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Prélèvements et biopsies: sur les traces de l’ours polaire en Arctique

Touchée par la fléchette sédative, l’ourse polaire se couche doucement sur le flanc: quelques minutes plus tard, le vétérinaire s’approche, pose un collier GPS, prélève du sang, incise la chair. Tout doit s’enchainer rapidement.  La mission est périlleuse : il fait en moyenne -20°C dans l’Arctique norvégien et l’ours polaire est un prédateur dangereux pour l’homme, il ne faut pas qu’il se réveille.Depuis quarante ans, les experts de l’Institut polaire norvégien (NPI) observent l’ours du Svalbard, sa santé, ses déplacements et les effets du réchauffement climatique trois à quatre fois plus important dans cette région que la moyenne mondiale.  Lors de leur expédition annuelle, en avril, sur le brise-glace de recherche Kronprins Haakon, du nom de l’actuel prince héritier de Norvège, huit scientifiques, accompagnés par un photographe de l’AFP, ont expérimenté de nouvelles méthodologies de suivi de l’Ursus maritimus.Sur ce bâtiment de 100 mètres de long, la journée dépend de la météo qui détermine si l’hélicoptère peut voler et traquer les ours sur la banquise, au GPS ou à la trace. Les “jours blancs”, quand ciel, neige et glace se confondent, c’est impossible.Ce jour-là, le vétérinaire Rolf Arne Olberg est à bord avec deux scientifiques quand l’hélicoptère part en quête des mammifères à l’aide d’une application qui localise la dizaine de femelles équipées pour la première fois l’an dernier d’un collier GPS. – Fréquence cardiaque -Un pied sur le patin de l’hélicoptère, Olberg épaule sa carabine à air comprimé et déclenche le tir de fléchette anesthésiante sur l’animal qui au bruit de l’appareil a commencé à courir. Certains ours, déjà anesthésiés les années précédentes, ne paniquent plus à l’approche de l’hélicoptère.Le dosage de sédatif est adapté à la taille de l’ours et la fléchette doit atteindre un muscle pour être efficace. Observation à la jumelle : si l’anesthésiant a fait effet, l’hélicoptère peut se poser près de l’ours cinq à dix minutes plus tard.Tout doit alors être précis et rapide, malgré les gants chirurgicaux par une température qui peut descendre à -30°C ou le vent. “Nous essayons de minimiser le temps que nous passons près de l’ours” dit le vétérinaire.Au chevet de l’animal, Olberg place un collier GPS ou remplace sa pile, si la femelle est déjà équipée. Les mâles, qui peuvent atteindre 2,60 mètres pour 600 kilos, ne peuvent pas en être dotés car leur cou étant plus gros que leur tête ils le perdraient immédiatement.Le vétérinaire incise ensuite la peau du mammifère pour placer entre la graisse et la chair un capteur cardiaque, petit cylindre de 4 centimètres. Les cinq premiers ont été posés l’an dernier.”C’est un enregistreur qui nous permet d’avoir, sur toute une année, la température corporelle et la fréquence cardiaque des ours”, explique la chercheuse française Marie-Anne Blanchet, spécialiste en écologie spatiale au NPI.”Ces deux paramètres sont reliés aux dépenses énergétiques des ours. Et la dépense énergétique, c’est un petit peu la monnaie qui nous intéresse pour savoir quelle énergie les ours ont besoin de dépenser dans la mesure où leur environnement change”, détaille-t-elle.- Œufs et rennes -Pour la première fois cette année donc, les experts vont pouvoir croiser température corporelle, rythme cardiaque et données GPS, et savoir quand ces ourses appareillées marchent pour atteindre leur zone de chasse, nagent ou restent en tanière.Le vétérinaire prélève aussi de fines lamelles de graisse qu’il insère dans un tube conservé à 37°C, la température corporelle de l’ours. A bord du brise-glace, les tissus graisseux seront exposés à des hormones de stress et polluants puis plongés dans de l’azote liquide pour être analysés plus tard sur terre.Cette nouvelle technique, appelée “slices”, est destinée à mesurer l’impact des “polluants éternels” (PFAS) sur leur santé. “L’idée, c’est de représenter au mieux ce que les ours vivent dans la nature mais en laboratoire”, dit la toxicologue belge Laura Pirard, qui expérimente cette méthode de biopsie sur le mammifère.Ces échantillons de graisse et de sang révèlent déjà l’évolution du régime alimentaire des ours polaires alors que la glace de mer recule. “Ils mangent plus de nourriture terrestre que de phoques. Ils chassent toujours les phoques mais ils prennent également des œufs et des rennes, ils mangent même de l’herbe et des choses comme ça, bien que cela ne leur fournisse aucune énergie”, a constaté le chef scientifique du programme “ours polaires” au NPI, Jon Aars, Le phoque reste cependant une nourriture essentielle pour l’animal.”Même s’ils ne disposent que de trois mois pour chasser, ils peuvent obtenir environ 70% de ce dont ils ont besoin pour toute l’année pendant cette période. C’est probablement pour cette raison que nous constatons qu’ils s’en sortent bien et qu’ils se portent bien”, ajoute-t-il.Mais le chef de mission met en garde : “Si la période (de chasse du phoque) diminue encore, peut-être seront-ils à la peine”.

