Sur les points de deal à Marseille, des ados traités comme des “esclaves modernes”

“Bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP appelle la police”. C’est l’angoissant message que des clients d’un point de deal de Marseille ont découvert griffonné dans le pochon de drogue qu’ils venaient d’acheter.”On a souvent des mineurs violentés très gravement, séquestrés, mis à l’amende, qui n’arrivent plus à sortir des réseaux” mais “c’est l’omerta, on ne dénonce pas”, explique à l’AFP le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, qui n’hésite pas désormais à parler de traite d’êtres humains.Les autorités ne savent pas quoi faire pour endiguer ce phénomène apparu peu avant le Covid. Des centaines d’adolescents, souvent en rupture familiale, “jobbent” à Marseille, recrutés sur les réseaux sociaux. Certains viennent d’ailleurs et les autorités ont même parlé de “narcotourisme”. “On fait croire que c’est le job de rêve mais 100 euros pour guetter de 10H à minuit, au taux horaire, c’est de l’exploitation”, remarque une actrice associative qui souhaite rester anonyme tant la peur règne depuis l’assassinat mi-novembre de Mehdi Kessaci, tué sans doute pour faire taire son frère Amine, militant anti-drogue.Pour Hakim*, descendu de région parisienne fin 2020, les choses ont vite mal tourné. C’est l’un des rares cas qui a donné lieu à des poursuites, car les victimes ne portent presque jamais plainte.Quelques jours à peine après son arrivée, il se jette sur des policiers en patrouille cité de la Busserine, les suppliant de le sortir de là. Cet adolescent alors âgé de 15 ans est certes venu de son plein gré dans la deuxième ville de France mais très vite on lui prend son téléphone, on l’oblige à dormir chez une logeuse “énormément radine”: un bol d’eau pour se laver et un cookie à partager avec un partenaire d’infortune, raconte-t-il aux enquêteurs.Il fait le guetteur et doit crier “ara” à l’arrivée de la police. On lui reproche d’avoir raté une alerte, c’est le début d’un déferlement de violences. Et le gérant du point de deal, à peine plus âgé, un surnommé Loose D dont il ne connaissait pas le vrai nom, une garantie en cas d’interpellation, lui lance sous la menace d’un couteau: “Qu’est-ce que tu serais prêt à faire pour rester en vie ? Est-ce que tu serais prêt à me sucer ?”. Il est violé, on lui fait croire qu’il est filmé pour qu’il se taise.- des “mouchoirs jetables” -Début février une affaire similaire sera jugée aux assises des Bouches-du-Rhône. Les faits se passent cette fois dans la cité de Frais-Vallon en 2022: deux minots à qui on invente “un trou” dans la caisse de 500 euros.Dans les pochons de drogue qu’ils remettent aux clients, ils glissent des petits papiers: “bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP appelle la police il nous oblige a vendre gratuit depuis 1 mois et nous tabasse avec des bare. SVP appelle la police on a besoin d’aide (on a 15 ans)” (sic).Ils finiront par sauter du 2e étage de l’appartement où ils étaient retenus et les pompiers les récupéreront grâce à l’appel d’un passant.Cette brutalité commence désormais à déborder sur des fratries: “si d’aventure, le frère ne rembourse pas ou ne jobbe pas assez, le petit frère ou la petite soeur est mis à contribution, elle est violée pour rembourser”, témoigne un directeur d’un établissement accueillant des mineurs délinquants. Il confirme: ils ne portent jamais plainte par peur des représailles et parce qu’on ne “balance” pas.Les dossiers se ressemblent et face à ce phénomène, où les tortionnaires ont parfois eux-mêmes subi des sévices, la justice est en train d’opérer un changement d’approche significatif.”Quand nous sommes arrivés en 2023, c’était en pleine guerre de gangs entre les clans Yoda et DZ Mafia. Et nous avons fait immédiatement le constat qu’on avait énormément de mineurs décédés, gravement blessés. C’était eux qui étaient au front, ils étaient complètement interchangeables, des mouchoirs jetables. Ils arrivaient volontairement en disant +je vais rentrer dans un réseau+, et puis, très vite, ils déchantaient, puisqu’ils étaient vraiment traités comme des esclaves”, explique Isabelle Fort, qui pilote le pôle criminalité organisée au parquet de Marseille.C’est une juge pour enfants aujourd’hui à la retraite, Laurence Bellon, qui a commencé à parler de traite d’êtres humains. “Ces adolescents sont coincés dans un processus de répétition que l’on aborde aujourd’hui