Les Jeux de Paris soufflent leur première bougie en bord de Seine
Pour souffler leur première bougie, les Jeux de Paris s’offrent samedi une parade de canoës sur la Seine qui fut l’une des stars de ces JO, un tour en Seine-Saint-Denis, avant une ascension de Montmartre dimanche par le peloton du Tour de France. Un an après un été festif et sportif, les JO ont déjà un peu fait leur retour depuis plus d’un mois avec la réinstallation de la vasque olympique qui prend son envol chaque soir comme l’été dernier aux Tuileries. Pour commémorer ce “souvenir commun”, comme le dit le chef d’orchestre de la cérémonie d’ouverture Thomas Jolly, un retour en Seine était inévitable. Une parade nautique de canoës, paddles, kayaks, sur le fleuve qui avait accueilli le soir du 26 juillet 2024 le défilé des délégations du monde entier, a démarré cette journée anniversaire. Deux grandes phryges, les mascottes à succès des JO, grimpées sur un zodiac, ont salué depuis le fleuve la délégation institutionnelle en promenade, tandis quelques “merci! merci!” fusaient. “Les Jeux ont changé la ville profondément, ils nous ont donné beaucoup de bonheur, beaucoup de joie”, a commenté depuis le pont Saint-Louis la maire PS de Paris Anne Hidalgo, évoquant “l’héritage très très important, comme la baignade en Seine”. “Aucune nostalgie, mais des souvenirs merveilleux qui sont toujours très forts et très présents”, a lancé Tony Estanguet, l’ex-patron du comité d’organisation. Pour son premier déplacement en France, la nouvelle présidente du CIO Kirsty Coventry a trouvé “merveilleux d’être de retour à Paris et de voir tout l’héritage laissé derrière” des JO, a-t-elle lancé, aux côtés de Thomas Bach, son prédécesseur, qui a suivi de très près pendant des années la préparation des Jeux de Paris. – baignade en Seine -Après avoir découvert le projet de “monument des championnes et champions” qui sera installé pont Saint-Louis d’ici fin 2025 pour rendre hommage aux milliers de médaillés de toute nationalité des JO, l’ensemble de la délégation s’est rendu à l’espace de baignade situé bras Marie. Plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont déjà baignées dans la Seine depuis l’ouverture des trois zones de baignade début juillet mais la météo pluvieuse a contraint la mairie de Paris à les fermer depuis le début de semaine. Elles étaient encore fermées ce samedi. La délégation du CIO s’est ensuite rendue dans le nord de Paris, rue de la Chapelle, pour voir les dix statues de femmes célèbres conçues pour la cérémonie d’ouverture des JO désormais installées dans ce quartier.Après un moment réservé aux discours au Grand Palais, lieu emblématique des compétitions d’escrime olympique, le convoi institutionnel se rendra en Seine-Saint-Denis samedi après-midi. Au menu: visite du centre aquatique olympique à Saint-Denis, gratuit pour cette journée anniversaire, et du parc Georges-Valbon à la Courneuve où seront installés les anneaux olympiques. Il s’y déroulera aussi un grand concert.- baisse du budget sport -Sur la Tour Eiffel, un drapeau avec les anneaux olympiques a déjà été accroché et sera éclairé samedi soir. Pour réinstaller des anneaux en dur, volonté affichée d’Anne Hidalgo, il faudrait modifier la législation mais pour l’instant le Sénat a rejeté cette possibilité dans la loi olympique qui passera à l’Assemblée cet automne.Si le monde sportif a envie de fêter la quinzaine olympique, il a surtout une sérieuse gueule de bois en regardant les coupes budgétaires qui ont amputé les crédits du sport dès les Jeux paralympiques terminés en septembre 2024. Dernier coup dur en date: le projet de baisse de 17,6% pour les missions jeunesse et sport dans le budget 2026 présenté par le Premier ministre François Bayrou. “C’est un message incompréhensible alors que la France va investir dans de grands évènements” comme les JO d’hiver 2030, a protesté vendredi l’adjoint au JO et au sport de la mairie de Paris Pierre Rabadan, se disant “hyper en colère”. L’ex-ministre des Sports et des JO, Amélie Oudéa Castéra, désignée fin juin présidente du comité olympique français, dénonce elle une coupe “disproportionnée”.”On n’aurait pas dû dire qu’il y aurait un héritage”, avait lâché il y a quelques mois la championne olympique d’escrime, Manon Apithy-Brunet.