Le Japon maintent ses poursuites contre le défenseur des baleines Paul Watson en dépit de la décision d’Interpol

Le Japon a dénoncé mercredi la levée de la notice rouge d’Interpol qui visait le militant écologiste américano-canadien Paul Watson, figure de la défense des baleines, et a déclaré que son mandat d’arrêt reste valide.La levée de cette notice visant à l’arrestation de Paul Watson, annoncée mardi par l’un de ses avocats, Me William Julié, est “extrêmement regrettable”, a déclaré un porte-parole du gouvernement japonais lors d’un point de presse régulier.”L’annulation ne change pas le fait que le mandat d’arrêt du Japon à son encontre reste valide”, a dit Yoshimasa Hayashi. “Notre position reste inchangée: nous continuerons d’appeler les parties concernées à procéder à son extradition”, a-t-il ajouté.Le Japon accuse Paul Watson d’être coresponsable de dommages et blessures à bord d’un navire baleinier japonais en 2010 dans le cadre d’une campagne menée par l’ONG Sea Shepherd.”Notice rouge annulée! Les baleiniers japonais ont été sur mon dos pendant 14 ans et depuis ma première arrestation à Francfort (Allemagne), en mai 2012″, a écrit mardi Paul Watson sur le site internet de sa fondation en faveur des océans, qui porte son nom.Un porte-parole d’Interpol, l’organisation internationale de police criminelle, a confirmé à l’AFP que la commission de contrôle des fichiers (CCF) avait “décidé d’effacer” cette notice rouge. “Ce n’est pas un jugement sur le fond du dossier, ou sur ces événements qui ont eu lieu en 2010, mais une décision basée sur les règles d’Interpol en matière de gestion des données”, a expliqué ce porte-parole.Interpol émet des notices rouges, qui constituent des demandes de localiser une personne suspecte et de procéder à son arrestation provisoire dans l’attente de son extradition, mais celles-ci n’ont pas le statut de mandat d’arrêt.Paul Watson, 74 ans, a été détenu au Groenland pendant cinq mois, avant que le Danemark ne rejette une demande d’extradition du Japon. Il a pu rentrer à Paris, où il vit depuis 10 ans, le 20 décembre dernier.

