Violences sexuelles, syndrome de stress post-traumatique, dépression : une enquête publiée mardi lève le voile sur l’état de santé “alarmant” des personnes prostituées en France, un volet jusque-là peu documenté.Menée en partenariat avec l’Inserm et Sorbonne Université, l’étude Aspire (Accès aux soins, Santé et Prostitution) a été conduite auprès de 258 personnes majeures en situation de prostitution ou l’ayant été dans une trentaine de villes.Les résultats sont sans appel : sur les 258 personnes ayant répondu (dont 238 femmes, 12 personnes trans et 8 hommes), la quasi totalité (95%) déclarent avoir subi une violence, sexuelle dans 85% des cas.Elles sont 85% à déclarer avoir été forcées à des actes par un client au moins une fois et 65% à avoir été violentées physiquement et forcées par leurs proxénètes à des actes dont elle n’avaient pas envie.Soixante-huit pour cent des personnes interrogées révèlent avoir entre un et six problèmes de santé, parmi lesquels hypertension, diabète, maux d’estomac, infection urinaire.Sur le plan de la santé mentale, 62,5% présentent des symptômes de stress post-traumatique – contre 5 à 12% de la population générale ou contre un quart des militaires ayant participé à une guerre.La moitié souffrent de troubles dépressifs et 72% souffrent au moins d’un trouble alimentaire et de troubles du sommeil, selon cette étude pilotée par le Mouvement du Nid, qui milite de longue date en faveur de l’abolition de la prostitution.- Troubles du sommeil -“Les personnes prostituées ont vraiment une santé physique et santé mentale détériorées par rapport à la population globale”, souligne Fabienne El Khoury, chercheuse en épidémiologie sociale à l’Inserm qui a contribué à l’étude.Or, pendant longtemps, leur “état de santé, qui est alarmant, a souvent été réduit à leur santé sexuelle et à la lutte contre les infections et maladies sexuellement transmissibles, il y a urgence à regarder leurs besoins dans leur ensemble et mieux les accompagner”, ajoute-t-elle. En matière de santé sexuelle, 66% des personnes interrogées ont dit se faire dépister au moins une fois par an, 59% ont eu recours à au moins une interruption volontaire de grossesse (IVG) contre 22% de la population féminine générale, et 27% ont subi une excision. Seules 5,5% ont fait mention d’usage de substances psychoactives (hors tabac, alcool et cannabis) dans l’année écoulée. Sur le terrain, l’accès au soin reste un parcours semé d’obstacles, entre barrière de la langue (96% de personnes interrogées sont d’origine étrangère), précarité économique et violences médicales. A cela s’ajoutent les freins psychologiques (honte, crainte d’être jugées, tabou culturel sur la santé mentale, infiltration psychique des agresseurs qui les culpabilise…).- Formation -Aujourd’hui âgée de 29 ans, Alexine, qui s’est prostituée étudiante pendant deux ans, initialement pour pouvoir payer son loyer, n’a parlé de sa situation “ni à l’époque ni aux médecins qui me suivent aujourd’hui pour mon inflammation de la thyroïde”.Pendant sa période de prostitution, la jeune femme a vu “sa dépression s’accentuer”, s’est “mise à boire beaucoup, à se scarifier” mais n’a réussi à mettre des mots dessus qu’une fois qu’elle s’en “est sortie”.L’étude dresse une série de préconisations, appelant notamment à former les professionnels de santé “aux conséquences traumatiques” de la prostitution.”Il faut que les professionnels soient en capacité de lire la situation dans laquelle la personne rescapée ou encore en situation de prostitution se trouve”, souligne Pauline Spinazze, coordinatrice de l’étude pour le Mouvement du Nid.”Peut-être qu’elle est en situation de dissociation traumatique, peut-être qu’il y a un mécanisme psychotraumatique de déni ou de conduite d’évitement ou de mise en danger qui vont être appliquées”, ajoute-t-elle.Autre mesures préconisées, l’accès à l’aide médicale d’Etat (AME) – “encore trop souvent refusé” -, un renforcement du nombre de psychologues et de psychiatres et une augmentation du nombre de centres régionaux du psychotraumatisme.
