Au Canada, premier débat très attendu à moins de deux semaines des législatives
Les chefs des principaux partis canadiens se retrouvent mercredi soir pour un débat en français à Montréal, où la performance du libéral Mark Carney sera particulièrement scrutée pour ce temps fort d’une campagne électorale dominée par les tensions avec les États-Unis de Donald Trump.Le nouveau Premier ministre canadien, qui a remplacé Justin Trudeau mi-mars et déclenché des élections anticipées pour le 28 avril, est attendu au tournant sur sa maîtrise du français et la défense de la province francophone de Québec, des enjeux importants dans ce pays bilingue.D’après les enquêtes, quelque 40% des électeurs de ce pays du G7 de 41 millions d’habitants n’ont pas encore fait leur choix, à moins de deux semaines du scrutin.”Contrairement à d’habitude, j’attends le débat pour me faire une idée, confie à l’AFP Carole Potvin, Montréalaise de 70 ans. Je n’ai jamais voté libéral, mais aujourd’hui j’y pense. Les menaces de Donald Trump ont tout changé.”Le retour à la Maison Blanche du républicain, qui a imposé des droits de douane au Canada dont il rêve de faire le 51e Etat américain, a rebattu les cartes de la politique nationale.Carole Potvin explique qu’elle prêtera donc moins d’attention au niveau de français des candidats, mais dit vouloir entendre des paroles fortes sur la défense de la province francophone.Même discours chez Alexandre Tittley. Pour cet ébéniste québécois de 50 ans, “on a une situation mondiale qui est dégueulasse à cause de Trump, et ce que l’on recherche avant tout, c’est un chef qui a la tête sur les épaules”.Après avoir renversé la tendance ces dernières semaines, les Libéraux (centre) dominent les intentions de vote (44%) devant les conservateurs (droite) crédités de 38%. Derrière viennent le Nouveau parti démocratique (NPD, gauche) avec 8%, puis le Bloc québécois, parti indépendantiste du Québec, à 6%.- Débat avancé -Ce débat sera l’occasion de comparer directement les visions de Mark Carney, du conservateur Pierre Poilievre, de Jagmeet Singh (NPD) et d’Yves-François Blanchet (Bloc québécois).Un cinquième homme, Jonathan Pedneault (Parti Vert), devait y participer mais en a été exclu mercredi matin car son parti n’a pas présenté assez de candidats, selon la commission organisatrice.Ce débat 100% masculin doit se tenir à 18H00 heure locale (22h00 GMT) après avoir été avancé de deux heures. La raison, surprenante pour tout observateur extérieur au Canada: éviter qu’il se déroule pendant le match des Canadiens, la très populaire équipe montréalaise de hockey sur glace.Il sera suivi jeudi d’un second échange, en anglais cette fois, qui portera sur les sujets les plus sensibles: droits de douane, menaces de Trump, crise du logement, inflation et avenir énergétique du pays.Pour Daniel Béland, professeur de sciences politiques à l’université McGill, “Mark Carney sera sûrement prudent (mercredi) car il est vraiment en avance au Québec et le danger pour lui, ce serait une bourde qui devienne virale”. Son français étant moins bon que celui de Pierre Poilievre, “s’il fait une performance correcte sans faire de gaffe, ce sera une victoire”, estime l’universitaire.Agé de 60 ans, Carney, un anglophone qui a dirigé les banques centrales du Canada et d’Angleterre, compte sur son CV pour convaincre les électeurs. Il se présente pour la première fois à une élection.En face, Pierre Poilievre, lui aussi anglophone de l’ouest, “doit montrer aux gens qu’il est capable d’exprimer son désaccord de manière calme et raisonnable”, estime Laura Stephenson, présidente du département de sciences politiques de la Western University.Agé de 45 ans, cet homme politique de carrière a mis l’accent sur des réductions d’impôts, l’amélioration de l’accès au logement et le développement des ressources naturelles face aux pressions américaines. Mais il souffre d’être vu par une partie des électeurs comme proche de Donald Trump, selon les experts.Pour Laura Stephenson, les débats “peuvent faire la différence”. Cette élection “est vraiment une course à deux chevaux, ce qui n’est pas habituel”, dit-elle. “Il sera donc très important de voir comment les deux principaux candidats se parlent”.