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En Albanie, les fruits exotiques pour tenter de s’adapter au réchauffement climatique

Fruit du dragon, de la passion, goyave, kiwano… habitués aux climats tropicaux, ces fruits poussent désormais en Albanie où, résolus à s’arranger du réchauffement climatique, certains producteurs y voient les exportations de demain.Irakli Shkoza a 75 ans, un diplôme d’agronomie et une petite ferme à Divjaka, qui ressemblerait presque au Jardin d’Eden. Cherchant à s’adapter aux températures chaque année plus élevées, il a décidé il y a six ans de diversifier sa production.Il a d’abord fait venir les graines d’Afrique et d’Amérique et les a plantés sur son terrain d’environ deux hectares. Toutes se sont très bien adaptées au climat albanais.Nichée entre des terres agricoles et la côte adriatique, la région de Divjaka est considérée comme le grenier de l’Albanie, où poussent légumes et pastèques destinés tant au marché local qu’à l’export.Mais la hausse des températures couplée à un manque criant de main d’Å“uvre – l’Albanie a perdu 400.000 habitants en une décennie – pèsent sur les exploitations.Les fruits exotiques ont besoin de moins d’eau et d’entretien, explique Irakli Shkoza, leur coût de production est donc inférieur.Typiquement méditerranéen avec des étés chauds et sec et des hivers doux, le climat en Albanie a évolué sous le coup du réchauffement climatique. Les simulations des conditions climatiques futures projettent une augmentation de température pour les Balkans occidentaux de 3,5°C en cas d’émissions modérées de gaz à effet de serre jusqu’à 8,8°C pour le scénario à fortes émissions, d’ici la fin du XXIe siècle, soulignent dans leur étude sur les impacts du changement climatique sur l’agriculture les Balkans occidentaux deux chercheurs allemands, Daniel Müller et Max Hofmann.Les vagues de chaleur “endommageront probablement les rendements des cultures, en particulier en Albanie, où les températures moyennes sont les plus élevées pendant l’été”, écrivent-ils.Dans ce pays, la part de l’agriculture, la sylviculture et de la pêche dans le PIB en 2020 était de 19%.Les changements climatiques ne sont pas nécessairement une calamité, veut cependant croire Irakli Shkoza, selon qui il faut savoir s’adapter pour en tirer profit.”Les agriculteurs albanais doivent se mettre à produire largement ces cultures, le climat est favorable. Ces fruits sont très recherchés sur le marché européen, alors qu’ils viennent de loin, d’Amérique latine, d’Asie du Sud-Est, de Nouvelle-Zélande, d’Australie… “, explique l’agronome, soulignant que le voyage jusqu’en Europe a un coût, tant financier qu’en termes de fraîcheur.- “Moins chers, plus frais” -S’ils venaient d’Albanie, “ils coûteraient non seulement moins cher mais ils seraient plus frais”, estime aussi Altin Hila, un autre agronome qui a créé un musée du papillon à Divjaka.Les papayes que l’on trouve sur les marchés européens “sont récoltées encore vertes, puis apportées en Europe où elles mûrissent de façon artificielle. Ici, elles peuvent mûrir sur les arbres”, dit Vasil Nikolovski, un producteur originaire de Macédoine du Nord installé depuis quelques années à Divjaka.”L’Albanie a toutes les capacités pour répondre aux demandes du marché européen et réaliser un chiffre d’affaires de 100 à 200 millions d’euros”, espère-t-il.Irakli Shkoza a déjà réussi à mettre un pied sur le marché européen en exportant des fruits du dragon, de la passion et des pepinos – aussi appelé poire-melon, originaires d’Amérique latine.Récemment, en s’alliant à d’autres fermiers de sa région, il a pu exporter en Croatie 30 tonnes de kiwano – aussi appelé melon à cornes.”Et la récolte cette année s’annonce abondante”, se réjouit-il en regardant attentivement les bourgeons de ses fruits du dragon.A 55 km au sud de Divjaka, Lulzim Bullari cultive des kiwis. “Il ne faut pas se plaindre des températures élevées, ces deux dernières années, la production du kiwi a été une bénédiction”, explique-t-il au milieu de ses 40 hectares de ce fruit dont la culture est récente en Albanie et quasi exclusivement dédiée à l’exportation vers la Suisse et les Pays-Bas.Depuis peu, il s’est aussi mis à cultiver sur une quinzaine d’hectares une variété de figuiers originaire d’Afrique du Nord très résistant au climat hivernal doux.”La chance sourit aux audacieux et il faut courir pour l’attraper”, professe-t-il.