Aux îles Cook, les riches profondeurs du Pacifique aiguisent les appétits

Aux îles Cook, un navire de 1.000 tonnes explore les riches profondeurs du Pacifique à la recherche des minerais qu’elles recèlent et qui pourraient être exploitées.Bordées de lagons étincelants et de plages ornées de palmiers, les îles Cook, dans le Pacifique sud, ont ouvert leurs eaux territoriales à l’exploration minière. Des navires de recherche sillonnent les mers à la recherche de gisements de métaux pour les batteries, de terres rares et de minéraux critiques qui reposent dans les grands fonds  de l’Océan. L’Anuanua Moana mène des études pour l’exploitation minière en haute mer: une industrie pionnière que certains comparent à une ruée vers l’or des temps modernes et que d’autres qualifient de “folie” environnementale. L’AFP l’a visité dans le port d’Avatiu. “Les ressources sont estimées à une valeur potentielle d’environ 4 milliards de dollars (américains)”, a indiqué Hans Smit, le directeur général de Moana Mineral. Le navire parcourt depuis deux ans les eaux tropicales des îles Cook, à mi-chemin entre la Nouvelle-Zélande et Hawaï, recueillant des données pour convaincre les autorités de réglementation que l’exploitation minière en eaux profondes est sans danger.Aucune entreprise n’a encore commencé à exploiter commercialement les fonds marins.”Je veux commencer l’exploitation avant 2030″, explique M. Smit, dans le vrombissement de grues qui chargent des caisses en bois.Moana Minerals, filiale d’une société texane, détient des droits d’exploration sur 20.000 kilomètres carrés dans la zone économique exclusive (ZEE) des îles Cook.Selon des chercheurs australiens, il s’agit du gisement en nodules polymétalliques, sortes de galets riches en manganèse, cobalt, cuivre ou nickel, le plus important et le plus riche au monde au sein d’un territoire souverain”.Ces roches sont riches en minéraux comme le manganèse, le nickel, le cobalt, le cuivre ou les terres rares, prisées pour les véhicules électriques et le matériel électronique notamment.- “Lieu des dieux” -Mais les habitants des îles redoutent que l’exploitation minière puisse souiller leur précieux “moana”, ou océan, à tout jamais. “J’ai vu le navire dans le port”, lâche Ngametua Mamanu, un guide local de 55 ans.”Pourquoi avons-nous besoin de ce matériel pour détruire les océans?”Ana Walker, retraitée de 74 ans, craint qu’il soit pillé au profit d’intérêts étrangers.”On pense que ces gens viennent ici pour se faire de l’argent et pour nous laisser la pagaille” ensuite, confie-t-elle.”Si tout se passe bien, il y a du bon à en tirer. Sur le plan financier”, commente James Kora, 31 ans, perliculteur comme son père et son grand-père avant lui.Les yeux plissés face à l’intensité du soleil, le biologiste marin Teina Rongo observe de près depuis son petit bateau, les activités de l’Anuanua Moana.”Nous n’avons jamais voulu explorer le fond de l’océan, car nos ancêtres pensaient que c’était le lieu des dieux”, confie-t-il.”Nous n’y avons pas notre place”, ajoute-t-il. – “Pas de calendrier” -Les sociétés d’exploitation minière sont encore en train d’étudier le meilleur moyen pour aller chercher les nodules qui gisent à cinq kilomètres ou plus de profondeur.Leurs efforts se concentrent sur des machines de récolte robotisées qui ratissent le fond de l’océan.Pour l’environnementaliste Alanna Smith les chercheurs ont très peu de connaissances sur les grands fonds. “Nous servirions vraiment de cobayes pour l’industrie, en nous lançant en premier”, dit-elle, c’est un pas “très, très risqué”. Dans les années 1950, une expédition de recherche soutenue par les Etats-Unis a été la première à découvrir d'”énormes champs” de nodules polymétalliques dans le Pacifique Sud.Et des nuées de navires japonais, français, américains et russes ont ensuite parcouru la zone pour cartographier ce trésor.Mais l’exploitation minière en eaux profondes est restée une idée marginale jusqu’en 2018 environ, avant que l’industrie des véhicules électriques ne fasse grimper en flèche les prix des métaux.Une poignée d’entreprises se disputent désormais l’exploitation des quatre principaux gisements de nodules, dont trois se trouvent dans les eaux internationales, et le dernier dans les îles Cook.L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) se réunit ce mois-ci afin d’élaborer des règles pour l’exploitation de la “zone de fracture de Clipperton”, dans l’océan Pacifique.Jusqu’à présent, les îles Cook ont déclaré que leur approche de l’exploitation minière, même dans leurs propres eaux, serait étroitement “alignée” sur les règles de l’AIFM.Mais “nous ne fixons pas de calendrier pour le démarrage de cette activité”, a déclaré Edward Herman, de l’Autorité des minéraux des fonds marins des îles Cook, une agence publique.En juin, le président français Emmanuel Macron a estimé que c’était une “folie de lancer de l’action économique prédatrice qui va bousculer des grands fonds marins (…) quand nous n’y connaissons rien !”.Mais les îles Cook ont des amis puissants. Elles ont signé cette année un partenariat avec la Chine portant sur le commerce et l’exploitation minière sous-marine.

La Cour internationale de justice sur le point de rendre un avis majeur sur le climat

