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Procès Jubillar: pour éviter un “désastre” ou une “erreur judiciaire”, la défense plaide l’acquittement

Le procès de Cédric Jubillar pour le meurtre de sa femme Delphine est un “tapis rouge” déroulé à une “erreur judiciaire”, a plaidé jeudi après-midi Me Alexandre Martin, à la suite de son associée de la défense qui, face aux assises du Tarn, a fustigé la “chronique d’un désastre”.La cour n’a désormais plus qu’à entendre l’accusé, vendredi matin, à qui sera donné, comme le prévoit le code de procédure pénale, la possibilité de s’exprimer une dernière fois, avant de partir délibérer pour rendre un verdict attendu dans la journée. “Ce procès est vicié, c’est dérouler un tapis rouge à l’erreur judiciaire d’accepter même qu’il se tienne”, a affirmé l’avocat de M. Jubillar, avant de conclure à l’adresse des jurés: “Votre devoir vous dicte de l’acquitter”.Me Martin a estimé que cette affaire était devenue un “cimetière de certitudes”, avec des “indices” qui ne sont pas ceux “d’un crime” ou “d’une scène de crime”, mais ceux “d’un coupable annoncé sans crime, ni scène de crime”.D’une voix forte au ton solennel, Me Martin a décrit son client, contre lequel une peine de 30 ans de réclusion a été requise mercredi, comme un “homme seul, détruit”, victime “d’une conviction des gendarmes figée depuis le début”, soumis à une “meute accusatrice” et à un “acharnement médiatique”.Alors que sa consoeur Emmanuelle Franck avait dans la matinée décortiqué l’enquête, Me Martin s’est attaché à défendre l’accusé en évoquant sa “vie sans aucune caricature, sans aucun travestissement”.Un homme qui “gueule pour exister”, “qui veut qu’on l’aime”, a décrit l’avocat. “Il est chiant oui, il sait tout sur tout, lui, le gamin agité, il veut qu’on le regarde”, a énuméré Me Martin qui, au passage, a dénoncé le comportement de la mère de l’accusé.- “Plus de mère” -“Cédric, tu n’as plus de mère”, a ainsi lancé le conseil toulousain, ajoutant: “Je n’avais jamais vu une mère abandonner son fils” pour attaquer avec force le témoignage de Nadine Jubillar, partie civile dans cette procédure et qui n’a pas caché à la barre qu’elle pensait son fils capable d’avoir tué son épouse.Dans une plaidoirie d’environ trois heures, Me Martin a retracé le parcours personnel de son client et l’évolution du couple qu’il formait avec Delphine jusqu’aux semaines ayant précédé la nuit de la disparition de l’infirmière, entre le 15 et le 16 décembre 2020, réfutant le scénario d’un crime commis par un homme “dévoré par la passion”.Cédric Jubillar acceptait la perspective d’un divorce, même si c’était difficile, a soutenu son avocat, ironisant sur la volonté de l’accusation de transformer son client en Othello ou en Don José, en référence au mari jaloux de la tragédie de Shakespeare et au meurtrier de Carmen.”Ce soir-là, il faudrait imaginer que Cédric Jubillar va exploser et commettre un crime passionnel qui ne lui correspond nullement”, un scénario impossible selon Me Martin, tout comme pour Me Franck qui avait le matin fait remarquer que le “pétage de plomb” imaginé par l’accusation “est ce qu’on appelle un crime pulsionnel, un crime passionnel, celui qui laisse le plus de traces, parce qu’on ne contrôle rien, on éclabousse tout”.- “Cauchemar” -Or, il n’y a aucune trace, a insisté l’avocate qui a conclu sa plaidoirie de trois heures également, la voix un moment voilée par l’émotion pour demander aux jurés de mettre “fin à ce cauchemar”.A la barre, elle a longuement dénoncé le travail des enquêteurs, assénant: “Rien de pire que des gendarmes qui ont des certitudes de bonne foi mais qui, pour combler les vides, font des choses de mauvaise foi”.L’avocate a repris tous les éléments du dossier: l’attitude de Cédric Jubillar, le cri d’effroi entendu par les voisines, la téléphonie… jetant le discrédit sur chacun d’entre eux, tentant d’introduire le doute dans l’esprit des jurés en ponctuant ses affirmations d’un “ça colle pas”.”On fabule, on raconte une histoire, on essaie de faire rentrer des ronds dans des carrés”, a-t-elle accusé. “C’est bien beau de parler d’indices mais encore faut-il qu’ils s’imbriquent entre eux.””Vous êtes les derniers remparts de ce cirque judiciaire”, a-t-elle dit aux jurés. Vendredi, les trois magistrats et les six jurés devront rendre leur verdict selon leur intime conviction. Sept sur neuf doivent déclarer Cédric Jubillar coupable pour qu’il soit condamné. Si trois votent non coupable, il sera acquitté.