uniquement sous l’angle de la récidive alors qu’il s’agit aussi d’emprise et de soumission à des réseaux très violents”, expliquait-t-elle à l’AFP en 2023.Habituellement, la traite d’êtres humains est réservée aux dossiers de proxénétisme ou de mendicité forcée. Parler de criminalité forcée est totalement inédit en France et cette approche bouscule, divise, mais finit par cheminer.L’Unicef a poussé un cri d’alerte en juillet, soulignant qu’il est “en contradiction avec le droit international que les enfants victimes d’exploitation criminelle fassent encore l’objet de poursuites et de sanctions pénales en France au lieu d’être considérés et pris en charge comme des victimes”.En Belgique ou au Royaume-Uni des lois récentes établissent “que les victimes de la traite ne doivent pas être punies pour des infractions commises sous contrainte”, souligne l’organisme onusien.- D’abord auteur ou victime ? -La France commence à avancer sur ce sujet. En janvier, le ministre de la Justice Gérald Darmanin préconisait lui-même dans une circulaire d'”envisager le traitement des procédures sous l’angle de la répression de la traite des êtres humains”.Le parquet de Marseille a donc ouvert une dizaine d’enquêtes comportant un volet traite d’êtres humains sur des réseaux de trafiquants, annonce-t-il à l’AFP. “Il y a un travail de changement de paradigme pour tout le monde, mais sans tomber dans l’excès inverse de déresponsabiliser complètement les jeunes qui viendraient au soleil de Marseille parce qu’on paye mieux qu’ailleurs”, insiste Céline Raignault, procureure-adjointe, en charge de la division Mineurs-Famille.La traite d’êtres humains obéit à des critères précis : la notion de déplacement, de recrutement aux fins d’exploitation, les menaces, violences, l’abus de vulnérabilité et éventuellement le recrutement par voies de télécommunication, énumère-t-elle.Du côté des policiers, il y a une certaine réticence et une difficulté à faire parler ces petites mains du trafic. “Il faut dans la traite d’être humains qu’on ait à faire à des victimes à 100%”, estime Sébastien Lautard, numéro deux de la police marseillaise.”Actuellement, c’est bien beau, c’est des belles idées, mais on n’est pas prêts”, ajoute le commissaire, pour qui “il y a un flou artistique dans le traitement de ces jeunes-là”, notamment le manque d'”un parcours pour sortir du trafic”.”Il n’y a aucun retour possible, à part de les extraire et de prendre soin d’eux”, insiste le directeur d’établissement déjà cité: “il faudrait les mettre à la campagne et les reconsidérer comme des enfants”, faire des choses simples avec eux, des jeux de société, la cuisine pour les sortir d’un mode de fonctionnement qui repose sur la violence où “agresseur, agressé tout se mélange”.Me Frédéric Asdighikian, spécialiste du droit des enfants, se souvient d’un client, un mineur en fuite. Il est revenu brûlé au chalumeau sur le flanc, sa blessure était à vif, pas soignée. “Ils ont l’habitude de cette douleur, on l’avait torturé dans une cave trois jours”.”c’est vraiment de l’esclavage moderne”, estime l’avocat pour qui “il faut qu’on essaie de réfléchir autrement parce que c’est une histoire sans fin”.* prénom modifié

Sur les points de deal à Marseille, des ados traités comme des “esclaves modernes”

“Bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP appelle la police”. C’est l’angoissant message que des clients d’un point de deal de Marseille ont découvert griffonné dans le pochon de drogue qu’ils venaient d’acheter.”On a souvent des mineurs violentés très gravement, séquestrés, mis à l’amende, qui n’arrivent plus à sortir des réseaux” mais “c’est l’omerta, on ne dénonce pas”, explique à l’AFP le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, qui n’hésite pas désormais à parler de traite d’êtres humains.Les autorités ne savent pas quoi faire pour endiguer ce phénomène apparu peu avant le Covid. Des centaines d’adolescents, souvent en rupture familiale, “jobbent” à Marseille, recrutés sur les réseaux sociaux. Certains viennent d’ailleurs et les autorités ont même parlé de “narcotourisme”. “On fait croire que c’est le job de rêve mais 100 euros pour guetter de 10H à minuit, au taux horaire, c’est de l’exploitation”, remarque une actrice associative qui souhaite rester anonyme tant la peur règne depuis l’assassinat mi-novembre de Mehdi Kessaci, tué sans doute pour faire taire son frère Amine, militant anti-drogue.Pour Hakim*, descendu