Dati renvoyée en procès: le président du tribunal judiciaire de Paris dénonce “l’opprobre” jetée sur les magistrats

Le président du tribunal judiciaire de Paris a dénoncé mercredi “l’opprobre jetée publiquement sur des magistrats” par la ministre de la Culture Rachida Dati après son renvoi en procès, aux côtés de l’ex-patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn, pour corruption et trafic d’influence.”Si toute personne peut librement apporter tout élément d’explication utile à l’appui de sa défense, au titre d’une prise de parole assurant le respect de sa présomption d’innocence, l’opprobre jetée publiquement sur des magistrats soumis au devoir de réserve et ne pouvant répondre à ces attaques, jette le discrédit sur l’autorité judiciaire et sape la confiance légitime des citoyens dans la justice”, a affirmé Peimane Ghaleh-Marzban dans un communiqué.Le président du tribunal a réagi après que l’ex-Garde des Sceaux de Nicolas Sarkozy, elle-même magistrate de formation, a dénoncé mardi soir sur LCI une “procédure émaillée d’incidents” et vilipendé des magistrats qui “marchent” sur les droits de la défense et perpétueraient des “atteintes graves” contre ces derniers.Elle a notamment mis en cause le procureur de la République financier qui, d’après elle, l’aurait assurée de son désaccord avec les charges portées contre elle lorsqu’il l’a “reçue deux heures trente dans son bureau” : “J’ai vu droit dans les yeux M. (Jean-François) Bohnert qui m’a dit que son parquet dysfonctionnait”.”Il doit être rappelé que tout justiciable a la possibilité de former un recours contre une décision de justice le concernant”, écrit le président du tribunal dans son communiqué.Mme Dati et M. Ghosn contestent les accusations dans ce dossier judiciaire instruit depuis 2019 à Paris et aux lourds enjeux politiques, Rachida Dati étant également une potentielle candidate à la mairie de Paris.La ministre, âgée de 59 ans, sera jugée pour recel d’abus de pouvoir et d’abus de confiance, corruption et trafic d’influence passifs par personne investie d’un mandat électif public au sein d’une organisation internationale, le Parlement européen.”Nous allons faire appel dès aujourd’hui de cette décision”, ont déclaré à l’AFP deux des avocats de Mme Dati, Olivier Baratelli et Olivier Pardo, dont l’un des nombreux recours sur la prescription des faits qu’ils allèguent a encore été écarté mi-juillet.Mme Dati est soupçonnée d’avoir perçu 900.000 euros entre 2010 et 2012 pour des prestations de conseil actées dans une convention d’honoraires signée le 28 octobre 2009 avec RNBV, filiale de l’alliance Renault-Nissan, mais sans avoir réellement travaillé, alors qu’elle était avocate et députée européenne (2009-2019).