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“Un venin mortel”: en Tunisie, une ville asphyxiée par un complexe chimique “délabré”

Ikram Aioua est emplie d’une colère froide. Depuis début septembre, son fils a été hospitalisé trois fois après avoir inhalé des gaz toxiques imputés à un complexe chimique vieillissant à Gabès, dans le sud de la Tunisie. Comme les proches de dizaines d’autres personnes intoxiquées, elle exige la fermeture de l’usine.Le complexe “est un venin mortel”, s’emporte cette femme au foyer de 40 ans. “Il faut s’en débarrasser!”.Les vidéos d’élèves secourus après des malaises ont poussé mercredi des milliers d’habitants de Gabès dans la rue, une mobilisation inédite depuis plusieurs années selon des militants. La police a fait usage de grandes quantités de gaz lacrymogènes pour disperser les protestataires.Ahmed Sarray, 12 ans, le fils d’Ikram, raconte à l’AFP avoir “senti des brûlures à la gorge” alors qu’il était en classe. Son collège de Chott Essalem est proche de l’usine de fertilisants du Groupe Chimique Tunisien (GCT), un énorme complexe qui crache jour et nuit une fumée grise et âcre.”Ma tête était lourde, j’ai perdu connaissance”, poursuit-il. Sa camarade Emna Mrabet indique avoir senti sa poitrine s’enflammer puis elle a vomi. Sa mère dit ne plus vouloir l’envoyer à l’école “jusqu’à ce que les autorités trouvent des solutions”.En un mois, près de 200 habitants des quartiers proches du complexe ont reçu des soins pour des “intoxications” dont 122 mardi, selon les autorités locales.- “Démantèlement” -Pour Ahmed Guefrech, un élu local du Conseil des régions, cela ne fait aucun doute: “ces malaises sont provoqués par des fuites de gaz provenant des unités du GCT”.Et si les fuites “ne sont pas nouvelles”, il note “leur intensification – quatre fois en septembre, deux fois depuis début octobre”.Le complexe utilise de l’acide sulfurique et de l’ammoniac pour fabriquer des engrais à base de phosphates.Le GCT n’a pas répondu à l’AFP au sujet de l’état du complexe inauguré en 1972 et dénoncé pour pollution depuis plus d’une décennie.Selon M. Guefrech, qui est aussi militant pour l’environnement, les émanations toxiques sont dues “au vieillissement des unités polluantes” ainsi qu’à des “équipements délabrés” et à un manque d’entretien.Elles s’expliquent aussi par une “augmentation de la production à un rythme qui ne correspond pas à l’état” du site, selon M. Guefrech.Pour lui, il n’y a qu’une solution: “le démantèlement”.Khayreddine Debaya, qui milite avec son collectif Stop Pollution contre les dégâts causés par l’usine à l’environnement et à la santé des riverains, est du même avis. Selon Stop Pollution et diverses études, les résidus déversés en pleine nature par le GCT polluent les plages et les sols, ont causé un effondrement de la pêche et sont la cause d’une incidence anormale de maladies respiratoires et cancers.En 2017, les autorités avaient promis de démanteler le complexe qui emploie 4.000 personnes dans une zone frappée par le chômage, pour le remplacer par un établissement conforme aux normes internationales.- “Rien ne sera fait” -Le dossier devrait prendre une tournure judiciaire puisqu’un groupe d’avocats de Gabès, représentant des élèves intoxiqués récemment, entend poursuivre le GCT.Une première plainte “sera déposée (prochainement) au tribunal de première instance de Gabès pour arrêter les activités des unités polluantes et une deuxième pour démanteler le groupe”, affirme à l’AFP Mehdi Telmoudi, qui préside leur comité de défense.Mais les autorités sont en porte-à-faux sur ce dossier car l’exploitation des mines de phosphates – principale richesse naturelle du pays – est “un pilier fondamental” de l’économie pour le président Kais Saied. Les autorités veulent quintupler la production d’engrais d’ici 2030 (d’environ 3 millions de tonnes par an à 14 millions) pour profiter de la hausse des prix mondiaux.Samedi dernier, dénonçant un manque d’entretien, le président Saied a dépêché en urgence une équipe des ministères de l’Industrie et de l’Environnement, en dépit de doutes d’experts sur la possibilité d’assainir le site.”Rien ne sera fait et le complexe qui nous tue restera”, se désespère Radhia Sarray, 58 ans, une proche d’Ahmed. Atteinte d’un cancer, elle a récemment été hospitalisée pour intoxication.

