Après une courte trêve consacrée à Notre-Dame, Emmanuel Macron a repris lundi ses consultations politiques à l’Elysée, cinq jours après la censure de Michel Barnier, afin de nommer au plus vite un nouveau Premier ministre, mais de nombreux écueils demeurent.Dernières tractations avant l’annonce ? Le chef de l’Etat a reçu tour à tour lundi matin les représentants des députés indépendants Liot, du parti communiste et des écologistes.”On a fait un pas ce matin”, a affirmé à la sortie le patron du PCF Fabien Roussel, venu avec la “volonté de trouver des solutions” mais sans “mettre des préalables”. Pas même celui d’un Premier ministre de gauche, seulement “préférable”, ou d’une abrogation de la réforme des retraites – qui pourrait être renvoyée à une “conférence sociale”. A condition toutefois que “chacun s’y retrouve”, notamment sur le sujet du “pouvoir d’achat”.”Chacun doit faire un pas vers l’autre”, a également déclaré Marine Tondelier, à son arrivée. Mais pour la cheffe de file des Verts, c’est au président “de proposer quelque chose qui ne soit pas juste la continuité de sa politique”, afin de “consentir à (l’)alternance” réclamée selon elle par les électeurs aux dernières législatives.Moins antagoniques, les députés Liot (Liberté, Indépendants, Outre-mer, Territoires) ont seulement demandé “quelque chose qui regroupe les différentes sensibilités”, et surtout “que ça soit rapide, parce que le pays est dans une situation d’urgence”, a résumé leur vice-président Christophe Naegelen.Verra-t-on pour autant une fumée blanche au palais présidentiel avant la fin de journée ? Les précédents incitent à la prudence: il avait fallu 51 jours cet été au locataire de l’Elysée pour choisir Michel Barnier, et plusieurs semaines également dans le cas de ses prédécesseurs Gabriel Attal et Elisabeth Borne.- Calculs et boucliers -Cette fois-ci, Emmanuel Macron est pourtant pressé de trancher par son propre camp. La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, plaide ainsi pour aller “rapidement” et désigner un nouveau chef de gouvernement “dans les prochaines heures”.Son calcul est simple: “additionner” les députés du “socle commun” (Renaissance, LR, MoDem, Horizons), de Liot et du parti socialiste pour obtenir une majorité absolue au Palais Bourbon. “Et donc il n’y a plus de censure possible”.Le patron du MoDem, François Bayrou, se dit pour sa part préoccupé par “une situation que pas un citoyen français ne peut accepter de voir perdurer ou se complexifier”.Pressenti, parmi d’autres, pour Matignon, l’allié historique de M. Macron ne revendique pas le poste mais presque: “Si je peux aider à ce qu’on sorte de tout ça, je le ferai”, a-t-il lancé dimanche depuis sa ville de Pau.Offre de service accueillie par une levée de boucliers à gauche. “La ligne politique de M. Bayrou n’a pas gagné les élections législatives”, a souligné Mme Tondelier sur RTL, tandis que le social-démocrate Raphaël Glucksmann a jugé sur France 2 que le centriste “enverrait le message de la continuité politique”.Or la gauche réclame sa part du pouvoir. “Si ce n’est pas un Premier ministre de gauche, nous ne participerons pas à ce gouvernement”, a averti le chef des députés socialistes Boris Vallaud sur France Inter.- “Lignes rouges” et “trahison” -Ce scénario se heurte toutefois à plusieurs “lignes rouges”. A commencer par celles de l’homme fort de la droite Laurent Wauquiez, qui balaye dans Le Figaro “une hypothèse pas crédible” au regard de ses propres “conditions”: “Ni LFI au gouvernement, ni le programme du Nouveau Front populaire”.Le numéro un du PS Olivier Faure a pourtant proposé vendredi des “concessions réciproques” au président de la République.Mais ce début d’ouverture a réveillé l’ire des Insoumis, qui ont refusé l’invitation au Palais et ont instruit tout le week-end le procès en déloyauté de leurs alliés. “Faure ne décide pas tout seul”, a tonné Jean-Luc Mélenchon dans la presse italienne et espagnole, martelant son refus “de trahir (ses) électeurs pour des postes”.Et si les socialistes font quand même alliance avec les macronistes voire la droite, alors “le Nouveau Front populaire continuera sans eux”, menace le patriarche de La France insoumise.A l’autre bout de l’échiquier politique, le Rassemblement national reste à l’affût. Pas convié à l’Elysée, son président Jordan Bardella demande déjà “à être reçu avec Marine Le Pen” par le futur Premier ministre “de manière à pouvoir exprimer très clairement (leurs) lignes rouges”, qui n’ont “pas varié”: pouvoir d’achat, sécurité, immigration et scrutin proportionnel.Arbitre de la censure du gouvernement Barnier, le parti à la flamme prévient d’avance: “Vous ne pouvez pas faire comme si on n’était pas là”.