Exploration minière sous-marine: un entrepreneur se réjouit du soutien de Trump

Aux îles Cook, dans le Pacifique Sud, la société Moana Minerals envisage de s’attaquer à l’exploitation minière en eaux profondes d’ici 2030, encouragée par le récent soutien de Donald Trump à ce secteur très critiqué.Moana Minerals souhaite extraire des nodules polymétalliques, sortes de galets posés sur les fonds marins.Ils sont riches en minéraux comme le manganèse, le nickel, le cobalt, le cuivre ou les terres rares, prisées pour les véhicules électriques, panneaux solaires, mais aussi smartphones et ordinateurs portables.Le lancement de l’exploitation a été entravé par des appels de plus en plus nombreux à l’interdire, jusqu’à ce que son impact sur l’environnement soit clairement établi scientifiquement.Mais le patron de Moana Minerals, Hans Smit, a déclaré qu’un nouvel élan était en train de se créer, stimulé par le soutien du président américain Trump.Ce dernier a signé en début d’année un décret visant à “libérer” les ressources minières logées dans les profondeurs des océans.”Ce qu’il a fait, c’est charger ses collaborateurs de se pencher sérieusement sur la question”, lâche M. Smit.Les Etats-Unis et la Chine ont tous deux manifesté un regain d’intérêt pour l’exploitation minière en eaux profondes, qui pourrait leur offrir un approvisionnement en minéraux critiques les protégeant de futures perturbations commerciales.Et Donald Trump souhaite vivement affaiblir la mainmise de la Chine sur les terres rares.- Pas d’approbation -Les îles Cook, qui revendiquent l’un des plus grands gisements de nodules polymétalliques au monde, ont signé au début de l’année un accord controversé de coopération avec la Chine dans le domaine de l’exploitation minière en eaux profondes.”Les gens qui crient après les îles Cook parce qu’elles ont discuté avec les Chinois, j’ai quelque chose de très simple à leur dire: si vous voulez contrer les Chinois, bougez-vous le cul et agissez de manière proactive”, lance Hans Smit.Les Kiribati, voisines des îles Cook dans le Pacifique, envisagent également de conclure un accord avec la Chine pour l’exploitation des ressources minières en eaux profondes.L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) régit l’exploitation minière en eaux profondes dans les eaux internationales et se réunit ce mois-ci afin d’élaborer des règles pour l’exploitation de la “zone de fracture de Clipperton”, dans l’océan Pacifique.La société canadienne The Metals Company a indiqué qu’elle pourrait aller de l’avant et commencer à exploiter les eaux internationales sans l’approbation de l’Autorité.A la place, elle a demandé un permis d’exploitation minière en vertu de la réactivation par Donald Trump d’une loi américaine de 1980.”Je peux comprendre pourquoi la Metals Company a agi de la sorte”, a déclaré M. Smit.Jusqu’à présent, les autorités des îles Cook ont fait savoir que leur approche de l’exploitation minière, même dans leurs propres eaux, serait étroitement “alignée” sur les règles de l’AIFM.Mais “nous ne fixons pas de calendrier pour le démarrage de cette activité”, a déclaré Edward Herman, de l’Autorité des minéraux des fonds marins des îles Cook, une agence publique.”Je pense que les délais seront fixés en fonction des résultats de la recherche, de la science et des données”, a-t-il ajouté.

Le décret autorisant la retraite progressive dès 60 ans publié au JO

Le décret abaissant le droit à la retraite progressive à 60 ans contre 62 ans actuellement a été publié mercredi au Journal officiel avec une entrée en vigueur au 1er septembre.Sont concernés les assurés relevant du régime général, des régimes spéciaux et notamment du régime de la fonction publique de l’Etat, du régime des salariés et non-salariés agricoles et des régimes d’assurance vieillesse des professions libérales et des avocats, précise le décret. Ces dispositions “s’appliqueront aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2025″, peut-on lire. Cette mesure est issue d’une série d’accords signés à l’automne 2024 entre le Medef, côté patronal, la CFDT et la CFTC, côté syndicats, dont l’un portait sur l’emploi des seniors et prévoyait notamment de favoriser les retraites progressives, peu répandues. Ce dispositif, qui devient donc accessible à partir de 60 ans, permet aux salariés de bénéficier d’une fraction de leur retraite tout en exerçant une activité professionnelle réduite, afin de continuer à améliorer leurs droits à la retraite. Pour en profiter, le salarié devra avoir cotisé pour la retraite pendant au moins 150 trimestres.”La fin de carrière ne doit plus être angoissante et strictement binaire – temps plein ou rien – mais au contraire s’adapter aux envies et besoins de chacun tout en favorisant le maintien dans l’emploi le plus longtemps possible”, a estimé auprès de l’AFP la ministre chargée du Travail et de l’Emploi Astrid Panosyan-Bouvet. “L’abaissement à 60 ans de l’âge d’accès à la retraite progressive constitue une avancée majeure en ce sens”, a-t-elle ajouté. 

Un désastre climatique inconstitutionnel? De jeunes Américains saisissent la justice