La plus haute juridiction de l’ONU va rendre mercredi un avis consultatif sans précédent sur les obligations légales des Etats pour freiner le changement climatique, avec une question clé: la responsabilité historique des grands pollueurs sera-t-elle engagée?C’est l’affaire la plus importante jamais entendue par la Cour internationale de justice, basée à La Haye, arguent les experts. “Je pense que cela peut réellement changer la donne dans le débat climatique actuel”, estime Ralph Regenvanu, ministre du Changement climatique du Vanuatu, l’archipel du Pacifique dont sont originaires les étudiants à l’origine de la procédure en 2019, depuis propulsée par un vote de l’Assemblée générale des Nations unies.”Cela fait 30 ans que nous subissons cette situation. Cela va changer le narratif, et c’est ce dont on a besoin”, a-t-il déclaré mardi à l’AFP.L’avis que rendront les juges à 15H00 (13H00 GMT), même s’il ne sera que consultatif, pourrait influencer et remodeler la justice climatique en inspirant des lois et des tribunaux dans le monde entier.”Le changement climatique n’est pas qu’un exercice académique… On le vit au quotidien”, a déclaré à l’AFP l’étudiant fidjien Vishal Prasad, 29 ans, qui a lancé la campagne avec d’autres étudiants de l’université du Pacifique Sud, au Vanuatu.L’avis de la CIJ est “potentiellement l’une des décisions juridiques les plus importantes de notre époque”, affirme Joie Chowdhury, avocate principale à l’ONG CIEL, qui soutient la procédure.Les Nations unies ont chargé les 15 juges de la CIJ de répondre à deux questions.Premièrement: quelles obligations les Etats ont-ils en vertu du droit international de protéger la Terre contre les émissions de gaz à effet de serre, majoritairement générées par la combustion du pétrole, du charbon et du gaz, pour les générations présentes et futures? Deuxièmement, quelles sont les conséquences juridiques de ces obligations pour les Etats dont les émissions ont causé des dommages environnementaux, en particulier envers les Etats insulaires vulnérables de faible altitude?La Cour a dû organiser les plus grandes audiences de son histoire, avec plus de 100 nations et groupes prenant la parole, en décembre au Palais de la Paix.Des pays et militants du climat, frustrés par la lenteur des processus de négociations habituels, se tournent de plus en plus vers les tribunaux – nationaux et internationaux – pour forcer entreprises et Etats à agir, avec déjà quelques décisions en leur faveur.Les COP annuelles ont certes permis d’infléchir les prévisions de réchauffement, mais encore très insuffisamment pour tenir l’objectif limite de 2°C, par rapport à l’ère préindustrielle, fixé par l’accord de Paris de 2015. Le monde en est déjà à au moins 1,3°C de réchauffement.- Disparaître sous les vagues -Comme David contre Goliath, le débat a opposé petits pays en développement et économies avancées. Les grands pollueurs, dont les Etats-Unis et l’Inde, ont mis en garde la Cour et défendu le processus politique existant des COP, par la Convention-cadre de l’ONU sur les changements climatiques – malgré ses insuffisances. Sans compter que les Etats-Unis se retirent justement de l’accord de Paris sous Donald Trump.Les petits pays réclament aussi le paiement de réparations aux pollueurs historiques, une demande inacceptable pour la plupart des pays riches.”Le principe cardinal est clair comme de l’eau de roche. Les Etats responsables sont tenus de réparer intégralement le préjudice qu’ils ont causé”, a déclaré Margaretha Wewerinke-Singh, du Vanuatu.Ces Etats exigent également un calendrier pour l’élimination des combustibles fossiles, des compensations monétaires le cas échéant ainsi que la reconnaissance des torts passés.”Bien que responsable de moins de 0,01% des émissions de gaz à effet de serre, sur la trajectoire actuelle des émissions, Tuvalu disparaîtra complètement sous les vagues qui clapotent sur nos côtes depuis des millénaires”, a déclaré Eselealofa Apinelu, représentant de l’archipel polynésien. Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas contraignants et les détracteurs affirment que les principaux pollueurs l’ignoreront.Mais le droit international se construit avec de tels avis, explique à l’AFP Andrew Raine, du département juridique de l’ONU Environnement. “Ils clarifient la manière dont le droit international s’applique à la crise climatique, ce qui a des répercussions sur les tribunaux nationaux, les processus législatifs et les débats publics.”

En Albanie, les fruits exotiques pour tenter de s’adapter au réchauffement climatique

