“La menace islamiste, elle est votre ennemie, tout autant qu’elle constitue notre péril le plus existentiel”, a déclaré Jordan Bardella jeudi devant des centaines de personnes réunies à Jérusalem pour une conférence sur l’antisémitisme organisée par le gouvernement israélien.Cette grande réunion a suscité des débats dans la communauté juive, surtout hors d’Israël, car elle associait justement des figures de mouvements considérés comme liés à des idées antisémites, à des acteurs de longue date de la lutte contre ces idées.Des médias israéliens ont fait état de désistements d’invités qui, à l’instar du grand rabbin du Royaume-Uni, Ephraïm Mirvis, du chef de la Ligue antidiffamation (ADL), Jonathan Greenblatt, ou de l’intellectuel français, Bernard-Henri Lévy, disent ne pas vouloir s’afficher avec l’extrême droite.Mais c’est un accueil très chaleureux qui a été réservé au jeune président du Rassemblement national (RN), notamment de la part du ministre israélien de la Diaspora, Amichai Chikli, principal promoteur de l’évènement.D’autres représentants de l’extrême droite, essentiellement des eurodéputés dont la française Marion Maréchal ou la hongroise du Fidesz Kinga Gal, avaient répondu présent à l’invitation de M. Chikli, y compris le dirigeant serbe Milorad Dodik qui assistait à la conférence alors que la justice bosnienne a émis jeudi un mandat d’arrêt international contre ce chef politique soupçonné d’attaque contre l’ordre constitutionnel.- “Islamisme” -Premier dirigeant du RN à être officiellement invité par le gouvernement israélien, M. Bardella a insisté dans un discours généreusement applaudi sur le “lien” entre “la montée de l’islamisme, la recrudescence de l’antisémitisme et le phénomène migratoire qui fracture toutes les sociétés occidentales”.”Aujourd’hui, cette haine (l’antisémitisme, NDLR) refait surface (…) par l’intermédiaire de porte-parole islamistes radicaux au Yémen, au Liban, à Gaza”, a abondé le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, dans son discours de clôture.L’extrême gauche, l’immigration, et l’islamisme ont été présentés par de nombreux intervenants comme les racines de l’antisémitisme, en particulier en Europe, soulignant une convergence entre des mouvements considérés comme réactionnaires ou conservateurs, et des personnalités de la droite israélienne.Au cours de ses visites et entretiens, M. Bardella a répété qu’Israël et la France avaient “les mêmes adversaires”, établissant un parallèle entre l’attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas dans le sud du pays le 7 octobre 2023 et les attentats jihadistes de 2015 en France.Avant de visiter mercredi le mémorial de la Shoah, Yad Vashem, il s’était rendu sur des sites de l’attaque sans précédent du Hamas. Alors tout proche de Gaza, un territoire ravagé par presque 18 mois de guerre avec Israël, le président du RN s’est refusé à tout commentaire “sur des opérations militaires qui sont en cours”.- Rupture -Depuis son arrivée en Israël, le jeune chef de parti a également multiplié les déclarations marquant une rupture avec le passé du RN, dont le fondateur Jean-Marie Le Pen, régulièrement condamné par les tribunaux français pour avoir notamment renvoyé la Shoah à un “détail” de l’Histoire.Dans son discours lors de la conférence, il a même déclaré que son parti était “le meilleur bouclier” pour la communauté juive française.Interrogé en marge d’une visite sur les accusations d’antisémitisme portant sur son parti, M. Bardella a dit qu’il “ne (faisait) pas de la politique dans le rétroviseur”.La cheffe de file des députés RN, Marine Le Pen, avait pris ses distances avec son père, exclu du parti en 2015 pour ses propos niant la Shoah.M. Bardella est invité par M. Chikli, qu’il avait déjà rencontré en février aux Etats-Unis lors d’un grand rassemblement de la droite américaine.Ce dernier, membre du Likoud, le parti de M. Netanyahu, est l’un des ministres les plus à droite du gouvernement israélien.Qualifiant sa visite “d’historique”, M. Bardella a estimé qu’elle “consacr(ait) l’importance du ‘mouvement patriote’ en France et en Europe” – en référence à son groupe d’élus d’extrême droite au Parlement européen.”Ce déplacement est très important dans l’histoire du parti”, souligne à l’AFP un cadre du RN, qui relève “un gros travail de fond de Marine Le Pen et de Louis Aliot”, le vice-président du mouvement et maire de Perpignan, accompagnant M. Bardella lors de ce voyage. Marine Le Pen a elle aussi noué des contacts avec Israël lors d’un rassemblement des extrêmes droites européennes à Madrid en février.”Quand bien même Israël est un allié, il faut faire attention”, met néanmoins en garde un député RN: “Nous, on ne veut pas que Gaza soit une nouvelle Riviera”.lbs-pab-crb-bur/mib/hme