A la prison de Nîmes, des conditions “terribles”, “de fou”
A la prison de Nîmes, personnel comme détenus décrivent des conditions de détention “terribles”, “de fou”. Et tous espèrent que le nouveau bâtiment va désengorger un des établissements les plus surpeuplés de France.”Le matelas, on le tire juste la nuit, sinon on ne peut pas circuler. Il y a des jours où on étouffe, quand il fait chaud c’est horrible. On a cette chance d’avoir une douche en cellule pour se rafraîchir, mais elle fuit”, relate une jeune femme blonde très apprêtée, une des trois détenues de cette cellule aux murs blancs et violets défraîchis, recouverte de coloriages.Dans le quartier des hommes, la quasi-totalité des cellules de deux places doivent aussi composer avec un matelas à terre.”Ici on compte en matelas” et “là on atteint des sommets”, déclare d’entrée de jeu la directrice adjointe, Christine Harouat, au sénateur écologiste de l’Isère, Guillaume Gontard, venu visiter jeudi cette maison d’arrêt. Accompagné de trois journalistes dont deux de l’AFP, il a eu un accès rare à tous les recoins de cette prison, la seule du Gard, surpeuplée depuis son ouverture au début des années 1970.Actuellement il y a 480 détenus pour 180 places hommes et 40 pour les femmes, soit 260 personnes de trop. Sur la zone, la prison de Toulouse-Seysses elle aussi est au bord de l’explosion.”Mettre un matelas supplémentaire, c’est déroger à la loi. Ça doit être exceptionnel. Mais là on voit que c’est quelque chose de chronique”, glisse le sénateur à la presse.”On est serré comme des sardines, on est six”, témoigne ce détenu au regard enfantin, dans sa cellule de deux fois trois lits superposés recouverte d’images de Dragon Ball. Il estime néanmoins être un des mieux lotis avec deux grandes ouvertures laissant passer de l’air et de la lumière. Ici c’est l’étage des jeunes. Avec les tensions dans les quartiers sensibles de Nîmes, gangrénés par le narcotrafic, on trie les détenus: pas question qu’un jeune de Pissevin soit au même étage qu’un autre du Mas de Mingue. – Surpeuplée mais calme -Néanmoins, “on a une population pénale calme et un ratio surpopulation/incident très faible”, rapporte un surveillant historique. “Est-ce qu’ils sont résignés à ces conditions de détention ? En tout cas, nous on connaît leurs conditions, on leur dit: +Oui, je sais+. Et ils savent que c’est dur pour tout le monde”, aussi pour les quelque 160 personnes qui travaillent ici, ajoute-t-il.”Les conditions sont terribles”, soupire Farid Guemar, chef de détention. L’air désolé, il montre les douches: des cases sans intimité avec un plafond qui tombe en lambeaux. Ici c’est trois douches par semaine, même en période de canicule. Trop de détenus à gérer, pas le choix.Dans une cellule, un écriteau tente: “Osez la bonne humeur”. La plupart sont très bien rangées. Les parloirs ne sont pas plus aux normes, reconnaît la direction. Aucune intimité, juste une succession de tables presque collées dans une salle très sonore.Au quartier d’isolement, l’ambiance est lourde. Trois détenus prennent l’air, chacun seul dans une micro-cour.”Je deviens un légume. Ca fait deux mois que je suis là, on dirait que ça fait des années”, lance l’un avec des lunettes orange sur le crâne. Il est ici car justement il a appelé d’autres détenus au blocage. “Oui mais pourquoi ? Parce qu’on a des conditions de fou”.En mai, une quarantaine de détenus avaient refusé de remonter en cellule, demandant d’en finir avec le trois par cellule, d’avoir cinq douches par semaine, et plus de travail et d’activités.Tous se demandent qui aura le droit d’aller dans le nouveau bâtiment attendu mi-août, qui permettra d’augmenter les capacités de 130 cellules. A priori, il sera réservé aux condamnés, les prévenus resteront dans les anciennes ailes.Il “devrait permettre de dégager les matelas, de lutter contre la surpopulation et d’offrir des conditions plus dignes”, énumère Christine Harouat.Mais pour le sénateur, “on sait très bien que quand il va y avoir ce désengorgement, derrière, il va y avoir cette tentation d’accélérer encore des peines” avec le risque de se retrouver rapidement “dans des conditions quasi similaires de surpopulation”.