Fruit du dragon, de la passion, goyave, kiwano… habitués aux climats tropicaux, ces fruits poussent désormais en Albanie où, résolus à s’arranger du réchauffement climatique, certains producteurs y voient les exportations de demain.Irakli Shkoza a 75 ans, un diplôme d’agronomie et une petite ferme à Divjaka, qui ressemblerait presque au Jardin d’Eden. Cherchant à s’adapter aux températures chaque année plus élevées, il a décidé il y a six ans de diversifier sa production.Il a d’abord fait venir les graines d’Afrique et d’Amérique et les a plantés sur son terrain d’environ deux hectares. Toutes se sont très bien adaptées au climat albanais.Nichée entre des terres agricoles et la côte adriatique, la région de Divjaka est considérée comme le grenier de l’Albanie, où poussent légumes et pastèques destinés tant au marché local qu’à l’export.Mais la hausse des températures couplée à un manque criant de main d’œuvre – l’Albanie a perdu 400.000 habitants en une décennie – pèsent sur les exploitations.Les fruits exotiques ont besoin de moins d’eau et d’entretien, explique Irakli Shkoza, leur coût de production est donc inférieur.Typiquement méditerranéen avec des étés chauds et sec et des hivers doux, le climat en Albanie a évolué sous le coup du réchauffement climatique. Les simulations des conditions climatiques futures projettent une augmentation de température pour les Balkans occidentaux de 3,5°C en cas d’émissions modérées de gaz à effet de serre jusqu’à 8,8°C pour le scénario à fortes émissions, d’ici la fin du XXIe siècle, soulignent dans leur étude sur les impacts du changement climatique sur l’agriculture les Balkans occidentaux deux chercheurs allemands, Daniel Müller et Max Hofmann.Les vagues de chaleur “endommageront probablement les rendements des cultures, en particulier en Albanie, où les températures moyennes sont les plus élevées pendant l’été”, écrivent-ils.Dans ce pays, la part de l’agriculture, la sylviculture et de la pêche dans le PIB en 2020 était de 19%.Les changements climatiques ne sont pas nécessairement une calamité, veut cependant croire Irakli Shkoza, selon qui il faut savoir s’adapter pour en tirer profit.”Les agriculteurs albanais doivent se mettre à produire largement ces cultures, le climat est favorable. Ces fruits sont très recherchés sur le marché européen, alors qu’ils viennent de loin, d’Amérique latine, d’Asie du Sud-Est, de Nouvelle-Zélande, d’Australie… “, explique l’agronome, soulignant que le voyage jusqu’en Europe a un coût, tant financier qu’en termes de fraîcheur.- “Moins chers, plus frais” -S’ils venaient d’Albanie, “ils coûteraient non seulement moins cher mais ils seraient plus frais”, estime aussi Altin Hila, un autre agronome qui a créé un musée du papillon à Divjaka.Les papayes que l’on trouve sur les marchés européens “sont récoltées encore vertes, puis apportées en Europe où elles mûrissent de façon artificielle. Ici, elles peuvent mûrir sur les arbres”, dit Vasil Nikolovski, un producteur originaire de Macédoine du Nord installé depuis quelques années à Divjaka.”L’Albanie a toutes les capacités pour répondre aux demandes du marché européen et réaliser un chiffre d’affaires de 100 à 200 millions d’euros”, espère-t-il.Irakli Shkoza a déjà réussi à mettre un pied sur le marché européen en exportant des fruits du dragon, de la passion et des pepinos – aussi appelé poire-melon, originaires d’Amérique latine.Récemment, en s’alliant à d’autres fermiers de sa région, il a pu exporter en Croatie 30 tonnes de kiwano – aussi appelé melon à cornes.”Et la récolte cette année s’annonce abondante”, se réjouit-il en regardant attentivement les bourgeons de ses fruits du dragon.A 55 km au sud de Divjaka, Lulzim Bullari cultive des kiwis. “Il ne faut pas se plaindre des températures élevées, ces deux dernières années, la production du kiwi a été une bénédiction”, explique-t-il au milieu de ses 40 hectares de ce fruit dont la culture est récente en Albanie et quasi exclusivement dédiée à l’exportation vers la Suisse et les Pays-Bas.Depuis peu, il s’est aussi mis à cultiver sur une quinzaine d’hectares une variété de figuiers originaire d’Afrique du Nord très résistant au climat hivernal doux.”La chance sourit aux audacieux et il faut courir pour l’attraper”, professe-t-il.

Dati renvoyée en procès: le président du tribunal judiciaire de Paris dénonce “l’opprobre” jetée sur les magistrats

Le président du tribunal judiciaire de Paris a dénoncé mercredi “l’opprobre jetée publiquement sur des magistrats” par la ministre de la Culture Rachida Dati après son renvoi en procès, aux côtés de l’ex-patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn, pour corruption et trafic d’influence.”Si toute personne peut librement apporter tout élément d’explication utile à l’appui de sa défense, au titre d’une prise de parole assurant le respect de sa présomption d’innocence, l’opprobre jetée publiquement sur des magistrats soumis au devoir de réserve et ne pouvant répondre à ces attaques, jette le discrédit sur l’autorité judiciaire et sape la confiance légitime des citoyens dans la justice”, a affirmé Peimane Ghaleh-Marzban dans un communiqué.Le président du tribunal a réagi après que l’ex-Garde des Sceaux de Nicolas Sarkozy, elle-même magistrate de formation, a dénoncé mardi soir sur LCI une “procédure émaillée d’incidents” et vilipendé des magistrats qui “marchent” sur les droits de la défense et perpétueraient des “atteintes graves” contre ces derniers.Elle a notamment mis en cause le procureur de la République financier qui, d’après elle, l’aurait assurée de son désaccord avec les charges portées contre elle lorsqu’il l’a “reçue deux heures trente dans son bureau” : “J’ai vu droit dans les yeux M. (Jean-François) Bohnert qui m’a dit que son parquet dysfonctionnait”.”Il doit être rappelé que tout justiciable a la possibilité de former un recours contre une décision de justice le concernant”, écrit le président du tribunal dans son communiqué.Mme Dati et M. Ghosn contestent les accusations dans ce dossier judiciaire instruit depuis 2019 à Paris et aux lourds enjeux politiques, Rachida Dati étant également une potentielle candidate à la mairie de Paris.La ministre, âgée de 59 ans, sera jugée pour recel d’abus de pouvoir et d’abus de confiance, corruption et trafic d’influence passifs par personne investie d’un mandat électif public au sein d’une organisation internationale, le Parlement européen.”Nous allons faire appel dès aujourd’hui de cette décision”, ont déclaré à l’AFP deux des avocats de Mme Dati, Olivier Baratelli et Olivier Pardo, dont l’un des nombreux recours sur la prescription des faits qu’ils allèguent a encore été écarté mi-juillet.Mme Dati est soupçonnée d’avoir perçu 900.000 euros entre 2010 et 2012 pour des prestations de conseil actées dans une convention d’honoraires signée le 28 octobre 2009 avec RNBV, filiale de l’alliance Renault-Nissan, mais sans avoir réellement travaillé, alors qu’elle était avocate et députée européenne (2009-2019).