Assassinat d’un chrétien irakien à Lyon: cinq personnes en garde à vue

Cinq personnes ont été placées en garde à vue jeudi dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat d’un chrétien irakien en fauteuil roulant en septembre à Lyon, a appris l’AFP de sources proches du dossier.Ces cinq personnes, interpellées jeudi à Lyon, ont toutes eu des contacts avec un Algérien de 28 ans arrêté en Italie dans le cadre de cette enquête, a précisé une de ces sources.L’enquête ayant été reprise par les juges antiterroristes parisiens, les gardes à vue sont prises en charge par la Sous-direction antiterroriste (Sdat).La victime, Ashur Sarnaya, un chrétien d’Irak de 45 ans, a été frappée au cou à l’arme blanche le soir du 10 septembre au pied de son immeuble à Lyon par un homme qui l’attendait et qui a ensuite pris la fuite à pied.Au moment de l’attaque, Ashur Sarnaya, en situation de handicap, était en train de faire un live vidéo consacré à la religion chrétienne, comme il en avait l’habitude. Les pompiers n’ont pas pu le ranimer.Le 2 octobre, un Algérien, entré en Italie le 12 septembre, a été arrêté dans le sud de la péninsule en vertu d’un mandat d’arrêt européen, émis dans le cadre de cette enquête. Un immense couteau a été saisi lors de son interpellation, selon la police italienne.Selon une source policière, des “investigations techniques très poussées” ont situé ce suspect près de la scène de crime au moment des faits. La victime vivait avec sa sœur depuis au moins dix ans à Lyon. Sur ses comptes en ligne, consultés par l’AFP, cet homme s’exprimait en arabe et postait des vidéos souvent consacrées à la religion chrétienne.Sur l’une d’elles, visible sur TikTok, il affirmait que ses contenus étaient régulièrement bloqués et ses comptes suspendus en raison, selon lui, de signalements faits par des utilisateurs musulmans.L’enquête, ouverte initialement pour assassinat, a été étendue le 9 octobre, “au regard des dernières avancées de l’enquête”, aux infractions d'”assassinat en relation avec une entreprise terroriste” et “association de malfaiteurs terroriste criminelle”, selon un communiqué du procureur de Lyon Thierry Dran et du procureur antiterroriste Olivier Christen.

Le président de l’Arcom défend son budget face aux “attentes” de la société

Face aux restrictions budgétaires, le président de l’Arcom Martin Ajdari a défendu jeudi le rôle du régulateur de l’audiovisuel et du numérique, et les moyens qui lui sont alloués, au regard des “attentes de plus en plus importantes” de la société.”Les contraintes des finances publiques s’imposent à tous. On a déjà eu, en 2025, une petite diminution de notre budget” et le projet 2026 prévoit “une légère progression qui nous permettra de rattraper une petite partie”, a-t-il déclaré devant l’Association des journalistes médias.Le budget de l’Arcom s’élève à quelque 50 millions d’euros, avec un plafond de 378 équivalents temps plein pour 2026. Face aux critiques envers le coût des nombreuses autorités administratives indépendantes, M. Ajdari a rappelé l'”utilité” de l’Arcom, pour réguler les sites pornographiques, vérifier le respect du pluralisme dans l’audiovisuel et encore mettre en œuvre des sanctions contre les médias russes.Et “on nous ajoute des compétences”, par exemple contre le piratage, et la société a des “attentes de plus en plus importantes en matière de régulation du numérique”, a souligné le dirigeant de l’Arcom.Concernant l’audiovisuel, l’autorité a été accusée de “censure” par des médias dans le giron du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, notamment sur CNews, après le non-renouvellement de la chaîne C8. En réponse, M. Ajdari fait valoir “l’indépendance et l’impartialité” des membres de son collège.”Si on veut demain supprimer l’Arcom (…) que fait-on des missions qu'(elle) remplit ?”, a-t-il aussi questionné, demandant notamment si l’attribution de fréquences télé ou radio avait vocation à se retrouver “entre les mains d’un gouvernement”.En outre, l’Arcom est intervenue récemment dans le conflit opposant ces mêmes médias privés dans la sphère Bolloré et l’audiovisuel public.Le conflit entre ces deux blocs médiatiques a explosé en septembre dans le sillage de l’affaire Legrand-Cohen, deux journalistes du service public accusés de connivence avec le PS.L’Arcom est en train d'”approfondir ses travaux sur l’impartialité du service public” et rendra ses conclusions d’ici quelques mois.”On voudrait que des juristes, des universitaires se penchent dessus”, a dit M. Ajdari. Ces travaux “ne signifient pas qu’il y a un problème, une défaillance” actuellement, a-t-il précisé.Quel est son avis sur CNews, que la présidente de France Télévisions a qualifiée de “chaîne d’extrême droite” ? M. Ajdari s’est refusé à toute qualification mais a relevé que “rien n’interdit à un média d’avoir une ligne éditoriale, donc quelque part une forme d’orientation”, tant que les règles du pluralisme sont respectées.