Face à la crise climatique, l’alpinisme s’adapte et change de voie
La cordée d’alpinistes s’arrête près d’une crevasse, hésite, puis se résigne à faire demi-tour: la montée au col du Replat (3.327 m) dans les Alpes, une course jadis facile, est devenue trop risquée, la faute au changement climatique qui rabote le glacier.”Cette jolie pente, qui était avant vraiment une classique de l’initiation de l’alpinisme dans les Écrins, est de plus en plus raide. Ça devient un peu exposé. Les conditions se dégradent assez rapidement”, constate Thomas Boillot, guide de haute montagne qui connaît bien ce massif à cheval entre l’Isère et les Hautes-Alpes.Fonte des glaciers, éboulements, moraines devenues impraticables à cause du dégel, crevasses à nu et infranchissables: les Alpes, frappées de plein fouet par le réchauffement climatique, sont en pleine métamorphose et l’alpinisme n’a pas d’autre choix que de “s’adapter” aux conditions qui deviennent dans l’ensemble plus incertaines et difficiles, expliquent les professionnels de la montagne.- “Glacier tout mou” -Comme nombre de ses collègues, Thomas Boillot dit avoir renoncé “depuis plus de dix ans” à mener des clients au Mont-Blanc, qu’il juge désormais “trop dangereux” en raison des chutes de pierres, notamment dans le tristement célèbre couloir du Goûter, surnommé “couloir de la mort”.”Des journées comme aujourd’hui, c’est quand même super, par contre il faut choisir ses créneaux. Ça ne donne plus envie de venir quand il fait trop chaud, que le glacier est tout mou, et qu’on entend de l’eau couler, des bruits suspects”, souligne-t-il. Nombre des “100 plus belles courses” du massif du Mont-Blanc, recensées en 1973 par l’alpiniste Gaston Rébuffat dans un ouvrage faisant toujours référence, ne sont d’ores et déjà plus accessibles, comme le pilier Bonatti, une paroi effondrée en 2005, ou d’autres itinéraires jadis “archiclassiques”.Pour Clément Carpentier, le guide de la cordée d’alpinistes UCPA qui a dû faire demi-tour sur le glacier, rien n’est plus normal que d’avoir constamment en tête “des plans B, C, D, E” pour faire face aux conditions de terrain, aux aléas de la météo ou aux difficultés d’un client.Mais cela va plus loin désormais: les bouleversements induits par le réchauffement climatique ont beaucoup fait évoluer le calendrier des courses de l’été, trop chaud et incertain, au profit des “ailes de saison”. Plus généralement, ils poussent la profession à “se réinventer, trouver de nouveaux itinéraires (…) pratiquer un autre type d’alpinisme qui soit peut-être moins tourné vers la performance, vers le sommet à tout prix, mais plus sur le moment, le côté voyage dans des vallées très sauvages”, estime-t-il. “L’image de l’alpinisme, chez beaucoup de gens, c’est quand même le glacier, la neige, et moins le rocher. Il faut qu’on arrive à montrer au grand public que ce n’est pas que ça. En montagne, il y a plein de choses à faire et c’est toujours là”, souligne-t-il.- “Crier dans le désert” -Les guides et gardiens de refuges, aux premières loges des bouleversements observés sur le terrain, ont toujours partagé leurs informations, mais celles-ci, “volatiles”, se perdaient souvent en route, relève Jean-Marc Vengeon, président du Syndicat National des Guides de Montagne (SNGM).Allié à des laboratoires scientifiques alpins, le Parc national des Écrins et d’autres entités, le syndicat a récemment lancé un outil collaboratif pour les mettre à disposition des chercheurs, pratiquants et des pouvoirs publics, souligne-t-il. Ce site, baptisé “Regards d’altitude”, leur permet de “savoir ce qui se passe en haut”: il a recensé sur la seule première semaine de juillet 2025 six nouveaux événements (écroulement, chutes de pierres, apparition d’un lac glaciaire) autour de Chamonix.Cela fait 20 ans que le monde de la montagne “crie dans le désert”, déplore pour sa part Xavier Cailhol, guide de haute montagne, et qui travaille sur une thèse dédiée à l’alpinisme et aux risques d’origine glaciaire.Les montagnards ont “un vrai rôle de lanceur d’alerte à jouer en disant +ces changements sont irréversibles et extrêmement rapides+” faute d’application de l’Accord de Paris sur le climat, estime le jeune homme de 29 ans. L’alpinisme est touché aujourd’hui, mais demain ce sera le reste de la société, avec un risque de “crise sociale complète”. Or cela demeure “peu compris car trop abstrait”, s’alarme-t-il.
