Budget: le RN ne censurera pas non plus, Bayrou peut se projeter… un peu

Bientôt un budget, et un gouvernement épargné: après le PS, le RN a mis fin au suspense mardi en laissant entendre qu’il ne votera pas la censure, donnant au Premier ministre François Bayrou la possibilité de se projeter, un peu, dans l’avenir.Si le Rassemblement national prendra officiellement sa décision mercredi, il ne devrait pas voter le même jour la censure du gouvernement pour ne pas aggraver “l’instabilité”, a affirmé son président Jordan Bardella.”Il faut éviter l’incertitude parce que beaucoup de nos compatriotes (…) sont extrêmement inquiets d’une instabilité qui pourrait s’installer dans la durée”, a-t-il justifié, “avec des conséquences plus lourdes pour l’économie que lors de la censure” du gouvernement de Michel Barnier en décembre.Faute de majorité à l’Assemblée nationale, François Bayrou a dégainé lundi ses deux premiers 49.3 pour faire adopter sans vote le budget de l’Etat et une partie de celui de la Sécurité sociale.En retour, La France insoumise a déposé deux motions de censure qui seront défendues à partir de 15H30 mercredi mais ne seront soutenues que par les écologistes et les communistes.”Nous refusons cette idée qu’il ne pourrait pas y avoir de débat démocratique sur le budget”, a déclaré la cheffe de file du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain, en taclant un texte “clairement pas à la hauteur des besoins”.Même si le RN avait décidé de la voter, cette censure n’a aucune chance d’être adoptée après le refus des socialistes de la soutenir.Après avoir “beaucoup hésité”, comme l’a admis leur premier secrétaire Olivier Faure, les socialistes ont en effet fini par “faire le choix de donner un budget à la France”.”Nous avons été sollicités par une multitude d’acteurs, les collectivités locales, associations, entreprises… qui dépendent de la commande publique et ne peuvent attendre davantage. Nous avons choisi, non pas de soutenir le gouvernement, mais de ne pas pratiquer la politique du pire”, a-t-il expliqué.- Une “rupture” pour LFI -“Il y a un débat budgétaire, le gouvernement et le Parlement sont en train d’arriver à son terme. Je m’en félicite parce le pays a besoin de stabilité”, a réagi le président de la République Emmanuel Macron, lors d’un déplacement au centre de lutte contre le cancer Gustave Roussy.De nombreux députés de la coalition gouvernementale et des ministres ont salué “l’esprit de responsabilité du PS”. “Le Parti socialiste a rompu un accord avec La France insoumise, (…) c’est courageux”, s’est félicité dans l’émission C à vous sur France 5 le garde des Sceaux Gérald Darmanin. “Il faut qu’on écoute davantage le PS”, a -t-il ajouté. De leur côté, les Insoumis restent très remontés contre le choix de ceux censés être leurs alliés au sein du NFP.”Le Nouveau Front populaire est réduit d’un parti”, a réagi Jean-Luc Mélenchon. “Ce sera une rupture avec tous les socialistes qui ne votent pas la censure”, a renchéri le président de la commission des Finances Eric Coquerel.”Ce n’est pas Jean-Luc Mélenchon qui dit qui appartient au Nouveau Front populaire”, a répondu M. Faure.”Est-ce que le vote sur la censure doit être la manière de définir le périmètre du Nouveau Front populaire ? La réponse est non”, a aussi relativisé Cyrielle Chatelain. – Motion “spontanée” -Pour autant, dans un art consommé de la synthèse, les socialistes déposeront la semaine prochaine une motion de censure “spontanée” sur la base de l’article 49.2 de la Constitution en réaction aux propos de François Bayrou sur le “sentiment de submersion” migratoire.Il s’agit de protester contre “une forme de trumpisation du débat public sous l’influence notamment de Bruno Retailleau”, le ministre (LR) de l’Intérieur, a plaidé Olivier Faure. Le Parti socialiste, qui reconnait ne pas vouloir faire tomber le gouvernement pour ne pas, selon M.Faure, “avoir un Premier ministre plus à droite qui négocie sa propre survie avec l’extrême droite” ou “une démission du chef de l’Etat”, partent de l’idée que le RN ne votera pas leur motion de censure.Mais le parti d’extrême droite a montré par le passé qu’il pouvait voter une motion de censure de gauche, faisant fi des mots qu’elle contenait.”Il faut toujours être prudent”, a reconnu un député MoDem mettant en garde “ceux qui veulent jouer aux apprentis sorciers”.S’il n’a pas été interrogé sur le vote du RN sur cette motion socialiste, M. Bardella n’a pas exclu que le gouvernement puisse “tomber demain, après-demain, dans une semaine, sur un autre sujet” que le budget.