Exploration minière sous-marine: un entrepreneur se réjouit du soutien de Trump

Aux îles Cook, dans le Pacifique Sud, la société Moana Minerals envisage de s’attaquer à l’exploitation minière en eaux profondes d’ici 2030, encouragée par le récent soutien de Donald Trump à ce secteur très critiqué.Moana Minerals souhaite extraire des nodules polymétalliques, sortes de galets posés sur les fonds marins.Ils sont riches en minéraux comme le manganèse, le nickel, le cobalt, le cuivre ou les terres rares, prisées pour les véhicules électriques, panneaux solaires, mais aussi smartphones et ordinateurs portables.Le lancement de l’exploitation a été entravé par des appels de plus en plus nombreux à l’interdire, jusqu’à ce que son impact sur l’environnement soit clairement établi scientifiquement.Mais le patron de Moana Minerals, Hans Smit, a déclaré qu’un nouvel élan était en train de se créer, stimulé par le soutien du président américain Trump.Ce dernier a signé en début d’année un décret visant à “libérer” les ressources minières logées dans les profondeurs des océans.”Ce qu’il a fait, c’est charger ses collaborateurs de se pencher sérieusement sur la question”, lâche M. Smit.Les Etats-Unis et la Chine ont tous deux manifesté un regain d’intérêt pour l’exploitation minière en eaux profondes, qui pourrait leur offrir un approvisionnement en minéraux critiques les protégeant de futures perturbations commerciales.Et Donald Trump souhaite vivement affaiblir la mainmise de la Chine sur les terres rares.- Pas d’approbation -Les îles Cook, qui revendiquent l’un des plus grands gisements de nodules polymétalliques au monde, ont signé au début de l’année un accord controversé de coopération avec la Chine dans le domaine de l’exploitation minière en eaux profondes.”Les gens qui crient après les îles Cook parce qu’elles ont discuté avec les Chinois, j’ai quelque chose de très simple à leur dire: si vous voulez contrer les Chinois, bougez-vous le cul et agissez de manière proactive”, lance Hans Smit.Les Kiribati, voisines des îles Cook dans le Pacifique, envisagent également de conclure un accord avec la Chine pour l’exploitation des ressources minières en eaux profondes.L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) régit l’exploitation minière en eaux profondes dans les eaux internationales et se réunit ce mois-ci afin d’élaborer des règles pour l’exploitation de la “zone de fracture de Clipperton”, dans l’océan Pacifique.La société canadienne The Metals Company a indiqué qu’elle pourrait aller de l’avant et commencer à exploiter les eaux internationales sans l’approbation de l’Autorité.A la place, elle a demandé un permis d’exploitation minière en vertu de la réactivation par Donald Trump d’une loi américaine de 1980.”Je peux comprendre pourquoi la Metals Company a agi de la sorte”, a déclaré M. Smit.Jusqu’à présent, les autorités des îles Cook ont fait savoir que leur approche de l’exploitation minière, même dans leurs propres eaux, serait étroitement “alignée” sur les règles de l’AIFM.Mais “nous ne fixons pas de calendrier pour le démarrage de cette activité”, a déclaré Edward Herman, de l’Autorité des minéraux des fonds marins des îles Cook, une agence publique.”Je pense que les délais seront fixés en fonction des résultats de la recherche, de la science et des données”, a-t-il ajouté.

