application de la réforme Borne de 2023. Il suspend jusqu’à janvier 2028 la marche en avant vers les 64 ans, tout comme le relèvement du nombre de trimestres à cotiser pour partir à taux plein.Cette suspension coûtera 100 millions d’euros en 2026 et 1,4 milliard d’euros en 2027, selon la lettre rectificative dévoilée mercredi par le quotidien économique Les Échos et dont l’AFP a obtenu copie.Pour financer la mesure, les complémentaires santé et les retraités seront mis à contribution, d’après le document.La sous-indexation des pensions par rapport à l’inflation, initialement prévue à 0,4 point, sera augmentée de 0,5 point supplémentaire en 2027, ce qui pèsera sur le pouvoir d’achat des retraités.Le taux de contribution des organismes complémentaires (mutuelles, assurances de santé…) passera de 2,05% à 2,25% en 2026.- “jeu de dupes” -Les options retenues font controverse. D’autant que le gouvernement avait indiqué que les pensions de retraite et les prestations sociales seraient gelées en 2026 pour freiner la dérive des dépenses publiques.”Il n’est pas possible que la désindexation des pensions prévoie quasiment deux années blanches pour les retraités en 2026 et 2027. Les plus modestes ne peuvent supporter une telle mesure”, a réagi à l’AFP Yvan Ricordeau, numéro 2 de la CFDT.”On fait payer une micro-suspension de la réforme aux retraités actuels et futurs”, a déploré Denis Gravouil, secrétaire confédéral de la CGT, Rémi Servot, de l’Association nationale des retraités (ANR), qualifiant le projet de financement d'”assez scandaleux”.A gauche, La France insoumise a dénoncé “un jeu de dupes”. “Les retraités partiront trois mois avant mais avec une retraite plus faible”, a relevé le président de la commission des Finances, Eric Coquerel.LFI a rapidement reporté les torts sur les socialistes qui ont décidé de ne pas censurer, dans l’immédiat, le gouvernement de Sébastien Lecornu notamment contre la promesse d’une suspension de la réforme Borne. “Bravo le PS!”, a ironisé sur X le coordinateur du mouvement Manuel Bompard.”Quel est l’objectif derrière ça?”, s’est interrogée la présidente du groupe écologiste et social à l’Assemblée nationale, Cyrielle Chatelain, pour qui le gouvernement veut rendre “ce report finalement insupportable”.Le Rassemblement national, également favorable à la suspension, a lui aussi dénoncé le financement de la mesure. “Ils tapent toujours sur les mêmes. Et en l’occurrence, évidemment, les retraités sont assez lourdement frappés par ce budget”, a dénoncé, depuis l’Assemblée nationale, la présidente des députés RN Marine Le Pen. “La question, c’est comment le PS va voter ça? Comment les LR vont voter ça?”, a-t-elle ajouté, sans préciser si son parti pourrait s’abstenir sur le projet de budget de la Sécurité sociale afin de laisser passer la suspension.Dans un climat déjà empreint de suspicion, le chef de l’État avait semé le trouble mardi en déclarant depuis la Slovénie que la réforme n’était ni “abrogée” ni “suspendue”, au risque de fragiliser son Premier ministre.L’entourage du président de la République a toutefois démenti depuis tout contentieux entre les deux têtes de l’exécutif, expliquant qu’il avait seulement signifié que la réforme ne pouvait être suspendue “ad vitam” au regard des besoins de financement du système.bur-bj-vl-sde/jmt/tes

Le gouvernement acte la suspension de la réforme des retraites, son financement critiqué

Le gouvernement a acté jeudi la suspension de la réforme des retraites dans le projet de budget de la Sécurité sociale, mais la mise à contribution des complémentaires santé et des retraités, prévue pour la financer, suscite de vives critiques.  