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Fraisage, tournage… “Des métiers qui ne peuvent pas être perdus”

Fraisage, tournage, maintenance industrielle… De jeunes Français se sont illustrés dans la maîtrise de métiers de l’industrie lors d’une compétition internationale organisée à Marseille, des métiers “un peu cachés” mais qui “ne peuvent pas être perdus”, a plaidé auprès de l’AFP une jeune participante.Les métiers industriels sont “un peu cachés parce qu’on voit les pièces unies, mais pas ce qui se passe avant”, observe Lona Hugues.L’étudiante en BTS Conception des Processus de Réalisation de Produits à Toulon (Var), meilleure apprentie de France 2023 en usinage, participait en fin de semaine dernière, dans la catégorie “tournage”, aux finales nationales de la 48ème édition de la compétition WorldSkills, un concours général dans des métiers techniques, à Marseille.Arts, communication et numérique, construction, propreté, végétal, industrie ou mobilité, “le but c’est que tout le monde puisse découvrir le plus de métiers possible”, a expliqué Arnaud Delaunay, directeur de la communication de Worldskills France, en marge de l’événement.Lona Hugues insiste sur l’importance de ces métiers, “qui ne peuvent pas être perdus. Ce sont des métiers qui doivent rester ici et qui doivent continuer à être appris et aimés”.Plusieurs jeunes Français se sont récemment illustrés en la matière. Mi-septembre, l’UIMM, l’Union des industries et métiers de la métallurgie qui “représente 42.000 entreprises industrielles”, s’est fendu d’un communiqué pour se féliciter de la “performance historique” de l’équipe de France des Métiers aux EuroSkills 2025, l’échelon européen de la compétition, où elle a remporté 27 médialles, dont sept en or, finissant première au classement des nations.”Cette magnifique victoire de la France met en lumière le formidable engagement de la jeunesse et l’excellence de l’alternance, en particulier dans l’industrie”, plaidait Hubert Mongon, délégué général de l’UIMM La Fabrique de l’avenir, estimant que cela récompensait “des années de préparation et une mobilisation sans faille des jeunes, des experts métiers, des entreprises et des centres de formation”.”L’appétence des jeunes se porte sur le luxe, le numérique, le digital de manière générale”, relève auprès de l’AFP Mathieu Beaujon, responsable du pôle soudage chez EDF. Mais il y a aussi une jeunesse sensible au “concret, c’est-à-dire je fabrique, je soude, je peux voir l’ouvrage auquel j’ai participé”.

Fort du retour d’expérience en Ukraine, KNDS adapte ses canons Caesar à la guerre moderne