de région parisienne fin 2020, les choses ont vite mal tourné. C’est l’un des rares cas qui a donné lieu à des poursuites, car les victimes ne portent presque jamais plainte.Quelques jours à peine après son arrivée, il se jette sur des policiers en patrouille cité de la Busserine, les suppliant de le sortir de là. Cet adolescent alors âgé de 15 ans est certes venu de son plein gré dans la deuxième ville de France mais très vite on lui prend son téléphone, on l’oblige à dormir chez une logeuse “énormément radine”: un bol d’eau pour se laver et un cookie à partager avec un partenaire d’infortune, raconte-t-il aux enquêteurs.Il fait le guetteur et doit crier “ara” à l’arrivée de la police. On lui reproche d’avoir raté une alerte, c’est le début d’un déferlement de violences. Et le gérant du point de deal, à peine plus âgé, un surnommé Loose D dont il ne connaissait pas le vrai nom, une garantie en cas d’interpellation, lui lance sous la menace d’un couteau: “Qu’est-ce que tu serais prêt à faire pour rester en vie ? Est-ce que tu serais prêt à me sucer ?”. Il est violé, on lui fait croire qu’il est filmé pour qu’il se taise.- des “mouchoirs jetables” -Début février une affaire similaire sera jugée aux assises des Bouches-du-Rhône. Les faits se passent cette fois dans la cité de Frais-Vallon en 2022: deux minots à qui on invente “un trou” dans la caisse de 500 euros.Dans les pochons de drogue qu’ils remettent aux clients, ils glissent des petits papiers: “bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP appelle la police il nous oblige a vendre gratuit depuis 1 mois et nous tabasse avec des bare. SVP appelle la police on a besoin d’aide (on a 15 ans)” (sic).Ils finiront par sauter du 2e étage de l’appartement où ils étaient retenus et les pompiers les récupéreront grâce à l’appel d’un passant.Cette brutalité commence désormais à déborder sur des fratries: “si d’aventure, le frère ne rembourse pas ou ne jobbe pas assez, le petit frère ou la petite soeur est mis à contribution, elle est violée pour rembourser”, témoigne un directeur d’un établissement accueillant des mineurs délinquants. Il confirme: ils ne portent jamais plainte par peur des représailles et parce qu’on ne “balance” pas.Les dossiers se ressemblent et face à ce phénomène, où les tortionnaires ont parfois eux-mêmes subi des sévices, la justice est en train d’opérer un changement d’approche significatif.”Quand nous sommes arrivés en 2023, c’était en pleine guerre de gangs entre les clans Yoda et DZ Mafia. Et nous avons fait immédiatement le constat qu’on avait énormément de mineurs décédés, gravement blessés. C’était eux qui étaient au front, ils étaient complètement interchangeables, des mouchoirs jetables. Ils arrivaient volontairement en disant +je vais rentrer dans un réseau+, et puis, très vite, ils déchantaient, puisqu’ils étaient vraiment traités comme des esclaves”, explique Isabelle Fort, qui pilote le pôle criminalité organisée au parquet de Marseille.C’est une juge pour enfants aujourd’hui à la retraite, Laurence Bellon, qui a commencé à parler de traite d’êtres humains. “Ces adolescents sont coincés dans un processus de répétition que l’on aborde aujourd’hui uniquement sous l’angle de la récidive alors qu’il s’agit aussi d’emprise et de soumission à des réseaux très violents”, expliquait-t-elle à l’AFP en 2023.Habituellement, la traite d’êtres humains est réservée aux dossiers de proxénétisme ou de mendicité forcée. Parler de criminalité forcée est totalement inédit en France et cette approche bouscule, divise, mais finit par cheminer.L’Unicef a poussé un cri d’alerte en juillet, soulignant qu’il est “en contradiction avec le droit international que les enfants victimes d’exploitation criminelle fassent encore l’objet de poursuites et de sanctions pénales en France au lieu d’être considérés et pris en charge comme des victimes”.En Belgique ou au Royaume-Uni des lois récentes établissent “que les victimes de la traite ne doivent pas être punies pour des infractions commises sous contrainte”, souligne l’organisme onusien.