Après plusieurs jours de tergiversations sur le véhicule législatif – amendement, projet de loi à part… – l’option de la lettre rectificative au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) a finalement été entérinée lors d’un Conseil des ministres spécial présidé, en visioconférence, par le président Emmanuel Macron depuis Bruxelles.”Gage de clarté et de transparence, cette inscription dans le texte initial”, réclamée par le RN et la gauche, “vise à garantir la tenue d’un débat parlementaire loyal et sincère”, a souligné Matignon dans un communiqué alors que l’examen du PLFSS débute lundi au Parlement.Le projet décale dans le temps l’application de la réforme Borne de 2023. Il suspend jusqu’à janvier 2028 la marche en avant vers les 64 ans, tout comme le relèvement du nombre de trimestres à cotiser pour partir à taux plein.Cette suspension coûtera 100 millions d’euros en 2026 et 1,4 milliard d’euros en 2027, selon la lettre rectificative dévoilée mercredi par le quotidien économique Les Échos et dont l’AFP a obtenu copie.Pour financer la mesure, les complémentaires santé et les retraités seront mis à contribution, d’après le document.La sous-indexation des pensions par rapport à l’inflation, initialement prévue à 0,4 point, sera augmentée de 0,5 point supplémentaire en 2027, ce qui pèsera sur le pouvoir d’achat des retraités.Le taux de contribution des organismes complémentaires (mutuelles, assurances de santé…) passera de 2,05% à 2,25% en 2026.- “jeu de dupes” -Les options retenues font controverse. D’autant que le gouvernement avait indiqué que les pensions de retraite et les prestations sociales seraient gelées en 2026 pour freiner la dérive des dépenses publiques.”Il n’est pas possible que la désindexation des pensions prévoie quasiment deux années blanches pour les retraités en 2026 et 2027. Les plus modestes ne peuvent supporter une telle mesure”, a réagi à l’AFP Yvan Ricordeau, numéro 2 de la CFDT.”On fait payer une micro-suspension de la réforme aux retraités actuels et futurs”, a déploré Denis Gravouil, secrétaire confédéral de la CGT, Rémi Servot, de l’Association nationale des retraités (ANR), qualifiant le projet de financement d'”assez scandaleux”.A gauche, La France insoumise a dénoncé “un jeu de dupes”. “Les retraités partiront trois mois avant mais avec une retraite plus faible”, a relevé le président de la commission des Finances, Eric Coquerel.LFI a rapidement reporté les torts sur les socialistes qui ont décidé de ne pas censurer, dans l’immédiat, le gouvernement de Sébastien Lecornu notamment contre la promesse d’une suspension de la réforme Borne. “Bravo le PS!”, a ironisé sur X le coordinateur du mouvement Manuel Bompard.”Quel est l’objectif derrière ça?”, s’est interrogée la présidente du groupe écologiste et social à l’Assemblée nationale, Cyrielle Chatelain, pour qui le gouvernement veut rendre “ce report finalement insupportable”.Le Rassemblement national, également favorable à la suspension, a lui aussi dénoncé le financement de la mesure. “Ils tapent toujours sur les mêmes. Et en l’occurrence, évidemment, les retraités sont assez lourdement frappés par ce budget”, a dénoncé, depuis l’Assemblée nationale, la présidente des députés RN Marine Le Pen. “La question, c’est comment le PS va voter ça? Comment les LR vont voter ça?”, a-t-elle ajouté, sans préciser si son parti pourrait s’abstenir sur le projet de budget de la Sécurité sociale afin de laisser passer la suspension.Dans un climat déjà empreint de suspicion, le chef de l’État avait semé le trouble mardi en déclarant depuis la Slovénie que la réforme n’était ni “abrogée” ni “suspendue”, au risque de fragiliser son Premier ministre.L’entourage du président de la République a toutefois démenti depuis tout contentieux entre les deux têtes de l’exécutif, expliquant qu’il avait seulement signifié que la réforme ne pouvait être suspendue “ad vitam” au regard des besoins de financement du système.bur-bj-vl-sde/jmt/tes

Le gouvernement acte la suspension de la réforme des retraites, son financement critiqué

Le gouvernement a acté jeudi la suspension de la réforme des retraites dans le projet de budget de la Sécurité sociale, mais la mise à contribution des complémentaires santé et des retraités, prévue pour la financer, suscite de vives critiques.  