Sous le ciel lourd et bas, les détonations résonnent sur le plateau de Canjuers, dans le sud de la France. Avec l’expérience de la guerre en Ukraine, les canons Caesar du franco-allemand KNDS se réinventent pour résister aux drones, nouvelle menace apparue avec ce conflit.Les artilleurs se déploient pour envoyer plusieurs obus de 155 mm qui éclatent sur ce camp militaire, le plus vaste d’Europe occidentale, alternant terre battue et lisières boisées sur les hauteurs, devant huit délégations étrangères — venues d’Europe, du Moyen-Orient et d’Asie, autant de clients potentiels.Avec l’augmentation des budgets militaires en Europe et les appels au patriotisme, la concurrence reste féroce face aux K9 Thunder sud-coréens qui équipent massivement l’armée polonaise, ou aux Panzerhaubitze 2000 allemands.Léger et mobile, Caesar est capable de neutraliser à distance de 40 km l’équivalent d’un terrain de football avec un seul obus, puis de repartir avant même que les munitions n’atteignent la cible. Ce qui évite qu’il soit détecté et ne devienne une cible: le taux de destruction du Caesar qui se déplace sur roues est d’environ 11% alors qu’il va jusqu’à 50% pour certains systèmes, plus lourds et souvent chenillés, assure Olivier Fort, directeur marketing artillerie de KNDS citant les statistiques ukrainiennes.Il peut arriver en moins de 2 minutes et demie sur sa position de tir et envoyer six obus en une minute. – “Tout à apprendre d’Ukraine” -Cette architecture fait qu’en Ukraine Caesar se déplace sans munitions à bord, celles-ci sont prépositionnées. En cas d’attaque de drones ou de munitions planantes, le système et l’équipage sont de ce fait protégés contre une explosion secondaire ultra-puissante. “Cela n’avait pas été envisagé précédemment”, explique Olivier Fort qui a été l’auteur de la doctrine d’artillerie de l’armée de terre française en 2012.Sur le plateau de Canjuers, en raison d’une pluie incessante, le drone de renseignement censé transmettre les coordonnées de tir à la batterie n’est pas de la partie. Les munitions téléopérées — ces drones armés que KNDS a développés avec le droniste français Delair en un temps record, dans le sillage de l’invasion russe de l’Ukraine en 2022- manquent elles aussi à l’appel.Mais la démonstration grandeur nature est tout sauf théorique: principal fournisseur d’armement terrestre à l’Ukraine, KNDS s’appuie sur un retour d’expérience de terrain unique puisque près de 120 Caesar sont présents dans le pays.”On a tout à apprendre de la situation en Ukraine pour nos propres besoins. Il y a plein d’améliorations qui ont été faites grâce à l’Ukraine sur le canon Caesar”, résume pour l’AFP Darot Dy, consultant aérospatial et défense du cabinet de conseil stratégique Roland Berger.Une cabine au blindage renforcé, un moteur modernisé: depuis l’entrée en service du premier canon Caesar en 2008, celui-ci a déjà fait ses preuves en Afghanistan, au Mali et en Irak, et ne cesse d’évoluer, assure KNDS.”Il y a des tactiques que les artilleurs ukrainiens ont imaginées au combat et qui vont être reprises par l’armée de terre” française, estime Olivier Fort.L’une d’elles consiste à combiner l’utilisation de l’artillerie pour détruire les filets de protection sur les tranchées avant d’y envoyer des munitions téléopérées. – Transparent et vulnérable -“Les canons Caesar ont démontré leur performance en termes de précision” et leur capacité à se déplacer, souligne à l’AFP Pascal Fabre, directeur associé au cabinet de conseil AlixPartners.Ils doivent désormais faire face au nouveau défi: “la transparence du champ de bataille” grâce aux satellites, mais surtout aux drones.”La vitesse de réaction est très grande entre la détection et la frappe. Les armées des deux côtés se sont adaptées pour frapper beaucoup plus vite”, ajoute Pascal Fabre. La leçon numéro un de la guerre en Ukraine c’est “le besoin de se prémunir contre la menace des drones et “concilier la puissance de feu avec la mobilité”, déclare à l’AFP le lieutenant-colonel Renaud Durbecq, responsable du 35e régiment d’artillerie parachutiste qui anime la démonstration.Autre invention anti-drone déjà utilisée en Ukraine: des leurres gonflables, répliques de canons Caesar dotées d’une signature thermique qui servent à détourner les drones kamikazes russes et à préserver les véritables pièces d’artillerie.”C’est vraiment nouveau, pour permettre de se fondre dans le paysage”, commente Renaud Durbecq.