Iran: les deux détenus français “épuisés”, leur “survie” en jeu, alertent leurs familles

Les familles de Cécile Kohler et Jacques Paris, détenus en Iran depuis plus de trois ans, ont alerté jeudi sur la situation de leurs proches, dont “la survie” est désormais en jeu selon elles, et exhorté l’Etat français à les faire libérer immédiatement.”Chaque jour de détention qui passe engage la responsabilité de l’Etat français sur la survie de Cécile et Jacques”, a estimé Noémie Kohler, soeur de Cécile, lors d’une conférence de presse.La jeune femme a confié avoir échangé brièvement mardi avec eux, “pendant huit minutes en visio” sous haute surveillance. “C’était un appel de détresse”, a-t-elle confié. “Ils m’ont dit qu’ils étaient épuisés”.Ils sont “à bout de forces”, a-t-elle poursuivi, ajoutant que sa soeur lui a clairement dit qu’elle ne pourrait endurer encore “trois mois ou même quelques semaines de détention”.De son côté, Anne-Laure Paris, fille de Jacques Paris, a souhaité se faire “la porte-parole de son épuisement, de son désespoir, de sa détresse et de sa colère”. “Mon père m’a dit: +Je regarde la mort en face+”, a-t-elle dit.L’avocate de la famille Kohler, Me Chirinne Ardakani, a souligné que leur détention était l’une des plus longues infligées à des Français dans le monde, après celle d’Ingrid Betancourt en Colombie entre 2002 et 2008.Les proches des deux détenus ont par ailleurs estimé qu’il y avait “une rupture de confiance avec les autorités françaises qui ont retiré leur plainte auprès de la Cour internationale de justice”.La CIJ a annoncé le 25 septembre avoir abandonné, à la demande de la France, une requête contre l’Iran au sujet de la détention de Cécile Kohler et Jacques Paris qui sont, selon Paris, “retenus comme otages d’Etat”.”Nous ne savons toujours pas où ils sont détenus depuis leur transfert forcé en juin” pendant la guerre des 12 jours avec Israël, s’est également indignée Noémie Kohler.Les proches ont aussi confirmé l’annonce de la condamnation à 17 ans de prison pour Jacques Paris et à 20 ans pour Cécile Kohler.L’agence du pouvoir judiciaire iranien avait annoncé le verdict mardi mais n’avait communiqué aucun détail sur l’identité des deux condamnés. 