Après plusieurs jours de tergiversations sur le véhicule législatif – amendement, projet de loi à part… – l’option de la lettre rectificative au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) a finalement été entérinée lors d’un Conseil des ministres spécial présidé, en visioconférence, par le président Emmanuel Macron depuis Bruxelles.”Gage de clarté et de transparence, cette inscription dans le texte initial”, réclamée par le RN et la gauche, “vise à garantir la tenue d’un débat parlementaire loyal et sincère”, a souligné Matignon dans un communiqué alors que l’examen du PLFSS débute lundi au Parlement.Le projet décale dans le temps l’application de la réforme Borne de 2023. Il suspend jusqu’à janvier 2028 la marche en avant vers les 64 ans, tout comme le relèvement du nombre de trimestres à cotiser pour partir à taux plein.Cette suspension coûtera 100 millions d’euros en 2026 et 1,4 milliard d’euros en 2027, selon la lettre rectificative dévoilée mercredi par le quotidien économique Les Échos et dont l’AFP a obtenu copie.Pour financer la mesure, les complémentaires santé et les retraités seront mis à contribution, d’après le document.La sous-indexation des pensions par rapport à l’inflation, initialement prévue à 0,4 point, sera augmentée de 0,5 point supplémentaire en 2027, ce qui pèsera sur le pouvoir d’achat des retraités.Le taux de contribution des organismes complémentaires (mutuelles, assurances de santé…) passera de 2,05% à 2,25% en 2026.- “jeu de dupes” -Les options retenues font controverse. D’autant que le gouvernement avait indiqué que les pensions de retraite et les prestations sociales seraient gelées en 2026 pour freiner la dérive des dépenses publiques.”Il n’est pas possible que la désindexation des pensions prévoie quasiment deux années blanches pour les retraités en 2026 et 2027. Les plus modestes ne peuvent supporter une telle mesure”, a réagi à l’AFP Yvan Ricordeau, numéro 2 de la CFDT.”On fait payer une micro-suspension de la réforme aux retraités actuels et futurs”, a déploré Denis Gravouil, secrétaire confédéral de la CGT, Rémi Servot, de l’Association nationale des retraités (ANR), qualifiant le projet de financement d'”assez scandaleux”.A gauche, La France insoumise a dénoncé “un jeu de dupes”. “Les retraités partiront trois mois avant mais avec une retraite plus faible”, a relevé le président de la commission des Finances, Eric Coquerel.LFI a rapidement reporté les torts sur les socialistes qui ont décidé de ne pas censurer, dans l’immédiat, le gouvernement de Sébastien Lecornu notamment contre la promesse d’une suspension de la réforme Borne. “Bravo le PS!”, a ironisé sur X le coordinateur du mouvement Manuel Bompard.”Quel est l’objectif derrière ça?”, s’est interrogée la présidente du groupe écologiste et social à l’Assemblée nationale, Cyrielle Chatelain, pour qui le gouvernement veut rendre “ce report finalement insupportable”.Le Rassemblement national, également favorable à la suspension, a lui aussi dénoncé le financement de la mesure. “Ils tapent toujours sur les mêmes. Et en l’occurrence, évidemment, les retraités sont assez lourdement frappés par ce budget”, a dénoncé, depuis l’Assemblée nationale, la présidente des députés RN Marine Le Pen. “La question, c’est comment le PS va voter ça? Comment les LR vont voter ça?”, a-t-elle ajouté, sans préciser si son parti pourrait s’abstenir sur le projet de budget de la Sécurité sociale afin de laisser passer la suspension.Dans un climat déjà empreint de suspicion, le chef de l’État avait semé le trouble mardi en déclarant depuis la Slovénie que la réforme n’était ni “abrogée” ni “suspendue”, au risque de fragiliser son Premier ministre.L’entourage du président de la République a toutefois démenti depuis tout contentieux entre les deux têtes de l’exécutif, expliquant qu’il avait seulement signifié que la réforme ne pouvait être suspendue “ad vitam” au regard des besoins de financement du système.bur-bj-vl-sde/jmt/tes

JD Vance rejette toute annexion en Cisjordanie, Rubio attendu en Israël