L’un veut forer du pétrole “à tout-va”, les autres réclament “vie, liberté et quête du bonheur”: saisi par de jeunes Américains, un tribunal du Montana devra juger si la politique climatosceptique de Donald Trump est conforme à ces principes fondateurs des Etats-Unis.Devant cet Etat du nord-ouest, ce mouvement de la jeunesse compte faire valoir à la rentrée que les projets du président favorables aux combustibles fossiles vont non seulement accélérer le changement climatique, mais aussi violer leurs droits fondamentaux protégés par la Constitution.”C’est angoissant de penser à mon avenir”, confie à l’AFP Eva Lighthiser, à la tête de ce groupe, lors d’une manifestation devant le Congrès dans la capitale Washington.”Le climat est devenu imprévisible, il est déstabilisé et ça ne va faire qu’empirer. C’est très difficile à accepter pour quelqu’un qui entre tout juste dans l’âge adulte”, poursuit cette jeune femme de 19 ans, originaire de Livingston, ville du Montana située près du célèbre parc national de Yellowstone, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.Avec des cas similaires à travers le monde, jusqu’à la Cour internationale de justice qui doit rendre un avis très attendu mercredi, l’affaire Lighthiser contre Trump est l’une des plus connues. Juridiquement, elle s’appuie sur le Cinquième amendement qui interdit à l’Etat fédéral de priver la population de ses droits fondamentaux sans procédure légale régulière.Dans cette affaire, l’association Our Children’s Trust représente 22 jeunes, forts de deux succès récents au niveau local.- “Profiter de son existence” -Dans ce même Montana par exemple, un juge s’était rangé en 2023 du côté de jeunes plaignants qui reprochaient aux autorités locales d’avoir fait fi de l’impact environnemental lors de la délivrance de permis de construire. Un an plus tard, d’autres jeunes étaient parvenus à un accord pour accélérer la décarbonation du secteur des transports à Hawaï.En cause aujourd’hui: les décrets du président Trump qui a déclaré l'”urgence énergétique nationale”, tant pour accélérer la production de combustibles fossiles que pour bloquer les initiatives liées aux énergies renouvelables. Représentant Our Children’s Trust, Me Mat Dos Santos estime que la Cour suprême majoritairement conservatrice et prompte à défendre le “droit à la vie” pour restreindre l’accès à l’avortement, devrait l'”étendre aux enfants vivants”. Ce principe “signifie que chacun a le droit de profiter de son existence sur Terre”.Fait inhabituel, 19 procureurs locaux ont demandé à intervenir dans la procédure pour appuyer l’Etat fédéral visé par la plainte. L’affaire est donc prise au sérieux, observe Me Dos Santos.Originaire du “Montana rural” où les habitants “accordent beaucoup d’importance à l’environnement naturel”, Eva Lighthiser raconte une courte vie déjà marquée par un ciel enfumé, des inondations incessantes et un déménagement contraint par des raisons climatiques. Envisageant d’étudier les sciences de l’environnement, elle dit souffrir d’anxiété et de dépression.- “Parcours du combattant” -Comme Joseph Lee, étudiant de 19 ans présent à la manifestation et qui, face à la menace d’une catastrophe climatique, s’interroge sur la perspective de fonder une famille. Ayant grandi près d’une raffinerie de pétrole en Californie, il a, enfant, souffert d’asthme aigu. Pour échapper à la pollution, sa famille a déménagé en Caroline du Nord, où elle a dû faire face aux inondations.L’initiative des jeunes contre Donald Trump s’inscrit dans la lignée des batailles judiciaires sur le mariage interracial, la déségrégation ou encore le droit à l’avortement, constate Patrick Parenteau, professeur de droit de l’environnement à la Vermont Law School. Mais il reste sceptique, avec une Cour suprême particulièrement conservatrice qui risque de rejeter l’affaire au bout du processus judiciaire.”Les plaignants savent que ce sera un parcours du combattant”, dit à l’AFP Patrick Parenteau. “Mais le fait est qu’ils se doivent d’essayer”.D’autres juristes ne voient pas ces initiatives du même oeil. Pour Jonathan Adler, professeur de droit à l’université William & Mary, il s’agit surtout de militantisme politique tapageur qui repose sur une “vision très large et sans fondement” du pouvoir des juges.”Le changement climatique est un problème sérieux”, souligne l’universitaire à l’AFP. “Mais les stratégies juridiques les plus solides ne sont pas celles qui sont conçues pour faire beaucoup de bruit”.