L’oenotourisme en effervescence en Champagne, surfant sur l’effet Unesco

“On a l’impression de se promener dans une peinture”, s’extasie Tyler Ryan, un touriste américain visitant le Pavillon Ruinart à Reims, l’une des vitrines du boom de l’oenotourisme en Champagne, dix ans après son inscription au patrimoine mondial de l’Unesco.La plus ancienne maison de champagne, propriété du géant du luxe LVMH, a métamorphosé depuis un an son accueil du public avec ce pavillon aux airs de pagode signé Sou Fujimoto, l’une des stars de l’architecture japonaise contemporaine, à côté de ses crayères, ces profondes caves naturelles en craie qui se visitent.Employé de la franchise de basket NBA des Bucks de Milwaukee, Tyler Ryan et sa femme Taylor, infirmière, expliquent à l’AFP être venus en France fêter le premier anniversaire de leur voyage de noces. En deux étapes: la Champagne, puis Paris.Taxes Trump ou pas, “nous buvions déjà du champagne pour les grandes occasions et nous allons continuer à en boire”, sourit le couple.L’oenotourisme “est reparti comme jamais, avec un public qui n’est plus le même”, ce sont “des gens qui voyagent d’abord pour le vin”, estime Olivier Livoir, “responsable de l’hospitalité” chez Ruinart.Un relais de croissance bienvenu pour la filière champagne, touchée depuis cette année par les droits de douane des Etats-Unis sur les produits européens.- Musées, bars et hôtels chics -Dix ans après l’inscription de ses coteaux, maisons et caves au patrimoine mondial, l’oenotourisme “est en train d’exploser” en Champagne, constate aussi Séverine Couvreur, présidente de la Mission Unesco.Un nombre impressionnant de projets a vu le jour ces dernières années: rénovation du musée du vin de Champagne à Epernay, reconversion des anciens pressoirs de Pommery en un musée interactif à Aÿ-Champagne, hôtels de luxe et restaurants assemblant gastronomie et dégustation de vins: Taittinger a ainsi ouvert sa propre table en juin à Reims.Parmi d’autres initiatives en cours, la maison Dom Pérignon (LVMH là encore) doit démarrer en décembre la restauration de l’ancienne abbaye Saint-Pierre d’Hautvillers, berceau du champagne, pour une réouverture prévue en 2028 sous le signe de l’oenotourisme.Dans un ancien hôtel particulier au coeur de Reims, la jeune maison Thiénot a inauguré en septembre “Le 3″, un lieu proposant sur 5.000m2 un circuit oenotouristique immersif, bientôt flanqué d’un hôtel cinq étoiles et d’un bar à champagne.”C’est le boom oenotouristique de la Champagne qui a fait germer cette idée”, explique à l’AFP Olivier Lamaison, le directeur général du “3”. Il y a “un fort enjeu commercial” dans ce projet, reconnaît Stanislas Thiénot, co-dirigeant de cette maison indépendante et désireuse de cibler davantage le grand public.- “Eviter le surtourisme” -Le nombre de nuitées à Reims a bondi de plus de 60% entre 2016 et 2023, atteignant 1,8 million. Et les emplois touristiques locaux ont augmenté de plus de 30% sur la même période pour atteindre 8.240 postes, selon une récente enquête de l’Agence d’urbanisme, de développement et de prospective de la région de Reims.”Cette hausse des emplois est homogène sur tout le territoire” et “surtout sensible dans les zones périphériques” souligne Mme Couvreur.Car l’inscription Unesco va au-delà de “zones coeur” comme Reims et Epernay, engageant également 320 villes et villages de l’AOC Champagne dans la Marne, l’Aube et l’Aisne.Ainsi “on arrive aussi à éviter le surtourisme” car “il n’y a pas qu’un seul lieu qui se visite, mais une multitude d’expériences”, vante encore Mme Couvreur.La Mission Unesco veut dorénavant anticiper “des flux qui favorisent la mobilité, pour que les habitants n’en souffrent pas”, ajoute-t-elle.Dès 2023, Hautvillers et Aÿ-Champagne ont pris des arrêtés plafonnant le nombre de locations touristiques autorisées dans leurs communes. Epernay vient de les imiter, alors que le nombre de ces meublés recensés dans la ville – plus de 420 – a décuplé depuis 2019, selon la mairie.A Aÿ-Champagne, des investisseurs locaux, mais aussi étrangers, “achetaient des biens assez conséquents” et à un prix élevé pour les “rediviser” ensuite, explique à l’AFP Dominique Collard, le maire de cette commune.”On est fier de la montée du tourisme en Champagne, mais il faut essayer de trouver le bon équilibre”, car se loger sur Aÿ est devenu “compliqué” et sa population décline, souligne l’élu.