Face à la crise climatique, l’alpinisme s’adapte et change de voie
La cordée d’alpinistes s’arrête près d’une crevasse, hésite, puis se résigne à faire demi-tour: la montée au col du Replat (3.327 m) dans les Alpes, une course jadis facile, est devenue trop risquée, la faute au changement climatique qui rabote le glacier.”Cette jolie pente, qui était avant vraiment une classique de l’initiation de l’alpinisme dans les Écrins, est de plus en plus raide. Ça devient un peu exposé. Les conditions se dégradent assez rapidement”, constate Thomas Boillot, guide de haute montagne qui connaît bien ce massif à cheval entre l’Isère et les Hautes-Alpes.Fonte des glaciers, éboulements, moraines devenues impraticables à cause du dégel, crevasses à nu et infranchissables: les Alpes, frappées de plein fouet par le réchauffement climatique, sont en pleine métamorphose et l’alpinisme n’a pas d’autre choix que de “s’adapter” aux conditions qui deviennent dans l’ensemble plus incertaines et difficiles, expliquent les professionnels de la montagne.- “Glacier tout mou” -Comme nombre de ses collègues, Thomas Boillot dit avoir renoncé “depuis plus de dix ans” à mener des clients au Mont-Blanc, qu’il juge désormais “trop dangereux” en raison des chutes de pierres, notamment dans le tristement célèbre couloir du Goûter, surnommé “couloir de la mort”.”Des journées comme aujourd’hui, c’est quand même super, par contre il faut choisir ses créneaux. Ça ne donne plus envie de venir quand il fait trop chaud, que le glacier est tout mou, et qu’on entend de l’eau couler, des bruits suspects”, souligne-t-il. Nombre des “100 plus belles courses” du massif du Mont-Blanc, recensées en 1973 par l’alpiniste Gaston Rébuffat dans un ouvrage faisant toujours référence, ne sont d’ores et déjà plus accessibles, comme le pilier Bonatti, une paroi effondrée en 2005, ou d’autres itinéraires jadis “archiclassiques”.Pour Clément Carpentier, le guide de la cordée d’alpinistes UCPA qui a dû faire demi-tour sur le glacier, rien n’est plus normal que d’avoir constamment en tête “des plans B, C, D, E” pour faire face aux conditions de terrain, aux aléas de la météo ou aux difficultés d’un client.Mais cela va plus loin désormais: les bouleversements induits par le réchauffement climatique ont beaucoup fait évoluer le calendrier des courses de l’été, trop chaud et incertain, au profit des “ailes de saison”. Plus généralement, ils poussent la profession à “se réinventer, trouver de nouveaux itinéraires (…) pratiquer un autre type d’alpinisme qui soit peut-être moins tourné vers la performance, vers le sommet à tout prix, mais plus sur le moment, le côté voyage dans des vallées très sauvages”, estime-t-il. “L’image de l’alpinisme, chez beaucoup de gens, c’est quand même le glacier, la neige, et moins le rocher. Il faut qu’on arrive à montrer au grand public que ce n’est pas que ça. En montagne, il y a plein de choses à faire et c’est toujours là”, souligne-t-il.- “Crier dans le désert” -Les guides et gardiens de refuges, aux premières loges des bouleversements observés sur le terrain, ont toujours partagé leurs informations, mais celles-ci, “volatiles”, se perdaient souvent en route, relève Jean-Marc Vengeon, président du Syndicat National des Guides de Montagne (SNGM).Allié à des laboratoires scientifiques alpins, le Parc national des Écrins et d’autres entités, le syndicat a récemment lancé un outil collaboratif pour les mettre à disposition des chercheurs, pratiquants et des pouvoirs publics, souligne-t-il. Ce site, baptisé “Regards d’altitude”, leur permet de “savoir ce qui se passe en haut”: il a recensé sur la seule première semaine de juillet 2025 six nouveaux événements (écroulement, chutes de pierres, apparition d’un lac glaciaire) autour de Chamonix.Cela fait 20 ans que le monde de la montagne “crie dans le désert”, déplore pour sa part Xavier Cailhol, guide de haute montagne, et qui travaille sur une thèse dédiée à l’alpinisme et aux risques d’origine glaciaire.Les montagnards ont “un vrai rôle de lanceur d’alerte à jouer en disant +ces changements sont irréversibles et extrêmement rapides+” faute d’application de l’Accord de Paris sur le climat, estime le jeune homme de 29 ans. L’alpinisme est touché aujourd’hui, mais demain ce sera le reste de la société, avec un risque de “crise sociale complète”. Or cela demeure “peu compris car trop abstrait”, s’alarme-t-il.