Le vice-président américain JD Vance a condamné jeudi les discussions au Parlement israélien sur des projets d’annexion en Cisjordanie occupée, après des critiques similaires du secrétaire d’Etat Marco Rubio attendu dans la journée en Israël.En pleine visite mercredi de M. Vance en Israël, la Knesset s’est prononcée pour l’examen de deux projets de loi visant à étendre la souveraineté israélienne en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.Pour les responsables américains, un tel projet nuit à leur efforts visant à consolider le fragile cessez-le-feu dans la bande de Gaza après deux ans de guerre dévastatrice, déclenchée par une attaque du Hamas palestinien contre Israël le 7 octobre 2023.”La politique de l’administration Trump est que la Cisjordanie ne sera pas annexée par Israël, cela continuera d’être notre politique”, a dit M. Vance au terme de sa visite en Israël. “Si c’était un coup politique, c’était un coup politique très stupide et je le prends personnellement comme une insulte.” Avant de quitter Washington mercredi pour se rendre en Israël, M. Rubio a estimé qu’un tel projet “menacerait” le cessez-le-feu à Gaza et serait “contre-productif”.”Ce n’est pas quelque chose que nous pouvons soutenir pour le moment”, ajouté le secrétaire d’Etat, qui doit rencontrer le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu vendredi.Fin septembre, le président Donald Trump a affirmé qu’il ne “permettrait pas à Israël d’annexer la Cisjordanie. Non, je ne le permettrai pas. Cela n’arrivera pas”.Ce projet est soutenu par l’extrême droite israélienne.- “Très difficile” -Plusieurs responsables de l’administration Trump se sont succédé cette semaine à Jérusalem pour tenter de cimenter le cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre et basé sur un plan de M. Trump.L’accord entre Israël et le Hamas a paru vaciller dimanche après des violences meurtrières à Gaza et des échanges d’accusations de violations de la trêve.Mercredi, après un entretien avec Benjamin Netanyahu M. Vance a reconnu que les prochaines étapes de l’accord, dont le désarmement du Hamas et la reconstruction de Gaza, seraient “très difficiles”. “Nous avons une tâche très, très difficile devant nous, qui est de désarmer le Hamas et de reconstruire Gaza, de rendre la vie meilleure pour les gens de Gaza, mais aussi de s’assurer que le Hamas ne soit plus une menace pour nos amis en Israël”, a-t-il dit.La première phase de l’accord prévoit, outre le cessez-le-feu, la libération de tous les otages, vivants et morts, aux mains du Hamas depuis l’attaque du 7-Octobre, des retraits israéliens dans Gaza et l’afflux d’aide humanitaire pour la population gazaouie.Le Hamas a libéré au 13 octobre tous les otages vivants, au nombre de 20. Il devait aussi rendre à cette date les 28 corps des captifs qu’il retient, mais il n’en a restitué que 15 jusque-là, arguant de difficultés pour trouver les dépouilles dans le territoire ravagé par l’offensive israélienne lancée en représailles à l’attaque du 7-Octobre.Israël a restitué en échange 195 corps de Palestiniens. Les forces israéliennes se sont retirées de secteurs de Gaza mais contrôlent toujours environ la moitié du territoire palestinien et l’assiègent. L’aide humanitaire reste insuffisante selon l’ONU.- La presse étrangère déçue -Les phases ultérieures du plan Trump prévoient un nouveau retrait israélien dans Gaza, le désarmement du Hamas, le déploiement d’une force de sécurité internationale ainsi que la reconstruction du territoire notamment.M. Vance a exclu le déploiement de troupes américaines au sol à Gaza et affirmé chercher des pays prêts à contribuer à cet effort militaire. Le Hamas a jusqu’à présent refusé d’envisager son désarmement et ses combattants se sont redéployés dans des secteurs de Gaza après la trêve, s’affrontant avec des groupes armés dont il accuse certains de “collaborer” avec Israël. M. Netanyahu veut chasser le Hamas de Gaza où le mouvement a pris le pouvoir en 2007.L’attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.221 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l’AFP à partir de données officielles.  L’offensive israélienne menée en représailles a fait 68.280 morts à Gaza, en majorité des civils, selon les chiffres du ministère de la Santé du Hamas, et provoqué un désastre humanitaire.Jeudi, l’Association de la presse étrangère à Jérusalem (FPA) a exprimé sa déception après que la Cour suprême israélienne a reporté de 30 jours sa décision sur la demande de la FPA d’un accès indépendant à Gaza qu’elle réclame depuis deux ans.Les autorités israéliennes qui contrôlent tous le accès de Gaza, empêchent depuis deux ans les journalistes de médias étrangers d’entrer de manière indépendante dans le territoire dévasté.