Violences sexuelles, syndrome de stress post-traumatique, dépression : une enquête publiée mardi lève le voile sur l’état de santé “alarmant” des personnes prostituées en France, un volet jusque-là peu documenté.Menée en partenariat avec l’Inserm et Sorbonne Université, l’étude Aspire (Accès aux soins, Santé et Prostitution) a été conduite auprès de 258 personnes majeures en situation de prostitution ou l’ayant été dans une trentaine de villes.Les résultats sont sans appel : sur les 258 personnes ayant répondu (dont 238 femmes, 12 personnes trans et 8 hommes), la quasi totalité (95%) déclarent avoir subi une violence, sexuelle dans 85% des cas.Elles sont 85% à déclarer avoir été forcées à des actes par un client au moins une fois et 65% à avoir été violentées physiquement et forcées par leurs proxénètes à des actes dont elle n’avaient pas envie.Soixante-huit pour cent des personnes interrogées révèlent avoir entre un et six problèmes de santé, parmi lesquels hypertension, diabète, maux d’estomac, infection urinaire.Sur le plan de la santé mentale, 62,5% présentent des symptômes de stress post-traumatique – contre 5 à 12% de la population générale ou contre un quart des militaires ayant participé à une guerre.La moitié souffrent de troubles dépressifs et 72% souffrent au moins d’un trouble alimentaire et de troubles du sommeil, selon cette étude pilotée par le Mouvement du Nid, qui milite de longue date en faveur de l’abolition de la prostitution.- Troubles du sommeil -“Les personnes prostituées ont vraiment une santé physique et santé mentale détériorées par rapport à la population globale”, souligne Fabienne El Khoury, chercheuse en épidémiologie sociale à l’Inserm qui a contribué à l’étude.Or, pendant longtemps, leur “état de santé, qui est alarmant, a souvent été réduit à leur santé sexuelle et à la lutte contre les infections et maladies sexuellement transmissibles, il y a urgence à regarder leurs besoins dans leur ensemble et mieux les accompagner”, ajoute-t-elle. En matière de santé sexuelle, 66% des personnes interrogées ont dit se faire dépister au moins une fois par an, 59% ont eu recours à au moins une interruption volontaire de grossesse (IVG) contre 22% de la population féminine générale, et 27% ont subi une excision. Seules 5,5% ont fait mention d’usage de substances psychoactives (hors tabac, alcool et cannabis) dans l’année écoulée. Sur le terrain, l’accès au soin reste un parcours semé d’obstacles, entre barrière de la langue (96% de personnes interrogées sont d’origine étrangère), précarité économique et violences médicales. A cela s’ajoutent les freins psychologiques (honte, crainte d’être jugées, tabou culturel sur la santé mentale, infiltration psychique des agresseurs qui les culpabilise…).- Formation -Aujourd’hui âgée de 29 ans, Alexine, qui s’est prostituée étudiante pendant deux ans, initialement pour pouvoir payer son loyer, n’a parlé de sa situation “ni à l’époque ni aux médecins qui me suivent aujourd’hui pour mon inflammation de la thyroïde”.Pendant sa période de prostitution, la jeune femme a vu “sa dépression s’accentuer”, s’est “mise à boire beaucoup, à se scarifier” mais n’a réussi à mettre des mots dessus qu’une fois qu’elle s’en “est sortie”.L’étude dresse une série de préconisations, appelant notamment à former les professionnels de santé “aux conséquences traumatiques” de la prostitution.”Il faut que les professionnels soient en capacité de lire la situation dans laquelle la personne rescapée ou encore en situation de prostitution se trouve”, souligne Pauline Spinazze, coordinatrice de l’étude pour le Mouvement du Nid.”Peut-être qu’elle est en situation de dissociation traumatique, peut-être qu’il y a un mécanisme psychotraumatique de déni ou de conduite d’évitement ou de mise en danger qui vont être appliquées”, ajoute-t-elle.Autre mesures préconisées, l’accès à l’aide médicale d’Etat (AME) – “encore trop souvent refusé” -, un renforcement du nombre de psychologues et de psychiatres et une augmentation du nombre de centres régionaux du psychotraumatisme.