La Cour internationale de justice va rendre un avis majeur sur le climat

La plus haute juridiction de l’ONU va rendre mercredi un avis consultatif sans précédent sur les obligations légales des Etats pour freiner le changement climatique, avec une question clé: la responsabilité historique des grands pollueurs sera-t-elle engagée?C’est l’affaire la plus importante jamais entendue par la Cour internationale de justice, basée à La Haye, arguent les experts. Elle a été lancée en 2019 par des étudiants d’un petit archipel du Pacifique, Vanuatu, et propulsée par un vote de l’Assemblée générale des Nations unies.L’avis que rendront les juges à 15H00 (13H00 GMT), même s’il ne sera que consultatif, pourrait influencer et remodeler la justice climatique en inspirant des lois et des tribunaux dans le monde entier.”Le changement climatique n’est pas qu’un exercice académique… On le vit au quotidien”, a déclaré à l’AFP l’étudiant fidjien Vishal Prasad, 29 ans, qui a lancé la campagne avec d’autres étudiants de l’université du Pacifique Sud, au Vanuatu.L’avis de la CIJ est “potentiellement l’une des décisions juridiques les plus importantes de notre époque”, affirme Joie Chowdhury, avocate principale à l’ONG CIEL, qui soutient la procédure.Les Nations unies ont chargé les 15 juges de la CIJ de répondre à deux questions.Premièrement: quelles obligations les Etats ont-ils en vertu du droit international de protéger la Terre contre les émissions de gaz à effet de serre, majoritairement générées par la combustion du pétrole, du charbon et du gaz, pour les générations présentes et futures? Deuxièmement, quelles sont les conséquences juridiques de ces obligations pour les Etats dont les émissions ont causé des dommages environnementaux, en particulier envers les Etats insulaires vulnérables de faible altitude?La Cour a dû organiser les plus grandes audiences de son histoire, en décembre au Palais de la Paix.Des pays et militants du climat, frustrés par la lenteur des processus de négociations habituels, se tournent ainsi de plus en plus vers les tribunaux – nationaux et internationaux – pour forcer entreprises et Etats à agir, avec déjà quelques décisions en leur faveur.Les COP annuelles ont certes permis d’infléchir les prévisions de réchauffement, mais encore très insuffisamment pour tenir l’objectif limite de 2°C, par rapport à l’ère préindustrielle, fixé par l’accord de Paris de 2015. Le monde en est déjà à au moins 1,3°C de réchauffement.- Disparaître sous les vagues -Comme David contre Goliath, le débat a opposé petits pays en développement et économies avancées. Les grands pollueurs, dont les Etats-Unis et l’Inde, ont mis en garde la Cour et défendu le processus politique existant des COP, par la Convention-cadre de l’ONU sur les changements climatiques — malgré ses insuffisances. Sans compter que les Etats-Unis se retirent justement de l’accord de Paris sous Donald Trump.Les petits pays réclament aussi le paiement de réparations aux pollueurs historiques, une demande inacceptable pour la plupart des pays riches.”Le principe cardinal est clair comme de l’eau de roche. Les Etats responsables sont tenus de réparer intégralement le préjudice qu’ils ont causé”, a déclaré Margaretha Wewerinke-Singh, du Vanuatu.Ces Etats exigent également un calendrier pour l’élimination des combustibles fossiles, des compensations monétaires le cas échéant ainsi que la reconnaissance des torts passés.”Bien que responsable de moins de 0,01% des émissions de gaz à effet de serre, sur la trajectoire actuelle des émissions, Tuvalu disparaîtra complètement sous les vagues qui clapotent sur nos côtes depuis des millénaires”, a déclaré Eselealofa Apinelu, représentant de l’archipel polynésien. Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas contraignants et les détracteurs affirment que les principaux pollueurs l’ignoreront.Mais le droit international se construit avec de tels avis, explique à l’AFP Andrew Raine, du département juridique de l’ONU Environnement. “Ils clarifient la manière dont le droit international s’applique à la crise climatique, ce qui a des répercussions sur les tribunaux nationaux, les processus législatifs et les débats publics”.