Le décret autorisant la retraite progressive dès 60 ans publié au JO

Le décret abaissant le droit à la retraite progressive à 60 ans contre 62 ans actuellement a été publié mercredi au Journal officiel avec une entrée en vigueur au 1er septembre.Sont concernés les assurés relevant du régime général, des régimes spéciaux et notamment du régime de la fonction publique de l’Etat, du régime des salariés et non-salariés agricoles et des régimes d’assurance vieillesse des professions libérales et des avocats, précise le décret. Ces dispositions “s’appliqueront aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2025″, peut-on lire. Cette mesure est issue d’une série d’accords signés à l’automne 2024 entre le Medef, côté patronal, la CFDT et la CFTC, côté syndicats, dont l’un portait sur l’emploi des seniors et prévoyait notamment de favoriser les retraites progressives, peu répandues. Ce dispositif, qui devient donc accessible à partir de 60 ans, permet aux salariés de bénéficier d’une fraction de leur retraite tout en exerçant une activité professionnelle réduite, afin de continuer à améliorer leurs droits à la retraite. Pour en profiter, le salarié devra avoir cotisé pour la retraite pendant au moins 150 trimestres.”La fin de carrière ne doit plus être angoissante et strictement binaire – temps plein ou rien – mais au contraire s’adapter aux envies et besoins de chacun tout en favorisant le maintien dans l’emploi le plus longtemps possible”, a estimé auprès de l’AFP la ministre chargée du Travail et de l’Emploi Astrid Panosyan-Bouvet. “L’abaissement à 60 ans de l’âge d’accès à la retraite progressive constitue une avancée majeure en ce sens”, a-t-elle ajouté. 

Un désastre climatique inconstitutionnel? De jeunes Américains saisissent la justice

L’un veut forer du pétrole “à tout-va”, les autres réclament “vie, liberté et quête du bonheur”: saisi par de jeunes Américains, un tribunal du Montana devra juger si la politique climatosceptique de Donald Trump est conforme à ces principes fondateurs des Etats-Unis.Devant cet Etat du nord-ouest, ce mouvement de la jeunesse compte faire valoir à la rentrée que les projets du président favorables aux combustibles fossiles vont non seulement accélérer le changement climatique, mais aussi violer leurs droits fondamentaux protégés par la Constitution.”C’est angoissant de penser à mon avenir”, confie à l’AFP Eva Lighthiser, à la tête de ce groupe, lors d’une manifestation devant le Congrès dans la capitale Washington.”Le climat est devenu imprévisible, il est déstabilisé et ça ne va faire qu’empirer. C’est très difficile à accepter pour quelqu’un qui entre tout juste dans l’âge adulte”, poursuit cette jeune femme de 19 ans, originaire de Livingston, ville du Montana située près du célèbre parc national de Yellowstone, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.Avec des cas similaires à travers le monde, jusqu’à la Cour internationale de justice qui doit rendre un avis très attendu mercredi, l’affaire Lighthiser contre Trump est l’une des plus connues. Juridiquement, elle s’appuie sur le Cinquième amendement qui interdit à l’Etat fédéral de priver la population de ses droits fondamentaux sans procédure légale régulière.Dans cette affaire, l’association Our Children’s Trust représente 22 jeunes, forts de deux succès récents au niveau local.- “Profiter de son existence” -Dans ce même Montana par exemple, un juge s’était rangé en 2023 du côté de jeunes plaignants qui reprochaient aux autorités locales d’avoir fait fi de l’impact environnemental lors de la délivrance de permis de construire. Un an plus tard, d’autres jeunes étaient parvenus à un accord pour accélérer la décarbonation du secteur des transports à Hawaï.En cause aujourd’hui: les décrets du président Trump qui a déclaré l'”urgence énergétique nationale”, tant pour accélérer la production de combustibles fossiles que pour bloquer les initiatives liées aux énergies renouvelables. Représentant Our Children’s Trust, Me Mat Dos Santos estime que la Cour suprême majoritairement conservatrice et prompte à défendre le “droit à la vie” pour restreindre l’accès à l’avortement, devrait l'”étendre aux enfants vivants”. Ce principe “signifie que chacun a le droit de profiter de son existence sur Terre”.Fait inhabituel, 19 procureurs locaux ont demandé à intervenir dans la procédure pour appuyer l’Etat fédéral visé par la plainte. L’affaire est donc prise au sérieux, observe Me Dos Santos.Originaire du “Montana rural” où les habitants “accordent beaucoup d’importance à l’environnement naturel”, Eva Lighthiser raconte une courte vie déjà marquée par un ciel enfumé, des inondations incessantes et un déménagement contraint par des raisons climatiques. Envisageant d’étudier les sciences de l’environnement, elle dit souffrir d’anxiété et de dépression.- “Parcours du combattant” -Comme Joseph Lee, étudiant de 19 ans présent à la manifestation et qui, face à la menace d’une catastrophe climatique, s’interroge sur la perspective de fonder une famille. Ayant grandi près d’une raffinerie de pétrole en Californie, il a, enfant, souffert d’asthme aigu. Pour échapper à la pollution, sa famille a déménagé en Caroline du Nord, où elle a dû faire face aux inondations.L’initiative des jeunes contre Donald Trump s’inscrit dans la lignée des batailles judiciaires sur le mariage interracial, la déségrégation ou encore le droit à l’avortement, constate Patrick Parenteau, professeur de droit de l’environnement à la Vermont Law School. Mais il reste sceptique, avec une Cour suprême particulièrement conservatrice qui risque de rejeter l’affaire au bout du processus judiciaire.”Les plaignants savent que ce sera un parcours du combattant”, dit à l’AFP Patrick Parenteau. “Mais le fait est qu’ils se doivent d’essayer”.D’autres juristes ne voient pas ces initiatives du même oeil. Pour Jonathan Adler, professeur de droit à l’université William & Mary, il s’agit surtout de militantisme politique tapageur qui repose sur une “vision très large et sans fondement” du pouvoir des juges.”Le changement climatique est un problème sérieux”, souligne l’universitaire à l’AFP. “Mais les stratégies juridiques les plus solides ne sont pas celles qui sont conçues pour faire beaucoup de bruit”.