- D’abord auteur ou victime ? -La France commence à avancer sur ce sujet. En janvier, le ministre de la Justice Gérald Darmanin préconisait lui-même dans une circulaire d'”envisager le traitement des procédures sous l’angle de la répression de la traite des êtres humains”.Le parquet de Marseille a donc ouvert une dizaine d’enquêtes comportant un volet traite d’êtres humains sur des réseaux de trafiquants, annonce-t-il à l’AFP. “Il y a un travail de changement de paradigme pour tout le monde, mais sans tomber dans l’excès inverse de déresponsabiliser complètement les jeunes qui viendraient au soleil de Marseille parce qu’on paye mieux qu’ailleurs”, insiste Céline Raignault, procureure-adjointe, en charge de la division Mineurs-Famille.La traite d’êtres humains obéit à des critères précis : la notion de déplacement, de recrutement aux fins d’exploitation, les menaces, violences, l’abus de vulnérabilité et éventuellement le recrutement par voies de télécommunication, énumère-t-elle.Du côté des policiers, il y a une certaine réticence et une difficulté à faire parler ces petites mains du trafic. “Il faut dans la traite d’être humains qu’on ait à faire à des victimes à 100%”, estime Sébastien Lautard, numéro deux de la police marseillaise.”Actuellement, c’est bien beau, c’est des belles idées, mais on n’est pas prêts”, ajoute le commissaire, pour qui “il y a un flou artistique dans le traitement de ces jeunes-là”, notamment le manque d'”un parcours pour sortir du trafic”.”Il n’y a aucun retour possible, à part de les extraire et de prendre soin d’eux”, insiste le directeur d’établissement déjà cité: “il faudrait les mettre à la campagne et les reconsidérer comme des enfants”, faire des choses simples avec eux, des jeux de société, la cuisine pour les sortir d’un mode de fonctionnement qui repose sur la violence où “agresseur, agressé tout se mélange”.Me Frédéric Asdighikian, spécialiste du droit des enfants, se souvient d’un client, un mineur en fuite. Il est revenu brûlé au chalumeau sur le flanc, sa blessure était à vif, pas soignée. “Ils ont l’habitude de cette douleur, on l’avait torturé dans une cave trois jours”.”c’est vraiment de l’esclavage moderne”, estime l’avocat pour qui “il faut qu’on essaie de réfléchir autrement parce que c’est une histoire sans fin”.* prénom modifié

Pour les sommelières, un verre à moitié plein

La sommellerie a longtemps été un bastion masculin mais les femmes prennent désormais largement leur place et s’imposent avec éclat jusque dans les concours et les établissements prestigieux, malgré les obstacles qui subsistent dans le milieu.Aujourd’hui figure de la sommellerie internationale, Pascaline Lepeltier se souvient de ses débuts: des clients masculins “d’un certain âge ne me faisaient pas confiance” ou “demandaient à voir le sommelier”, raconte à l’AFP cette quadragénaire installée à New York depuis 2009.Même ressenti pour Paz Levinson, sommelière argentine. “Quand je suis arrivée en France, il y avait des clients qui avaient tendance à préférer un homme sommelier… et Français”, se souvient-elle. Vingt ans plus tard, le paysage a changé. “Les choses ont évolué en termes de mixité. Ce n’est pas la parité, mais on s’en approche”, assure Mme Lepeltier.Le sommelier est une figure incontournable des grandes tables gastronomiques. Il est l’expert du vin et des boissons, chargé d’en imaginer la carte, de gérer la cave et d’accompagner les clients dans leurs accords mets-vins.Si les années 1970-1980 ont vu émerger quelques pionnières, comme les Françaises Danièle Carré-Chantal ou Maryse Allarousse, le véritable tournant s’est opéré “il y a une vingtaine d’années”, estime Fabrice Sommier, président de l’Union de la sommellerie française (UDSF). Au point qu’aujourd’hui, les femmes représentent près de la moitié des effectifs en formation.”Ça reste un métier masculin. Quand on voit les chefs sommeliers dans les restaurants, il y a plus d’hommes que de femmes”, nuance toutefois Paz Levinson, mais “depuis 15 ans que je suis en France, j’ai vu des changements.”Son parcours en témoigne: deux fois sacrée meilleure sommelière d’Argentine (2010, 2014), puis meilleure sommelière des Amériques en 2015, la quadragénaire dirige depuis 2018 la sommellerie des restaurants d’Anne-Sophie Pic.La même année, Pascaline Lepeltier a signé un doublé historique en devenant à la fois Meilleur Sommelier de France et Meilleur Ouvrier de France, avant d’être sacrée vice-meilleure sommelière d’Europe en 2024.