Le président sud-coréen, Yoon Suk Yeol, fait face samedi pour la deuxième fois à une motion de destitution devant les députés pour sa tentative ratée d’imposer la loi martiale et de faire museler le Parlement par l’armée le 3 décembre.Des milliers de manifestants ont commencé à se rassembler à Séoul, avant le vote des députés prévu à 16H00 (07H00 GMT), pour exiger le départ de l’impopulaire chef de l’Etat conservateur, parallèlement visé par une enquête pour “rébellion” et qui a interdiction de quitter le pays. La police a dit attendre au moins 200.000 participants.Devant l’Assemblée nationale, par un froid glacial, des bénévoles distribuent des patchs chauffants, du café et de la nourriture. Une manifestante a annoncé avoir loué un autobus et le mettre à la disposition des parents souhaitant changer les couches et donner à manger à leurs bébés pendant le rassemblement. “Si Yoon n’est pas destitué aujourd’hui, je reviendrai la semaine prochaine”, dit à l’AFP Yoo Hee-jin, 24 ans, qui se déclare “furieuse” contre le président. “Je continuerai à venir chaque semaine jusqu’à ce que cela se produise”, jure-t-elle.- Repas gratuits -La chanteuse de K-pop Yuri, du groupe Girl’s Generation, dont la chanson “Into the New World” est devenue un hymne de protestation, a annoncé avoir payé à l’avance des repas pour les manifestants. “Restez en sécurité et prenez soin de votre santé”, a-t-elle écrit sur une plateforme de discussion.Plusieurs milliers de partisans de M. Yoon se sont également rassemblés dans le centre de Séoul, brandissant des drapeaux sud-coréens et américains et réclamant l’arrestation des dirigeants d’opposition.”Yoon n’avait d’autre choix que de déclarer la loi martiale. J’approuve toutes les décisions qu’il a prises en tant que président”, dit à l’AFP Choi Hee-sun, 62 ans.Le 7 décembre, une première motion de destitution avait échoué, la plupart des députés du Parti du pouvoir au peuple (PPP) de M. Yoon ayant quitté l’hémicycle avant le vote pour empêcher le quorum d’être atteint.Pour être adoptée, la motion doit recueillir au moins 200 voix sur 300. L’opposition menée par le Parti démocrate compte 192 sièges, et le PPP 108. Les adversaires de M. Yoon doivent donc faire basculer au moins huit députés du PPP dans leur camp pour obtenir sa chute.Jusqu’à présent, sept députés du PPP ont dit qu’ils voteraient pour la destitution. Selon les médias locaux, beaucoup de députés n’ont pas encore pris leur décision à quelques heures du vote.Si la motion passe, M. Yoon sera suspendu en attendant que la Cour constitutionnelle valide sa destitution. L’intérim sera assuré par le Premier ministre Han Duck-soo.La Cour aura 180 jours pour se prononcer. Seuls six de ses neuf juges étant en fonctions – trois autres ont pris leur retraite en octobre et n’ont pas encore été remplacés – il leur faudra se prononcer à l’unanimité.Si la Cour confirme la destitution, M. Yoon, 63 ans, deviendra le deuxième président de l’histoire de la Corée du Sud à subir ce sort, après Park Geun-hye en 2017. Mais il existe aussi un précédent de destitution votée par le Parlement puis invalidée deux mois plus tard par la Cour constitutionnelle: celle de Roh Moo-hyun en 2004.- “L’Histoire se souviendra” -Le chef du Parti démocrate, Lee Jae-myung, a exhorté les députés du PPP à se rallier à sa cause. “L’Histoire se souviendra de votre choix”, leur a-t-il dit vendredi.”Nous ne pouvons plus supporter la folie de Yoon”, a déclaré samedi la porte-parole du parti, Hwang Jung-a.Pendant ce temps, le filet policier se resserre sur le président et ses collaborateurs. Vendredi, le parquet a annoncé l’arrestation du chef du commandement militaire de Séoul, et un tribunal de Séoul a lancé des mandats d’arrêt contre les chefs de la police nationale et de la police de la capitale, citant un “risque de destruction de preuves”.L’ancien ministre de la Défense Kim Yong-hyun, considéré comme la personne ayant poussé le président à imposer la loi martiale, avait été le premier a être arrêté le 8 décembre. Il avait tenté deux jours plus tard de se suicider en détention.Yoon Suk Yeol avait sidéré la Corée du Sud dans la nuit du 3 au 4 décembre en instaurant la loi martiale, une première en plus de quatre décennies dans le pays, et en envoyant les forces spéciales de l’armée au Parlement pour essayer d’empêcher les députés de se réunir.Mais 190 élus avaient tout de même réussi à entrer dans le bâtiment, parfois en escaladant les clôtures. Ils avaient voté à l’unanimité une motion exigeant la levée de la loi martiale, pendant que leurs assistants empêchaient les soldats de faire irruption dans l’hémicycle en barricadant les portes à l’aide de tables, de chaises et de canapés.Le président avait finalement obtempéré, abrogé la loi martiale proclamée seulement six heures plus tôt et renvoyé les soldats dans leurs casernes.
Sat, 14 Dec 2024 05:37:38 GMT