L’avocate de Cédric Jubillar appelle à mettre fin au “cauchemar” de l’accusé

L’affaire Jubillar, c’est “la chronique d’un désastre judiciaire annoncé”, a fustigé jeudi l’avocate de la défense Emmanuelle Franck, appelant les jurés de la cour d’assises du Tarn à mettre fin au “cauchemar” de Cédric Jubillar, accusé du meurtre de son épouse, en l’acquittant.Mercredi soir, le ministère public a requis 30 ans de réclusion criminelle contre Cédric Jubillar, jugé depuis le 22 septembre pour le meurtre de Delphine, la mère de leurs deux enfants, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines, un village du Tarn.”C’est difficile d’arrêter de parler. Tant que je plaide je continue à le défendre (…) mais je vais me taire car c’est seulement dans le silence et le recueillement que vous pourrez mettre fin à ce cauchemar”, a dit aux jurés Emmanuel Franck, émue, pour conclure sa plaidoirie de plus de trois heures qui sera suivie dans l’après-midi par celle de son associé, Alexandre Martin.A la barre, elle a longuement dénoncé le travail des enquêteurs de la gendarmerie, assénant: “Rien de pire que des gendarmes qui ont des certitudes de bonne foi mais qui, pour combler les vides (de l’enquête), font des choses de mauvaise foi”.L’avocate toulousaine a même parfois qualifié de “honteux” ou de “dégoûtants” certains aspects de leur travail, dénonçant par exemple des contacts entre enquêteurs et témoins, hors procédure. “C’est tout ce que combat l’avocat, c’est tout ce que doit combattre la justice”, a-t-elle tonné.- “Pétage de plomb” -Alors que parties civiles et avocats généraux ont estimé qu’un “pétage de plomb” de l’accusé a pu conduire au meurtre de l’infirmière de 33 ans, Me Franck affirme: “Un pétage de plomb, c’est ce qu’on appelle un crime pulsionnel, un crime passionnel, celui qui laisse le plus de traces, parce qu’on ne contrôle rien, on éclabousse tout”. Or, fait-elle remarquer, il n’y a aucune trace.Cédric Jubillar, insiste-t-elle, “ne sait plus comment dire qu’il est innocent (…). Il a mis depuis quatre ans le pied dans une machine à broyer”.L’avocate reprend tous les éléments du dossier, l’attitude de Cédric Jubillar, le cri d’effroi entendu par les voisines, la téléphonie, jetant le discrédit sur chacun d’entre eux, tentant d’introduire le doute dans l’esprit des jurés en ponctuant ses affirmations d’un “ça colle pas”.”On fabule, on raconte une histoire, on essaie de faire rentrer des ronds dans des carrés”, accuse-t-elle. “C’est bien beau de parler d’indices mais encore faut-il qu’ils s’imbriquent entre eux.”Dans son box vitré, vêtu de noir, le peintre-plaquiste de 38 ans assiste, concentré et impassible, à la plaidoirie, affalé en avant, menton appuyé sur ses bras croisés, ou adossé à sa chaise, les mains jointes.Au sujet des enfants du couple Jubillar, Louis, 11 ans, et Elyah, six ans, Me Franck regrette l’utilisation par l’accusation de la parole de l’aîné, qui n’avait alors que six ans. “Derrière ce procès spectacle, il y a deux invisibles qui attendent, deux orphelins de mère”, à qui on dit “que papa a tué maman”, “il faut être sûr et certain pour leur dire cela, et peut-on l’être ?”, a questionné l’avocate.- “Derniers remparts” -“Vous êtes les derniers remparts de ce cirque judiciaire”, a-t-elle dit aux jurés, en haussant le ton. Au fil des audiences, des contradictions sont apparues dans les déclarations de Cédric Jubillar, pointées par l’accusation et les parties civiles.Mercredi, dans son réquisitoire, l’avocat général Pierre Aurignac avait déclaré: “Le crime parfait attendra, le crime parfait, ce n’est pas le crime sans cadavre mais celui pour lequel on n’est pas condamné, et vous allez être condamné M. Jubillar”.Selon lui, “pour défendre l’idée de l’innocence de M. Jubillar, il faut écarter quatre experts, faire taire 19 témoins et tuer le chien pisteur” qui a permis d’établir que la mère de famille n’a pas quitté son domicile vivante. Durant les quatre semaines du procès, les parties civiles ont espéré en vain des aveux dans cette affaire sans corps, ni scène de crime, ni preuves irréfutables.Vendredi, la parole sera donnée une dernière fois à l’accusé, avant que les trois magistrats et les six jurés se retirent pour délibérer et ensuite rendre leur verdict, selon leur intime conviction. Sept sur neuf doivent déclarer Cédric Jubillar coupable, pour qu’il soit condamné. Si trois votent “non coupable”, il sera acquitté.

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Deux ONG publient une carte de France des polluants dans l’eau du robinet

Les ONG Générations Futures et Data For Good ont mis en ligne jeudi un site proposant une carte interactive des principaux polluants chimiques présents dans l’eau du robinet en France, espérant permettre ainsi “un accès plus facile du public à ces informations”.PFAS (“polluants éternels”), pesticides et leurs métabolites, nitrates, perchlorates, etc.: grâce à cet outil, appelé “Dans Mon Eau” (consultable à l’adresse https://dansmoneau.fr/), “vous pourrez savoir, où que vous habitiez, si vous êtes exposés via l’eau du robinet” à ces substances, indiquent les deux ONG, qui ont souhaité rendre plus accessibles et compréhensibles des données déjà publiques.Les données compilées pour cette carte, qui sera “actualisée tous les mois”, sont “issues  du contrôle sanitaire effectué par les Agences Régionales de Santé (ARS) pour chaque unité de distribution d’eau potable (UDI)”, indiquent les deux ONG.Un moteur de recherche permet de rentrer l’adresse de son domicile et de consulter les données qui lui correspondent, avec “les résultats des dernières analyses effectuées sur chaque catégorie de polluants”, des données “actualisées tous les mois, permettant ainsi d’identifier au plus tôt de nouvelles situations problématiques”, expliquent les ONG.Il est également possible de connaître l’historique de l’exposition, avec des bilans annuels (à partir de 2020), indiquant les pourcentages d’analyses non conformes retrouvées chaque année.Cette carte révèle notamment “une grande hétérogénéité” sur le territoire, selon les auteurs de cet outil: “Le nord de la France est particulièrement concerné par la majorité des cas de non conformité et des recommandations de non consommation de l’eau”, soulignent les auteurs, qui ajoutent que “la très grande majorité des cas de non conformité à la réglementation, recensés au 29 août 2025, sont dus à la présence de métabolites de pesticides.”- Suivi lacunaire des PFAS -“De manière générale, la qualité de l’eau est globalement bonne en France avec actuellement plus de 87% des UDI conformes à la réglementation et sans dépassement de limites sanitaires”, indiquent Générations Futures et Data For Good.Elles précisent toutefois que ce chiffre est “à interpréter avec prudence”, car il exclut les métabolites (molécules issues de la dégradation des pesticides) classés comme “non pertinents” par les autorités sanitaires).Les ONG soulignent un suivi inégal des PFAS ou “polluants éternels”, utilisés dans de nombreux objets pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes ou leur résistance à la chaleur, mais ayant pour certains des effets dléétères sur la santé.Il manque des analyses “dans plus de la moitié” des UDI (52,4%)”, indiquent les ONG, évoquant l’Occitanie et les départements d’outre-mer.Concernant les pesticides, 5,7% (1.377) des UDI en France sont en non conformité” pour ces substances, selon le rapport.Un métabolite est responsable à lui tout seul de 86% de ces cas de non conformités, le chloridazone desphényl, métabolite du chloridazone, un herbicide qui a été utilisé principalement dans la culture des betteraves des années 1960 jusqu’en 2020, année de son interdiction en France et en Europe.