JD Vance rejette toute annexion en Cisjordanie, Rubio attendu en Israël

Le vice-président américain JD Vance a condamné jeudi les discussions au Parlement israélien sur des projets d’annexion en Cisjordanie occupée, après des critiques similaires du secrétaire d’Etat Marco Rubio attendu dans la journée en Israël.En pleine visite mercredi de M. Vance en Israël, la Knesset s’est prononcée pour l’examen de deux projets de loi visant à étendre la souveraineté israélienne en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.Pour les responsables américains, un tel projet nuit à leur efforts visant à consolider le fragile cessez-le-feu dans la bande de Gaza après deux ans de guerre dévastatrice, déclenchée par une attaque du Hamas palestinien contre Israël le 7 octobre 2023.”La politique de l’administration Trump est que la Cisjordanie ne sera pas annexée par Israël, cela continuera d’être notre politique”, a dit M. Vance au terme de sa visite en Israël. “Si c’était un coup politique, c’était un coup politique très stupide et je le prends personnellement comme une insulte.” Avant de quitter Washington mercredi pour se rendre en Israël, M. Rubio a estimé qu’un tel projet “menacerait” le cessez-le-feu à Gaza et serait “contre-productif”.”Ce n’est pas quelque chose que nous pouvons soutenir pour le moment”, ajouté le secrétaire d’Etat, qui doit rencontrer le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu vendredi.Fin septembre, le président Donald Trump a affirmé qu’il ne “permettrait pas à Israël d’annexer la Cisjordanie. Non, je ne le permettrai pas. Cela n’arrivera pas”.Ce projet est soutenu par l’extrême droite israélienne.- “Très difficile” -Plusieurs responsables de l’administration Trump se sont succédé cette semaine à Jérusalem pour tenter de cimenter le cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre et basé sur un plan de M. Trump.L’accord entre Israël et le Hamas a paru vaciller dimanche après des violences meurtrières à Gaza et des échanges d’accusations de violations de la trêve.Mercredi, après un entretien avec Benjamin Netanyahu M. Vance a reconnu que les prochaines étapes de l’accord, dont le désarmement du Hamas et la reconstruction de Gaza, seraient “très difficiles”. “Nous avons une tâche très, très difficile devant nous, qui est de désarmer le Hamas et de reconstruire Gaza, de rendre la vie meilleure pour les gens de Gaza, mais aussi de s’assurer que le Hamas ne soit plus une menace pour nos amis en Israël”, a-t-il dit.La première phase de l’accord prévoit, outre le cessez-le-feu, la libération de tous les otages, vivants et morts, aux mains du Hamas depuis l’attaque du 7-Octobre, des retraits israéliens dans Gaza et l’afflux d’aide humanitaire pour la population gazaouie.Le Hamas a libéré au 13 octobre tous les otages vivants, au nombre de 20. Il devait aussi rendre à cette date les 28 corps des captifs qu’il retient, mais il n’en a restitué que 15 jusque-là, arguant de difficultés pour trouver les dépouilles dans le territoire ravagé par l’offensive israélienne lancée en représailles à l’attaque du 7-Octobre.Israël a restitué en échange 195 corps de Palestiniens. Les forces israéliennes se sont retirées de secteurs de Gaza mais contrôlent toujours environ la moitié du territoire palestinien et l’assiègent. L’aide humanitaire reste insuffisante selon l’ONU.- La presse étrangère déçue -Les phases ultérieures du plan Trump prévoient un nouveau retrait israélien dans Gaza, le désarmement du Hamas, le déploiement d’une force de sécurité internationale ainsi que la reconstruction du territoire notamment.M. Vance a exclu le déploiement de troupes américaines au sol à Gaza et affirmé chercher des pays prêts à contribuer à cet effort militaire. Le Hamas a jusqu’à présent refusé d’envisager son désarmement et ses combattants se sont redéployés dans des secteurs de Gaza après la trêve, s’affrontant avec des groupes armés dont il accuse certains de “collaborer” avec Israël. M. Netanyahu veut chasser le Hamas de Gaza où le mouvement a pris le pouvoir en 2007.L’attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.221 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l’AFP à partir de données officielles.  L’offensive israélienne menée en représailles a fait 68.280 morts à Gaza, en majorité des civils, selon les chiffres du ministère de la Santé du Hamas, et provoqué un désastre humanitaire.Jeudi, l’Association de la presse étrangère à Jérusalem (FPA) a exprimé sa déception après que la Cour suprême israélienne a reporté de 30 jours sa décision sur la demande de la FPA d’un accès indépendant à Gaza qu’elle réclame depuis deux ans.Les autorités israéliennes qui contrôlent tous le accès de Gaza, empêchent depuis deux ans les journalistes de médias étrangers d’entrer de manière indépendante dans le territoire dévasté.