Face à la crise climatique, l’alpinisme s’adapte et change de voie
La cordée d’alpinistes s’arrête près d’une crevasse, hésite, puis se résigne à faire demi-tour: la montée au col du Replat (3.327 m) dans les Alpes, une course jadis facile, est devenue trop risquée, la faute au changement climatique qui rabote le glacier.”Cette jolie pente, qui était avant vraiment une classique de l’initiation de l’alpinisme dans les Écrins, est de plus en plus raide. Ça devient un peu exposé. Les conditions se dégradent assez rapidement”, constate Thomas Boillot, guide de haute montagne qui connaît bien ce massif à cheval entre l’Isère et les Hautes-Alpes.Fonte des glaciers, éboulements, moraines devenues impraticables à cause du dégel, crevasses à nu et infranchissables: les Alpes, frappées de plein fouet par le réchauffement climatique, sont en pleine métamorphose et l’alpinisme n’a pas d’autre choix que de “s’adapter” aux conditions qui deviennent dans l’ensemble plus incertaines et difficiles, expliquent les professionnels de la montagne.- “Glacier tout mou” -Comme nombre de ses collègues, Thomas Boillot dit avoir renoncé “depuis plus de dix ans” à mener des clients au Mont-Blanc, qu’il juge désormais “trop dangereux” en raison des chutes de pierres, notamment dans le tristement célèbre couloir du Goûter, surnommé “couloir de la mort”.”Des journées comme aujourd’hui, c’est quand même super, par contre il faut choisir ses créneaux. Ça ne donne plus envie de venir quand il fait trop chaud, que le glacier est tout mou, et qu’on entend de l’eau couler, des bruits suspects”, souligne-t-il. Nombre des “100 plus belles courses” du massif du Mont-Blanc, recensées en 1973 par l’alpiniste Gaston Rébuffat dans un ouvrage faisant toujours référence, ne sont d’ores et déjà plus accessibles, comme le pilier Bonatti, une paroi effondrée en 2005, ou d’autres itinéraires jadis “archiclassiques”.Pour Clément Carpentier, le guide de la cordée d’alpinistes UCPA qui a dû faire demi-tour sur le glacier, rien n’est plus normal que d’avoir constamment en tête “des plans B, C, D, E” pour faire face aux conditions de terrain, aux aléas de la météo ou aux difficultés d’un client.Mais cela va plus loin désormais: les bouleversements induits par le réchauffement climatique ont beaucoup fait évoluer le calendrier des courses de l’été, trop chaud et incertain, au profit des “ailes de saison”. Plus généralement, ils poussent la profession à “se réinventer, trouver de nouveaux itinéraires (…) pratiquer un autre type d’alpinisme qui soit peut-être moins tourné vers la performance, vers le sommet à tout prix, mais plus sur le moment, le côté voyage dans des vallées très sauvages”, estime-t-il. “L’image de l’alpinisme, chez beaucoup de gens, c’est quand même le glacier, la neige, et moins le rocher. Il faut qu’on arrive à montrer au grand public que ce n’est pas que ça. En montagne, il y a plein de choses à faire et c’est toujours là”, souligne-t-il.- “Crier dans le désert” -Les guides et gardiens de refuges, aux premières loges des bouleversements observés sur le terrain, ont toujours partagé leurs informations, mais celles-ci, “volatiles”, se perdaient souvent en route, relève Jean-Marc Vengeon, président du Syndicat National des Guides de Montagne (SNGM).Allié à des laboratoires scientifiques alpins, le Parc national des Écrins et d’autres entités, le syndicat a récemment lancé un outil collaboratif pour les mettre à disposition des chercheurs, pratiquants et des pouvoirs publics, souligne-t-il. Ce site, baptisé “Regards d’altitude”, leur permet de “savoir ce qui se passe en haut”: il a recensé sur la seule première semaine de juillet 2025 six nouveaux événements (écroulement, chutes de pierres, apparition d’un lac glaciaire) autour de Chamonix.Cela fait 20 ans que le monde de la montagne “crie dans le désert”, déplore pour sa part Xavier Cailhol, guide de haute montagne, et qui travaille sur une thèse dédiée à l’alpinisme et aux risques d’origine glaciaire.Les montagnards ont “un vrai rôle de lanceur d’alerte à jouer en disant +ces changements sont irréversibles et extrêmement rapides+” faute d’application de l’Accord de Paris sur le climat, estime le jeune homme de 29 ans. L’alpinisme est touché aujourd’hui, mais demain ce sera le reste de la société, avec un risque de “crise sociale complète”. Or cela demeure “peu compris car trop abstrait”, s’alarme-t-il.