- Accords sans alcool -Pour Marion Cirino, récemment élue meilleure sommelière de l’année par le Gault et Millau, la question du genre ne s’est en revanche jamais posée. “Il suffit juste de bien faire son métier, sincèrement, pour que tout le monde vous respecte”, estime la sexagénaire, sommelière du triplement étoilé L’Ambroisie à Paris. Après avoir constitué pendant près de vingt ans la cave du deux étoiles L’Hostellerie Jérôme, près de Monaco, elle observe même que le client “est peut-être plus apaisé avec une femme qu’avec un homme”.”Je me suis toujours comportée comme si être homme ou femme n’avait pas d’intérêt. C’est la passion qui nous réunit”, abonde Agnese Morandi, sommelière du restaurant deux étoiles Table à Paris. L’Italienne de 28 ans s’est notamment formée auprès de Paz Levinson, qui lui a “ouvert l’esprit” sur les accords sans alcool. Une démarche qui l’inspire encore aujourd’hui, notamment à travers la carte des thés qu’elle propose chez Table.- Objectif monde -Les femmes sommelières “partent plus dans des régions ou des produits plus confidentiels” et proposent des accords “un peu plus doux”, selon Alexandre Lesieur, enseignant à l’École de Paris des Métiers de la Table (EPMT).”Je ne dirais pas qu’on a une approche différente”, nuance Pauline Monclus, l’une de ses apprenties. “Chacun a vraiment sa personnalité (…), homme comme femme”, assure la jeune femme de 25 ans. Si la féminisation progresse, la parité reste absente des podiums. Pascaline Lepeltier demeure la seule femme sacrée meilleur sommelier de France, et au concours du meilleur sommelier du monde dans lequel moins de 10 % des candidats sont des femmes. Certaines ont brillé – la Canadienne Véronique Rivest (2e en 2013), la Danoise Nina Jensen (2e en 2019 et 2023) ou encore la Française Julie Dupouy (3e en 2016) – mais aucune n’a encore remporté le titre.”Il nous reste la place à prendre des meilleures sommeliers du monde. On garde beaucoup d’espoir ”, assure Paz LevinsonArrivée 4e en 2023, Pascaline Lepeltier représentera de nouveau la France en 2026 à Lisbonne. 

Pour les sommelières, un verre à moitié plein

La sommellerie a longtemps été un bastion masculin mais les femmes prennent désormais largement leur place et s’imposent avec éclat jusque dans les concours et les établissements prestigieux, malgré les obstacles qui subsistent dans le milieu.Aujourd’hui figure de la sommellerie internationale, Pascaline Lepeltier se souvient de ses débuts: des clients masculins “d’un certain âge ne me faisaient pas confiance” ou “demandaient à voir le sommelier”, raconte à l’AFP cette quadragénaire installée à New York depuis 2009.Même ressenti pour Paz Levinson, sommelière argentine. “Quand je suis arrivée en France, il y avait des clients qui avaient tendance à préférer un homme sommelier… et Français”, se souvient-elle. Vingt ans plus tard, le paysage a changé. “Les choses ont évolué en termes de mixité. Ce n’est pas la parité, mais on s’en approche”, assure Mme Lepeltier.Le sommelier est une figure incontournable des grandes tables gastronomiques. Il est l’expert du vin et des boissons, chargé d’en imaginer la carte, de gérer la cave et d’accompagner les clients dans leurs accords mets-vins.Si les années 1970-1980 ont vu émerger quelques pionnières, comme les Françaises Danièle Carré-Chantal ou Maryse Allarousse, le véritable tournant s’est opéré “il y a une vingtaine d’années”, estime Fabrice Sommier, président de l’Union de la sommellerie française (UDSF). Au point qu’aujourd’hui, les femmes représentent près de la moitié des effectifs en formation.”Ça reste un métier masculin. Quand on voit les chefs sommeliers dans les restaurants, il y a plus d’hommes que de femmes”, nuance toutefois Paz Levinson, mais “depuis 15 ans que je suis en France, j’ai vu des changements.”Son parcours en témoigne: deux fois sacrée meilleure sommelière d’Argentine (2010, 2014), puis meilleure sommelière des Amériques en 2015, la quadragénaire dirige depuis 2018 la sommellerie des restaurants d’Anne-Sophie Pic.La même année, Pascaline Lepeltier a signé un doublé historique en devenant à la fois Meilleur Sommelier de France et Meilleur Ouvrier de France, avant d’être sacrée vice-meilleure sommelière d’Europe en 2024.- Accords sans alcool -Pour Marion Cirino, récemment élue meilleure sommelière de l’année par le Gault et Millau, la question du genre ne s’est en revanche jamais posée. “Il suffit juste de bien faire son métier, sincèrement, pour que tout le monde vous respecte”, estime la sexagénaire, sommelière du triplement étoilé L’Ambroisie à Paris. Après avoir constitué pendant près de vingt ans la cave du deux étoiles L’Hostellerie Jérôme, près de Monaco, elle observe même que le client “est peut-être plus apaisé avec une femme qu’avec un homme”.”Je me suis toujours comportée comme si être homme ou femme n’avait pas d’intérêt. C’est la passion qui nous réunit”, abonde Agnese Morandi, sommelière du restaurant deux étoiles Table à Paris. L’Italienne de 28 ans s’est notamment formée auprès de Paz Levinson, qui lui a “ouvert l’esprit” sur les accords sans alcool. Une démarche qui l’inspire encore aujourd’hui, notamment à travers la carte des thés qu’elle propose chez Table.