L’un s’était fait oublier, pendant que l’autre crevait l’écran. Les marins Thomas Ruyant et Sam Goodchild pointent aux deux premières places du classement du Vendée Globe jeudi et, cas inédit dans l’histoire de la course, ils courent pour la même équipe.Premier à sortir du redoutable Pot-au-Noir dans la matinée de jeudi, le Nordiste Thomas Ruyant, l’un des favoris, a pris la tête de la flotte à 11 heures à bord de son voilier dernière génération appelé Vulnerable.En embuscade lors de la descente de l’Atlantique nord, il a pris une option légèrement plus ouest que ses concurrents, trouvant un couloir de vent favorable pour reléguer à 20 milles le nouveau dauphin Sam Goodchild, embarqué sur… Vulnerable également.”Ok Thomas, c’est bien parce que c’est toi”, a plaisanté le grand marin anglais sur ses réseaux sociaux dans la matinée, après avoir émargé à 24 reprises en tête de course depuis le départ des Sables le 10 novembre.Les deux hommes se connaissent plus que bien : ils sont amis, partenaires, adversaires. En 2020, c’était sur le voilier de Goodchild, alors appelé LinkedOut, que Ruyant franchissait l’équateur sur son 2e Vendée Globe, terminé à la 6e place. – Inspirée par la F1 -Trois ans plus tard et tout juste revenu de l’éprouvante Ocean Race, le marin britannique a été approché par Thomas Ruyant pour intégrer l’écurie TR Racing à Lorient (Morbihan).Le Nordiste lui a alors confié la barre de son ancien bateau, avant d’en mettre à l’eau un nouveau. “On voulait s’inspirer de la Formule 1″, a expliqué Ruyant à quelques jours du départ de son 3e tour du monde début novembre.”Il y a deux baquets, deux skippers et un seul nom d’écurie. On s’entraîne ensemble, on fait les briefs et les débriefs ensemble. On partage tout avant les courses”, a-t-il raconté.Discret sur les pontons, préférant laisser ses résultats parler pour lui, le charismatique nordiste, 43 ans, a été l’architecte principal, avec son partenaire Advens, de cette incursion inédite dans l’histoire du sport.”Cela a été un gain de temps énorme pour moi”, a apprécié Goodchild, sacré champion du monde Imoca 2023 après avoir terminé sur le podium de toutes ses courses l’année dernière dès son arrivée dans la classe.”Les équipes techniques de TR Racing connaissaient déjà le bateau par coeur, Thomas m’a accompagné pour m’expliquer comment il l’utilisait. Tout était en place pour jouer aux avant-postes”, a-t-il estimé.- “Deux adversaires” -Ruyant n’avait lui pas grand-chose de plus à prouver. Ce double vainqueur de la Transat Jacques Vabre (2021, 2023) et de la Route du Rhum (2010, 2022) voulait surtout se donner “un coup d’avance sur le reste de la flotte” du tour du monde.”Hors course, pouvoir s’entraîner à deux bateaux performants, de façon très ouverte dans l’échange, c’est très précieux. Et si on arrive à tous les deux monter sur le podium ce serait énorme”, s’est-il enthousiasmé.S’ils font partie de la même écurie, les deux hommes se défendent de faire la célèbre course en solitaire à deux. “Une fois le départ donné, c’est un adversaire comme un autre, a insisté Ruyant, plutôt coriace même”.”Il fait ses propres choix avec son sens marin. Il n’est pas là pour me laisser passer”, a-t-il affirmé. A terre toutefois, les résultats des voiliers Vulnerable enchantent l’écurie dans son ensemble.”On savoure l’instant. Thomas sait lire les nuages (…) Sam se montre remarquable, opportuniste en diable (…) C’est singulier et exceptionnel”, s’est félicité Thomas Gavériaux, directeur de TR Racing.Goodchild, bizuth du Vendée Globe, répète à l’envi qu’il veut avant tout terminer tandis que Ruyant affiche fièrement son ambition de gagner. En solitaire et autour du monde, l’union sera peut-être finalement la clef du succès.fd/cpb/
Thu, 21 Nov 2024 12:24:14 GMT