La Cour internationale de justice va rendre un avis majeur sur le climat

La plus haute juridiction de l’ONU va rendre mercredi un avis consultatif sans précédent sur les obligations légales des Etats pour freiner le changement climatique, avec une question clé: la responsabilité historique des grands pollueurs sera-t-elle engagée?C’est l’affaire la plus importante jamais entendue par la Cour internationale de justice, basée à La Haye, arguent les experts. Elle a été lancée en 2019 par des étudiants d’un petit archipel du Pacifique, Vanuatu, et propulsée par un vote de l’Assemblée générale des Nations unies.L’avis que rendront les juges à 15H00 (13H00 GMT), même s’il ne sera que consultatif, pourrait influencer et remodeler la justice climatique en inspirant des lois et des tribunaux dans le monde entier.”Le changement climatique n’est pas qu’un exercice académique… On le vit au quotidien”, a déclaré à l’AFP l’étudiant fidjien Vishal Prasad, 29 ans, qui a lancé la campagne avec d’autres étudiants de l’université du Pacifique Sud, au Vanuatu.L’avis de la CIJ est “potentiellement l’une des décisions juridiques les plus importantes de notre époque”, affirme Joie Chowdhury, avocate principale à l’ONG CIEL, qui soutient la procédure.Les Nations unies ont chargé les 15 juges de la CIJ de répondre à deux questions.Premièrement: quelles obligations les Etats ont-ils en vertu du droit international de protéger la Terre contre les émissions de gaz à effet de serre, majoritairement générées par la combustion du pétrole, du charbon et du gaz, pour les générations présentes et futures? Deuxièmement, quelles sont les conséquences juridiques de ces obligations pour les Etats dont les émissions ont causé des dommages environnementaux, en particulier envers les Etats insulaires vulnérables de faible altitude?La Cour a dû organiser les plus grandes audiences de son histoire, en décembre au Palais de la Paix.Des pays et militants du climat, frustrés par la lenteur des processus de négociations habituels, se tournent ainsi de plus en plus vers les tribunaux – nationaux et internationaux – pour forcer entreprises et Etats à agir, avec déjà quelques décisions en leur faveur.Les COP annuelles ont certes permis d’infléchir les prévisions de réchauffement, mais encore très insuffisamment pour tenir l’objectif limite de 2°C, par rapport à l’ère préindustrielle, fixé par l’accord de Paris de 2015. Le monde en est déjà à au moins 1,3°C de réchauffement.- Disparaître sous les vagues -Comme David contre Goliath, le débat a opposé petits pays en développement et économies avancées. Les grands pollueurs, dont les Etats-Unis et l’Inde, ont mis en garde la Cour et défendu le processus politique existant des COP, par la Convention-cadre de l’ONU sur les changements climatiques — malgré ses insuffisances. Sans compter que les Etats-Unis se retirent justement de l’accord de Paris sous Donald Trump.Les petits pays réclament aussi le paiement de réparations aux pollueurs historiques, une demande inacceptable pour la plupart des pays riches.”Le principe cardinal est clair comme de l’eau de roche. Les Etats responsables sont tenus de réparer intégralement le préjudice qu’ils ont causé”, a déclaré Margaretha Wewerinke-Singh, du Vanuatu.Ces Etats exigent également un calendrier pour l’élimination des combustibles fossiles, des compensations monétaires le cas échéant ainsi que la reconnaissance des torts passés.”Bien que responsable de moins de 0,01% des émissions de gaz à effet de serre, sur la trajectoire actuelle des émissions, Tuvalu disparaîtra complètement sous les vagues qui clapotent sur nos côtes depuis des millénaires”, a déclaré Eselealofa Apinelu, représentant de l’archipel polynésien. Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas contraignants et les détracteurs affirment que les principaux pollueurs l’ignoreront.Mais le droit international se construit avec de tels avis, explique à l’AFP Andrew Raine, du département juridique de l’ONU Environnement. “Ils clarifient la manière dont le droit international s’applique à la crise climatique, ce qui a des répercussions sur les tribunaux nationaux, les processus législatifs et les débats publics”.