- Objectif monde -Les femmes sommelières “partent plus dans des régions ou des produits plus confidentiels” et proposent des accords “un peu plus doux”, selon Alexandre Lesieur, enseignant à l’École de Paris des Métiers de la Table (EPMT).”Je ne dirais pas qu’on a une approche différente”, nuance Pauline Monclus, l’une de ses apprenties. “Chacun a vraiment sa personnalité (…), homme comme femme”, assure la jeune femme de 25 ans. Si la féminisation progresse, la parité reste absente des podiums. Pascaline Lepeltier demeure la seule femme sacrée meilleur sommelier de France, et au concours du meilleur sommelier du monde dans lequel moins de 10 % des candidats sont des femmes. Certaines ont brillé – la Canadienne Véronique Rivest (2e en 2013), la Danoise Nina Jensen (2e en 2019 et 2023) ou encore la Française Julie Dupouy (3e en 2016) – mais aucune n’a encore remporté le titre.”Il nous reste la place à prendre des meilleures sommeliers du monde. On garde beaucoup d’espoir ”, assure Paz LevinsonArrivée 4e en 2023, Pascaline Lepeltier représentera de nouveau la France en 2026 à Lisbonne. 

Sept téléphériques urbains en France

La mise en service samedi du téléphérique urbain du Val-de-Marne porte à sept le nombre d’infrastructures de ce type en France. Historiquement utilisés pour franchir des reliefs accidentés en montagne, ils servent de plus en plus à désenclaver des quartiers isolés.C’est à Grenoble, enchâssée au pied des Alpes, que le premier téléphérique urbain du pays a vu le jour en 1934, restauré en 1976, pour relier le centre-ville au fort de la Bastille qui surplombe la ville.Mais cet équipement de transport aérien par câble, comme celui de Toulon qui relie la ville au mont Faron à 584 mètres d’altitude depuis 1959, reste à vocation de desserte essentiellement touristique.Le transport urbain par câble a commencé par être terrestre, avec les funiculaires au XIXe siècle, comme celui de Montmartre (1900) à Paris, également à vocation touristique.Pour que ce mode de déplacement prenne les airs et soit véritablement intégré au réseau de transport en commun, en sortant d’un usage purement touristique, il a fallu attendre celui de Brest en 2016.D’une longueur de 420 mètres, il relie deux rives du fleuve et raccorde le centre-ville au quartier des Capucins qui a fait l’objet d’un programme de rénovation urbaine. Les passagers l’empruntent grâce à un titre de transport standard, sans surcoût.Depuis 2020, trois autres projets de ce type, servant à réduire des fractures urbaines et à désenclaver des zones isolées, ont vu le jour: Toulouse et Saint-Denis de La Réunion en 2022, puis Ajaccio en Corse en 2025.Jusqu’à l’inauguration du C1 dans le Val-de-Marne samedi, celui de Toulouse, baptisé Téléo, était le plus long de France, avec ses 3,7 kilomètres. Il dessert l’université Paul-Sabatier et un centre de recherche hospitalier sur le cancer, survolant la Garonne et la colline de Pech-David.A Saint-Denis de La Réunion, connue pour ses embouteillages monstres, le téléphérique de 2,7 kilomètres relie en 14 minutes et trois stations intermédiaires un quartier est à un quartier nord.A Ajaccio, “Angelo”, inauguré en octobre, sert aussi à relier des quartiers isolés au centre-ville, sur près de 3 kilomètres et 4 stations desservies.Avec 4,5 kilomètres et 5 stations de plain-pied sans escalier ni escalator ni ascenseur, le C1 exploité par Transdev, se présente comme “le plus long téléphérique urbain d’Europe”.Il est “une réponse concrète aux besoins des riverains de Limeil-Brévannes, Valenton et du plateau de Villeneuve-Saint-Georges qui étaient enclavés dans leur secteur”, explique Grégoire de Lasteyrie, vice-président du conseil régional d’Ile-de-France chargé des Transports.Alors que cette zone n’est qu’à 15 kilomètres de Paris, elle ne bénéficiait ni du métro de la capitale ni de RER et les bus étaient ralentis par un “faisceau ferroviaire de lignes à grande vitesse sortant de Paris, une gare de triage et plusieurs axes routiers”.