Benjamin Brière, “le poing levé”, raconte ses trois années de prison en Iran

Après avoir passé trois ans en prison en Iran, Benjamin Brière raconte dans un livre les épreuves subies derrière les barreaux, mais aussi les défis du retour en France et son combat pour faire revenir les deux derniers Français détenus par Téhéran.”C’est l’histoire d’un type qui croyait naïvement qu’il était possible d’échapper à son destin”, résume Benjamin Brière dans “Azadi” (“Liberté” en persan), à paraître le 23 octobre chez Robert Laffont.Son destin, c’est d’avoir été arrêté en pleine nuit, le 28 mai 2020, dans une région reculée d’Iran, que ce grand voyageur visitait seul à bord de son van. S’en sont suivis 1.079 jours de détention avant sa libération le 12 mai 2023.”Je demande à ne pas faire d’amalgame entre ce qui m’est arrivé et ce sublime pays et ses magnifiques habitants”, qui “sont aussi des otages de la République islamique”, insiste Benjamin Brière, interrogé par l’AFP.Depuis son retour à Lyon, sa ville, l’ex-prisonnier de 40 ans consacre une partie de son énergie à se battre pour la libération des deux derniers Français détenus en Iran, Cécile Kohler et Jacques Paris, arrêtés en mars 2023 et condamnés à de lourdes peines pour espionnage.”Je n’arriverai pas à lâcher tant que Cécile et Jacques ne seront pas rentrés”, affirme-t-il. Mais “tout le monde sait que leur sort ne se joue pas devant un tribunal. C’est du cirque (…) Tout se passe à un niveau plus élevé, diplomatique et politique”.L’espoir d’une libération a grandi quand le chef de la diplomatie iranienne, Abbas Araghchi, a déclaré en septembre qu’un accord visant à les échanger contre une femme iranienne détenue en France approchait de sa “phase finale”.- “L’ennui est colossal” -Dans “Azadi”, Benjamin Brière ne cache rien des hauts, et souvent des bas, de sa vie dans le quartier de haute sécurité de la prison de Mashhad, la grande ville de l’est de l’Iran.”Il y a des journées d’errance totale. Je fixe le carrelage du mur, le contreplaqué du lit au dessus (…) L’ennui est colossal. Des détenus s’assomment de drogue”, témoigne-t-il. “J’écris pour ne pas devenir fou.”Il dépeint aussi les liens de camaraderie noués avec certains détenus, dont plusieurs ont ensuite été pendus, avec lesquels il apprend à parler le persan “des canailles”.  Remerciant l’ambassadeur de France Nicolas Roche, arrivé fin 2022, pour son “énergie à libérer les otages”, Benjamin Brière raconte être sorti de prison “le poing levé” en signe de défi, avec un autre détenu, le franco-irlandais Bernard Phelan.Deux ans et demi après, “je m’en sors plutôt très bien” grâce à “la carapace que je me suis créée derrière les barreaux”, reconnait-il.Mais la réinsertion dans la société est difficile car “il n’y a pas de suivi, pas d’accompagnement, pas d’aide”, surtout au niveau administratif, regrette-t-il.Il raconte ainsi le dialogue avec une employée des impôts qui lui demande pourquoi il n’avait rien déclaré pendant quatre ans: – “Parce que j’étais en prison” – “Oui, mais même en prison, on peut le faire”.- “Pas depuis l’Iran”.Le problème est qu’il “fallait qu’elle me mette dans une case et que, pour un cas comme le mien, rien n’est prévu”, relate-t-il.Benjamin Brière milite donc pour qu’un projet de loi soit adopté pour aider “les otages d’État” au même titre que sont soutenus les “otages” ou victimes de “groupes terroristes”. Ils pourraient ainsi bénéficier à leur retour d’un “guichet unique” qui “dépendrait de la Délégation interministérielle à l’aide aux victimes (Diav)”, précise-t-il.