En Corse, la croix d’un village déchaîne les passions

Atteinte à la laïcité ou “symbole” de l’identité corse? Depuis une semaine, une décision de justice enflamme les esprits sur l’île : elle concerne l’avenir d’une croix installée à l’entrée d’un petit village de 60 habitants.A côté de cette croix en bois, deux banderoles ont été accrochées. L’une conseille à la vieille dame qui mène la fronde: “Rentre chez toi, la croix, elle, est chez elle”. L’autre assure: “Enlever la croix c’est effacer la Corse”.Au coeur de l’imbroglio, une décision du tribunal administratif de Bastia du 10 octobre qui “annule le refus du maire de Quasquara”, Corse-du-Sud, “d’enlever” cette croix chrétienne, installée en 2022 sur un terrain public.Les réactions ont été si vives que le cardinal et le préfet ont dû intervenir, dans cette île méditerranéenne où se pratique un catholicisme fervent et qui a accueilli fin 2024 le défunt pape François pour son ultime voyage officiel.Beaucoup ont interprété cette décision comme une injonction à retirer la croix. Mais ce n’est pas le cas, explique à l’AFP une source judiciaire : l’avocat de la plaignante –villageoise octogénaire vivant depuis 20 ans à Quasquara– n’a pas explicitement formulé cette requête, donc le tribunal ne l’a pas prononcée.Pour se conformer, le maire devra déplacer la croix ou rendre privée la parcelle où elle est installée, sans quoi il s’expose à de nouvelles poursuites.Pourquoi cette décision?La loi de 1905 de séparation des églises et de l’Etat “s’oppose à l’installation par les personnes publiques, dans un emplacement public, d’un signe ou d’un emblème” religieux, rappelle le tribunal, sauf pour les “signes et emblèmes religieux” antérieurs à la législation.Or la croix a été installée “sur un emplacement différent des deux calvaires identifiés sur le cadastre communal de 1880”.- “Tradition de nos villages” -Une pétition en ligne a rassemblé plus de 42.000 signatures “pour maintenir la croix de Quasquara, symbole de notre patrimoine et de notre identité”.L’indignation politique est quasi-unanime, contexte qui rend difficile d’exprimer publiquement tout désaccord.L’octogénaire à l’origine du recours reçoit de nombreuses menaces mais n’a pas porté plainte à ce stade, selon une source proche du dossier.Laurent Marcangeli (Horizons), ministre sortant de la Fonction publique et ancien maire d’Ajaccio, a apporté sur X son “soutien le plus total” au maire de Quasquara.”Avant d’être un symbole religieux, la croix chrétienne est une tradition de nos villages insulaires, qui je le crois, ne porte tort à personne”, écrit-il.Le parti Femu a Corsica du président autonomiste du conseil exécutif Gilles Simeoni a fustigé une “interprétation laïciste, rigide et conflictuelle du fait religieux”.Face à l’emballement, le cardinal Bustillo, évêque d’Ajaccio, a tenté d’apaiser les esprits car “la croix ne doit pas être un motif de division”. “La croix, on la sert, on ne s’en sert pas”, a-t-il lancé dans un entretien à Corse Matin.Le préfet a promis au maire que “les services de l’Etat accompagneront” la commune pour étudier “les différentes voies permettant d’assurer que l’implantation de la croix s’inscrive dans le cadre légal”.- “Nationalisme identitaire” -Interrogé par l’AFP, Thierry Dominici, politologue à l’Université de Bordeaux et spécialiste de la Corse, évoque “un épiphénomène monté en épingle” par des partisans du “nationalisme identitaire” cherchant à “occuper l’espace médiatique.”Pour lui, “les identitaires activent cette idée que le Corse non seulement est corsophone, né sur l’île, de parents corses, mais surtout ils adhèrent à une forme de pensée civilisationnelle qui ne peut être qu’européenne, occidentale, blanche et chrétienne”.A ce stade la grogne n’est pas retombée.Jeudi et vendredi, des lycéens de Sartène, Corte et Bastia ont manifesté sous des banderoles “Terra corsa, terra cristiani” (Terre corse, terre chrétienne, NDLR).Samedi, Palatinu, jeune mouvement nationaliste identitaire d’extrême droite, le Rassemblement national et l’Union des droites pour la République (UDR) d’Eric Ciotti ont choisi Quasquara pour annoncer leur alliance, notamment en vue des municipales de 2026.Ils ont proposé au passage qu’un “fonds privé” acquiert la parcelle communale où se trouve la croix.Et dimanche encore, le syndicat étudiant indépendantiste Ghjuventu Indipendentista a réuni quelque 200 personnes au pied de la croix, selon son responsable Chilianu Begliomini. “Si on a grandi dans l’esprit corse ça fait l’unanimité”, dit-il à l’AFP.Le maire Paul-Antoine Bertolozzi continue lui d’étudier “toutes les voies de recours possibles” pour “que cette croix reste là où elle est”, a-t-il déclaré au Journal du dimanche.

A close-up of a stack of newspapers resting on a desk, symbolizing information and media.