A la ferme, des détenus en fin de peine se réinsèrent pas à pas

Réapprendre à vivre à l’air libre, retrouver un travail, renouer avec la vie en communauté, reconquérir autonomie et intimité: la ferme Ker Madeleine, en Loire-Atlantique, accompagne des détenus en fin de peine pour amorcer leur réinsertion.Sous une serre plantée au coeur des 43 hectares de cette propriété de Saint-Gildas-des-Bois, Frédéric, 43 ans, inspecte les dernières tomates de la saison. Sous placement extérieur depuis début octobre, il a quitté sa cellule en prison pour une chambre dans la longère en pierre de Ker Madeleine. Sa fin de peine est prévue pour 2027.”Tout a changé. J’étais dans une cellule de quelques mètres carrés et je me retrouve dans un espace vert à ciel ouvert. Avec la clef de ma chambre et des personnes qui m’aident à construire ma vie d’après”, raconte Frédéric, polaire grise et lunettes rectangulaires. Lui qui n’a “plus d’attache, ni famille, ni proches, ni maison”, n’aurait pas su où aller “si la porte de la prison s’était ouverte du jour au lendemain”.Avec pour objectif d’éviter la sortie sèche, sans accompagnement, la ferme Ker Madeleine emploie comme salariés, pour une durée de quelques mois à deux ans, dix détenus (des hommes uniquement) ayant fait cette demande d’aménagement de peine. Des professionnels les aident à chercher pour l’après un logement, un travail, à passer le permis de conduire, parfois à reprendre contact avec leur famille.- Pudeur -“Évidemment, c’est comme une carte postale: il y a la belle photo et derrière l’histoire qu’on écrit. Il peut y avoir des tensions à réguler, des colères à accompagner. Mais c’est surtout de la joie, de la complicité”, explique Anthony Pouliquen, directeur d’Emmaüs Sources d’envol, association gérante de Ker Madeleine.Le choix du “support agricole” n’est pas anodin, explique-t-il. “On peut imaginer quand on a vécu enfermé ce que ça représente de travailler à l’air libre.”Arrivés à la ferme, les salariés ne sont plus des détenus mais des résidents. Les nouveaux arrivants mettent parfois un peu de temps à remplacer le mot cellule par chambre. Les encadrants mettent d’ailleurs un point d’honneur à ne jamais y entrer sans s’être d’abord annoncés. “Il y a des choses de l’ordre de l’intime qui ont souvent été perdues. Il n’y a plus trop de pudeur quand ils arrivent ici: tout a tellement été exposé au procès. Les cellules partagées empêchent souvent toute intimité”, explique Adeline Eveno, chargée de la vie communautaire à Ker Madeleine.L’accent est aussi mis sur l’autonomie, parfois moins évidente pour les détenus ayant purgé les plus longues peines (13 ans jusqu’ici pour Ker Madeleine). Les tâches ménagères sont réparties chaque jour entre les résidents.Chargé ce matin-là de la préparation du déjeuner, Alban, 40 ans, jogging noir et casquette sur la tête, épluche des carottes aux côtés d’une bénévole, voisine de la ferme, à la retraite. – Fourche -Avant l’ouverture en 2022, le projet avait suscité méfiance et réticences de la part de certains riverains, à l’origine de pétitions et de quelques manifestations.”Cette opposition est derrière nous aujourd’hui. En trois ans, il n’y a pas eu le moindre incident”, souligne Anthony Pouliquen. Le recours aux aménagements en fin de peine, pensés pour “favoriser un retour progressif à la liberté et préparer l’insertion”, a augmenté ces dernières années, jusqu’à représenter en 2024 près de la moitié des sorties de prison après une condamnation pour un délit, selon le ministère de la Justice. La plus grande partie de ces aménagements se font sous bracelet électronique. Fin 2023, la Cour des comptes appelait dans un rapport à renforcer le déploiement des placements extérieurs et de la semi-liberté “qui permettent un accompagnement du détenu”.A Ker Madeleine, Laurent, 51 ans, s’occupe des chèvres et de la vente au marché des produits de la ferme. Fourche à la main, en jogging bleu nuit et bottes kaki, il place dans l’enclos quelques bottes de foin. Lui vient d’achever sa peine et devrait quitter la ferme d’ici la fin de l’année. Le travail d’après” il l’imagine “à l’extérieur, surtout pas entre quatre murs”.