Violences sexuelles à Saint-Stanislas à Nantes: la justice va diligenter des enquêtes

Le parquet de Nantes prévoit de diligenter des enquêtes pénales sur certains faits après avoir reçu une trentaine de courriers concernant des violences sexuelles commises au collège-lycée catholique Saint-Stanislas, remontant pour la plupart aux années 1960.Fin septembre, un mois après la conférence de presse qui avait rendu publics de premiers témoignages sur des faits courant des années 1950 à 1990, le diocèse avait dit avoir récolté 63 signalements à propos de cet établissement. Sur les 31 courriers reçus par la justice, transmis par l’évêché ou directement adressés au parquet, quinze émanent de victimes et seize de témoins, a indiqué jeudi le procureur de la République de Nantes, Antoine Leroy. “Certaines personnes se sont également rendues dans des commissariats de police pour donner des informations ou déposer plainte”, a-t-il ajouté.Neuf personnes sont mises en cause, principalement des membres du clergé, certaines décédées. “Selon les situations, des enquêtes pénales vont être diligentées”, a ajouté le procureur, sans donner davantage de détails. Une enquête avait déjà été ouverte début septembre après le suicide en 2024 d’un quadragénaire ayant confié à des proches avoir été victime de violences sexuelles lorsqu’il était interne au collège. Les premiers témoignages évoqués par le diocèse, récoltés depuis début 2025 et émanant de victimes ou de leurs familles, décrivaient des viols, des agressions sexuelles et des attouchements, commis au sein de l’internat et pour “au moins une victime” des faits survenus lors de vacances organisées par l’établissement. – “Système de prédation” – Fin septembre, un collectif de victimes a été fondé. “C’est en le constituant qu’on a découvert qu’on était passés dans le même système de prédation, avec des auteurs différents pour certains, communs pour d’autres”, a expliqué à l’AFP Emmanuel Cocaul, 60 ans, élève à Saint-Stanislas entre 1976 et 1984. Dès 2020, il avait témoigné auprès de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase) d’agressions sexuelles commises par un aumônier – décédé depuis – entre ses 11 et 14 ans. “J’ai toujours su que c’était anormal, mais le système ne reposait pas, à la différence de Bétharram par exemple, sur de la violence physique directe. C’était beaucoup plus doucereux, c’était un rapport de force, d’autorité”, a-t-il déclaré. Un autre membre du collectif, qui a préféré rester anonyme, décrit une agression sexuelle subie de la part d’un professeur de catéchèse – également décédé – au milieu des années 1960, dans la chambre du religieux. “Peut-être que ce type de prêtre repère les élèves solitaires. A la récréation j’étais seul, j’étais la brebis fragile, facile à attraper”, raconte cet enseignant à la retraite de 70 ans, ajoutant avoir ressenti une “grande tristesse” mais aussi une “once de soulagement” après avoir appris qu’il n’était pas la seule victime. – D’autres établissements -Lors de leur conférence de presse fin août, l’évêque de Nantes et le directeur de l’enseignement catholique avaient assuré qu’un travail d’archive allait être mené à Saint-Stanislas et dans le diocèse pour éventuellement “détecter s’il y a eu des choses dissimulées, mises sous le tapis”. Depuis 2021 et la publication du rapport de la Ciase, Saint-Stanislas a été plusieurs fois la cible de tags accusant des hommes d’Eglise de viol.Au-delà de Saint-Stanislas, le parquet a dit jeudi avoir reçu 14 courriers concernant d’autres établissements, notamment à Nantes et Saint-Nazaire. De son côté, le diocèse a indiqué jeudi à l’AFP avoir reçu 95 mails depuis son appel à témoignages lancé fin août, tous établissements confondus. Le rapport de la Ciase publié en 2021 estimait à 330.000 le nombre de mineurs victimes de violences sexuelles au sein de l’Eglise. Parmi elles, 108.000 auraient été agressées dans le cadre de l’enseignement scolaire catholique, a estimé depuis le président de la Ciase, Jean-Marc Sauvé.