Un film choral inédit donne la parole aux Soulèvements de la Terre

De Sainte-Soline à l’autoroute A69, les mobilisations des Soulèvements de la Terre secouent régulièrement l’actualité: loin de ces épisodes paroxystiques, un documentaire présenté dans un festival toulousain, donne pour la première fois longuement la parole à ces militants écologistes.”Soulèvements”, film d’1h45 du réalisateur Thomas Lacoste, retraçant seize parcours pour autant d’entretiens au long cours, était programmé au Festival international du film d’Environnement, dimanche à Toulouse.”Cela serait une faute de ne pas programmer un film comme +Soulèvements+”, a expliqué à l’AFP Antonin Haddad, le directeur du festival qui fête ses quinze ans d’existence, y voyant “un des films de l’année”, susceptible de “créer des espaces d’échanges et de débats”.S’il se défend d’avoir réalisé un film militant, le réalisateur, extérieur au mouvement, assume, un “film assurément politique”, dont l’idée prend sa source en 2023, année marquée en mars par les violents affrontements entre militants et forces de l’ordre autour des mégabassines, par la tentative avortée de dissolution du mouvement et l’émergence du qualificatif d'”écoterroristes”.”Là, je me dis qu’il ne faut pas laisser faire et qu’à minima, il faut s’interroger: comment un État peut-il criminaliser sa jeunesse pour les efforts qu’elle déploie afin d’inverser le funeste cours des choses ?”, a expliqué à l’AFP M. Lacoste.- “Attachement sensible” -En réponse à cette “criminalisation”, les Soulèvements sont attachés à un certain anonymat, ce qui a poussé le cinéaste à trouver les ingrédients pour “établir un rapport de confiance suffisant”, comme il avait pu le faire dans un autre projet portant sur l’histoire du conflit au Pays basque.”Très vite, on s’est mis d’accord sur l’objet, c’est-à-dire de faire un film à la fois réflexif et sensible”, raconte-t-il, évoquant d’autres points “plus élémentaires” mais “hyper importants”: “anonymiser les lieux, les personnes qui parlent” et “ne pas entrer dans l’organigramme du mouvement”.”On a décidé de faire confiance”, a expliqué à l’AFP Martin Fraysse, membre des Soulèvements de la Terre et l’un des organisateurs du dernier rassemblement anti-A69 dans le Tarn, début juillet.”Au-delà de la possible mise en danger de se montrer […], il y a quelque chose d’important dans raconter l’attachement sensible à la terre et au vivant”, a précisé l’un des seize visages du film, lors d’une des projections du film.”Le film prend soin de donner suffisamment de repères aux regardants pour savoir où on est et de quoi on parle”, souligne encore le réalisateur qui a voulu dresser une “espèce de géographie à la fois humaine et des luttes”, dont certaines sont moins visibles que d’autres. – “Filmer la pensée” -A l’image de celle contre les retenues collinaires de La Clusaz, destinées à alimenter les canons à neige de cette station alpine, qui donne lieu à une séquence d’entretien émouvante entre une jeune militante de la “CluZAD” et le père de sa meilleure amie engagée dans la même lutte, ému et fier du combat des jeunes femmes.A cela, s’ajoute un “pari cinématographique”: “filmer la pensée, donc la parole, ce n’est pas forcément le plus aisé”, confie le réalisateur. Mais la longueur des interviews permettent, selon lui, de sortir “le protagoniste de tout récitatif militant, de tout didactisme”.Les prises de parole sont entrecoupées de plans d’animaux, de paysages et parfois même de chants. Des respirations qu’il a décidé de filmer avec “la même attention”, que ce soit “une vache, un cheval ou une paysanne”.”J’espère que l’intégrité et la dignité des visages saura vous toucher comme elles nous ont bouleversés à leur rencontre”, s’est ému Thomas Lacoste, devant quelque 300 spectateurs, en majorité des jeunes.Parmi eux, plusieurs avaient participé au mouvement contre le projet d’autoroute entre Toulouse et Castres.”Le film tient en son cœur le +pourquoi+ de ce mouvement”, il “humanise celles et ceux qu’on a appelé +les écoterroristes+”, estime Virginie, une éducatrice spécialisée. Pour Océane, étudiante en Sciences sociales, “ça donne envie de soutenir de différentes manières”.Si la salle pleine et les discussions suscitées par le film “donnent de l’espoir”, souligne le directeur du festival, Antonin Haddad, elles “nous attristent aussi. Si cela marche aussi bien, c’est qu’il y a un énorme trou à combler dans l’éducation citoyenne à l’écologie”.”Soulèvements” doit sortir en salles le 11 février.