A close-up of a stack of newspapers resting on a desk, symbolizing information and media.

Sept téléphériques urbains en France

La mise en service samedi du téléphérique urbain du Val-de-Marne porte à sept le nombre d’infrastructures de ce type en France. Historiquement utilisés pour franchir des reliefs accidentés en montagne, ils servent de plus en plus à désenclaver des quartiers isolés.C’est à Grenoble, enchâssée au pied des Alpes, que le premier téléphérique urbain du pays a vu le jour en 1934, restauré en 1976, pour relier le centre-ville au fort de la Bastille qui surplombe la ville.Mais cet équipement de transport aérien par câble, comme celui de Toulon qui relie la ville au mont Faron à 584 mètres d’altitude depuis 1959, reste à vocation de desserte essentiellement touristique.Le transport urbain par câble a commencé par être terrestre, avec les funiculaires au XIXe siècle, comme celui de Montmartre (1900) à Paris, également à vocation touristique.Pour que ce mode de déplacement prenne les airs et soit véritablement intégré au réseau de transport en commun, en sortant d’un usage purement touristique, il a fallu attendre celui de Brest en 2016.D’une longueur de 420 mètres, il relie deux rives du fleuve et raccorde le centre-ville au quartier des Capucins qui a fait l’objet d’un programme de rénovation urbaine. Les passagers l’empruntent grâce à un titre de transport standard, sans surcoût.Depuis 2020, trois autres projets de ce type, servant à réduire des fractures urbaines et à désenclaver des zones isolées, ont vu le jour: Toulouse et Saint-Denis de La Réunion en 2022, puis Ajaccio en Corse en 2025.Jusqu’à l’inauguration du C1 dans le Val-de-Marne samedi, celui de Toulouse, baptisé Téléo, était le plus long de France, avec ses 3,7 kilomètres. Il dessert l’université Paul-Sabatier et un centre de recherche hospitalier sur le cancer, survolant la Garonne et la colline de Pech-David.A Saint-Denis de La Réunion, connue pour ses embouteillages monstres, le téléphérique de 2,7 kilomètres relie en 14 minutes et trois stations intermédiaires un quartier est à un quartier nord.A Ajaccio, “Angelo”, inauguré en octobre, sert aussi à relier des quartiers isolés au centre-ville, sur près de 3 kilomètres et 4 stations desservies.Avec 4,5 kilomètres et 5 stations de plain-pied sans escalier ni escalator ni ascenseur, le C1 exploité par Transdev, se présente comme “le plus long téléphérique urbain d’Europe”.Il est “une réponse concrète aux besoins des riverains de Limeil-Brévannes, Valenton et du plateau de Villeneuve-Saint-Georges qui étaient enclavés dans leur secteur”, explique Grégoire de Lasteyrie, vice-président du conseil régional d’Ile-de-France chargé des Transports.Alors que cette zone n’est qu’à 15 kilomètres de Paris, elle ne bénéficiait ni du métro de la capitale ni de RER et les bus étaient ralentis par un “faisceau ferroviaire de lignes à grande vitesse sortant de Paris, une gare de triage et plusieurs axes routiers”.