Lecornu échappe de peu à la censure, et va pouvoir s’atteler au budget

Sébastien Lecornu a échappé à quelques voix près jeudi à la censure, le Parti socialiste laissant sa chance au Premier ministre en échange de sa promesse de suspendre la réforme des retraites. Les débats budgétaires vont désormais pouvoir commencer à l’Assemblée dès la semaine prochaine.Au total, 271 députés ont voté pour, insuffisant pour atteindre les 289 voix nécessaires pour renverser le gouvernement. LFI, les communistes, les écologistes et l’extrême droite avaient annoncé leur volonté de censurer le gouvernement, Les Républicains et surtout le PS faisant le choix inverse.Une deuxième motion déposée par le Rassemblement national devrait elle être rejetée largement un peu plus tard dans la matinée, la gauche refusant d’y mêler ses voix.Lors des débats à la tribune de l’Assemblée, le député socialiste Laurent Baumel a défendu cette décision du PS d’épargner le gouvernement de Sébastien Lecornu, à rebours du reste de la gauche. Ce n’est “en aucun cas un pacte de non-censure” pour l’avenir, a-t-il averti. “La pérennité même de votre gouvernement” est suspendue à l’effectivité de la suspension de la réforme des retraites promise, et “il n’y aura pas d’entourloupe ou de ruse procédurale”, a-t-il aussi prévenu.Chacune leur tour, Aurélie Trouvé (LFI) puis la cheffe des députés RN, Marine Le Pen, ont tenté de convaincre les possibles hésitants, notamment chez LR et au PS, de voter leur motion respective. La suspension de la réforme des retraites, “n’est qu’un leurre, une tromperie, un subterfuge”, a dénoncé la députée insoumise en lançant les débats. “Vous tous qui avez été élus pour abroger la réforme des retraites, allez-vous vraiment vous laisser abuser par cette aumône en trompe-l’oeil ?”, a-t-elle lancé aux socialistes, alors que doutes émergent sur le fait qu’elle soit effectivement votée. Marine Le Pen a elle tancé la droite, qui après “après avoir fait campagne pendant des mois sur son refus de se dissoudre dans le macronisme”, a préféré “se dissoudre dans le socialisme”. Elle a attaqué les “partis unis par la terreur de l’élection” et a dit attendre la dissolution “avec une impatience croissante”.- “Moment de vérité” – En réponse, Sébastien Lecornu, dont le gouvernement a été nommé dimanche, a appelé à “un moment de vérité entre ordre républicain et désordre”, demandant aux censeurs de ne pas “prendre en otage” le budget. Pour donner des gages aux députés, le Premier ministre a renoncé à utiliser l’arme du 49.3 dans les débats budgétaires, permettant habituellement au gouvernement d’imposer son texte.Chez les socialistes, le chef des députés Boris Vallaud avait appelé ses troupes à s’en tenir à la ligne décidée de façon “quasi-unanime”. Mais certains s’inquiètent notamment que la suspension de la réforme des retraites n’aboutisse pas. Celle-ci doit passer par un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce qui implique que ce texte budgétaire soit adopté, possiblement avec les voix des socialistes, pourtant dans l’opposition.Or, argumentent Insoumis, écologistes et communistes, ce projet de loi comprend des mesures d’économies “inacceptables” comme le gel des prestations sociales ou le doublement des franchises médicales. Les socialistes font “le pari” que celles-ci évolueront lors du débat parlementaire.En cas de censure, le patron du PS Olivier Faure a également fait valoir jeudi que le budget passerait par “une loi spéciale”.Les LR ont eux décidé de ne pas censurer “au nom de l’intérêt national de doter la France d’un budget” malgré des “désaccords importants” selon leur orateur Jean-Didier Berger.Le patron des députés LR, Laurent Wauquiez, avait appelé ses troupes à suivre cette ligne — contrairement à l’eurodéputé François-Xavier Bellamy, proche du chef du parti Bruno Retailleau. – Bataille du budget -Les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi et qui prévoit un effort d’une trentaine de milliards d’euros, doivent enfin commencer à l’Assemblée la semaine prochaine.La commission des Finances s’en emparera lundi, et il devrait arriver dans l’hémicycle vendredi. La bataille entre une gauche traversée de tensions, un socle commun fracturé et l’extrême droite s’annonce dantesque, dans des délais très contraints.Le socialiste Laurent Baumel a d’ores et déjà appelé M. Lecornu à faire de “nouvelles concessions” sur “la trajectoire financière, sur la justice sociale, sur le pouvoir d’achat” lors des discussions. Même au sein du bloc central, le chef des députés Horizons Paul Christophe, qui a jugé jeudi la suspension de la réforme des retraites “déconnectée de toute réalité démographique et financière” a prévenu: “nous ne voterons pas n’importe quoi. Nous n’avons aucunement l’intention de renier nos valeurs”.