Un film choral inédit donne la parole aux Soulèvements de la Terre

De Sainte-Soline à l’autoroute A69, les mobilisations des Soulèvements de la Terre secouent régulièrement l’actualité: loin de ces épisodes paroxystiques, un documentaire présenté dans un festival toulousain, donne pour la première fois longuement la parole à ces militants écologistes.”Soulèvements”, film d’1h45 du réalisateur Thomas Lacoste, retraçant seize parcours pour autant d’entretiens au long cours, était programmé au Festival international du film d’Environnement, dimanche à Toulouse.”Cela serait une faute de ne pas programmer un film comme +Soulèvements+”, a expliqué à l’AFP Antonin Haddad, le directeur du festival qui fête ses quinze ans d’existence, y voyant “un des films de l’année”, susceptible de “créer des espaces d’échanges et de débats”.S’il se défend d’avoir réalisé un film militant, le réalisateur, extérieur au mouvement, assume, un “film assurément politique”, dont l’idée prend sa source en 2023, année marquée en mars par les violents affrontements entre militants et forces de l’ordre autour des mégabassines, par la tentative avortée de dissolution du mouvement et l’émergence du qualificatif d'”écoterroristes”.”Là, je me dis qu’il ne faut pas laisser faire et qu’à minima, il faut s’interroger: comment un État peut-il criminaliser sa jeunesse pour les efforts qu’elle déploie afin d’inverser le funeste cours des choses ?”, a expliqué à l’AFP M. Lacoste.- “Attachement sensible” -En réponse à cette “criminalisation”, les Soulèvements sont attachés à un certain anonymat, ce qui a poussé le cinéaste à trouver les ingrédients pour “établir un rapport de confiance suffisant”, comme il avait pu le faire dans un autre projet portant sur l’histoire du conflit au Pays basque.”Très vite, on s’est mis d’accord sur l’objet, c’est-à-dire de faire un film à la fois réflexif et sensible”, raconte-t-il, évoquant d’autres points “plus élémentaires” mais “hyper importants”: “anonymiser les lieux, les personnes qui parlent” et “ne pas entrer dans l’organigramme du mouvement”.”On a décidé de faire confiance”, a expliqué à l’AFP Martin Fraysse, membre des Soulèvements de la Terre et l’un des organisateurs du dernier rassemblement anti-A69 dans le Tarn, début juillet.”Au-delà de la possible mise en danger de se montrer […], il y a quelque chose d’important dans raconter l’attachement sensible à la terre et au vivant”, a précisé l’un des seize visages du film, lors d’une des projections du film.”Le film prend soin de donner suffisamment de repères aux regardants pour savoir où on est et de quoi on parle”, souligne encore le réalisateur qui a voulu dresser une “espèce de géographie à la fois humaine et des luttes”, dont certaines sont moins visibles que d’autres. – “Filmer la pensée” -A l’image de celle contre les retenues collinaires de La Clusaz, destinées à alimenter les canons à neige de cette station alpine, qui donne lieu à une séquence d’entretien émouvante entre une jeune militante de la “CluZAD” et le père de sa meilleure amie engagée dans la même lutte, ému et fier du combat des jeunes femmes.A cela, s’ajoute un “pari cinématographique”: “filmer la pensée, donc la parole, ce n’est pas forcément le plus aisé”, confie le réalisateur. Mais la longueur des interviews permettent, selon lui, de sortir “le protagoniste de tout récitatif militant, de tout didactisme”.Les prises de parole sont entrecoupées de plans d’animaux, de paysages et parfois même de chants. Des respirations qu’il a décidé de filmer avec “la même attention”, que ce soit “une vache, un cheval ou une paysanne”.”J’espère que l’intégrité et la dignité des visages saura vous toucher comme elles nous ont bouleversés à leur rencontre”, s’est ému Thomas Lacoste, devant quelque 300 spectateurs, en majorité des jeunes.Parmi eux, plusieurs avaient participé au mouvement contre le projet d’autoroute entre Toulouse et Castres.”Le film tient en son cœur le +pourquoi+ de ce mouvement”, il “humanise celles et ceux qu’on a appelé +les écoterroristes+”, estime Virginie, une éducatrice spécialisée. Pour Océane, étudiante en Sciences sociales, “ça donne envie de soutenir de différentes manières”.Si la salle pleine et les discussions suscitées par le film “donnent de l’espoir”, souligne le directeur du festival, Antonin Haddad, elles “nous attristent aussi. Si cela marche aussi bien, c’est qu’il y a un énorme trou à combler dans l’éducation citoyenne à l’écologie”.”Soulèvements” doit sortir en salles le 11 février.

RAID: “Quand vous voyez arriver trente mecs de 120 kilos, surarmés, il vaut mieux se rendre”