Au domaine de Grosbois, les champions trotteurs peaufinent leur forme avant l’Amérique

Au petit matin, par petits groupes en file indienne, des trotteurs foulent la piste du centre d’entraînement de Grosbois (Val-de-Marne). Pas de casaque pour les différencier mais un même couvre-reins marron: difficile de reconnaitre le Français Keep Going ou encore le Suédois Borups Victory en quête d’un sacre dans l’Amérique.Tous les jours, les chevaux attelés ou montés, dont de nombreux cracks, séjournent dans le plus grand centre d’entraînement de chevaux trotteurs d’Europe, notamment en vue du Prix d’Amérique, sur le domaine de Grosbois à Marolles-en-Brie (Val-de-Marne).Le “Clairefontaine des courses hippiques” possède quatre pistes d’entraînement, dont un anneau de vitesse et 40 km d’allées cavalières en forêt.”On n’a pas l’impression qu’il y a surpopulation alors que nous avons actuellement 1.500 chevaux sur le site. Il n’y a pas d’embouteillage aux accès des pistes car il y a 100 hectares de surfaces en sable pour faire trotter les chevaux”, explique Christophe Walazyc, chef de l’établissement du domaine de Grosbois qui s’étend sur 412 hectares.Soixante-quinze entraîneurs y séjournent durant le meeting d’hiver. Cette année encore, les écuries font le plein de résidents à quatre jambes.”Les pistes avec les grandes lignes droites et les virages relevés permettent aux entraîneurs de travailler beaucoup le fractionné pour le cardio”, détaille-t-il. Matthieu Abrivard, entraîneur et driver, revient à l’écurie, la séance de la belle alezane est terminée. Le professionnel angevin, âgé de 40 ans, a pris ses quartiers d’hiver à Grosbois cette année encore, “pour éviter la fatigue pour lui et ses chevaux et faire des économies de carburant. Car les courses à Vincennes l’hiver c’est quasiment tous les jours”, confie-t-il.”Le domaine de Grosbois est ce qui se fait de mieux pour entraîner mes chevaux.” “Je n’ai pas ces infrastructures à la maison, comme les grandes lignes droites et les allées cavalières en forêt.”Une dizaine de personnes veillent à l’entretien des pistes pour les rendre confortables pour les chevaux toute l’année, quelles que soient les conditions climatiques.- Balnéo, ostéo, véto -Matthieu Abrivard va tenter de qualifier Iguski Sautonne, le fer de lance de son écurie, dans le Prix de Bourgogne le 28 décembre pour se mettre à “rêver” d’Amérique, une course “spéciale”. “La seule course de l’année ou au départ il n’y a pas un bruit, aucun cheval ne bouge, la concentration est extrême.” Pour inscrire son nom au palmarès de cette course mythique, le futur lauréat devra “être très maniable et pratique”. “Cette course se joue beaucoup au moment du départ. Il faut compter sur un bon déroulement de course”, estime Matthieu Abrivard, qui n’a encore jamais gagné le Prix d’Amérique. Troisième est son meilleur classement.Un Prix d’Amérique, c’est aussi une course de pilote. “On a une préparation mentale similaire à celle d’un pilote de formule 1”, relève-t-il. “Comme eux, on doit prendre les bonnes options. Nous on n’accélère pas, on ne freine pas mais on doit doser l’effort de notre cheval pour ne pas le payer pour finir”, fait-il valoir.Et pour arriver en forme le jour J, les chevaux font de la balnéo, vont sous les lampes chauffantes pour soulager leur dos, voient un ostéopathe ou encore un vétérinaire dans la clinique privée installée sur le site.Dans une autre écurie, Keep Going mange son foin paisiblement dans un filet accroché à la porte de son box, comme ses compagnons d’écurie. Pas de régime de faveur pour l’élève de Mathieu Mottier, qui a déjà son passeport pour l’Amérique. Keep Going est “hyper maniable et véloce”, “transformé à Grosbois”, affirme le professionnel de 33 ans. Il espère être à l’arrivée du Prix d’Amérique le 25 janvier. Avant, il courra le Prix Tenor de Baune, “une course éprouvante”, puis “il aura cinq semaines pour se reposer”.Il est bientôt midi, les chevaux s’excitent dans les boxes, la ration de grain arrive. Matthieu Abrivard, Mathieu Mottier ou encore Benjamin Rochard, qui sera associé à Izoard Védaquais dans l’Amérique, partent pour Vincennes en quête de nouvelles victoires.