TDAH: essor des psychostimulants en France, entre rattrapage et prudence

La prescription de médicaments pour traiter le trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) progresse en France, entre bénéfices réels et craintes de dérives autour de ce trouble du neurodéveloppement longtemps méconnu dans le pays.Connu sous le nom de Ritaline, le méthylphénidate, psychostimulant utilisé pour le réguler, a vu ses prescriptions bondir de 154% en France entre 2020 et 2024, selon les bases de données de l’assurance maladie analysées par l’AFP. Classés dans la catégorie des stupéfiants, ces médicaments stimulent le système nerveux central en contrôlant les principaux symptômes de ce trouble: déficit d’attention, hyperactivité et impulsivité.Pour le professeur de pédopsychiatrie Olivier Bonnot, qui a présidé un groupe de travail dédié, à la Haute autorité de santé (HAS), “ils comptent parmi les médicaments les plus efficaces qui existent”.De mieux en mieux dépisté grâce à une meilleure reconnaissance des troubles neurodéveloppementaux, le TDAH concernerait dans le monde environ 6% des moins de 18 ans et 2,5% des adultes, avec des symptômes pouvant varier tout au long de la vie.”Ce n’est pas comme un virus qu’on attrape ou pas, mais plutôt comme une tension trop élevée: quand les symptômes atteignent un certain niveau, ils doivent être traités”, dit l’AFP le président de la Fédération mondiale du TDAH, le professeur américain Stephen Faraone.- “Je vis très bien avec” -Aux États-Unis, où les diagnostics et les traitements de TDAH sont plus fréquents, des voix se sont élevées pour critiquer une approche trop médicalisée. Environ la moitié des jeunes (3-17 ans) américains diagnostiqués recevaient un traitement médicamenteux en 2022, selon une enquête nationale sur la santé des enfants, contre 10% en France, selon la Haute Autorité de Santé.”Il y a eu un amalgame avec la situation américaine qui a contribué à diaboliser la Ritaline. Des parents ont été accusés de droguer leurs enfants et certains subissent encore des réflexions de pharmaciens”, regrette Claudine Casavecchia, présidente de l’association HyperSupers – TDAH France.Mais depuis quelques années, la progression du dépistage, le remboursement du méthylphénidate étendu à l’adulte en 2022, et la nécessité d’améliorer la prise en charge ont levé des freins. Des patients témoignent des bénéfices des psychostimulants. Vanessa, enseignante de 51 ans diagnostiquée en 2021, a trouvé “extraordinaire de pouvoir regarder une série sans (se) lever toutes les cinq minutes”. Mais elle nuance: “ce n’est pas une molécule miracle”.Alexandre (prénom modifié), 26 ans, prend du Concerta (autre médicament à base de méthylphénidate) depuis l’enfance. “Je n’étais pas Bart Simpson à courir partout, mais juste distrait, à tout le temps perdre mes affaires”, se souvient-il. “Le traitement m’aide au quotidien. Je suis suivi par un psychiatre, et je vis très bien avec mon TDAH”, confie ce jeune ingénieur.A l’inverse, Thibault, 33 ans, garde un mauvais souvenir de la Ritaline, prise vers l’âge de huit ans : “J’avais l’impression d’être sous cloche, comme sédaté”. “C’était la guerre, je calais le cachet contre ma joue pour ne pas l’avaler. Ma mère m’observait jusqu’à ce que je déglutisse”, raconte-t-il. – Nouvelle molécule -Perte d’appétit, troubles du sommeil, de l’humeur, léger retard de croissance, maux de tête… : “généralement bénins”, les effets secondaires “peuvent être réglés en changeant la dose ou le médicament”, selon la Fédération mondiale du TDAH, qui se base sur un consensus d’experts internationaux.”Les données sont rassurantes. À long terme, on observe une légère hausse de la tension et du rythme cardiaque, c’est à surveiller”, indique Sébastien Weibel, psychiatre au CHU de Strasbourg.Aujourd’hui, des spécialistes du TDAH se félicitent de la récente commercialisation en France d’une nouvelle molécule, la lisdexamphétamine – sous le nom de Xurta -, une amphétamine déjà vendue ailleurs en Europe. Comme la Ritaline, elle agit sur la dopamine et la noradrénaline, impliquées dans la motivation et l’apprentissage, mais via un mécanisme d’action différent.”Son arrivée a nécessité un travail de pédagogie”, souligne Hugo Prunier, psychiatre au CH Le Vinatier, car “le mot +amphétamine+ fait peur en France, avec des préjugés partagés à la fois par les soignants et les patients”.D’autant qu’aux États-Unis, d’autres médicaments à base d’amphétamines comme l’Adderall – interdit en France – pour traiter le TDAH, ont été détournés de leur indication thérapeutique.Dans ce pays, des étudiants peuvent prendre la Ritaline ou l’Adderall pour “rester éveillé et étudier” ou dans un cadre festif, explique le Pr Faraone, le président de la Fédération mondiale du TDAH.- Manque de données -Ces produits suscitent en outre la crainte d’une dépendance potentielle, les personnes atteintes d’un TDAH étant plus à risque de développer un comportement addictif.”Etre bien traité en amont peut limiter ce risque par la suite, notamment en gérant mieux les symptômes d’impulsivité”, rassure Louise Carton, pharmacologue et psychiatre-addictologue au CHU de Lille.Peu de données existent en France sur le mésusage ou la durée des traitements médicamenteux du TDAH, longtemps marginaux, que la plupart des adolescents prennent pendant moins d’un an selon une étude internationale. “Deux ans en moyenne pour l’adulte”, explique Sébastien Weibel, qui a analysé des données du CHU de Strasbourg.La plupart du temps, les patients développent en parallèle des stratégies de compensation pour vivre avec ce trouble, en évitant par exemple d’installer leur bureau devant une fenêtre, source de distraction, ou en se faisant répéter une consigne au moment d’un examen.”L’offre de prise en charge s’élargit et s’enrichit” en France, se réjouit Eric Acquaviva, psychiatre de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital Robert-Debré (AP-HP), avec notamment des alternatives aux traitements médicamenteux, comme la psychoéducation.