Branle-bas de combat dans les Hauts-de-Seine. Le RAID est appelé pour une intervention périlleuse en ce mercredi d’octobre: une prise d’otage, dans un bâtiment fermé et difficile d’atteinte, risque de mal tourner. L’objectif ? “Récupérer un survivaliste qui a pris sa femme en otage”, détaille le chef d’équipe Jonathan (*). “Mais attention! C’est un militaire, spécialiste des explosifs et armé jusqu’aux dents”, prévient-il.La crise, inspirée d’une histoire réelle, est un exercice destiné à mettre à mal cette unité d’élite de la police. A pousser ses membres dans leurs derniers retranchements pour “servir sans faillir” – la devise du RAID (Recherche, assistance, intervention, dissuasion), qui fête cette semaine sa création il y a 40 ans, le 23 octobre 1985.”Allez, changez vous! On se prépare”, lance Jonathan tandis que ses hommes s’équipent. En intervention, un opérateur du RAID, polyvalent et hautement entraîné, peut porter plus de 30 kilos d’équipement entre armes, gilets pare-balles, casques et masques, adaptés selon le niveau de menace attendu. “On n’y va pas la fleur au fusil, on prend son temps”, intime-t-il.Pendant ce temps, les tireurs haute précision sont déjà partis prendre position en hauteur. Ils jouent un rôle crucial, de protection mais aussi de prise d’informations.Même chose pour l’opérateur du GOST (pour Groupe opérationnel de soutien technique): avec ses drones, cet “ingénieur” du RAID surveille le périmètre autour de l’objectif, le preneur d’otage.Sous le soleil automnal, une équipe est en train de couper les arbres sur le chemin pour ouvrir la voie, une autre installe des échelles.Mais la négociation ayant tourné court, la colonne va intervenir. Encagoulés, casqués et armés comme pour partir à la guerre, les hommes du RAID avancent. Doucement mais sûrement derrière leur lourd bouclier fixe. “On reste comme des fraises, là: il faut bouger”, peste un opérateur, visiblement lassé des atermoiements.- Obligation de résultat -Une dernière tentative de négociation avortée – “Cassez-vous!” – et les “effracs”, chargés de permettre une entrée rapide et efficace du groupe d’intervention, entrent en scène. “Avant chaque opération, il y a un gros travail préparatoire”, explique Guillaume Cardy, le patron du RAID. “Quand vous rentrez dans un appartement, les couloirs peuvent être droits, en L, en T… avec une mezzanine, un sous-sol… Il faut regarder la topographie, il faut regarder le plan de l’appartement – si on a les plans. Il faut analyser la porte, comment elle est configurée pour que l’opérateur chargé de l’effraction puisse préparer sa charge explosive. C’est au grammage près”, ajoute-t-il. “Le RAID a une obligation de résultat”.Des résultats glanés par cette unité d’élite de la police à force de sueur, d’adrénaline, de sang-froid et de professionnalisme.”Quand quelqu’un regarde par la fenêtre, il voit arriver le RAID, avec une colonne de trente mecs, qui font 120 kilos, qui sont surarmés, il se dit ‘ouh là peut-être qu’il vaut mieux se rendre'”, sourit Guillaume Cardy.Dans la simulation des Hauts-de-Seine, le forcené, joué cette fois par un opérateur du RAID spécialiste de l’explosif, ne s’est pas rendu. Vêtu d’une combinaison de démineur, il portait des grenades et avait piégé les portes d’entrée.Il a fini par être maîtrisé après un assaut supersonique et le jet de quelques grenades de diversion. “Tu nous as vraiment fait chier, dis donc”, le houspillent ses camarades. Mais la prochaine fois, ils seront prêts à toutes les éventualités.(*): pour des raisons de sécurité, les noms de famille ne sont pas mentionnés

Aux assises, les experts racontent “l’angoisse” de Lola et son supplice de “deux à trois minutes”

“Il y a souffrance physique, psychique, morale”, a expliqué lundi devant la cour d’assises de Paris une médecin légiste qui a expertisé le corps de Lola, 12 ans, violée, torturée et tuée en octobre 2022, face à une accusée, Dahbia Benkired, toujours impassible.Une heure après un exposé aussi technique qu’exhaustif, le président de la cour interroge l’experte: “Lola Daviet a-t-elle souffert ?””Avant la perte de connaissance, l’asphyxie est en soi est très, très anxiogène”, a répondu la légiste, évoquant une “agonie qui a pu durer entre deux et trois minutes”.Les médecins avaient mis en évidence que c’est l’obstruction du nez et de la bouche par du scotch qui enroulait toute la tête de la jeune adolescente qui avait provoqué son décès.Mais des coups ont également été donnés: “il y a eu probablement un ou plusieurs impacts au niveau de la tête, avec des douleurs physiques”, a rappelé la médecin, sans compter ses “multiples plaies”, notamment dans le dos, selon elles possiblement réalisées à l’aide d’une paire de ciseaux.Au deuxième jour d’audience, l’accusée, aujourd’hui 27 ans, présente le même visage hébété, le regard fixé vers le président ou les écrans qui diffusent clichés ou schémas, mais dégageant toujours l’impression d’être en retrait de son procès, au terme duquel elle encourt la réclusion criminelle à perpétuité.Au-delà du mobile, c’est la manière dont Dahbia Benkired a convaincu Lola – la fille des gardiens de cette résidence du XIXe arrondissement de Paris – de monter dans son appartement – ou plutôt celui de sa sœur, chez qui elle vivait par intermittence – qui interroge.Et lorsque la légiste rappelle qu’elle n’a pas constaté de “plaie de défense”, laissant supposer que la fillette n’a “pas réagi”, la mère de Lola s’effondre en sanglots dans la salle.Dans leurs rapports, les médecins légistes ont également relevé des “lésions anatomiques profondes” vaginales et ano-rectales: davantage que simplement “compatibles”, elles sont “avec certitude” la conséquence selon eux d’un traumatisme direct avec pénétration, survenu avant la mort.”Ça, c’est faux, je l’ai jamais touchée”, proteste quelques minutes plus tard l’accusée, qui reconnaît en revanche avoir “touché les seins” et s’être fait prodiguer un cunnilingus – juridiquement, un viol – par sa victime.Le président lui demande s'”il y avait quelqu’un d’autre dans l’appartement”. “Non. J’ai pas d’explication pour ça, j’ai rien fait. Si je l’avais fait, je l’aurais dit”.