Pour Abdallah, la fin de plus de quarante ans de vie entre les murs

Un grand drapeau rouge frappé d’un portrait du Che, des affiches et autocollants signes du combat en faveur de la cause palestinienne: Georges Ibrahim Abdallah doit quitter vendredi le décor de cette cellule de 11m2 où il a passé les dernières de ses quarante années de détention en France.Conformément à la décision de la cour d’appel de Paris du 17 juillet, le Libanais de 74 ans devenu l’un des détenus les plus anciens de France va sortir de la prison centrale de Lannemezan (Hautes-Pyrénées), avant de s’envoler pour son pays natal. A quelques kilomètres des sommets pyrénéens que Georges Abdallah ne pouvait pas voir depuis sa cellule, l’établissement réservé aux longues peines accueille environ 140 détenus. Incarcéré depuis 1984 et condamné en 1987 pour complicité d’assassinats, le prisonnier y était déjà passé à plusieurs reprises, alternant avec les centrales de Saint-Maur (Indre), Moulins (Allier) ou Clairvaux (Aube), avant de s’installer dans sa geôle 221 marquée d’une étiquette manuscrite portant la mention “Abdallah”.C’est dans cette cellule ouvrant sur un couloir orange flashy du bâtiment A que la députée LFI Andrée Taurinya a pu lui rendre visite le jour de l’annonce de sa libération, accompagnée par une équipe de l’AFP. – “Camarades sous terre” -Le militant communiste et anti-impérialiste, débardeur rouge et short blanc, l’a accueillie ce jour-là avec une longue accolade, partageant sourires, selfie et impressions avec la parlementaire.Dans cette cellule aux murs abricot, des cartes postales envoyées par des amis et soutiens, des papiers et journaux divers remplissent presque tout l’espace entre le lit, un bureau encombré et un petit coin cuisine.”Quarante ans c’est beaucoup mais on ne les sent pas quand il y a une dynamique de lutte”, confie le détenu, barbe et cheveux blancs soignés.Même si c’est difficile en raison “des camarades qui sont sous terre”, morts au fil des ans comme autant de jalons dans sa détention.”Sur mon ordinateur, j’ai un calendrier où je vois au jour le jour ce qui se passe: les camarades décédés, c’est en couleur marron, le orange c’est pour les visites, le vert les anniversaires”, dit-il. Or, “la couleur marron, ça devient très consistant”.Malgré tout, le détenu libérable vendredi estime avoir été “bichonné” dans les prisons françaises, au regard “de ce qui se passe à Gaza ou en Cisjordanie, surtout pour les camarades qui sont en prison”.- “Levier historique” -Condamné pour complicité d’assassinats de diplomates américain et israélien, le militant propalestinien avait nié lors de son procès, affirmant qu’il n’était “rien qu’un combattant arabe”. Depuis, il n’a jamais exprimé le moindre regret sur son passé.Derrière les barreaux, il se décrit comme “un militant qui lutte (…) dans des conditions particulières”. Dehors, il assure vouloir rester un militant “dans des conditions différentes”, ne voyant pas dans sa libération un “changement radical dans (s)es perspectives de lutte”.Sur la cause palestinienne, le militant marxiste estime que les manifestations en Occident sont un élément important pour tenter de faire évoluer la situation dans la région, considérant que “la Palestine reste le levier historique de la révolution dans tout le monde arabe”.Le mot “lutte” reste en tout cas son moteur: “Si je suis debout aujourd’hui face à vous, c’est parce que je lutte, sinon quarante ans ça décervelle, il ne faut pas oublier que la prison, c’est la prison”, déclarait-il, juste après avoir appris sa libération prochaine et son retour imminent au Liban.

Dîner entre Macron et Merz à Berlin, les droits de douane de Trump au menu

Face au compte-à-rebours pour les exportations européennes menacées de surtaxes américaines massives, les consultations s’accélèrent : Emmanuel Macron retrouve Friedrich Merz mercredi à Berlin pour un dîner de travail auquel s’inviteront également les questions de défense.La France et l’Allemagne ont beau rappeler que c’est la Commission européenne qui mène au nom des Vingt-sept les négociations commerciales avec le gouvernement de Donald Trump, le président français et le chancelier allemand entendent peser sur la stratégie de l’UE.Après des “échanges” sur le sujet le week-end dernier, les dirigeants des deux premières économies européennes en reparleront mercredi soir, un rendez-vous qui illustre, selon l’Elysée, “la relance de la relation franco-allemande” liée à l’arrivée du conservateur Friedrich Merz à la chancellerie.- Coopération renforcée -C’est le premier déplacement du chef de l’Etat français à Berlin depuis l’investiture de M. Merz, qui s’était quant à lui rendu à Paris début mai, dès le lendemain du jour où il avait pris ses fonctions.Cette rencontre, organisée dans le cadre bucolique d’une villa du nord de Berlin, doit permettre de finaliser les préparatifs du Conseil des ministres franco-allemand prévu pour fin août en France, une nouvelle démonstration de la coopération renforcée entre les deux pays.Ce dialogue bilatéral nourri n’a cependant pas effacé par miracle toutes les dissonances.Face à l’intransigeance de Washington qui menace l’UE de surtaxes douanières de 30% au 1er août, Paris prône “une position de fermeté” de la part de Bruxelles. Une posture réaffirmée par le ministre français de l’Industrie Marc Ferracci, allé lundi rencontrer son homologue allemande à Berlin.L’Allemagne a régulièrement plaidé pour une approche “pragmatique”, offrant des concessions pour sauver des secteurs-clés de son industrie exportatrice, dont les Etats-Unis sont le premier client.Pour autant, les gouvernements français et allemand disent soutenir les mesures de représailles préparées par la Commission en cas d’absence d’accord avec Washington.- Avion de combat et nucléaire -Paris et Berlin n’ont pas non plus aplani toutes leurs divergences sur la politique énergétique, un sujet qui les divise de longue date, même si des rapprochements sont esquissés.La France insiste particulièrement sur le concept de “neutralité technologique” pour que le nucléaire fasse l’objet d’un traitement similaire à celui des énergies renouvelables dans la législation européenne. Le classement du nucléaire en énergie “verte” au niveau de l’UE a été par le passé un point de désaccord majeur entre Français et Allemands.Sur ce sujet, le parti conservateur de Friedrich Merz, traditionnellement favorable à l’atome, doit composer avec les réserves de son allié social-démocrate dans la coalition au pouvoir.Et alors que Paris et Berlin veulent être les moteurs du réarmement de l’Europe, pour affronter le désengagement américain et la menace russe, le développement commun de l’avion de combat du futur (Scaf), un projet phare pour la défense du continent, patine.Le groupe aéronautique Dassault, qui représente la France dans ce projet, a clairement mis en doute son avenir et sa viabilité alors qu’il est encore loin de toute phase de prototype. Côté allemand, le projet est porté par Airbus via sa branche Defense and Space.Objet de difficultés récurrentes sur la répartition des tâches entre chaque pays, le Scaf a besoin d’un “vrai leader” industriel et non de “trois +co-co-co+” partenaires, a déclaré mardi Eric Trappier, le PDG de Dassault.Friedrich Merz insiste sur la nécessité de “respecter les accord conclus”, tout en se montrant optimiste sur la possibilité de rapidement éliminer les “divergences” avec la France. Les ministres de la Défense des deux pays se rencontreront en Allemagne jeudi.En difficulté sur le plan intérieur, où sa coalition est confrontée à ses premières turbulences, le chancelier allemand continue de vouloir renforcer le poids de l’Allemagne sur la scène internationale.Très critique d’une Union européenne freinée par ses règles et ses querelles internes, il mise sur le renforcement d’un axe avec Paris et Londres, où il s’est rendu en juillet – comme Emmanuel Macron – pour faire avancer des initiatives communes sur la sécurité ou l’immigration.