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Inondations: Bali fait les frais du développement touristique effréné

Se tenant debout là où se dressait encore récemment sa maison familiale, Ruth Deidree Boelan ferme les yeux et prie pour ses proches disparus lors des inondations meurtrières qui ont balayé l’île touristique de Bali début septembre.”Je suis encore sous le choc. Mon frère, mon père et ma mère ont été emportés par les eaux et la maison entière”, située en bord de rivière, “a disparu”, confie à l’AFP la femme de 28 ans, des sanglots dans la voix.Ces inondations et glissements de terrain provoqués par des pluies torrentielles ont fait 18 morts sur “l’île des dieux” et ont mis en lumière les méfaits sur l’environnement d’années de développement urbanistique et touristique effréné.Le sud de l’île indonésienne, autrefois verdoyant, a été transformé par un boom touristique créateur d’emplois mais qui a fragilisé des terres assurant auparavant le drainage de l’eau.En comparant des images d’espionnage américaines déclassifiées datant la guerre froide et des photos satellites récentes, la start-up TreeMap, via son projet Nusantara Atlas, fait apparaître nettement ces bouleversements. “Tout ce terrain est désormais transformé en routes ou en bâtiments, le sol n’a plus la même capacité à absorber l’eau”, explique David Gaveau, son fondateur.Plus de 4,6 millions de touristes étrangers ont visité Bali sur les sept premiers mois de 2025, soit plus que les 4,4 millions d’habitants permanents.L’infrastructure pour les accueillir a entraîné “une conversion des terres et une gestion urbaine chaotique, accompagnées d’une application laxiste des lois d’aménagement du territoire”, dénonce Made Krisna Dinata, directeur exécutif de l’ONG locale Walhi Bali.Tout cela “a placé Bali dans une situation très propice aux catastrophes”, estime-t-il.- Précipitations record -Selon les données de l’agence de météorologie locale, Bali a connu des précipitations record le 9 septembre dernier, notamment dans le district de Badung qui abrite certaines des installations touristiques les plus populaires de l’île.”Il n’y a jamais eu de précipitations aussi importantes”, a déclaré à l’AFP le gouverneur de Bali, Wayan Koster, tout en reconnaissant que des problèmes d’infrastructures ont également joué un rôle dans les inondations désastreuses.Une étude sur les constructions le long de quatre grands cours d’eau va être lancée, ainsi qu’une chasse aux constructions enfreignant les réglementations de zonage, a ajouté le gouverneur.s”Si les règles sont violées, des mesures seront prises pour les faire respecter”, a-t-il promis.Une réglementation visant à protéger les emblématiques rizières en terrasse de Bali de tout développement ultérieur est également prévue.Mais à cet enjeu s’ajoute celui de la gestion des déchets.Selon des recherches menées en 2019, Bali produit 4.200 tonnes de déchets par jour, dont moins de la moitié est envoyée à la décharge, explique I Gede Hendrawan, professeur à l’Université Udayana de Bali.Mal collectés ou éliminés, ces déchets obstruent les rivières et les égouts, aggravant les inondations, explique-t-il à l’AFP.- Déchets -Les autorités balinaises s’apprêtent à fermer une importante décharge sur l’île cette année et exhortent les ménages à mieux gérer leurs déchets organiques. Mais bon nombre de détritus risquent de finir dans la nature, déplore M. Hendrawan, car “nous sommes tous confrontés (…) à l’absence d’un bon système de gestion des ordures”.Bien que le gouvernement local travaille avec Jakarta en vue de construire une usine de valorisation énergétique des déchets, cela ne devrait pas se concrétiser rapidement, indique M. Koster.Les volumes de déchets risquent également d’augmenter si le projet d’ouverture d’un deuxième aéroport international dans le nord de l’île voit le jour, visant à développer, selon les autorités, le tourisme dans cette partie encore peu fréquentée.Le changement climatique fait par ailleurs craindre des pluies record plus fréquentes car une atmosphère plus chaude retient davantage d’humidité.”Si nous ne parvenons pas à résoudre ce problème (de gestion des déchets), alors en décembre et janvier, lorsque la saison des pluies sera à son apogée, nous pouvons craindre qu’une catastrophe encore plus grande ne se produise”, met en garde M. Hendrawan.